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2. Les EAJE, entre diversité, multiplicité et inégalit E

2.3. EAJE : des disparités territoriales dans l’offre et l’accès

Le monde de la petite enfance apparaît à la fois très hétéroclite et multidisciplinaire, autant dans les acteurs, dans les solutions d’offre d’accueil que dans les financements. Les conditions d’existence de ces lieux d’accueil ne dépendant que de la bonne volonté des acteurs locaux et notamment politiques. Cette diversité dans les statuts des EAJE sur le territoire entraîne inévitablement des disparités et des inégalités dans l’offre mais aussi dans l’accès aux familles de ces dispositifs.

2.3.1. Disparités d’offre sur le territoire

En France, l’offre des EAJE est très disparate. En effet, bien qu’en moyenne 52 places de garde, tous modes confondus, pour 100 enfants de moins de 3 ans pouvaient être disponibles au niveau national en 2011, cela était très variable d’un département à l’autre. Concernant les EAJE à proprement parlé, la moyenne nationale était de 13 places pour 100 enfants entre 0 et 3 ans en 2011. Mais là encore, cette offre différait selon les départements, pouvant varier de 4 à 34 places. Les zones disposant de la meilleure offre de garde sont celles urbaines, davantage peuplées. Les zones rurales, moins denses, et celles défavorisées présentent un taux d’offre beaucoup moins élevé. (Schillinger, 2014) Toutefois, des politiques publiques destinées à augmenter le nombre de places proposées, autant en accueil individuel que collectif, sont instaurées depuis plus d’une dizaine d’années maintenant, étant un objectif de la politique familiale. Ainsi, la COG État-CNAF 2013-2017 avait pour objectif de proposer 275 000 places supplémentaires, dont 100 000 en EAJE ; objectif qui n’aura pu trouver entière finalité. Cet objectif a été renouvelé mais réajusté au financement de 30 000 places supplémentaires en crèche pour la COG État- CNAF 2018-2022.16 Ainsi, la moyenne globale, tout mode de garde confondu, est passée à environ 56 places pour 100 enfants de moins de 3 ans sur le territoire français en 2014. Cependant, des écarts importants étaient toujours percevables entre départements et régions, pouvant passer d’une offre de 6 places à 46 pour 100 enfants de 0 à 3 ans pour les EAJE en 2014. (IGAS, 2017) Cette répartition changeant peu en 2015. (Figure 6)

Figure 6 : Répartition par

département du nombre de places en EAJE pour 100 enfants de moins de

3 ans en 2015

Source : CNAF, 2018a

16 CNAF. Le conseil d’administration de la Cnaf vote pour la convention d’objectifs et de gestion 2018-2022. Information presse, 11 juillet 2018, 2 p.

Ces disparités étant même observables au sein d’une même région et selon les modes de garde. Ceci est le reflet des traditions et des politiques d’accueil du jeune enfant très différentes d’une région à l’autre, tout comme les services et pratiques de la PMI. (IGAS, 2017)

Ces inégalités résultent de la combinaison de facteurs multiples et complexes, dont l’un d’entre eux constitue l’accès par les familles aux crèches en fonction de leur niveau de vie et de revenus. (Schillinger, 2014)

2.3.2. Des inégalités d’accès pour les familles

Si des disparités sont percevables au sein du territoire, cela a également une incidence sur l’accès aux EAJE pour les familles. Bien que cette diversité d’offre dans les lieux d’accueil puisse apparaître comme une manière à ce que chaque famille puisse trouver la solution qui lui convient le mieux en termes d’organisation et de disponibilité, cela ne se traduit pas tout à fait comme cela en réalité. Cette liberté de choix entre les différentes solutions de gardes n’existant guère. Ce choix s’avèrant être davantage imposé. Bien que de nombreuses aides financières puissent exister pour la garde d’enfant, la situation économique des parents reste néanmoins un facteur influençant énormément le choix du mode de garde. Ainsi, les accueils formels collectifs, comme les assistant(e)s maternel(le)s, sont relativement peu fréquentés par les ménages les plus défavorisés, non seulement à cause de leur coût trop onéreux, mais aussi car l’offre et l’accessibilité y sont plus compliquées sur leur territoire. (Leprince, 2003 ; Schillinger, 2014 ; Terranova, 2017) Le choix des ménages pour un mode de garde va également dépendre de leur propre situation familiale. (CNAF, 2018b) Le choix des parents sur la solution de garde pour leur enfant s’avère donc dépendant des revenus, des prestations accessibles, de la composition de leur famille (un ou plusieurs enfants, parents actifs ou non) et de l’offre disponible sur leur territoire. Mais les taux de prise en charge en fonction de ces facteurs n’évoluent pas de façon proportionnelle. Ainsi, seules les familles les plus aisées ont réellement un choix de liberté au regard des modes de garde proposés. De ce fait, le désir des parents pour la garde de leur enfant n’est pas toujours pleinement satisfait (Figure 7). (Leprince, 2003)

Figure 7 : Modes d’accueil souhaités à la naissance et utilisés lors de la rentrée 2017

Source : CNAF, 2018b

Les possibilités d’accueil du jeune enfant restent donc très dépendantes de situations territorio-socio-parentales très différenciées, ce qui peut expliquer en grande partie que les parents constituent la première solution de garde des enfants (Figure 4), bien que ce ne soit pas forcément leur volonté première. (Figure 7)

Progressivement, des objectifs plus qualitatifs viennent se greffer à ceux quantitatifs évoqués plus haut, afin de pouvoir pallier en partie à ces disparités. Notamment, celui d’encourager la mixité sociale des enfants accueillis en crèche, au sein desquelles les enfants de couples biactifs de catégorie socio-professionnelle plutôt aisée sont davantage représentés. Un certain nombre de place doit dorénavant être réservé pour accueillir des enfants de familles défavorisées, en insertion sociale ou professionnelle. (CNAF, 2018b ; IGAS, 2017) Mais ce passage du quantitatif au qualitatif se traduit également dans les orientations et dynamiques mises en place pour l’accueil et le soin apportés à l’enfant en tant que tel.