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Diversité des jugements pragmatiques relevés et thèmes abordés D’après le Tableau 33, le nombre total de JP relevés chez ces sept agriculteurs s’élève à 1103.

pratiques-clefs et les processus d’apprentissage

3.1. Diversité des jugements pragmatiques relevés et thèmes abordés D’après le Tableau 33, le nombre total de JP relevés chez ces sept agriculteurs s’élève à 1103.

La durée des entretiens a varié de six à dix heures selon les agriculteurs. Le nombre de JP par agriculteur est variable (compris entre 65 et 235), ce qui s’explique à la fois par la durée variable de l’entretien et par une facilité plus ou moins grande de chaque agriculteur à être réflexif sur ses pratiques. Ceci s’explique également par notre propre part d’interprétation : si nous avons essayé de traiter de façon identique les entretiens, il est possible que nous ayons rassemblé plusieurs idées dans un seul JP pour certains agriculteurs et moins pour d’autres, ce qui expliquerait la différence du nombre de JP entre agriculteurs.

Les agriculteurs expriment des JP sur de nombreux thèmes. Ces JP relatifs aux pratiques-clefs représentent en moyenne 24% des JP des agriculteurs (de 12 à 33%), ce qui est finalement relativement faible.

Ce sont les JP relatifs au raisonnement de l’utilisation de l’engrais azoté qui prédominent parmi les JP reliés à des pratiques-clefs. Ce résultat semble logique puisque la pratique-clef « raisonnement de l’azote » est mise en place dans l’ensemble des trajectoires tandis que les autres pratiques-clefs (pratiques de l’ITK intégré du blé tendre et des autres cultures, allongement et/ou diversification de la succession de cultures, désherbage mécanique et gestion de la mosaïque paysagère) ne sont mises en place que dans les trajectoires B et A. Sachant que Luc a été classé dans la trajectoire A mais qu’il commence sa trajectoire en phase 2a-2b, peu de JP ont été relevés relativement au raisonnement de l’azote chez cet agriculteur. Mais même en intégrant Luc dans la somme des JP par trajectoire, et en analysant la part de JP correspondant à un thème relativement au nombre de JP énoncés, on observe que ce sont les agriculteurs de la trajectoire A qui expriment le plus de JP sur les pratiques-clefs (27% de leurs JP), puis les agriculteurs de la trajectoire B (24%) et enfin ceux de la trajectoire C (14%). Ce résultat corrobore le fait que les agriculteurs de la trajectoire A sont ceux qui

nombre de trois, comme suit : le semis tardif, la réduction de la densité de semis, l’utilisation de variétés résistantes aux maladies.

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ont mis en place le maximum de pratiques-clefs, avant ceux des trajectoires B et C : les agriculteurs de la trajectoire A sont donc ceux qui expriment le plus de JP sur les pratiques-clefs car ils en mettent davantage en place.

A l’inverse, il est intéressant de noter que les agriculteurs des trajectoires B et C énoncent des JP relatifs à des pratiques-clefs qui ne sont pas caractéristiques de leurs trajectoires : allongement et/ou diversification de la succession de cultures, adaptation du paysage pour la trajectoire B ; pratiques des ITK intégrés pour la trajectoire C. De plus, ces JP sont positionnés en majeure partie dans la dernière phase de cohérence agronomique de chaque agriculteur : ces JP se traduiront-ils par des actes dans le futur (par exemple, diversification de la succession de cultures pour Pierre) ? S’agit-il des prémisses d’une conceptualisation avant que des actions concrètes soient mises en place ? Peut-on en conclure la nécessaire progressivité des apprentissages réalisés dans les changements ? Ces questions seront discutées par la suite.

Nous examinerons plus en détail les JP liés aux pratiques-clefs dans la suite du chapitre. Le Tableau 33 permet d’identifier deux thèmes principaux sur lesquels les agriculteurs expriment de nombreux JP. Le premier, qui regroupe 17% de tous les JP, concerne directement l’usage des produits phytosanitaires, ce qui recouvre : les traitements phytosanitaires en général (2% de tous les JP), l’observation pour le déclenchement des traitements (2%), les insecticides (3%), les fongicides (4%) et les herbicides (5%). Cette répartition masque une diversité entre les agriculteurs (de 9 à 30% des JP exprimés) et, par conséquent, entre les trajectoires.

Ainsi, l’observation des parcelles et l’utilisation de seuils de déclenchement des traitements phytosanitaires par les agriculteurs, qui constituent des ressources informationnelles internes, sont traitées dans ce thème : le début du recours à l’observation marque pour quelques agriculteurs un tournant dans la gestion des bioagresseurs et implique, d’une part, un temps accru passé à observer, mais aussi la nécessité d’apprendre à reconnaître les bioagresseurs. Ce dernier constat ne semble pas facilement assumé par certains agriculteurs. On peut s’étonner que cette importance du thème ne ressorte pas dans les pratiques-clefs. Nous avons constaté que l’observation et l’utilisation de seuils accompagnent souvent la pratique-clef de raisonnement de l’utilisation de l’azote dans le passage de la phase de cohérence agronomique 0 à la phase 1. Toutefois, ce n’est pas systématique et ces pratiques d’observation et d’utilisation de seuils se répartissent dans des phases diverses. Il en va de même pour la gestion des adventices qui pose problème, de part leurs résistances aux herbicides, à toutes les phases de cohérence agronomique. Il est d’autant plus question des herbicides que c’est sur ce type de produits qu’ont commencé les réductions de doses (et les techniques de « désherbage précoce »), pratiques diffusées non seulement dans les groupes de développement de la Chambre d’agriculture mais aussi dans les CETA et les groupes privés. On note l’existence d’une tension entre, d’une part, la volonté de réduire les doses pour réduire les charges et, d’autre part, l’apparition de résistances qui est

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un lieu commun pour tous les agriculteurs qui parlent d’infestation par les adventices de plus en plus accrues. Pour tous les agriculteurs, y compris les agriculteurs de la trajectoire A qui mettent en place des pratiques de désherbage mécanique complémentaires au désherbage chimique (décrites ci-après), l’enjeu n’est pas de réduire la pression des adventices mais de maintenir une pression « acceptable », afin de ne pas subir une augmentation de la pression. Ces pratiques impliquent néanmoins des apprentissages qui sont reflétés dans le discours des agriculteurs par l’expression de JP. Ces apprentissages portent essentiellement sur la reconnaissance des bioagresseurs, leur seuils de nuisibilité, leur cycle biologiques et, dans certains cas, sur les facteurs et conditions qui influent sur la dynamique d’infestation.

Le second thème est celui intitulé « ressources informationnelles » (12% des JP) qui regroupe ici des ressources mobilisées dans le but d’apprendre, uniquement externes à l’exploitation : la formation initiale, les expérimentations, les groupes de développement, les relations sociales en général, l’enregistrement des pratiques, les critères d’évaluation et toutes les autres ressources mobilisées. Nous développerons ce thème à la fin de cette partie, dans la mesure où il peut nous aider à mieux saisir la façon dont les JP concernant les façons d’apprendre se retrouvent ou non dans les PCA mis en œuvre par les agriculteurs.

Les autres thèmes évoqués dans le Tableau 33 peuvent être regroupés en quatre thématiques principales :

• L’une touche au sol (matière organique, hétérogénéité inter-parcellaire, travail du sol, techniques simplifiées) ;

• L’autre à l’économie de l’exploitation (innovation-filière, économie, approvisionnement et débouchés),

• La troisième à la question des semences (choix de variétés, semences de ferme, techniques de semis)

• La dernière concerne la façon de se positionner face aux questions environnementales et aux modèles d’agriculture qui les intègrent (environnement et production intégrée en général, l’agriculture biologique, inter-cultures et CIPAN).

Les trois dernières thématiques marquent bien le lien avec la question de la réduction des intrants, qui s’impose comme l’un des facteurs qui va favoriser ou contraindre la possibilité d’engager la réduction. On retrouve l’importance des questions relatives au sol. Nous avons vu, dans la partie « trajectoires », que ces questions sont importantes pour les agriculteurs, sans que le lien à la réduction des intrants azotés et phytosanitaires soit univoque dans notre échantillon

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Tableau 33 - Classement de l’ensemble des jugements pragmatiques.

Ce tableau regroupe les jugements pragmatiques des sept agriculteurs relativement aux thèmes abordés, selon les trajectoires et détails pour chaque agriculteur. La lecture des pourcentages se fait en colonnes : Par exemple, les agriculteurs de la trajectoire A ont 5 % de leurs JP qui portent sur le raisonnement de l’azote.

Apports systématiques d’azote, de fongicides et insecticides, matériel, assolement, questions sur le lien produits phytosanitaires - impact sur la santé, qualité de l’activité, engrais de fond, produits phytosanitaires biologiques, foncier (agrandissement, vente de terres), simplification de la succession, anti-limaces, élevage, irrigation, mélange de variétés ou d’espèces, augmentation de la densité de semis, MAE.

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JP par agriculteur

JP Total sept

agriculteurs JP Par trajectoire Luc Fabien Thomas Pierre Patrick Francis Jean- Christophe

A B C A A A B B C C

Nombre total de JP 1103 620 195 288 174 211 235 65 130 85 203

% du nombre total de JP 56 18 26 16 19 21 6 12 8 18 JP RELATIFS AUX PRATIQUES-

CLEFS

nb JP %

% du nombre de

JP de la trajectoire % du nombre total de JP de chaque agriculteur Raisonnement de l’utilisation d’azote à

l’aide d’un OAD d’abord sur le blé, puis sur d’autres cultures

83 8

5 11 11

2 3 8 8 13 5 14

Pratiques-clefs de l’ITK intégré blé :

- réduction de la densité de semis

- et/ou retard de la date de semis

et/ou utilisation de variétés résistantes.

38 3

5 5 0

5 4 5 6 4 0 0

Pratiques-clefs relatives à un ITK intégré autre que blé

20 2 3 0 0 2 3 3 0 0 0 0

Allongement et/ou diversification des successions de cultures

53 5

5 7 2 6 6 5 9 6 6 0

Désherbage mécanique (désherbage en culture et en inter-culture)

33 3

4 2 1 2 6 6 5 0 1 0

Gestion de la mosaïque paysagère pour favoriser les régulations biologiques (bandes enherbées, surfaces de compensation écologique…). 34 3 5 0 0 4 6 7 0 0 0 0 Total 261 24 27 24 14 21 27 33 28 23 12 15

JP RELATIFS A D'AUTRES PRATIQUES

Produits phytosanitaires +

Observation&seuils 191 17 14 23 19

19 9 15 11 30 16 21

Ressources informationnelles 132 12 12 12 12 10 9 16 23 6 22 8

Semis : techniques, choix variétés,

achat semences, Semences de ferme 73 6 8 5 5

16 3 6 2 6 5 5

Approvisionnement et débouchés 50 4 4 5 6 5 3 3 2 6 2 8

Economie de l’exploitation 55 5 4 6 6 8 5 1 8 5 6 6

Connaissance du milieu naturel de l’exploitation (sols, hétérogénéité intra

et inter parcellaire)

41 4 4 4 3

1 0 10 3 4 5 2

Environnement, Production intégrée en

général 38 3 5 2 1

0 12 3 3 1 1 0

Récolte - rendement- qualité 28 2 2 0 6 4 0 2 0 0 1 8

Matière organique du sol 28 2 1 5 3 1 3 0 9 3 2 3

Inter-cultures- couverts-CIPAN 30 3 2 0 7 1 4 0 0 0 0 10

Travail du sol 28 2 2 4 2 1 3 3 0 6 1 2

Traitements phytosanitaires en général 28 2 3 2 3 0 12 0 2 0 0 0

Innovation filière-produit 27 2 4 1 0 6 2 0 0 0 2 2

Technique culturales simplifiées 22 2 2 0 2 1 1 0 0 0 7 0

Agriculture biologique 10 1 1 0 2 19 9 15 11 30 16 21 Autres * 91 <2 pour chaque sujet abordé 6 10 11 9 5 5 11 10 16 9 Total 1131 100 100 100 100 100 100 100 100 100 100 100

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3.2.

Les jugements pragmatiques associés aux pratiques-clefs : quels

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