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Document d’accord pour le recueil de données chiffrées des périodes

NOTE DE SYNTHESE

L’habitat des personnes fragilisées, plus particulièrement des personnes en situation de handicap psychique, dont nous parlons dans ce travail, est devenu le point d’ancrage des interventions sanitaires, médico-sociales et sociales. Les orientations en termes de citoyenneté, d’inclusion et de compensation ont ouvert la voie pour faire valoir la place de ce public dans la société, en bénéficiant d’appuis pour surmonter les difficultés de la vie quotidienne. Quel type d’habitat s’offre aux personnes lorsqu’elles n’ont plus leur place au sein de l’institution mais ne parviennent pas non plus à s’inscrire dans un logement indépendant ?

Nous avons sollicité l’Union Départementale des Associations Familiales, seul organisme à proposer des habitats accompagnés de nature pérenne, dédiés aux personnes en situation de handicap psychique. L’UDAF assure la gestion d’un SAVS renforcé sur Quimper depuis 2007 et de trois résidences accueil, respectivement ouvertes en 2012 sur Brest, en 2015 Quimper puis en 2017 sur Plouigneau. Notre étude concerne les deux résidences accueil MADEN de Brest et Quimper et le SAVS renforcé MADEHO.

La résidence accueil est une déclinaison des résidences sociales et pensions de famille, qui s’adresse à deux types de public spécifique. Le fonctionnement est assuré par un gestionnaire qui dispose d’un agrément de gestion de résidences sociales. Leur statut s’inscrit dans le droit commun et permet d’offrir 18 places dans chaque résidence.

Le SAVS renforcé du dispositif s’est construit suite au décret du 11 mars 2005 sur l’ouverture des SAVS/SAMSAH et appartient au domaine médico-social. Son agrément de 12 places s’explique par le caractère renforcé de l’accompagnement individuel et collectif des bénéficiaires, en lien étroit avec un Établissement Public de Santé Mentale (EPSM). Il a la particularité de proposer un mode d’habitat accompagné en colocation dans des appartements insérés dans le droit commun.

Les habitats accompagnés de l’UDAF, comme terrain de recherche, ont éveillé notre curiosité en termes d’enjeu et de support à la vie quotidienne des individus présentant des troubles psychiques. À partir de ces deux exemples d’habitat accompagné, notre première interrogation a porté sur l’impact que produisent ces habitats sur le parcours de vie et le parcours de soin de leurs habitants.

« Le parcours de vie doit donc être considéré comme une dimension propre de la structure sociale, comme un phénomène empirique à étudier et à expliquer. »221 Sur cette base, le parcours de vie que nous avons choisi d’analyser dans ce travail relève du parcours individuel de chaque personne, des négociations qu’elle a dû faire, des chemins, comme celui de l’institution, où elle s’est parfois retrouvée « prisonnière ». Elles doivent alors composer avec la volonté d’autonomie qui les anime et l’entrave d’une maladie psychique, invalidante qui freine leur inclusion dans la société et les obligent à d’autres choix.

À quel moment d’un parcours résidentiel une personne sollicite une entrée au sein d’un habitat accompagné ? À quels besoins vient-il répondre ?

Consciente des divergences de compréhension qui se posent dans l’accompagnement des personnes en situation de handicap psychique et des difficultés de coordination entre les différents champs d’intervention, il est intéressant de s’interroger sur le rôle que jouent les habitats accompagnés dans la « prise en soin » des habitants.

Dans quelle mesure l’habitat « accompagné » en résidence accueil et en SAVS renforcé, comme support et enjeu de la prise en soin des personnes en situation de handicap psychique, produit-il des effets sur le parcours de vie et le parcours de soin, permettant de limiter le recours aux hospitalisations psychiatriques ?

Pour répondre à notre question, trois hypothèses apparaissent en lien avec les habitants des deux formes d’habitat étudiées. Des différences dans le mode de fonctionnement et la manière d’accompagner les personnes les caractérisent.

L’habitat accompagné intervient dans le parcours de vie et de soin d’une personne en situation de handicap psychique lorsqu’il y a déficit, absence, épuisement ou inadaptation de l’entourage et que la vie en logement autonome n’est pas ou plus envisageable.

Les formes d’habitat accompagné sont un gage de sécurité et participent à la prise en soin des personnes. Avoir un logement à soi dans un habitat semi-collectif, assorti de l’accompagnement d’intervenants sociaux et d’un suivi des services de soin, influence positivement la vie quotidienne des habitants, limitant le recours aux périodes d’hospitalisation psychiatrique.

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221C

AVALLI S. (2007), « Modèle de parcours de vie et individualisation », Gérontologie et société, vol. 30, (n° 123),

L’environnement sécurisé rend l’habitat accompagné en résidence accueil ou en SAVS renforcé, à la fois contenant et apaisant. Ce mode d’habitat peut alors s’apparenter à une nouvelle forme « d’institutionnalisation » en milieu ordinaire qui, par la protection sociale qu’il procure, restreint le champ des possibles « hors du dispositif ».

Pour vérifier nos hypothèses et apporter des éléments de réponses à nos questionnements, nous avons choisi, afin de limiter les biais, de confronter plusieurs méthodes complémentaires, de nature qualitative par observation et entretiens semi-directifs auprès des habitants des lieux et de nature quantitative par des données chiffrées issues de 10 lieux de soin psychiatrique.

Dans un premier temps, une recherche bibliographique pluridisciplinaire nous a aidée à délimiter l’objet de notre recherche, les productions scientifiques sur le handicap psychique s’étant multipliées depuis les années 2000.

L’observation participante sur des temps individuels et collectifs avec les habitants des lieux ou sur des temps professionnels lors de synthèses et de réunions ont nourri notre réflexion. Ces échanges ont permis de saisir des moments de vie sociale en lien avec notre sujet et d’entendre des témoignages de l’expérience vécue au sein de ces habitats.

La méthode quantitative a nécessité la création d’un document d’accord, signé par tous les résidents et bénéficiaires du SAVS, pour le recueil des périodes d’hospitalisation les concernant en amont et en aval de l’entrée dans le dispositif. L’utilisation de la méthode quantitative par données chiffrées, corrélée aux témoignages des habitants et de leurs proches nous donne une lecture scientifique qui permet de mettre en lumière les effets produits des habitats accompagnés sur la santé des personnes.

Aussi, la « prise en soin » produite par la vie semi-collective en résidence accueil et au sein des colocations du SAVS renforcé est, au regard des résultats de notre recherche, plus que probante.

En réponse à notre première hypothèse, l’habitat accompagné intervient effectivement dans le parcours résidentiel de la personne suite à des « ruptures », tel un décès qui provoque l’absence, un épuisement de l’entourage qui ne sait plus comment soutenir ou l’inadéquation de personnes de l’entourage qui abolit toute capacité de gestion. Dans plusieurs cas, la vie en logement autonome, même soutenue par des services de soins ou des acteurs sociaux n’a pas fonctionné, engendrant des va-et-vient entre institution psychiatrique et domicile, marquant une instabilité.

Nous avions envisagé les modes d’habitat accompagné comme un gage de sécurité bénéficiant de nombreux facteurs explicatifs, en termes de semi-collectif, d’accompagnements

par plusieurs acteurs, de la place symbolique d’un logement à soi comme ancrage sécurisant, concourant à éviter les hospitalisations psychiatriques. Nous pouvons synthétiser par trois mots clés, sécurité, stabilité et sérénité l’ensemble des échanges pour illustrer le rôle contenant qu’assure le dispositif dans tous ses apports auprès des personnes.

Nous avions enfin soulevé l’environnement sécurisé des habitats accompagnés, pouvant s’apparenter au support d’une nouvelle forme « d’institutionnalisation » à la fois moderne et citoyenne. Plusieurs habitants signalent leur peur du monde « extérieur », renvoyant symboliquement l’idée que l’habitat accompagné, pourtant à visée inclusive, ne se situe pas dans ce qu’ils considèrent en tant que monde « extérieur ». Ils sont une minorité à avoir des activités hors du dispositif et seules deux à trois personnes considèrent ces modes d’habitat comme un passage transitoire. Certains évoquent même l’impossibilité de se passer de cette structure sécurisante et protectrice.

La recherche-action au sein du dispositif conforte l’idée que ces modes d’habitats sont une réponse pertinente à une véritable « prise en soin » non psychiatrique des personnes en situation de handicap psychique. Ce mode de vie leur permet à la fois d’accéder à un habitat en milieu ordinaire tout en tenant compte de leurs difficultés et de leurs besoins d’être sécurisées. Il reste encore à augmenter le nombre de places dans ce type d’habitat, en SAVS et en résidence accueil, qui apparaît insuffisant au regard des besoins grandissants de nos sociétés modernes.