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DISCUSSION, QUESTIONNEMENTS ET RECOMMANDATIONS

Outre la mention en tant que principe de la déclaration de Rio, le principe de participation en matière d’environnement est fondé, en droit

Etape 5 : choix d’une densité

6. DISCUSSION, QUESTIONNEMENTS ET RECOMMANDATIONS

Tout au long de ce rapport, nous avons présenté des méthodes de captation/taxation des plus-values d’urbanisme, issues de différents pays, et de différents types.

Le premier élément qu’il convient selon nous de remettre en avant est peut-être le fait que, hors expropriation avant changement d’affectation, l’appellation captation ou récupération des plus-values, parfois utilisée, ne correspond pas à la réalité des systèmes présentés. Il nous semblerait plus juste de parler de taxation ou de récupération partielle. Les taux appliqués sont en effet assez faibles (10% en France, de 1% à 30%211 en Région flamande par exemple).

Nous allons analyser ici les points qui posent question pour ce qui est d’une adaptation d’un tel mécanisme à la Région wallonne, et nous tenterons de mettre en avant les solutions les plus adéquates. Les structures et la culture d’aménagement pouvant fortement varier selon les états, il est beaucoup plus simple de transférer des outils et pratiques entre pays ou régions aux caractéristiques politiques, légales et culturelles similaires. C’est l’une des raisons qui nous fait penser que le modèle flamand peut servir de point d’appui au développement en Région wallonne d’un système de taxation des plus-values dues à changement d’affectation.

6.1 OBJECTIFS

La première question à se poser dans le cadre de la mise en place d’un tel outil foncier, concerne l’objectif qu’il sert. Il peut être simple (d’ordre essentiellement financier) ou au contraire multiple et issu d’une vision plus volontariste de l’aménagement territorial.

Dans le premier cas, la mise en place d’un système de captation des plus-values peut être uniquement le pendant de l’indemnisation, et servir à faire rentrer des recettes dans les caisses publiques. Bien entendu, indirectement, même ce simple objectif peut participer d’un aménagement territorial raisonné en permettant, par exemple, comme c’est la volonté en Région wallonne, de réviser les affectations en œuvrant à un usage du sol plus durable.

Dans le deuxième cas, l’outil peut être utilisé pour atteindre un objectif d’aménagement spatial : préservation des surfaces agricoles, logement abordable, objectifs environnementaux, conservation de sites historiques, réaffectation des sites, prévention de l’étalement urbain….

Selon les objectifs recherchés, les modalités et critères de mise en œuvre de cette taxe seront différents. L’affectation des recettes le sera aussi.

6.2 NIVEAU DE COMPÉTENCE

En Belgique, il existe au niveau fédéral une taxe sur les plus-values immobilières réalisées.

Or la matière de l’aménagement du territoire est régionale, et cette taxe ne peut donc être utilisée pour capter les plus-values liées à un changement d’affectation, les entités fédérées

211 30% étant par ailleurs un taux qui ne sera vraisemblablement qu’extrêmement rarement appliqué

n’étant pas autorisées à lever un impôt sur des matières déjà grevées par un impôt fédéral. Il importe donc de trouver une autre base à la taxation que la plus-value réalisée.

La question de l’éventuelle «redondance» entre les deux impôts en Région flamande a été examinée par la Cour d’arbitrage. Celle-ci a considéré, dans son arrêt du 5 juillet 2000212 que ce n’était pas le cas. Cet avis se basait sur le fait que, dans le cas de l’impôt fédéral, la matière imposable est une plus-value réalisée, tandis que dans le cas de la taxation des plus-values d’urbanisme, la matière imposée est, indépendamment de toute mutation, un élément du patrimoine, à savoir un accroissement de la valeur d’un bien immobilier, réputé découler d’une intervention de l’autorité régionale compétente en matière d’aménagement du territoire. Un tel élément du patrimoine ne faisant pas l’objet d’une taxation fédérale, la Région flamande pouvait le taxer213.

Un autre élément à examiner est le niveau de perception de la taxe. Certains pays ont adopté un système géré au niveau local, qui offre à celui-ci une latitude importante (les communes françaises par exemple sont autorisées mais non contraintes à lever une taxe. La Région flamande quant à elle a opté pour un système géré au niveau régional.

Il nous semble plus adapté, à l’instar de la Flandre, d’agir au niveau régional, et ceci pour plusieurs raisons. Tout d’abord, la Région possède un savoir-faire qui n’est pas disponible au niveau local, même si celui-ci permet une approche plus directe du terrain. De plus, l’application au niveau local pourrait provoquer des inégalités entre communes et pourrait risquer de perdre en efficacité.

6.3 QUATREPOSSIBILITES

Après avoir fait le tour des différentes possibilités et usages en la matière, il nous semble voir se dégager quatre possibilités d’envisager la taxation des plus-values dues à changement d’affectation.

La première, que nous recommandons, consiste en une taxation lors du changement d’affectation. Cette solution présente selon nous le grand avantage d’être un outil incitant à la mise en œuvre rapide des terrains rendus urbanisables.

-Les deuxième et troisième solutions consisteraient en une taxation lors de la cession du terrain.

Dans le cas de la deuxième, la taxe serait basée (comme en Région flamande), sur une plus-value forfaitaire. La taxation comporterait dans ce cas le risque de ne pas toujours être tout à fait en phase avec la plus-value effectivement réalisée.

Dans le cas de la troisième, la taxe serait basée (comme en France), sur la différence entre valeur de cession (actée par le notaire lors de la vente) et valeur d’acquisition. Cette solution serait sans doute plus équitable que la deuxième.

Ces deux méthodes, si elles permettraient sans doute de rencontrer moins d’opposition de la part des propriétaires, auraient par ailleurs le grand défaut d’inciter à la rétention, à l’inverse de l’effet recherché lorsqu’un terrain et classé en zone urbanisable.

Enfin, une quatrième solution serait de ne pas se munir d’un nouvel outil de taxation, mais bien d’utiliser la taxation existante sur les ventes foncières pour capter la plus-value.

Nous abordons cette question dans notre note sur la fiscalité.

212 Arrêt 86/2000 concernant le recours en annulation du décret flamand du 18/05/1999

213 Cependant, cet arrêt a été prononcé en 2000, et depuis lors, la législation a changé, et la taxe n’est plus réclamée lors du changement d’affectation, mais uniquement lors d’une cession, d’un permis d’urbanisme ou de lotir. La question pourrait donc se poser à l’heure actuelle.

Enfin, notons que, en ce qui concerne les potentielles hausses de prix causées par la taxation, notons que le risque en serait présent dans chacune des quatre formules, et ceci même à faible taux de taxation.

6.4 R

ECOMMANDATIONS 6.4.1 Fait générateur

Le choix de taxer une plus-value réalisée ou une plus-value latente est essentiel. Le choix de l’une ou l’autre méthode pourrait avoir des effets bien différents.

Comme nous le mentionnons ci-dessus, le choix de taxer uniquement en cas de plus-value réalisée peut s’appuyer sur l’argument selon lequel les propriétaires seraient moins réticents au payement de la taxe car ils disposeraient à cette fin du produit de la vente de leur bien.

Ce système pourrait en principe être plus aisé à faire accepter qu’une taxation au moment du changement de zonage. Mais, à l’inverse, si la taxe est due dès le changement d’affectation, le propriétaire peut être peu désireux de mettre en œuvre son terrain si cette mise en œuvre conduit à une taxation.

La taxation lors du changement d’affectation nous semble bien plus correspondre à une politique volontariste et pourrait avoir valeur d’incitant. En effet, si un propriétaire de terrain affecté par un changement de zonage doit payer une taxe, il tentera, le plus rapidement possible, d’affecter le terrain à sa nouvelle destination afin de récupérer les sommes payées.

La question se pose aussi de savoir si il n’est pas contradictoire d’une part de taxer les terrains à bâtir non bâtis (article 160 du CWATUPE, la taxe locale) et, au moment où un permis d’urbanisme est délivré - et donc où le propriétaire exprime son intention de mettre en œuvre ce qui est prévu par le nouveau zonage - de le taxer une seconde fois. Ne fut-ce que symboliquement, il est sans doute plus logique de taxer au moment du changement d’affectation.

De plus, si certains propriétaires peuvent s’avérer réticents à payer cette taxe, il convient de tenir compte du fait que si des terrains sont nouvellement affectés en zone d’habitat, c’est en principe en raison d’une sous offre foncière. Ou d’une volonté de recentrer l’habitat vers le noyau… ! Les terrains rendus constructibles pourraient donc être rapidement vendus. En cette matière, nous préférons donc le système tel qu’il était réglementé lors du premier décret flamand, en 1999.

Enfin, à l’image de ce qui est pratiqué en Région flamande, la Région wallonne pourrait prévoir que le propriétaire d’un seul terrain pourrait exiger le rachat de celui-ci par l’autorité planificatrice.

6.4.2 Taxe forfaitaire ou réelle

La taxe sur base de la plus-value réelle ne peut bien entendu être imaginée que dans le cas d’une plus-value réalisée. Etant donné que nous recommandons ici de taxer dès le changement d’affectation, il est impossible de se baser sur la plus-value réellement réalisée.

Il nous semble de plus qu’un système forfaitaire est effectivement plus transparent et aisé à appliquer qu’une expertise.

Les critères utilisés pour l’établissement de la plus-value estimée devraient selon nous être les suivants :

-type de changement d’affectation. Si nous ne n’avons travaillé dans notre exercice d’estimation que sur les changements d’affectation vers la zone d’habitat, il nous semble toutefois légitime de taxer tous les changements d’affectation susceptibles de provoquer une plus-value.

-superficie

-localisation de la parcelle 6.4.3 Spatialisation de la taxe

L’un des éléments pouvant concourir à l’efficacité de cet outil nous semble être une forme de discrimination territoriale, de spatialisation de la taxe. En effet, il nous semble plus équitable de prendre en compte le fait que la plus-value est en principe bien plus importante dans le cas d’une localisation en zone de forte pression foncière que dans une localisation isolée et peu recherchée.

L’ancien système flamand appliquait un coefficient correcteur selon l’arrondissement mais ce critère nous semble territorialement peu pertinent. Au sein d’un arrondissement, des valeurs foncières très différentes peuvent en effet coexister.

D’autres échelles pourraient être envisagées et la plus applicable nous semble être l’échelle communale. Nous utiliserions les catégories liées aux prêts sociaux « Habitat pour tous ».

Les terrains localisés dans des communes à forte pression foncière (HT+) se verraient appliquer un coefficient correcteur supérieur à 1, ce qui aurait pour effet de majorer la base taxable, tandis que les communes HT vert, se verraient appliquer un coefficient inférieur à 1, ce qui aurait l’effet inverse.

Les modifications dues à la révision régulière du décret Habitat pour tous seraient bien entendu appliquées.

La question de l’application d’un coefficient correcteur selon la localisation en ou hors noyaux d’habitat doit encore être examinée, et le sera d’ici septembre.

6.4.4 Seuil de taxation

Nous avons présenté l’exemple de la taxe locale française, qui applique un seuil d’exonération. Ce seuil est calculé en fonction du rapport entre la valeur d’acquisition du terrain et la valeur de revente. Selon nous, ce système présente le risque de provoquer un effet lié à ce seuil : les propriétaires risqueraient de revendre leur terrain juste en dessous de la valeur seuil.

Dans notre cas, si l’on observe ce qui se passe en Région flamande, il existe également un seuil en dessous duquel aucune taxation n’est appliquée, mais celui-ci est lié à la superficie de la parcelle. Si celle-ci n’a pas les dimensions minimales requises dans le RUP ou le BPA, elle n’est pas taxée. Nous pourrions proposer le même type de seuil, étant donné que dans le cas d’une parcelle trop petite, l’affectation prévue ne pourrait être appliquée.

6.4.5 Taux de taxation

La question du taux de taxation, si l’on souhaite mettre en place un tel système, est essentielle. La décision doit être prise du « positionnement du curseur », tout en ayant bien sûr en tête le fait que, même à taux élevé, les propriétaires fonciers ne sont en réalité pas lésés, puisqu’ils gardent une part de la plus-value, et que, pour des questions d’équité par rapport à l’indemnisation des moins-values, ainsi que d’efficacité, des taux élevés devraient être appliqués.

Selon nous, le taux de la taxe devrait idéalement atteindre les 80%, pour représenter le réel pendant aux indemnisations. Dans une optique minimaliste, le taux devrait ne pas être inférieur à 50%, pour être réellement efficace et incitatif.

Il nous semble peu efficace et peu approprié d’appliquer un taux progressif comme le fait la Flandre. D’une part, la volonté de grever moins les revenus des petits propriétaires n’est selon nous pas indiquée car le parallèle –fait en Région flamande- avec la taxation des revenus du travail ne nous semble pas adéquat, les revenus n’étant ici issus d’aucun acte du

propriétaire. Et, d’autre part, étant donné la taxation à la parcelle, même si un propriétaire en possède plusieurs, peu de parcelles seraient finalement taxées à un taux élevé, et les recettes en seraient donc diminuées.

6.4.6 Tenue de registres

En Région flamande, il existe un registre des changements d’affectation (geoloket planbaten), alimenté par les différentes autorités planificatrices. Ce système nous semble intéressant, et peut permettre à chaque niveau de planification de connaître les parcelles susceptibles d’être soumises à taxation ou indemnisation. Nous traitons de ce point dans notre note sur l’observation foncière (chapitre X).

6.4.7 Affectation des recettes de la taxe

Comme nous l’avons vu, la Région flamande affecte une majeure partie des recettes de cette taxe aux communes, selon la part de leur territoire non urbanisable. Cette taxe a donc pour objectif d’inciter à la conservation d’espaces non urbanisés, et non d’indemniser les moins-values.

Si l’objectif poursuivi en Région wallonne est la mise en œuvre de la modification des plans de secteur, les recettes de la taxe pourraient à notre sens être versées dans un fonds foncier, qui servirait à indemniser les moins-values, qui pourraient être importantes en cas de volonté de diminuer fortement les surfaces en zones d’habitat. Ceci pourrait donc permettre à la Région wallonne de disposer de moyens financiers pour mener à bien une politique foncière efficace.

De plus, dans le cas de recettes de taxation plus importantes que les indemnisations, une partie pourrait être investie dans la création de logement public.