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1 2 Une diversité qui n’épuise pas les points communs

Ce constat de l’hétérogénéité n’empêche pas les points communs. Ainsi, l’activité des associations est en expansion, en termes de volume horaire ou de zones d’intervention. Cette expansion a pu passer, pour certaines associations, par des reprises d’activité

26 On pourrait élargir ce constat aux membres des CA mais nous sortons ici du champ de l’enquête

27 Nous soulignons que si le secteur est très largement féminisé, au regard de nos terrains d’enquête, il est plus

exact de dire qu’il est extrêmement féminisé… dans les emplois d’exécution et d’encadrement intermédiaire. Les fonctions de direction sont, elles, majoritairement assurées par des hommes. Ce constat peut être étendu aux structures et organismes en charge de promouvoir les services aux personnes. Les comités et fonctions de direction semblent en effet majoritairement occupés par des hommes. C’est en tout cas ce qui ressort à chaque fois des photos officielles qui circulent. Autrement dit, le plafond de verre est aussi une réalité pour ce secteur féminisé et l’accès des femmes aux fonctions de direction ou aux postes de pouvoir encore visiblement difficile.

d’associations ou d’autres structures (CCAS par exemple) qui intervenaient sur le même espace géographique ou à ses frontières. On retiendra toutefois que si l’activité des associations, mesurée en termes de volume horaire, a cru, cette croissance s’appuie sur une activité en tension et potentiellement fluctuante. Le nombre des personnes aidées peut en effet varier d’une année à l’autre et, dans ce cadre, d’une zone à l’autre. Par ailleurs, cette dynamique d’extension géographique peut contribuer à complexifier la politique de sectorisation de la mise en emploi des salariées que l’on peut considérer comme l’un des ressorts de l’amélioration des conditions d’emploi28.

« On choisit. Moi, je ne vais pas aller dans les communes éloignées de ma zone géographique. Je prends la commune voisine, mais on ne va jamais faire 10km hors de notre zone d’activité parce que ce n’est pas rentable. Par contre, on a une famille qui a déménagé, nous avons une chargée de secteur qui a dit qu’on pouvait y aller. On s’est dit qu’on allait jouer le jeu de la qualité et laisser la même salariée. »

Les associations enquêtées partagent une autre caractéristique : elles peuvent figurer au nombre des principaux employeurs des bassins d’emploi où nous nous sommes rendues, qu’elles salarient plus de 600 personnes ou qu’elles comptent 270 personnes au moment de l’enquête. Elles peuvent en effet être comptées parmi les acteurs économiques qui participent, localement, au maintien de l’emploi, notamment dans des zones fortement précarisées par des recompositions sectorielles, les zones rurales…

« On est la plus grosse structure du département. Si on retire les communes de X, Y, Z, et la SNECMA, on est un des plus gros employeurs : 450 000 heures d’activité prestataire, 20 000 heures mandataire et 60 000 heures d’aide aux familles. »

Cette réalité prend d’ailleurs une ampleur particulière dans le secteur étudié :

« Il y a des endroits où on est le seul employeur et c’est vrai que l’on compose parfois parce qu’on sait qu’une personne peu qualifiée ou non qualifiée, si elle ne nous a pas, elle n’aura rien. On a cette dialectique et je crois que les cadres de secteur l’ont encore plus. »

Un autre point à relever est le suivant : les associations enquêtées, à l’instar des autres acteurs de l’aide à domicile, s’inscrivent dans un panorama en mouvement et se rassemblent, dans ce cadre, autour des mêmes enjeux : tenir place, dans les cadres définis par l’économie sociale. Ce constat n’est pas, en soi, nouveau. La longue histoire des associations fait en effet parfois oublier que l’univers associatif, dans ses différentes composantes, est loin d’être statique. L’histoire institutionnelle de la fédération dans laquelle nous avons enquêté illustre, à ce titre, ce mouvement, tout comme la mise en histoire des liens entre associations et politiques publiques qui reste encore à écrire29 : « On est né en 1970, mais les structures existaient souvent auparavant. Alors, pourquoi on a été créé ? Parce que quatre ou cinq associations qui faisaient de l’aide à domicile aux personnes âgées ont dit qu’il fallait absolument se

28 Elle ne permet pas de réduire l’éclatement des lieux de travail (les salariées peuvent continuer d’aller chez de

nombreux particuliers, parfois plus de 10 par semaine). Elle permet toutefois de limiter la circulation des salariées sur des espaces géographiques trop étendus et, parallèlement, de jouer sur les temps de déplacement. Ce dernier point est toutefois plus marqué pour les salariées travaillant en milieu rural où les temps de déplacement peuvent être plus facilement reliés aux kilomètres parcourus. Elle permet également aux associations de limiter les frais liés au remboursement des frais kilométriques.

29 L’analyse des recompositions régulières du secteur de l’aide à domicile, si elle demande de raisonner à

l’échelle de la fédération et du travail qui y fut engagé, demande aussi de mettre en perspective ces dynamiques avec les orientations des politiques publiques, d’abord en direction des personnes âgées puis de l’emploi. Pour une présentation synthétique des politiques publiques de maintien à domicile en France, entre 1962 et 2005, cf. Ennuyer (2005) ou Gaullier (1986).

regrouper pour faire un métier de l’aide à domicile. Donc la première finalité, c’était vraiment la construction d’une convention collective sur les personnes âgées. Dans notre réseau, c’est vraiment aider les personnes âgées démunies : c’est un ancrage fort en termes d’action auprès des personnes âgées. Pendant des années, nos structures n’ont développé que des actions auprès des personnes âgées. On avait des structures qui avaient une histoire plus liée à l’intervention auprès des familles, mais elles étaient minoritaires et c’est à l’occasion d’une fusion (avec un réseau intervenant sur les familles) que l’on a dit clairement : il y a des besoins sociaux au niveau des familles. Et compte tenu de nos compétences et de notre implantation territoriale, on se doit d’intervenir aussi auprès des familles. Politiquement, on a poussé l’intervention auprès des familles à ce moment-là et comme on a récupéré de l’expertise, des structures qui avaient l’habitude, on est devenu, en volumétrie, un réseau plus important, sur les familles, via ce réseau. Il y a des structures qui ensuite ont développé l’intervention auprès des familles, qui ont joué le jeu, qui étaient bien positionnées sur l’ADPA et qui ont commencé à travailler sur de l’activité auprès des enfants, de garde d’enfants par exemple, qui ont demandé un conventionnement CAF, qui ont recruté quelques TISF et qui ont développé ensuite des interventions dans le cadre de la protection de l’enfance… C’est l’inverse de ce qu’on trouve plus traditionnellement. »

Ce mouvement s’observe à l’échelle locale. Il renvoie à la production de nouvelles offres de service, à l’ouverture de nouveaux services et structures30, etc. et ce bien avant le début des années 2000, comme en témoignent les extraits ci-dessous :

- « L’association existe depuis 1971, formellement depuis qu’elle est là mais ses racines sont un peu plus anciennes car il y avait eu la création au sein des associations Familles rurales d’un service d’aide à domicile, qui intervenait auprès des personnes âgées et qui était géré par la fédération départementale des familles rurales et par l’UDAF (départementale). En 1971, il y a eu un rapprochement entre deux organismes, l’un issu lui-même d’un rapprochement entre les associations Familles rurales et une petite structure qui s’occupait plutôt de l’aide aux familles. Ça a abouti en 1997 à la création de l’association actuelle. Mais historiquement l’association a 30 ans et son histoire est très marquée par le milieu rural, car ses fondements sont nés uniquement d’interventions dans les communes rurales du département et essentiellement auprès du milieu agricole, le principal bailleur de fonds à l’époque étant la caisse du milieu agricole. (…). Aujourd’hui on ne peut plus dire ça. Aujourd’hui l’association s’est énormément développée avec toujours des interventions importantes en milieu rural mais un développement sur la frange ouest du département qui est constitué de zones urbaines ou semi-urbaines. Ca recouvre en gros à l’ouest les zones industrielles et les services et à l’est les zones agricoles. »

- « En 93-94, il y a eu la création d’un service d’aide à domicile en direction de personnes âgées. (…) Le conseil d’administration s’est dit : ce n’est pas logique qu’on continue de ne s’intéresser qu’aux familles. On a des compétences, un savoir-faire et puis, peut-être qu’il y a un marché. Déjà, à l’époque, cette notion existait au niveau du conseil d’administration. Alors, peut-être serait-il bon qu’on s’intéresse aux personnes âgées ? Ca a été assez conflictuel au niveau de l’association. (…) « On abandonne le secteur famille au profit des personnes âgées ! » et, du coup, il y avait un front commun travailleuses familiales et aides ménagères « familles ». Il faut voir que ça a mis 20 ans, quand même… En 70, avec le démarrage des associations d’aide à domicile aux personnes âgées et en 93-94, la création d’un secteur Personnes âgées… »

30 On peut renvoyer sur ce point à la monographie de Dussuet et Loiseau (2003) sur « Les services aux

familles offerts par les associations » et plus particulièrement à la réflexion sur la « vie et mort des services : un cycle de vie entre formel et informel »

- « La ville a changé de majorité en 77 et ils ont créé un service de soins qui a ouvert le 1e juillet 83. Pour la ville, uniquement. Nous, notre service, a ouvert en octobre 83 pour trente places. Et en 83, au changement de majorité, la municipalité bascule. Et le maire nous a demandé de fusionner le service. Donc, au 1e janvier 84, nos services ont fusionné. Il (le maire) trouvait anormal de créer deux services. Et après, ils ont dit qu’ils n’avaient pas le savoir-faire que l’on avait, nous. Nous, on est monté en charge très vite, alors qu’eux, non. On a eu 20 personnes en un mois. C’était dû à l’infirmière qui était plus administrative que soignante. On avait des aides à domicile qui disaient : « On a des gens qui relèvent du SSIAD ». Elle, elle venait trois jours après, alors que nous, non. Donc, quand le maire a vu que les services de la mairie ne fonctionnaient pas alors que les nôtres, oui, il n’y a pas eu photo. On a repris l’aide-soignante qu’ils avaient embauchée, elle était en CDD, et l’infirmière a rejoint la fonction publique. Elle n’avait pas cette approche du domicile. On est passé à 75 puis 90 et là, on est à 140 places. »

Pour autant, acter cette réalité ne signifie pas affirmer que rien ne change dans ce mouvement. On assiste en effet, dans la période contemporaine, à une nouvelle accélération des recompositions permanentes que connaît le maintien à domicile autour, il semble nécessaire d’en convenir, des mêmes questionnements31. Ainsi, selon des rythmes propres à chaque association, on voit émerger de nouvelles figures professionnelles, au nombre desquelles les cadres RH. On peut aussi relever l’entrée du management dans les associations, ce qui contribue à alimenter les tensions que connaissent les associations. Prouteau (2003) parle ainsi d’un secteur en tensions.

- « Notre DRH a suivi une formation en RH « dans un organisme qui n’est pas du secteur, pour rencontrer des responsables RH d’autres secteurs (l’industrie), qui ont d’autres problématiques. »

- « On a mis en place un CHSCT, le plan de prévention des risques professionnels, des formations…, dans un temps très court, parce qu’on partait de rien. »

III. 1. 3 … et la confrontation à une même problématique : des

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