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Partie III. — Différents traitements du paradoxe dans l’œuvre

2. La différence des idées de société

Aussitôt formulé le projet de société, le narrateur modère son enthousiasme, et fait état de certaines règles à supposer bonnes. Elles viennent médiatiser le déploiement annoncé282.Car, les contemporains du narrateur ne sont pas ceux qui auront été formés par l’éducation projetée. Pour éviter la tyrannie de l’opinion ― on peut songer ici, symboliquement, au sort de Socrate ; ou encore à celui de Giordano Bruno ; comme l’on peut penser aussi à Descartes, renonçant à publier son Traité du monde et de la lumière à l’annonce du sort fait à Galilée ―, le narrateur cherchera à se placer « à la portée du commun », faisant ce qu’il faut de concessions, de compromis, de façon à trouver, autour de lui, « pour entendre la vérité », des « oreilles bienveillantes ». Nulle mauvaise foi ; mais, deux morales : la civique et la philosophique, celle-ci existant à l’intérieur d’une

282 « Pendant que nous avons soin d’atteindre notre fin et que nous œuvrons à maintenir notre entendement

dans la voie droite, il est nécessaire que nous vivions ; nous sommes pour cela forcés avant toutes choses de supposer certaines règles de vie comme bonnes. » Par exemple : « Mettre nos paroles à la portée du vulgaire et faire d’après sa manière de voir tout ce qui ne nous empêchera pas d’atteindre notre but. Nous avons beaucoup à gagner avec lui pourvu, qu’autant qu’il se pourra, nous déférions à sa manière de voir et nous trouverons ainsi des oreilles bien disposées à entendre la vérité. » T.I.E., § 16.

délibération singulière, celle-là, extérieure, résultant des mœurs et des institutions283. Un tel projet philosophique est paradoxal au sens large du terme, c’est-à-dire qu’il ne coïncide pas avec l’opinion générale. Question : comment cultiver une sage « hétérodoxie » ? Il ne s’agit certes pas d’afficher un zèle pour la vérité propre à nuire à la réalisation du projet. Se mettre à la portée de la foule, autant que faire se peut ; adapter son langage, autant que la

vérité le permet ; « imiter les mœurs de la cité, qui ne s’opposent pas à notre objectif284» (mores civitatis, qui nostrum scopum non oppugnant, imitandos). Ce qui empêche la recherche ― « ce qui empêche l’entendement de réfléchir sur lui-même » ―, devient objet de critique. Mais le narrateur n’insiste pas. Cette limite, il ne la signale qu’en passant : les

écrits politiques (et l’Éthique) viendront en leur lieu. La vérité ne doit pas choquer le plus

possible, mais éduquer et améliorer la condition humaine285.

Quand il écrit au sujet de cette société désirée, imaginée, projetée, l’auteur du Traité

de l’amendement de l’intellect existe dans une situation concrète, il utilise une plume

particulière, etc. Il y a la société dans laquelle est la personne qui pense, et la société qui existe sous forme de projet. Quel est le mode d’existence de ce projet ? En un sens il existe, en un autre il n’existe pas. Une tension apparaît, on le voit, entre la société existante et la société projetée ; entre l’existant et ce qui pourrait exister, ou passer à l’existence. ― L’auteur ressaisit alors pour son compte les catégories modales traditionnelles suivantes.

J’appelle impossible, une chose dont la nature implique contradiction ; nécessaire, celle dont la nature implique contradiction à ce qu’elle n’existe pas ; possible, celle dont l’existence, dans sa nature, n’implique certes pas contradiction à ce qu’elle existe ou n’existe pas, mais dont la nécessité, ou l’impossibilité d’existence dépend de causes ignorées de nous aussi longtemps que nous feignons son existence286.

Le projet de société dont nous parlons, « feint » par le narrateur, n’implique pas contradiction à ce qu’il existe ; on peut même dire qu’il s’est « réalisé » en partie287. En mesurant ce qui existe par rapport à l’idée de quelque chose de mieux pouvant exister, le

283 « Il faut avoir une pensée de derrière, et juger de tout par là, en parlant cependant comme le peuple. »

Blaise Pascal, Pensée (39L).

284 Id.

285 « Spinoza ne pense pas qu’il faille se buter contre les opinions erronées des hommes, mais il les traite

également comme toutes les autres choses, en essayant de les prendre par leur bon côté et de les tourner à l’avantage des hommes. » Gilbert Boss, L’enseignement de Spinoza , Commentaire du Court Traité, Zürich, Grand Midi, 1982, p. 90.

286 T.I.E., § 53, op. cit., p. 73.

287 « Les citoyens et la cité que tu nous as représentés hier comme dans une fiction, nous allons les transférer

perfectionnement devient possible288. Il est certain que le monde ne se règle pas en soi à partir d’un modèle (exemplar), qu’un démiurge contemplerait pendant son opération de création. L’exemplar, le modèle, n’est pas perçu par l’intellect comme constituant l’essence de la substance289. La perfection et l’imperfection sont des concepts résultant d’une comparaison de l’esprit290. L’esprit peut avoir des idées vraies de choses non existantes291. Cette différence des idées peut faire apparaître comme défaut ou imperfection ce qui, jusque-là, s’imposait comme perfection292. Selon que l’esprit est plus ou moins parfait, les comparaisons qu’il fera seront elles-mêmes plus ou moins parfaites. Ainsi, il peut y avoir des différences d’idées sur ce qui est possible ou non physiquement, moralement, juridiquement, etc. ; comme sur ce qui devrait être.

* * *

Peut-être pouvons-nous maintenant éclairer sous un jour nouveau l’alternative qui ouvrait le Traité politique. Les uns diront que telle chose, qui est réalisable, est irréalisable ; et que telle chose, qui est irréalisable, est réalisable. On dira des philosophes qu’« ils méconnaissent la Pratique ». Il sera facile de faire passer leurs vues pour des chimères, à la lumière de ce qui se fait déjà, et qui est la coutume. Les politiques, les praticiens, les juristes, les commerçants et les autres seront blâmés ; mais, comme disait un auteur, tout

288 Ou, inversement, on peut imaginer quelque chose de pire, pour mettre en valeur, par contraste, ce qui

existe.

289 « Les hommes ont l’habitude de former des idées universelles aussi bien des choses naturelles que des

artificielles, idées qu’ils tiennent pour les modèles des choses, et ils croient que la nature (qui, pensent-ils, n’agit jamais qu’à cause d’une certaine fin), les a en vue et se les propose pour modèles. Quand donc ils voient dans la nature se faire quelque chose qui convient moins avec le concept modèle qu’ils ont ainsi de la chose, ils croient alors que la nature elle-même a fait défaut ou a péché, et qu’elle a laissé cette chose imparfaite. » Éthique, IV, Préface, op. cit., p. 337. ― Spinoza pratique ici ce que Nietzsche appellera une

généalogie de la morale ; rubrique : idée de perfection.

290 « Les maux et les péchés ne sont rien dans les choses, mais sont seulement dans l’esprit humain qui

compare les choses entre elles. » Spinoza, Œuvres complètes. Pensées métaphysiques, II, VII, trad. R. Caillois, Paris, Gallimard, p. 279.

291 « Si un ouvrier conçoit un ouvrage avec ordre, bien qu’un tel ouvrage n’ait jamais existé, et même ne

doive jamais exister, sa pensée n’en est pas moins vraie et sa pensée est la même, que l’ouvrage existe ou non. » T.I.E., § 69. ― Et dans l’Éthique : « C’est pourquoi nous pouvons avoir des idées vraies de modifications non existantes. » Éthique, I, Prop. VIII, Sc. II, op. cit., p. 23. ― Voir à ce sujet la section 2 de notre deuxième partie.

292 À rapprocher de ce passage de la Préface de l’Éthique IV : « Étant donné que nous désirons former une

idée de l’homme à titre de modèle de la nature humaine que nous puissions avoir en vue, il nous sera utile de conserver ces mêmes vocables dans le sens que j’ai dit. Et donc, par bien, j’entendrai dans la suite ce que nous savons avec certitude être un moyen d’approcher toujours plus de la nature humaine que nous nous proposons. Et, par mal, ce que nous savons avec certitude être un obstacle à ce que nous reproduisions ce même modèle. » Éthique, IV, Préface, op. cit., p. 341.

blâme n’est pas raisonnable. Les théoriciens tendront à oublier les conditions sociales, historiques et politiques ayant rendu possible leur loisir, leur activité désintéressée. Tandis que, autre feu allumé, les activités désintéressées seront dénoncées comme inutiles, improductives, immorales. La servitude sera appelée « liberté », et Socrate, le plus juste des hommes, jugé injuste. Les « politiques », et les groupes qui exercent sur eux une influence contraire à l’intérêt public, voudront faire passer pour impossible ce qui les désavantage personnellement, sub specie juris. Cependant, les bornes du possible dans les choses morales, ajouteront peut-être d’autres encore, sont moins étroites qu’on ne le croit communément : ce sont nos préjugés qui les rétrécissent.

Conclusion

Ce que Spinoza disait de Machiavel ― qu’il était un partisan constant de la liberté et qu’il avait, sur la façon de la conserver, donné des avis très salutaires293 ― pourrait s’appliquer, assurément, à lui-même. Nous croyons que la formulation de l’idée d’un péché de la cité ― du péché de la cité comme paradoxe ― est l’un de ces avis ; d’autant plus salutaire qu’il ne consiste pas en une doctrine arrêtée, mais en un enseignement dynamique, inséparable d’un certain art critique du discours.

Il s’est agi dans ce mémoire, premièrement, de présenter le Traité politique comme une œuvre singulière. Deuxièmement, d’y comprendre, selon l’ordre du mouvement d’exposition des principes du droit politique, l’idée d’un péché de la cité se trouvant en

tension avec l’idée d’un péché selon la cité. Troisièmement, de mettre en relief les

différents aspects et traitements de cette idée paradoxale dans les œuvres antérieures du philosophe. Nous interprétons l’ensemble comme accomplissant une transformation morale et politique du langage de la faute.

Avec le Traité politique, Spinoza s’avançait plus loin que jamais dans l’énonciation de l’idée d’un blâme raisonnable des institutions sociales, civiles et politiques. Il se peut que la cité soit blâmée avec raison, au sens où l’entendait Hobbes ― le premier qui eut l’audace, dans le Citoyen, de définir explicitement le péché, en son acception restreinte, comme une faute commise contre les lois d’un État. Au sens large, chez Hobbes, nous l’avons vu, pèche ce qui va contre la raison. Un pas supplémentaire allait être fait, dans le sens de cette recherche de ce que c’est que blâmer raisonnablement : poser que la « raison politique » peut aller contre la « raison ».

La situation de départ était celle dans laquelle le souverain, ou la personne qui détient le pouvoir politique ― ces deux expressions n’étant pas, en fin de compte, parfaitement équivalentes ―, erre, ou va « contre la raison ». Le problème venait de ce que le souverain est, par définition, injusticiable ; il va toujours selon sa raison. Il fallait affirmer deux thèses à première vue contradictoires. 1° La cité ne peut pas pécher, elle n’a pas de tribunal au-dessus d’elle ; la cité, dans la mesure où elle édicte les lois, n’est pas tenue par elles (art. 18 à 24 du chap. II du T.P.). C’est le moment du péché selon la cité.

2° La cité peut pécher, dans la mesure où elle va contre la raison (art. 4, 5 et 6 du chap. IV ; chap. V). Mais il ne pouvait s’agir, dans les deux cas, du même péché. C’est la raison pour laquelle Spinoza ajoutait que la cité pèche « au sens où les philosophes ou les médecins

disent que la nature peut pécher ».

Notre lecture devrait avoir fait ressortir les raisons pour lesquelles les jeux de renvois entre articles définissant les règles d’usage des notions de droit et de péché rendent possible le péché de la cité comme paradoxe, et non comme contradiction. Une telle logique paradoxale n’est pas un défaut dans la doctrine, mais atteste au contraire d’une cohérence supérieure. Cependant, il fallait que le droit naturel des individus (au sens de Spinoza) devienne raisonnable, pour que puisse être posé en esprit un étalon ou un modèle à partir duquel juger le droit existant. C’est dans cet écart, dans ce changement de perspective, que la contradiction apparente à un niveau est ressaisie comme non- contradictoire à un autre.

« La cité ne peut pas pécher », « la cité peut pécher » ― il est remarquable que ces deux énoncés contradictoires entre eux ne sont jamais parfaitement contigus dans le texte, mais plutôt entrelacés, espacés, décalés ; si bien qu’on peut lire le Traité politique sans s’y arrêter, en passant par-dessus, en ignorant cette structure profonde de l’ouvrage. S’apercevoir de la complication (annoncée à l’article 21 du chapitre II et énoncée au chapitre IV), chercher à la comprendre (confronter les chapitres IV et V aux chapitres II et III), amène à lire l’œuvre autrement ; peut amener à lire autrement en général. Nous avons repéré quelques saillies, les avons exhumées : tout un dispositif conceptuel fut porté au jour. Un commentaire suivi nous a permis de décrire cette scène, et de l’interroger.

Il ne s’est pas agi pour Spinoza de trouver la « vraie signification » des mots. L’étymologie peut être utile, mais ne suffit jamais à expliquer la nature des choses. Il ne s’agissait pas non plus d’accepter l’usage courant. On disait, à l’époque, que les hommes peuvent pécher contre Dieu. On prétendait que le pouvoir politique exprimait la volonté de Dieu. Contester les décrets, c’était pécher contre Dieu même. Tout le langage de la faute s’en trouvait verrouillé, les institutions étaient bénites294. Une déthéologisation de la notion de péché libérait le terme pour sa politisation première, puis seconde. Il y avait là

294 « Le Saint-Esprit ordonne aux esclaves de demeurer en leur état, et n’oblige point leurs maîtres à les

affranchir. » Bossuet, Avertissements aux protestants, 5e avertissement, § 50 ; cité dans Gustave Flaubert, « Sottisier », Bouvard et Pécuchet.

révolution dans la pensée. La raison politique est une partie de la raison ; la raison et la raison politique devraient se recouper nécessairement en partie au moins, d’où l’importance, en philosophie, de la politique. « Le but du philosophe, écrit Alexandre Matheron, n’est pas de plaire aux autorités constituées : ce qui lui importe, c’est le progrès des lumières. Mais, précisément, les conditions de l’équilibre social optimum sont en même temps celles du développement de la raison295. » Une bonne raison politique met en œuvre ce qui cultive la raison dans la société, et devient une politique culturelle. La culture de la raison ne dissout pas le lien social, ne détruit pas la piété, c’est le contraire qui est vrai, comme le montrait le Traité théologico-politique.

Face à la politique, le philosophe adopte une position morale296. Face à la morale, il adopte une position politique, ou bien juridique297. La pensée philosophique déborde la pensée juridique en la ramenant à sa raison d’être, ou bien lui oppose une idée du meilleur possible, plus que juridique, afin d’orienter, de corriger, d’améliorer les institutions. En critiquant à la fois les philosophes et les politiques, Spinoza inventait une singulière « philosophie politique », recueillant le meilleur de l’une et de l’autre branche de l’alternative. Pour être applicable, la théorie politique doit considérer les hommes tels qu’ils sont, non tels qu’on voudrait qu’ils soient. Et pourtant, ce n’est pas non plus de tout ce qui est « en règle » que l’on peut dire être fait pour le mieux. Comme dit François Zourabichvili, chez Spinoza, il s’agit moins de conserver ce qui existe, que de faire exister ce qui se conserve le mieux298. C’est la raison pour laquelle Spinoza aménageait, à côté des règles civiles positives, une sagesse de l’évaluation qualitative.

Mais, l’idée d’un péché de la cité fait partie de ces vérités malaisées à exprimer communément. Par sa complexité (elle suppose la rectification préalable de la notion de péché, une politisation première et une politisation seconde, « contredisant » la première), mais aussi parce qu’elle risque toujours d’être investie de passions sourdes à la voix de la raison. Détachée de ses prémisses, la « conclusion » (la cité peut pécher) peut fournir un

295 Alexandre Matheron, Individu et communauté chez Spinoza, op. cit., p. 430.

296 « Toute la vie sociale est infléchie par l’intention politico-éthique de la libertas et qualifiée selon les

réquisits de cette finalité. » Lucien Mugnier-Pollet, La philosophie politique de Spinoza, op. cit., p. 62.

297 « Tel est l’art du politique que les jeunes ont à apprendre : l’art de déceler les foyers de corruption aux

lieux divers où ils s’allument ; l’art de se porter garant des lois contre ceux qui leur opposent sourdement leur puissance privée, ou de s’insurger contre les lois lorsqu’elles sont devenues l’abri de la puissance privée ; l’art de restaurer la puissance publique par la réforme ou par la révolution. » Claude Lefort,

Machiavel. Le travail de l’œuvre, Paris, Gallimard, p. 690.

prétexte pour taxer d’injustice tout gouvernement existant. Tel est pourtant en partie le destin de l’écriture : le texte roule dans le monde, en proie aux prélèvements. Spinoza tenait manifestement à énoncer ce péché paradoxal, mais il ne pouvait pas trop appuyer. Il en résulte le subtil jeu du dire, de l’interdire et de l’entre-dire qui caractérise pour nous cet ouvrage ultime. Les « absolutistes » pourront toujours soutenir qu’admettre un tel principe de limitation du pouvoir de l’autorité, joint à l’idée d’une faute possible du gouvernement, représente une intarissable source d’instabilité politique. Or, la discussion des idées de justice ou d’injustice ne conduit pas à la sédition ― à condition toutefois que le jugement des personnes privées se subordonne en fin de compte à celui du souverain299.

Aurait-il été possible de formuler le problème du péché de la cité seulement dans les termes de la justice et de l’injustice ? Ainsi, un article aurait énoncé : nulle justice sans État ; un autre : l’État ne peut jamais être injuste300 ; un autre enfin : en un certain sens, l’État peut être dit injuste. Dans la mesure où le contenu de la justice procède du sens strict (le droit positif), défini par l’autorité politique, affirmer que la justice est injuste implique contradiction ; nous n’opposons jamais aux règles de justice qu’une idée différente et relative de justice que nous formons. Nous avons des idées vraies de modes non existants, mais pouvant, à certaines conditions, exister. En faisant de l’injustice un cas particulier de péché, d’une part, en dédoublant la notion de péché, d’autre part, le texte spinozien traçait sans doute en pointillé un tel renversement dans le concept de justice. En tout cas, il ne suffit jamais de revendiquer verbalement « plus de justice », d’invoquer un « droit naturel plus profond que le droit positif », à partir duquel juger du droit existant, abstraction faite de la question des conditions de la formation de la raison des individus constituant la société, par laquelle seule le « droit naturel » peut devenir « droit de raison301 ».

299 « De combien de rébellions et d’étranges félonies a été causée l’erreur de ceux qui ont enseigné qu’il

appartenait à des personnes privées de juger de la justice ou de l’injustice des édits d’un monarque, et que

non seulement on pouvait avec raison, mais qu’on devait disputer de la qualité de ses commandements avant que de lui obéir ? Il y a d’ailleurs en la philosophie morale, communément reçue, quantité d’autres propositions qui ne sont pas moins dangereuses que celles-ci, et desquelles ce n’est pas ici le lieu de faire