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Chapitre III : La confiance dans le processus de conception au Burkina Faso

2- Des origines de la méfiance en conception

Cela n’a probablement pas de sens de vouloir remonter l’histoire pour rechercher un idéal « point zéro » qui matérialiserait l’origine de la méfiance dans le domaine de la conception au Burkina Faso. En outre, l’histoire rend compte de systèmes et d’actions collectives qui exigent la manipulation de nombreux facteurs dont les influences respectives sont difficilement mesurables. Nous pouvons néanmoins accepter l’idée que jadis les sociétés rurales africaines et notamment ouest africaines avaient un caractère assez clos. Les différentes activités économiques, sociales et symboliques avaient en effet lieu dans une sphère relativement circonscrite à l’espace des lignages résidant dans un même espace. Ces sociétés avaient ainsi un mode spécifique de contrôle et de régulation des relations interpersonnelles, où la

79 Selon Everett C. Hughes (1996 : 99-100) cité par Orianne et Draelants (2010, p.11), « on peut dire qu’un métier existe, lorsqu’un groupe de gens s’est fait reconnaître la licence exclusive d’exercer certaines activités en échange d’argent, de biens ou de services. Ceux qui disposent de cette licence, s’ils ont le sens de la solidarité et de leur propre position, revendiqueront un mandat pour définir les comportements que devraient adopter les autres personnes à l’égard de tout ce qui touche à leur travail ». Cependant il reste très critique et méfiant quand il s’agit d’analyser les groupes professionnels, les métiers et les organisations de travail qu’il considère comme des catégories ordinaires et normatives au moyen de laquelle certains métiers cherchent à justifier leur prestige et leur haut statut (Cartier, 2005). Il invite en effet à ne pas s’en tenir à l’organisation formelle du travail et aux discours des institutions qui dispensent des services ; il attire aussi l’attention sur ce que les représentations conventionnelles des services et du travail dans les services tendent à dissimuler : les conflits de perspective et les antagonismes, les rapports de pouvoir qui habitent les relations entre les professions de service et leurs clients. Il prône plutôt l’étude des pratiques réelles y compris celles qui altèrent les rôles et les fonctions officiels. Pour lui, une des grandes propriétés des métiers de service est la distance et la tension entre le producteur et le consommateur du service. La méfiance envers la catégorie ordinaire de « service » et sa redéfinition critique invitent en somme à ne pas considérer comme évident et établi d’avance ce que font ceux qui prétendent « servir les autres ». Contre « la vieille formule qui prétend que les professions et les institutions dispensant des services satisfont les besoins et les désirs fondamentaux des gens et de la société », Hughes rappelle que les professions et les institutions ne se contentent pas d’offrir un service en réponse à des besoins, mais contribuent, en interaction avec les populations qu’elles servent et la société, à définir ces besoins qu’elles-mêmes satisfont.

gérontocratie et le droit des aînés avaient une importance primordiale. Le caractère relativement fermé des sociétés rurales ne permettait pas aux jeunes d’en savoir beaucoup plus que leurs aînés : « Un vieillard assis voit plus loin qu’un jeune débout » dit un adage africain. Il faut également souligner la tradition d'oralité dans les échanges en Afrique qui limite l'accumulation et la divulgation de connaissances que permet au contraire le support écrit (livres et autres supports numériques). On a souvent cité cet adage africain: "un vieillard qui meurt c'est une bibliothèque qui brûle", sans dire que c'est une bibliothèque relativement restreinte, limitée à la mémoire d'un individu, au mieux d’une lignée (voir l’œuvre de Amadou Hampâté Bâ, très illustrative à ce titre). L’accumulation et l’accès libre à des connaissances est pourtant une condition de la conception comme capacité et pratique, car chaque concepteur ne peut pas se permettre de repartir de zéro, sauf à réinventer ce qui existe déjà.

2.1- Les transformations de la société

Le contrôle des apprentissages et des productions, tout comme le contrôle social des cadets (et des femmes) assuraient d’une certaine manière une sécurité matérielle et sociale, et partant un équilibre auto défini et auto régulé (Gosselin, 1986 ; Rémy, 1977 ; Benoît, 1972 ; Izard, 1977, 1985, 1995 ; Boutillier, 1975 ; Boutillier et al., 1977 ; Capron et Kolher, 1975).

Le contact des sociétés africaines subsahariennes avec l’Occident a constitué un tournant important dans leur histoire : cette rencontre culturelle a fait bouger les frontières des valeurs suscitant l’émergence d’autres valeurs et l’affaiblissement de certaines80. Selon Ouédraogo (1990) par exemple, le champ des valeurs en Afrique enregistre aujourd’hui de nouvelles tendances ; l’accumulation monétaire dominant peu à peu l’accumulation d’autres biens ont fait émerger le « culte » de l’argent et l’individualisme (entre autres) qui favorisent des comportements, des styles de vie tendant à nier les valeurs traditionnelles, éminemment liées à des situations et constructions historiques spécifiques (le système lignager ou clanique notamment), de solidarité et d’équité, ou encore de sincérité81. Hilgers (2007) renforce la conviction de Ouédraogo (1990) quand il écrit : « C’est à Pierre-Joseph Laurent (2003) que l’on doit cette heureuse formule [modernité insécurisée] pour caractériser l’incertitude qui règne actuellement et est au cœur, ou au moins à la lisière, de la plupart des travaux contemporains consacrés à l’Afrique de l’Ouest. L’absence de confiance de la population dans les institutions étatiques, le bouleversement des mécanismes de solidarité, l’individualisation, la recrudescence de logiques sorcellaires, le népotisme, la corruption généralisée, la privatisation des biens publics, les abus de pouvoirs, la violence, l’utilisation opportuniste des

80 Pour Pierre et Delange critiquant l’œuvre de Philippe d’Iribarne, notamment son ouvrage de (2003) intitulé "Le Tiers-Monde qui réussit. Nouveaux modèles", la situation a beaucoup évolué et « la lecture des travaux de D’Iribarne rappelle peu le poids des contre-cultures dans les pays du Tiers-Monde. Pour nombre de jeunes cadres originaires de pays en voie de développement, nous devons pourtant faire le constat que ceux-ci ont « un pied dans la culture de leur père et l’autre dans celle de leur génération, mais le second est plus entraînant que le premier » pour reprendre la belle image de Mayol (1992). A une société de parenté forte se substitue fréquemment pour les jeunes élites du Tiers-Monde, une société où ce ne sont plus les pères, les « anciens » qui formulent l’identité culturelle mais peut-être surtout les « pairs » de l’univers professionnel. Leurs réseaux sont donc modernistes (par opposition aux réseaux de résistance identitaire des « anciens »), en ce qu’il est question de « s’exprimer comme tout le monde », d’entrer dans le jeu de la concurrence interindividuelle afin de « faire carrière dans l’entreprise ». Ces aspects sont peu présents dans le dernier livre de D’Iribarne alors que la quête identitaire de ces jeunes élites, pour qui « le droit à la ressemblance » semble succéder au droit à la différence, apparaît liée à la modernisation et à l’internationalisation des entreprises » p 5. (Voir Delange, Pierre. Note de lecture de l’ouvrage de D’Iribarne, ethnographiques.org, Comptes-rendus d’ouvrages. http://www.ethnographiques.org/2004/Pierre,Delange.html (consulté le 25 avril 2009)).

81 L’inégalité étant pensée, dans ces systèmes normatifs traditionnels, comme un principe structurant permettant de reproduire et de réguler les pouvoirs et hiérarchies, de contrôler les trajectoires individuelles, dans le groupe.

institutions, la répression des dissidences politiques, les contraintes de la décentralisation, les exigences de la globalisation, la pluralité des normes, la profonde mutation du cadre spatial opérée par une urbanisation rapide et des réformes foncières sont autant d’éléments qui façonnent un contexte d’anxiété et de précarité que l’on peut synthétiser dans la formule de Laurent : l’Afrique vit à l’heure d’une modernité insécurisée » (p. 157).

La déliquescence des valeurs « traditionnelles » issue d’un fond colonial et néocolonial nous semble cependant partiale et monolithique. En effet, elle sous-entend que ces valeurs étaient partout prégnantes, appliquées et vécues comme telles en toutes situations.

Or, l’histoire nous apprend aussi qu’avant la période coloniale les guerres tribales, les querelles internes existaient bien, tout comme le marché et l’argent ; la méfiance, la traîtrise, l’égoïsme ou l’individualisme étaient aussi des comportements possibles, que les romanciers africains82 ont su parfois fort bien nous restituer. C’est le cas notamment de Amadou Hampâté Bâ avec « L’étrange destin de Wangrin », de Sembène Ousmane avec « Les bouts de bois de

Dieu », de Ahmadou Kourouma avec « Le soleil des Indépendances. »

Par conséquent, sans aller jusqu’à diaboliser l’épisode colonial ou à l’opposé à faire un état des lieux dithyrambique des sociétés précoloniales, nous pensons que l’effritement ou l’apparition de nouvelles valeurs est d’abord un résultat du contact – déjà très ancien – avec d’autres cultures et constitue ensuite un processus permanent, que l’on peut même dire intrinsèque à l’évolution de toutes les sociétés humaines. En effet, aucune d’entre elles n’est figée. Les sociétés sont toutes mues par des éléments endogènes aussi bien qu’exogènes ; Balandier (1970) les appelle « dynamique du dedans » et « dynamique du dehors ». Pour Mendras (1976), même « les sociétés les plus "primitives" changent d’elles-mêmes et ne sont pas figées dans un éternel présent. Les sociétés paysannes sont sous l’influence d’une société englobante » (p.173).

Ceci étant entendu, on constate aujourd’hui que le vécu quotidien de la majeure partie des populations africaines subsahariennes est de plus en plus précaire au regard du coût de la vie, des charges et incertitudes sociales croissantes en matière d’alimentation, d’emploi et d’avenir. L’urbanisation et l’émigration constituent par ailleurs deux phénomènes massifs, difficilement contrôlables, rapides, sources de tensions, de précarisation, de risques et surtout de ruptures, ayant pour premier effet notable, celui de fragiliser les liens sociaux. Désormais la lutte pour la survie économique notamment en ville, passe au détriment de toutes autres considérations soient-elles. La quête d’argent devient le moteur des relations de travail (simple rémunération de survie ou rente), ce qu’elle n’était pas dans les sociétés traditionnelles. Le leitmotiv devient : « le chacun pour soi dans une économie de pauvreté et de la débrouillardise.83 »

Cependant, notre analyse des changements en Afrique semble partielle et monolithique parce qu’elle ne prend en compte qu’une part des facteurs et des processus qui induisent les changements. En effet, dans notre développement, nous n’abordons pas la transformation des structures sociales ce qui donne l’impression que les mutations sociales que nous observons ne tiennent qu’à des changements de valeurs et à des changements économiques plus qu’à des changements de structure sociale, des formes d’échange, des interdépendances, etc. On peut toutefois se demander quels mécanismes tenaient les gens avant et généraient de la

82 Ces romanciers ont mis en évidence que l’homme africain avant la colonisation n’était ni naïf ni « fondamentalement bon », ni même indéfectiblement attaché ou fidèle à ses groupes d’appartenance et à leurs normes.

83 La monétarisation progressive des échanges de biens (comme nous l’avons souligné dans le chapitre précédent), dans une société où ceux qui n'ont rien à vendre et tout à acheter sont exclus, a également tendu les rapports humains, même au sein de groupes sociaux traditionnels (village, ethnie, etc.).

confiance ? Que sont-ils devenus aujourd’hui pour que l’on assiste au développement de la méfiance tout au moins dans le monde du travail ? Ces mécanismes qui tenaient les gens ont-ils disparu ou en restent-ont-ils dans d’autres sphères sociales (famille, clan, lignage…) en dehors du cadre de travail ? Comment se manifestait la confiance dans le monde du travail ? La méfiance exacerbée que l’on observe aujourd’hui est-elle propre au fait que le monde du travail est une institution sociale différente et non enracinée dans les structures traditionnelles, ou cette évolution est-elle due au fait que ces structures traditionnelles changent ? Quelle spécificité de l’Afrique par rapport au reste du monde ? Ce sont là autant de questions que nous nous posons également.

Par ailleurs, nous n’ignorons pas qu’il y a plusieurs « avant » c'est-à-dire plusieurs phases de transition dans l’histoire africaine, notamment : avant la colonisation (tissu d’interdépendance familiale, tribale et villageoise) ; après la colonisation mais avant l’époque actuelle mue par l’argent, l’individualisme et la compétition (destruction des structures traditionnelles mais mise en place de valeurs et de structures occidentales avec un Etat, une fierté au travail, etc.). Dans cette thèse, nous n’analysons pas la transformation des pratiques et des structures. Nous nous centrons sur la question des changements de valeurs tout en étant conscient qu’une autre analyse est possible en termes de pratiques, d’interdépendances, d’institutions, de structures d’organisation, notamment.

La recherche, l’enseignement et les activités d’innovation artisanale ne sont pas épargnés. On y assiste dorénavant à une marchandisation accrue des rapports de travail, donc à de nouvelles justifications et fonctions des collaborations : « je travaille avec » pour dégager un meilleur revenu, constitue par exemple un registre courant, banalisé, pour justifier une collaboration entre pairs.

Ces changements ne vont toutefois pas sans regrets. Les gens n’oublient pas si vite d’anciennes normes, d’anciennes habitudes et d’autres régimes de collaborations. Le cogérant de la SGGI (âgé d’une quarantaine d'année) regrette cette évolution :

« quand moi je débutais ici on avait même du plaisir à réaliser un certain nombre d’équipements ; on travaillait jusqu'à des heures tardives sans rien en compensation, mais on ne se plaignait pas, tout simplement parce qu’on avait envie de prouver aux yeux de tout le monde qu’on pouvait le faire ; c’était la fierté, la satisfaction morale qui primaient. Oui on peut parler d’évolution dans ce sens là. De nos jours, je ne vois pas qui tu peux appeler à la collaboration pour la réalisation d’un équipement sans que la question pécuniaire là ne soit évoquée en premier lieu ».

On assiste ainsi au passage progressif d’un travail fait avec fierté et procurant une satisfaction étroitement liée à une reconnaissance, à une forme d’engagement dans le travail dont les fondements et gratifications ne seraient plus que monétaires. Le référentiel social semble donc bien avoir changé. Notre interlocuteur poursuit d’ailleurs :

« Dans le temps, il y avait des personnes ressources, des référentiels ; et on veut faire comme eux ; mais aujourd’hui les référentiels qu’on nous donne à voir c’est qui, c’est ceux qui ont l’argent, c’est tout ! Je parle de ce domaine des innovations technologiques hein, réellement on aurait pu avoir des gens qui ont une certaine renommée, comme référence, des gens qu’on connaît vraiment bien intègres, qui ont fait la preuve de ci et de ça, que le domaine de la conception s’en porterait mieux ».

Dans un monde de précarité ou de débrouillardise, les leaders charismatiques ou les « hommes intègres » ne sont plus les premiers référents ; ils ne sont pas non plus à même d’imposer certaines valeurs et certaines conduites aux autres. Ils ont été dépassés par les leaders du capital (détenteurs d’argent et de pouvoir politique et économique) qui construisent

des relations clientélistes, elles-mêmes faisant la part belle désormais à l’installation d’un climat délétère. La peur, la crainte, la méfiance, la défiance, les suspicions multiples fondées ou non de vol d’idées ou de technologies, et de traîtrise qui en résultent reposent en définitive sur un déplacement des pouvoirs, des valeurs de référence et du sens des liens sociaux.

2.2- Méfiance côté chercheurs

Au niveau de la recherche scientifique par exemple, les sources de l’absence de confiance sont à la fois endogènes et exogènes.

Sur le plan endogène (aux dires des chercheurs), l’absence de confiance viendrait du système de formation (francophone ou anglo-saxon), des relations interpersonnelles dans les collectifs de travail, des rapports hiérarchiques et des traitements salariaux. Un premier facteur tient aux hiérarchies et aux découpages verticaux qui structurent la formation et la recherche. Des distances inutiles s’instaurent entre les acteurs alors que ceux-ci devraient coopérer dans l’activité de conception. A ces distances se surajoute de la méfiance lorsque les différences hiérarchiques conduisent à présupposer des incompétences chez ses partenaires. C’est ce que relève ce chercheur d’un institut de recherche au Burkina Faso :

« le système de supériorité ce qu’on appelle le mandarinat, le professeur n’ira jamais redescendre demander à un technicien comment marche telle ou telle chose ; c’est une erreur grave et ça entrave la collaboration. En fait le technicien ce qu’il sait dans la pratique le professeur peut ne pas le savoir ; il a des connaissances techniques et pratiques dans certains domaines que le professeur ignore ; eh ben ! il faut demander au technicien : à tel niveau comment est-ce que tu comprends la chose ; ça permet d’avancer et de comprendre même tout le schéma qu’on est en train de travailler. Ici on s’est rendu compte que c’est une entrave grave parce que à partir du moment où on a ses diplômes on se dit que les moins diplômés sont moins outillés, moins préparés que nous quoi, c’est faux !».

Aux distances hiérarchiques entre acteurs de la conception se greffent également des conditions matérielles et financières défavorables qui distraient les acteurs de leur activité ; leur faible investissement dans les projets conduit alors leurs partenaires, ignorants de cet état de fait, à se méfier des chercheurs. Un enseignant-chercheur pointe ainsi le problème lié la faiblesse des salaires :

« Je me souviens de cette discussion que j’avais eue avec un chercheur français et des Africains il y a quelques années de là et le Français m’avait dit : quand on monte un projet en Afrique on commet une erreur ; c’est-à-dire qu’on ne regarde pas le chercheur ; on regarde la recherche et le résultat auquel on veut arriver et on finance ça ; c’est terminé ; c’est un problème ; quand vous montez un projet même si le projet est bien ficelé et que vous n’avez pas regardé les conditions de vie des chercheurs, en fait ils ont des préoccupations qui font que finalement la recherche est secondaire alors que c’est bien là l’axe principal de leur travail. Ce qui se passe dans la tête d’un homme qui a des difficultés c’est extrêmement difficile ».

De telles conditions de travail conduisent au fait que, au niveau de la recherche scientifique nationale par exemple, les chercheurs collaborent peu entre eux84 et ceux qui sont dotés de diplômes ou d’expériences préfèrent migrer vers les ONG et les entreprises privées dont les rémunérations sont plus intéressantes et régulières. À titre d’exemple, le département

84

Ceci n’est évidemment pas inéluctable. Les acteurs peu dotés en ressource pourraient aussi s’unir pour agir collectivement mais cela supposent qu’ils ne soient pas mobilisés individuellement dans des projets indépendants les uns des autres.

Mécanisation de l’IRSAT a connu en l’espace de 5 ans le départ de huit de ses cadres intellectuels sur un effectif total de 14 vers les entreprises privées comme Burkina Equipements, SOTRACO (société de transport en commun), Zain (ex-Celtel), ou vers les ONG comme le CEAS. Cette exportation de savoirs incorporés vers l’industrie n’est pas en soi une mauvaise chose si ce n’est qu’elle vide les centres de recherche de leurs forces vives et que les chercheurs qui ne migrent pas ne se sentent guère motivés, financièrement85 et intellectuellement ; certains d’entre eux en viennent à faire de la quête d’argent leur activité de recherche principale. Une pratique très courante est de signer des contrats et des conventions avec des ONG intervenant dans le domaine de l’appui aux acteurs économiques et sociaux pour la réalisation d’études de diagnostic et d’intervention. Ainsi, nombreux sont les chercheurs qui entretiennent ce type de relation avec les ONG et les bailleurs de fonds surtout internationaux. Cette pratique considérée comme une rémunération intermédiaire permet toutefois à certains chercheurs de publier ce qui sert aussi à leur promotion scientifique.

Sur le plan exogène (aux dires des concepteurs privés), l’absence de confiance découle de