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SOUS-TITRE 1 : LES DECISIONS JURIDICTIONNELLES

CHAPITRE 2 LES DECISIONS DU JUGE ADMINISTRATIF

Il est également possible d’appréhender la position du juge administratif et de connaitre sa vision de la situation à travers la décision qu’il prend en matière de santé. Pour cela, les

affaires suivantes : une dite Extencilline (I), une dite Fracture (II), une dite Fil de lin (III), une dite Accouchement (IV) et enfin une dite Nivaquine (V),ayant fait l’objet d’une prise de décisions par le juge vont nous servir de cas d’études.

I. L’affaire dite Extencilline

141. Cas n° 8: Responsabilité administrative- Dommages- intervention médicale- obligation de

moyens. Acte de soins- faute lourde-expertise. (R P c/Etat Malagasy, arrêt n°38/79-ADM, Chambre administrative de la Cour suprême)

L'enfant X. a reçu un traitement à titre externe à l'Hôpital principal de Fianarantsoa. Le 2 décembre, elle s'est rendue à l'hôpital pour y poursuivre son traitement habituel. Après contrôle, son médecin traitant lui prescrit une injection d'Extencilline 2,4MUI. Sitôt après l'injection faite par l'infirmier, elle décéda. Le médecin-chef a déclaré une cause naturelle du décès.

Après avoir déposé une réclamation préalable restée sans suite auprès du Ministère de la santé, le père a introduit une requête devant la Chambre administrative de la cour suprême tendant à l'indemniser du préjudice subi sur la faute de l'infirmier, qui a aurait administré une substance autre que celui prescrite par le médecin. La fille aurait toujours toléré l'Extencilline.

Par arrêt n°64 du 14 septembre 1988, la Cour a rejeté la requête aux motifs « qu'en matière de santé, l'Administration n'est pas tenue à une obligation de résultat mais une obligation de moyens; que dans le cas d'espèce, le sieur R. E. n' a pas demandé un constat d'urgence afin de pouvoir déterminer l'existence d'une faute lourde de l'administration, susceptible d'engager la responsabilité de celle-ci ».

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II. L’affaire dite Fracture

142. Cas n°9:Expertise-Dommages - dysfonctionnement du service public.(Chambre

Administrative, 30 janvier 1985, A BR Ac/ Etat Malagasy, Recueil de jurisprudence de la chambre administrative de la cour suprême (1977 – 2003).

M. X a été admis à l'Hôpital de F. le 8 août 1980 pour enflure à la jambe, un état qui a été imputé à un excès d'albumine. Le 9 septembre, l'on s'en est aperçu que le patient souffrait d'une fracture du fémur. Une évacuation vers la capitale a été décidée le 7 novembre 1980.

M. X a introduit une requête aux fins d'indemnisation contre l'Etat malagasy pour mauvais fonctionnement d'un service public.

Par arrêt n°24/83 du 30 janvier 1985, la Cour a commis un deuxième expert et avance qu’une expertise a été ordonnée aux fins de déterminer d’une part la nature de la fracture dont ils’agit, d’autre part la ou les causes qui ont fait que l’évacuation sur Antananarivo n’a pu avoir lieu que de façon si tardive ; … que le requérant dans un mémoire du 22 octobre 1984 conteste les conclusions de l’expertise tout en récusant la personne de l’expert elle-même et demande par la même occasion une contre-expertise ;…qu’il résulte des pièces versées au dossier que l’objet du litige concerne deux éléments essentiels de l’acte médical, à savoir le diagnostic et le traitement ; qu’il convient dans ces conditions d’accéder à la requête formulée par le demandeur relativement à la désignation d’un contre expert, lequel aura pour mission de dire si l’affectation a fait l’objet d’un diagnostic correct de la part des services hospitaliers de Fianarantsoa ; de dire aussi, si sur le plan du traitement tout le nécessaire a été fait, en particulier pour la période allant du 8 août au 9 septembre 1980, et entre cette dernière date et le 7 novembre de la même année.

III. L’affaire dite Fil de lin

143. Cas n°10:Faute technique- opération chirurgicale dans un établissement public de

santé.(Chambre administrative de la CS, Arrêt du 1966, RACACS 1, 1966, p.37)

Par un arrêt du 1966, la Chambre administrative de la Cour suprême a affirmé que le fait d'utiliser un fil de lin pour les besoins d'une opération de ligature ne constitue pas une faute médicale.

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IV. L’affaire dite Accouchement

144. Cas n°11 :Décès de la mère et de l'enfant à naître- accouchement – faute- obligation de

moyens- Maternité, Etablissement public de santé.(RP c/Etat Malagasy, arrêt n°38/79-ADM, Chambre administrative de la Cour suprême)

La mère et l'enfant à naître décèdent lors de l'admission de Mme. X à la Maternité de B pour accouchement. Son conjoint introduit une requête aux fins d'indemnisation contre l'Etat malagasy auprès de la Chambre administrative de la Cour suprême pour faute lourde du service médical.

Par arrêt n°38/79 du 24 avril 1981, la Cour rejette la demande aux motifs que « qu'il est constant que la condition légale d'octroi de dommages-intérêt est l'existence d'une faute réelle et matérielle prouvée de façon irréfutable, au besoin d’expertise effectuée en temps opportun; que le requérant n'a pu que présumer l'existence d'une telle faute en alléguant que les moyens médicaux en matériel et en personnel ne font pas défaut (...); que les interventions médicales, y compris la chirurgie et l'utilisation matérielle et humaine à la dispositions de la formation sanitaire incriminée ne peuvent procéder que d'une adéquation technique dont les praticiens sont les seuls juges; qu'il n'est pas possible, en l'état actuel du dossier, de reprocher à ces derniers et à leur service quelque défaillance ou défectuosité de fonctionnement ; dès lors que l'administration a produit pour sa défense un relevé d'observations médicales soutenues et défendues à l'audience par le Médecin-Chef de la Maternité de l'époque et par écrit par son successeur actuel. »

Sans préciser les postes de préjudices, dans l’affaire dit anesthésie, par jugement du 12 septembre 2000, le premier juge a condamné, l’anesthésiste et le secrétaire, conjointement et solidairement, à payer à titre de dommage- intérêts la somme de 2.000.000 Ar.

V. Affaire dite Nivaquine

145. Cas n° 12 : (Chb Adm, Arrêt n°45, R c/Etat Malagasy)

L’enfant A a décédé suite à la prise obligatoire et collective de Nivaquine prescrite dans le cadre de la campagne de lutte antipaludique du Ministère de la Santé et du Planning Familial. L’opération a été réalisée par la Croix Rouge Malagasy au nom et pour le compte de l’Etat dans un centre préscolaire.

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Le père a intenté un recours en indemnisation contre l’Etat pour fonctionnement défectueux du service de l’Assistance Médicale du Ministère de la Santé du fait du surdosage de nivaquine administrée à son enfant. Le Représentant de l’Etat soutient le rejet de la requête aux motifs que la Nivaquine ne passe pas immédiatement dans le sang lorsqu’elle est administrée sous la forme de solution; qu’il est établi que l’enfant n’a bu que trois cuillerées de la solution préparée , bien en deçà des normes prescrites par l’Organisation mondiale de la Santé; que de surcroît, provenait du milieu du récipient; que le taux de 410 mg de nivaquine avancé par le requérant comme pouvant être décelé pour la totalité des viscères ne correspond pas à celui indiqué dans le rapport d’expertise.

Le requérant soutient également que la sage-femme préposée à la préparation et à la distribution de la solution de nivaquine était aidée de dix collaborateurs bénévoles dont la dame R.E. qui n’était qu’une simple cultivatrice et qui a pu commettre quelques erreurs dans la préparation de la solution; que la relation de cause à effet entre l’absorption de la nivaquine et la mort de l’enfant ne saurait être contestée.

L’Etat avance par rapport à cela que s’il y a une relation de cause à effet entre l’absorption de la nivaquine et le décès de l’enfant, il faut cependant qu’il y ait une faute pour engager la responsabilité de l’Etat; que la Chambre d’accusation a expressément affirmé qu’aucune faute ne peut être reprochée à la personne.

En ce qui concerne la détermination de la personne responsable, l’Ancienne chambre administrative avance que les actes commis par les membres de la Croix-Rouge, organisme privé reconnu d’utilité publique, exerçant une mission de service public dans le cadre de la lutte chimioprophylaxique antipalustre, sont accomplis sous la responsabilité de l’Etat.

Sur le fondement de la responsabilité, la Cour précise que sur la base du Code de la Santé et des textes réglementaires pris par le Ministère de la santé et du planning familial, les enfants d’âge scolaire et préscolaire sont obligés de prendre de la nivaquine sous la forme imposée par l’Administration. « En contrepartie de l’obligation qui ainsi faite aux enfants de se soumettre à la nivaquinisation, il convient d’admettre que la faute présumée doit suffire à entraîner la responsabilité de l’Administration en cas d’accident; qu’en particulier, un décès est révélateur d’un fonctionnement défectueux du service public de la santé. Qu’il suffit, dans ce cas, d’établir la relation de cause à effet entre l’acte incriminé et le décès pour que la responsabilité de l’Etat

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soit engagée sauf à celui-ci à prouver que le décès est dû à une faute de la victime ou d’un tiers ou un cas de force majeure ».

Sur la responsabilité du service public, la Chambre administrative a avancé que l’enfant, en parfaite santé, absorba une solution de nivaquine préparée et distribuée par la dame X, membre de la Croix-Rouge; qu’elle décéda deux heures et demie plus tard, après être passée toutes les phases d’intoxication; que les circonstances sont telles que le lien de cause à effet entre l’absorption de nivaquine et la mort peut être perçu direct et certain; que ce décès laisse plus présumer une faute dans le fonctionnement du service que le même jour, trois enfants ont été intoxiqués à la suite d’une ingestion de nivaquine provenant du même récipient, rempli de la même solution faite avec le troisième sachet de nivaquine sur les quatre utilisés au moment de la séance; que toutes les trois ont présenté les mêmes processus d’aggravation; d’abord des vertiges, yeux injectés puis nausées et coliques, enfin cyanose et chute; que si les deux d’entre elles ont être sauvées, l‘enfant X a succombé; que la dame bénévole X ayant administré la dose a été seule ce jour là à s’occuper de cent-vingt enfants; qu’elle n’a pas travaillé dans les bonnes conditions; que la dose absorbée était supérieure à celle prescrite eu égard au poids de l’enfant; que dans ces conditions, la responsabilité du service de la Santé Publique est engagée et qu’elle est entière, aucune faute de la victime ou de ses parents ou d’aucun tiers n’étant établie ni même alléguée ».

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