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3.2 Modèle de référence

3.2.3 Développements

Au cours de la thèse, le développement du modèle a consisté en l’ajout de phases clathrates et la prise en compte de l’effet de composés dissous sur l’activité de la solution aqueuse. Le programme de Choukroun et Grasset (2010), de par sa structure modulaire et son formalisme centré sur l’expression du potentiel chimique de H2O, se prête adéquatement à l’implémentation localisée de ces nouvelles fonctions. La logique de ces modifications par rapport à la structure générale du programme est présentée en figure 3.3, page 123, et illustrés plus en détail en figure 3.4, page 124.

Les structures cristallines des clathrates de gaz telles que la structure sI adoptée par le CO2 et le CH4 sont constituées d’un réseau de molécules d’eau formant des cages stabilisées par la présence de molécules hôtes (figure 1.13, page 52). Bien que cette structure ne soit pas stable en l’absence complète de molécules hôtes (i.e. sys-tème unaire H2O), au moins deux arguments permettent de considérer séparément d’un point du vue thermodynamique le squelette hydraté formant la structure et l’espèce hôte la stabilisant. Premièrement, la structure cristalline de l’hydrate n’est pas spécifique à une molécule hôte : si la variabilité des dimensions des molécules hôtes sont effectivement à l’origine de plusieurs géométries distinctes du squelette hydraté (e.g. structure sI, sII et sH (Sloan et Koh, 2008)), une même structure peut accommoder des espèces chimiques différentes. C’est le cas de la structure sI dans les systèmes H2O − CO2 et H2O − CH4. Deuxièmement, ces hydrates ne sont pas des composés stœchiométriques : leur composition peut être complexe (emprisonnement d’hôtes différents dans des cages voisines) et leur taux d’occupation peut être partiel (le remplissage d’une fraction des cages permet une stabilisation globale de la struc-ture) ou multiple (à haute pression, plusieurs molécules hôtes peuvent occuper une même cage). Une revue exhaustive des structures clathrates connues est proposée par Sloan et Koh (2008). En conséquence, l’approche développée par van der Waals et Platteeuw (1959) considère d’une part l’existence d’une hypothétique structure clathrate "vide" et d’autre part l’effet stabilisateur des molécules hôtes piégées.

L’étude de Bakker et al. (1996) basée sur le modèle de van der Waals et Plat-teeuw (1959) modélise les équilibres entre les phases clathrates et la solution aqueuse en considérant trois éléments distincts :

la définition des structures clathrates "vides", de façon analogue à toute phase de glace (phases aux propriétés thermodynamiques distinctes) ;

la prise en compte de l’effet des espèces hôtes sur la stabilité des structures clathrates, cet effet étant compris comme une diminution de l’activité de l’eau formant le squelette hydraté de la même façon qu’une espèce en solution parti-cipe à la diminution de l’activité de l’eau dans la phase aqueuse ;

la prise en compte de la solubilité non nulle des espèces hôtes dans la solution aqueuse en équilibre avec les structures clathrates, l’effet de ces espèces (dimi-nution de l’activité de l’eau dans la solution) étant comparable sur les équilibres liquide − clathrate que sur les équilibres liquide − glace.

L’implémentation des phases clathrates dans le modèle de Choukroun et Grasset a été effectuée selon cette démarche. De façon analogue aux phases de glace dans

É

ENTR E : domaine P-T à explorer

MAIN input.dat É ENTR E : expressions de S, Cp, V parameters.in CALCDMU ROMBCP,ROMBCPT,ROMBVV TRAPZ,POLINT CALCV,CALCCP faux NOUVELLES FONCTIONS Itéraion en T à P fixe Intégrales du Δµ Paramètres affectant l’acivité de H2O Acivité de H2O Δµ de la réacion Δµ = 0 INIT_PARAM SORTIE : P-T saisfaisant Δµ = 0 É : choix des phases ENTR E

Iniialisaion des paramètres

Figure 3.3 – Modifications générales apportées au modèle thermodynamique. L’implémentation des clathrates nécessite la définition de nouvelles structures cristallines (parameters.in) et la prise en compte de l’effet des gaz sur la stabilité des nouvelles structures et sur le comportement de la solution aqueuse (nouvelles fonctions, détail en figure 3.4). Le schéma exploratoire a été modifié en réponse à la topologie des courbes de dissociation des clathrates aux pressions explorées.

CALCDMU ROMBCP,ROMBCPT,ROMBVV TRAPZ,POLINT CALCV,CALCCP GAS SALTS CLATHRATES Intégrales du Δµ

Fugacités des gaz

Solubilités des gaz

Approche Pitzer

Remplissage des clathrates

Acivité de H2O

Δµ de la réacion

Figure 3.4 –Détail de l’implémentation des gaz (calcul des fugacités et modèle de Henry), phases clathrates (modèle de van der Waals et Platteeuw) et sels (modèle de Pitzer) dans le modèle thermodynamique (détail de la figure 3.3). L’implémentation des sels, non effective à ce jour, est présentée ici à titre d’illustration.

la version originale du programme, les nouvelles structures clathrates sont définies dans le fichier de paramètres interrogé par le programme principal (modification de parameters.in, figure 3.3). Les déviations des activités de H2O dans la structure clathrate (en présence de CO2 piégé) et dans la solution (en présence de CO2dissous) doivent être prises en compte dans le calcul du ∆µ de la réaction à la fin des opérations de la routine CALCDMU ; le calcul de ces déviations a donc lieu en amont à la suite des fonctions de calcul dans le système unaire (ajout de nouvelles fonctions, figure 3.3). Plus en détail, les calculs de la stabilité des clathrates et de la solubilité des gaz font appel à la fugacité des espèces volatiles concernées. Le calcul de cette

fugacité est donc la première des nouvelles opérations effectuées, en préambule des deux calculs qu’elle régit (figure 3.4). L’implémentation prochaine des sels affectant le potentiel chimique de H2O dans la solution répondra à la même logique et sera donc localisée parmi ces nouvelles fonctions (figure 3.4). La présence simultanée de plusieurs espèces en solution affecte la solubilité de chacune d’entre elles. Les approches empiriques adoptées par Bakker et al. (1996) permettent une prise en compte directe de ces effets. Pour une approche plus fine, un processus itératif pourra être mis en place entre les différentes fonctions calculant la solubilité des espèces présentes dans le système.

La topologie de la courbe de dissociation du clathrate sI de CO2 a également imposé une légère modification du schéma exploratoire en pression et température du programme. En effet, la version originale du modèle explorait les intervalles définis par l’utilisateur selon un maillage en température et un sous-maillage en pression. Le modèle cherchant une solution unique, ce parcours n’était pas adapté aux équilibres présentant plusieurs "pressions solutions" à une température donnée. Dans la version originale du programme, cette limitation n’affectait que le calcul de l’équilibre métastable entre le liquide et la glace III, aucune autre phase ne présentant d’inflexion selon un parcours en pression. Pour répondre à ce problème, la hiérarchie des parcours en pression et température a été inversée (modification des itérations, figure 3.3). Cette approche offre une réponse adaptée au problème puisque les phases d’intérêt pour le développement prochain du modèle ne présentent qu’une unique "température solution" dans les gammes de pressions et températures considérées. Cette réponse simple permet de contourner le problème rencontré sans alourdir la charge de calcul comme l’aurait fait la recherche de solutions multiples.

Un futur développement du modèle pourrait consister en l’implémentation d’autres phases hydratées n’existant pas dans le système unaire (e.g. la famille des hydrates de magnésium) ou de phases anhydres (e.g. glaces d’autres éléments volatils, sels anhydres, carbonates...). Les équilibres impliquant de telles phases, cependant, ne pourraient plus être décrits par un simple calcul du potentiel chimique de H2O dans les différentes phases du système. Afin de permettre au modèle de conserver une approche prédictive basée exclusivement sur la minimisation de l’enthalpie libre ou sur l’égalisation des potentiels chimiques (et non sur des descriptions empiriques de paramètres tels que la solubilité), il serait alors nécessaire de prendre en compte la contribution de chaque constituant à l’enthalpie libre du système (relation de Gibbs-Duhem, éq. 3.8). Le modèle FREZCHEM de Marion (Marion et Kargel, 2008) est basé sur cette approche et calcule pour une quantité de constituants en entrée la quantité de chaque phase présente à l’équilibre à des conditions de pression et température données. Cette approche nécessiterait de connaître les paramètres de volume et capacité thermique de toutes les espèces fluides, solides et ioniques envi-sagées ainsi que les paramètres d’interaction des espèces ioniques dans la solution. Bien que d’importantes bases de données soient disponibles pour contraindre ces paramètres à relativement basse pression (la version 9 de FREZCHEM reproduit le comportement de seize composants dans 58 phases jusqu’à 100 MPa (Marion et. al, 2010)), l’implémentation de ces phases aux conditions de pression du modèle sera confrontée au manque de données au-delà de quelques centaines de MPa.