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L’acquisition de spectres de faibles pertes d’énergie (VEELS pour Valence EELS) est réali- sable avec un temps d’acquisition très faible (∼ 10−1 s) en comparaison de celui nécessaire pour obtenir des seuils de cœur avec un rapport signal sur bruit satisfaisant (∼ 10 s). De surcroît, le domaine d’énergie des pertes faibles correspond à une excitation des électrons de la bande de valence, et est donc sensible à la liaison chimique. Des expériences préliminaires sur les composés Ti2AlN et Ti2AlN0,66x ont mis en évidence une évolution du spectre de pertes faibles en fonction de la stœchiométrie en azote (cf. figure III.20). Le spectre enregistré selon l’axe de

0 10 1 20 2 0 40

B

Ti2AlN0,66x

Perte d'énergie (eV)

Ti2AlN massif [1010]

Ti2AlN

A

Figure III.20– Effet de la stœchiométrie sur le spectre de pertes faibles de Ti2AlN. Le spectre VEELS

de Ti2AlN massif est issu de la référence [62], ceux de Ti2AlN (tirets-pointillets) et Ti2AlN0,66x(tirets) ont été enregistrés sur des multicouches (Ti,Al)N/Ti2AlN respectivement après nitruration et simple recuit (cf. Chapitre II). La ligne verticale est un guide pour les yeux et la partie hachurée ne doit pas être considérée puisque soumise aux artefacts de l’extraction du pic élastique.

0 10 1 20 2 0 40 Ep = 19,9 eV Ep = 21,7 eV Ti2AlC [1100] Cr2AlC [1210] Cr2GeC [1210] In te ns ité (normalisée, u. a.)

Perte d'énergie (eV)

Ep = 17,8 eV

Figure III.21 – Spectres de pertes faibles de Ti2AlC, Cr2AlC et Cr2GeC. La partie hachurée ne doit

zone [10¯10] d’un échantillon massif de Ti2AlN (ligne pleine sur la figure III.20) présente deux structures clairement identifiables à∼ 16,5 eV (A) et ∼ 21 eV (B). Ces deux structures ont été attribuées à un plasmon (A) et à une transition interbande (B), cette dernière étant caractéris- tique des états Ti d-N p [62]. Ainsi le spectre de pertes faibles de Ti2AlN fournit une information structurale relative aux octaèdres Ti6N. Les spectres VEELS enregistrés pour une orientation quelconque dans des multicouches (Ti,Al)N/Ti2AlN, après nitruration à haute température ou simple recuit, confirment la sensibilité du spectre aux octaèdres et plus particulièrement à leur stœchiométrie en azote. En ce qui concerne la multicouche nitrurée (tirets-pointillets sur la figure III.20), où la phase MAX est proche de la stœchiométrie 211 attendue (cf. cha- pitre II), le spectre contient les structures A et B, l’élargissement vers les plus hautes énergies étant toutefois moins prononcé que dans le cas de l’échantillon massif. Des stœchiométries ou des orientations légèrement différentes pour l’acquisition peuvent être à l’origine de cette diffé- rence. En revanche la structure B, caractéristique des couches d’octaèdres Ti6N, disparait pour la phase sous-stœchiométrique Ti2AlN0,66x (tirets sur la figure III.20) et s’accompagne d’un décalage du plasmon vers les plus hautes énergies. Ceci indique la forte sensibilité du spectre VEELS de Ti2AlN à la stœchiométrie en azote des octaèdres. Au constat de ces avantages et de ces résultats prometteurs dans le cas de Ti2AlN, nous avons cherché à savoir si les spectres de pertes faibles des phases MAX carbures permettaient de suivre et d’interpréter les défauts structuraux induits par irradiation sous faisceaux d’ions.

Les spectres de pertes faibles de Ti2AlC, Cr2AlC et Cr2GeC, enregistrés suivant des axes de zone perpendiculaires à l’axe c, sont présentés sur la figure III.21 jusqu’à 40 eV. Ces spectres sont très peu structurés et dominés par une structure intense relativement large, à la différence de Ti2AlN. La position en énergie de cette structure est de ∼ 21,7 eV pour Cr2GeC, ∼ 19,9 eV pour Cr2AlC et ∼ 17,8 eV pour Ti2AlC. Cette dernière valeur est en bon accord avec le spectre de pertes faibles d’un échantillon massif de Ti2AlC, enregistré dans la direction [10¯10], présenté sur la figure 2a) de la référence [59].

Le spectre de pertes faibles de Ti3AlC2, enregistré suivant l’axe de zone [1¯100], et celui de TiC, issu de la thèse de Mirguet [95], sont présentés sur la figure III.22. Entre 5 et 35 eV, le spectre de Ti3AlC2 est également dominé par une structure intense pour une énergie de ∼ 22,6 eV. Cependant il est plus structuré que ceux des carbures 211, avec deux structures à∼ 12 et

∼ 17 eV. La structure la plus intense est située à plus haute énergie dans le cas de TiC (∼ 23,8

eV) que de Ti3AlC2 (∼ 22,6 eV). La structure à plus basse énergie est également observable dans le spectre des plasmons de TiC, alors que celle à 17 eV est moins visible. D’un point de vue global, les spectres de pertes faibles de Ti3AlC2 et de TiC présentent des similitudes, mais

0 10 1 20 2 0 40 Ep = 23,8 eV TiC In te ns ité (u. a. )

Perte d'énergie (eV)

Ti3AlC2 [1100]

Ep = 22,6 eV

Figure III.22 – Spectres de pertes faibles de Ti3AlC2 (haut) et TiC (bas) [95]. La partie hachurée ne

doit pas être considérée puisque soumise aux artefacts de l’extraction du pic élastique.

sont très différents de celui de Ti2AlC (cf. figure III.21). Une explication simple à cette obser- vation est que Ti3AlC2 est constitué de deux couches d’octaèdres de Ti6C séparées d’un plan d’aluminium, alors que Ti2AlC ne possède qu’une seule couche d’octaèdres entre les plans de l’élément A. Il semble donc vraisemblable que le spectre de faibles pertes d’énergie de Ti3AlC2 soit essentiellement caractéristique des octaèdres Ti6C.

La stucture cristallographique des phases MAX est fortement anisotrope, anisotropie qui devrait se retrouver dans les spectres de pertes faibles. Le spectre VEELS de Cr2AlC enregistré suivant deux directions parallèle et perpendiculaire à c, les axes de zone [0001] et [1¯210], est présenté sur la figure III.23. Le spectre enregistré suivant [0001] possède également une structure unique, large, à une énergie de 21,3 eV, valeur légèrement supérieure à celle observée pour l’orientation [1¯210]. Il existe également un épaulement vers les basses énergies, noté S, entre 12 et 15 eV, et présent pour l’axe de zone [0001] uniquement. Les spectres VEELS permettent donc de mettre en évidence une anisotropie dans la réponse diélectrique de Cr2AlC. Une anisotropie des spectres VEELS de Ti2AlC est également observée dans la littérature [59].

Les spectres de pertes faibles de Ti2AlN enregistrés suivant les deux directions [0001] et [10¯10], illustrés sur la figure III.24, sont également légèrement anisotropes avec un élargissement

0 10 1 20 2 0 40 [0001] Ep = 19,9 eV Ep exp= 21,3 eV In tensit é (u. a. )

Perte d'énergie (eV)

[1210] S

Figure III.23–Spectres de pertes faibles de Cr2AlC enregistrés suivant les axes de zone [0001] et [1¯210].

La partie hachurée ne doit pas être considérée puisque soumise aux artefacts de l’extraction du pic élastique.

0 10 20 0 40 0 60 0 Ti M2,3 [1010] In te ns ité (u. a. )

Perte d'énergie (eV)

[0001] Ti M2,3

A B

Figure III.24–Spectres de pertes faibles de Ti2AlN enregistrés suivant les axes de zone [0001] et [10¯10],

à plus haute énergie selon [10¯10]. Nous n’aborderons pas ici l’analyse réalisée sur l’anisotropie de la réponse diélectrique de Ti2AlN, une description détaillée étant disponible dans la référence [62]. Afin de comprendre l’origine de la différence de réponse diélectrique entre Ti2AlN et les carbures ici étudiés et de déterminer la nature des structures dans le cas des carbures, les spectres VEELS des composés 211 ont été simulés par des calculs ab initio.