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LE DEFAUT D’ACCOMPLISSEMENT DE L’ACTE MEDICAL EXONERE AU TITRE DE L’AUTORISATION DE LA LOI

PARAGRAPHE 1. L’ACTE MEDICAL, UN ACTE DE VIOLENCE AUTORISEE PAR LA LOI

B. LE DEFAUT D’ACCOMPLISSEMENT DE L’ACTE MEDICAL EXONERE AU TITRE DE L’AUTORISATION DE LA LOI

142. En d’autres circonstances, c’est l’abstention du praticien médical à accomplir l’acte médical qui est considérée comme fautive et qui peut engager sa responsabilité pénale au titre du délit d’omission de porter secours.

Or, la loi prévoit des hypothèses dans lesquelles le médecin ne peut se voir reprocher un délit de non-assistance à personne en danger l’exonérant ainsi de sa responsabilité pénale.

Il s’agit essentiellement des cas de patients en fin de vie, hors d’état d’exprimer leur volonté ou en état de le faire.

En d’autres termes, dans ces hypothèses, le médecin bénéficie au titre de la loi, d’une autorisation au « laisser-mourir ».

Cette autorisation de la loi est sous-tendue par l’idée de dignité ainsi exprimée à l’article 1110-5 nouveau du Code de la santé publique « Toute personne a le droit

d'avoir une fin de vie digne et accompagnée du meilleur apaisement possible de la souffrance. Les professionnels de santé mettent en œuvre tous les moyens à leur disposition pour que ce droit soit respecté ».

L’article 11 de la loi n°2016-87 du 02 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie a abrogé le dispositif précédent prévu à l’article L. 1111-13 du Code de la santé publique315 et l’a remplacé par l’article L. 1110-5-2.

143. L’article L. 1110-5- 2316 nouveau du Code de la santé publique prévoit que le patient atteint d'une affection grave et incurable et dont le pronostic vital est engagé à court

315 L’article L. 1111-13 de la loi de 2005 du Code de santé publique disposait que lorsqu’une personne était en phase terminale ou en phase avancée d’une affection grave et incurable est hors d’état d’exprimer sa volonté, le médecin pouvait décider de limiter ou d’arrêter un traitement inutile, disproportionné ou n’ayant d’autre objet que la seule prolongation artificielle de la vie de cette personne après avoir respecté la procédure collégiale et consulté la personne de confiance, la famille ou à défaut l’un de ses proches et le cas échéant les directives anticipées de la personne.

316 L’article L. 1110-5-2 du Code de la santé publique crée par la loi du 02 février 2016 n°2016-87, art.3 dispose que « à la demande du patient d'éviter toute souffrance et de ne pas subir d'obstination déraisonnable, une sédation profonde et continue provoquant une altération de la conscience maintenue jusqu'au décès, associée à une analgésie et à l'arrêt de l'ensemble des traitements de maintien en vie, est mise en œuvre dans les cas suivants : 1° Lorsque le patient atteint d'une affection grave et incurable et dont le pronostic vital est engagé à court terme

présente une souffrance réfractaire aux traitements ;

2° Lorsque la décision du patient atteint d'une affection grave et incurable d'arrêter un traitement engage son pronostic vital à court terme et est susceptible d'entraîner une souffrance insupportable.

terme, présente une souffrance réfractaire aux traitements ou lorsque la décision du patient atteint d'une affection grave et incurable d'arrêter un traitement engage son pronostic vital à court terme et est susceptible d'entraîner une souffrance insupportable, peut, afin d’éviter toute souffrance et ne pas subir d’obstination déraisonnable, demander un arrêt de l’ensemble des traitements de maintien en vie. Dans l’hypothèse où le patient ne peut exprimer sa volonté, la décision d’arrêt de l’ensemble des traitements de maintien en vie est mise en œuvre selon une procédure collégiale définie par voie réglementaire.

Cette procédure permet à l'équipe soignante de vérifier préalablement que les conditions d'application prévues aux alinéas précédents sont remplies.

Ainsi le praticien médical qui cesserait d’accomplir à la demande de son patient, ou sur base d’une décision collégiale lorsque son patient est hors d’état d’exprimer sa volonté, des gestes médicaux à l’endroit d’un patient atteint d'une affection grave et incurable et dont le pronostic vital est engagé à court terme, ne pourrait être poursuivi du chef du délit d’omission de porter secours et se voit pénalement exonéré.

144. Bien que le défaut d’accomplissement de l’acte médical puisse être exonéré au titre de l’autorisation de la loi, il existe des situations où l’évocation de l’état de nécessité ne sera pas retenue comme une cause exonératoire de responsabilité pénale.

Le domaine de l’urgence médicale crée la majorité des situations dans lesquelles les médecins évoquent l’état de nécessité.

Lorsque les valeurs sociales à protéger sont de valeur identique, le juge pénal est réticent à admettre l’état de nécessité comme fait justificatif.

Ainsi le médecin qui ayant été sollicité concomitamment par deux patients, a traité en priorité le patient épileptique au détriment de l’enfant de 11 mois immunodéficitaire et sujet à convulsions.

Lorsque le patient ne peut pas exprimer sa volonté et, au titre du refus de l'obstination déraisonnable mentionnée à l'article L. 1110-5-1, dans le cas où le médecin arrête un traitement de maintien en vie, celui-ci applique une sédation profonde et continue provoquant une altération de la conscience maintenue jusqu'au décès, associée à une analgésie.

La sédation profonde et continue associée à une analgésie prévue au présent article est mise en œuvre selon la procédure collégiale définie par voie réglementaire qui permet à l'équipe soignante de vérifier préalablement que les conditions d'application prévues aux alinéas précédents sont remplies ».

Le choix du médecin de ne pas privilégier l’enfant a été qualifié de délit d’omission de porter secours et n’a pas reçu de justification pénale 317 en raison de la nécessité d’intervenir auprès d’un patient souffrant d’une grave crise d’épilepsie.

Cette position particulièrement défavorable pour le praticien médical et a fortiori puisqu’il s’agit d’une infraction d’omission, condamne la passivité coupable du praticien aux yeux des magistrats qui n’ont pas retenu les arguments au pourvoi du médecin qui en vain argumentait que

« La nécessité d'intervenir immédiatement auprès du malade souffrant d'une

grave crise d'épilepsie », pouvait constituer « un cas de force majeure ou de contrainte morale l’ayant conduit à décider, après analyse de la situation pathologique de l'enfant, de conseiller aux parents de le conduire directement à l'hôpital, sachant qu'il ne pouvait provoquer directement ledit secours, faute de temps à raison de ce qu'un autre de ses malades se trouvait également en danger ».

Hormis ce cas exceptionnel, l’autorisation de la loi ou l’état de nécessité permet un recul de principe de la responsabilité pénale du praticien médical et des incriminations d’homicides involontaires et de non-assistance à personne en danger318 lors d’un arrêt de l’alimentation ou des soins conformément à la volonté du malade à travers l’autorisation de la loi et non d’un effet reconnu au consentement de la victime319.

Outre le fait que l’accomplissement de l’acte médical ou le défaut d’accomplissement de l’acte médical puisse être exonéré par une autorisation de la loi ou un état de nécessité, l’acte médical, acte par nature attentatoire à l’intégrité physique, peut aussi devenir licite sur ordre de la loi.

317 Cass. crim., 4 févr. 1998, n°96-81425.

318 L’article 223-3 du Code pénal dispose que « le délaissement, en un lieu quelconque, d'une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son état physique ou psychique est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende ».

319 F. ALT-MAES, « La loi sur la fin de vie devant le droit pénal » JCP G 2006, I, 119 et « Le respect de la dignité au centre des pratiques de la loi sur la fin de vie », Gaz. Pal., 26/27 mai 2006, p.1.

PARAGRAPHE 2. L’ACTE MEDICAL, UN ACTE DE VIOLENCE ORDONNEE