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4.3 Tentatives de visualisations et de recherches sur fonds in-forme

4.3.2 Dispositifs de visualisation d’information et logiques conceptuelles . 115

Le manque de structuration des données disponibles sur le Web participe donc largement à ces effets secondaires indésirables de surcharge cognitive et de désorientation qui ont fait ressortir le besoin de visualiser les informations s’y trouvant. De nombreuses tentatives graphiques de représentation des résultats de recherche sont apparues à titre de propositions en vue d’apporter une réponse à ces problèmes. L’Atlas des outils de cartographie (cf. figure 4.4) donne à voir la répartition thématique de 43 dispositifs de visualisation, dont certains accessibles en ligne ou téléchargeables, selon trois grands secteurs allant de l’analyse, à la synthèse et au défrichage de corpus.

Figure 4.4 : Atlas des outils de Cartographie de l’information selon Claude Aschenbrenner

(Version 2 datant du 14 mars 2002). Cette représentation, non exhaustive par rapport à l’ensemble des dispositifs de recherche existants actuellement, offre cependant une proposition de classement et de catégorisation de la diversité des systèmes d’information.

Le Web a besoin de représentations et celles que l’on y trouve proposent une interprétation des contenus au travers d’expérimentations graphiques interactives. En tentant de donner sens à l’information, se matérialise de manière factuelle une abstraction qui équivaut à la représentation d’une vision conceptuelle de la réalité du

dispositif de recherche et de ses résultats. Cette vision se substitue à l’interprétation potentielle des usagers.

Ce que représentent ces systèmes est davantage la réalité d’un modèle informatique. Ce peut être une réalité calculée à partir d’algorithmes de calculs statistiques, tel que pour Cartoweb (cf. figure 4.5), suivant un modèle mathématique qui restitue des relations entre des éléments non reliés et représente les proximités entre les agrégats documentaires par des thématiques. Cartoweb fait parler des relations dans le sens où elles se présentent suite à l’interrogation : il s’agit là d’un classement. Ce principe de visualisation rend surtout visible cette relation mathématique aux rapprochements calculés. Nulle sémantique ici mais seulement de la statistique, les documents et les mots sont en association avec les thèmes (un mot pour n documents selon un calcul de pondération).

Figure 4.5 : Cartoweb, module cartographique des résultats de recherche sur un corpus entier. Les

distances entre les cercles jaunes marquent la proximité ou l’éloignement par rapport au corpus, la taille des cercles exprime également le degré de représentativité du document par rapport au corpus. En sélection d’un cercle est obtenue une liste des documents concernés par le thème choisi sur les

topics de la carte.

La cartographie dans ce type de manifestation a la même origine que la Visualisation scientifique appliquée sur des théories physiques ou des modèles d’ingénierie, et donne davantage à l’usager un état de l’art tel une carte du domaine

concerné. L’instantané momentanément fixe de cette carte permet d’analyser une partie des bases de données dynamiques articulées à ces dispositifs.

Ce type de représentations, si tant est qu’elles soient adaptées sur le plan de la représentation graphique, échoue par le fait d’être articulées sur un fonds non structuré pour permettre aux usagers d’y trouver une correspondance avec leur usage. Une tentative d’interprétation des données récupérées est proposée au lecteur, alors que les résultats produits par le système sont l’expression d’une pertinence mathématique. Plus qu’une représentation qui invite à un processus inférentiel, sur la base des calculs de pertinence ou statistiques, dans lequel l’usager serait placé en tant qu’acteur, l’expression graphique ici attire l’attention sur le calcul et ses modalités tout en donnant des informations sur la proximité sémantique.

En observant à nouveau les réalisations de Visualisation d’Information développées au Xerox PARC dans les périodes émergeantes de l’Internet (cf. 2.4.1 : Table Lens, perspective walls, hyperbolic Trees en figure 4.6), il apparaît que la performance de ces dispositifs se situe davantage dans l’adéquation du traitement algorithmique avec une restitution efficiente de sa résultante à l’affichage écran que dans le contenu représenté et la corrélation sémantique des documents.

Figure 4.7 : TouchGraph, dispositif cartographique affilié à Google, outil de VI appliqué à des

nécessités fonctionnelles de recherche.

Au-delà d’une perception plus prégnante de la répartition des nœuds et des liens dans l’interrelation des documents et de la possibilité de mouvoir et de dissocier tout ou partie des grappes d’Url afin d’obtenir une lecture plus distincte à l’écran de l’ensemble des informations : ce type de représentation paraphrase une relecture de la liste textuelle d’Url résultant d’interrogations. Le TouchGraph139 montre des liens calculés de graphes de documents sans qu’il soit possible d’en ajouter, et sa filiation avec les arbres hyperboliques (cf. figure 4.7) fait de cette proposition une probante démonstration algorithmique appliquée au moteur de recherche le plus plébiscité du Web.

Issus de la technique de visualisation en espace contraint de données hiérarchiques nommées Treemaps et développée par Ben Shneiderman [JOHNSON 99], les exemples suivants (cf. figures 4.8, 4.9) sont une illustration de la représentation de larges volumes de données évolutives. Dans le cas de Map of the

139

Market140 la visualisation, plutôt factuelle, permet de comparer et de percevoir plus directement les fluctuations d’indices boursiers selon les secteurs d’activité alors que le même procédé appliqué à la répartition quantitative des gros titres d’informations à l’échelle internationale devient avec Newsmap141, en plus de l’aspect pratique d’une revue de presse internationale parcourue en un clin d’œil, un outil d’analyse plus fin sur la façon de traiter l’information et sa prééminence selon les pays et les diverses thématiques journalistiques majeures.

Figure 4.8 : Map of the Market de

SmartMoney propose une visualisation des fluctuations des actions boursières d’entreprises américaines (renouvellement de données toutes les 15 minutes).

Figure 4.9 : Newsmap de Marcos Weskamp (April

2004) . Structure spatiale des sources internationales du Google News.

La visualisation scientifique se doit d’avoir une prééminence du cognitif sur le sensible car la qualité scientifique de ce qui est transmis ne souffre aucune interprétation. A contrario, la visualisation interactive d’information est amenée à mêler logique (du signifié monosémique) et esthétique (du signifiant polysémique) au travers du signe dans un équilibre entre forme et sens. Elle opère dans un contexte qui nécessite que la variété d’utilisateurs des dispositifs puisse trouver un point d’ancrage cognitif face aux déploiements d’informations dynamiques qui sont proposées. La faculté de tout un chacun de percevoir dans cet ensemble informationnel une interprétation possible quant à la façon dont tout ou partie des informations relevées peuvent être reliées à sa démarche est essentielle.

140

http://www.smartmoney.com/marketmap/

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Pour que cette transposition graphique, esthétique et sémiologique, puisse être efficiente, il lui faut reposer sur un fonds organisé selon les principes de l’hypertexte. Les organisations, structurations, classifications quelle qu’elles soient sont porteuses de sens et figurent de fait des fondations indispensables à toutes représentations se voulant signifiantes. Or, le Web n’intègre que la technique de l’hypertexte qui permet de naviguer de liens en liens mais la profusion de données hétérogènes entrave les possibilités de sémantiser et de structurer ce fonds suivant une organisation intellectuelle qui ferait que quel que soit le chemin parcouru dans cet espace informationnel il deviendrait impossible de s’y perdre du fait de son organisation inhérente.

En l’état actuel, l’exploration sur le web (browsing) peut donc mener à l’errance puisque la scénarisation de la navigation au sein des données qui s’y trouvent, ne repose pas sur une élaboration intellectuelle structurée et susceptible de guider les usagers. Le territoire informationnel du web est immense et les glissements sémantiques guettent à chaque lien hypertexte les usagers dont les objectifs de recherche sont trop ouverts.

4.4 Visualisation, cartographie et tridimensionnalité des données

du Web

4.4.1 Une démonstration pragmatique de Visualisation d’Information :