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2.1.1) Développement et morphogenèse hépatique

Les deux types cellulaires principaux du foie, hépatocytes et cholangiocytes, proviennent de l’endoderme, feuillet interne de l’embryon, formé à E7.5 chez la souris et à partir de la 3ème semaine de grossesse chez l’être humain (Tableau 3). Cette structure forme le tube intestinal primitif le long de l’axe antéro-postérieur dans l’embryon murin et donne ensuite différentes structures telles que le foie, le pancréas ventral, l’estomac, les poumons et la thyroïde (Tremblay et Zaret 2005). Le processus de germination hépatique est entamé à E9 chez la souris et à 23 jours de grossesse chez l’être humain. Le tube intestinal primitif s’épaissit alors pour former le diverticulum hépatique en évoluant d’une monocouche de cellules endodermique à un ensemble de couches de cellules pseudo-stratifiées appelées les hépatoblastes. Celles-ci migrent afin de former le bourgeon hépatique. Sa partie antérieure formera le foie et le système biliaire intra hépatique, tandis que la partie postérieure formera la vésicule biliaire et le système biliaire extra-hépatique (Gordillo, Evans, et Gouon-Evans 2015).

Suite à leur migration, les hépatoblastes commencent à proliférer et à se différencier en hépatocytes et cholangiocytes. Ces étapes aboutissent à la formation du bourgeon hépatique à E10 chez la souris et durant la 5ème semaine de grossesse chez l’homme (Figure 20). La formation du bourgeon se fait conjointement au développement des cellules progénitrices hématopoïétique. Dans le même temps, une monocouche de cellules mésothéliales immatures apparaît à E10.5 et tapisse les lobes hépatiques murins en cours de développement (Gordillo, Evans, et Gouon-Evans 2015). A partir d’E12.5 chez la souris et 50 jours de grossesse chez l’être humain, le foie se divise en lobes hépatiques distincts jusqu’à atteindre une architecture hépatique « mâture » à E14.5 chez la souris et à 56 jours de grossesse chez l’être humain. La différenciation des hépatoblastes commence environ à E13.5 chez la souris et à 56-58 jours de grossesse chez l’être humain (Tableau 3). Chez l’être humain, les précurseurs des cholangiocytes sont formés au niveau de la plaque ductale à partir d’hépatoblastes entourant les veines portes tandis que les hépatoblastes qui sont éloignés de la zone de la veine porte se différencient en hépatocytes (Ruebner et al. 1990). Les tubules biliaires se forment à partir des cholangiocytes, à E17.5 chez la souris et à environ 14 semaines de grossesse chez l’être humain, par bourgeonnement depuis la plaque ductale, qui

Figure 21. Maturation hépatique et biliaire chez la souris et l’humain

La différenciation des hépatoblastes mène à la production de cholangiocytes, formant l’épithélium biliaire, et d’hépatocytes qui vont maturer au fur et à mesure du développement intra-utérin. Les tubules biliaires se forment à partir des cholangyiocytes, par bourgeonnement depuis la plaque ductale.

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régresse petit à petit. La différenciation des cholangiocytes se termine en période néonatale chez la souris et à environ 30 semaines de grossesse chez l’être humain, bien que quelques cellules de la plaque ductale puissent persister chez les nouveau-nés, les enfants et même jusqu’à l’âge adulte (Figure 21)(Gordillo, Evans, et Gouon-Evans 2015).

Au cours des dernières semaines de développement chez l’être humain, l’inhibition des enzymes glycolytiques, couplée à l’augmentation de la production d’enzymes néoglucogéniques, reflète la maturation du foie. Sa maturation se fait par l’installation définitive des systèmes d’irrigation sanguine et biliaire et continue après la naissance, tout en conservant l’architecture anatomique acquise au cours du développement fœtal. Cette maturation est accompagnée d’une diminution de la fluidité des membranes des hépatocytes, due à une diminution du ratio protéines/lipides et une augmentation de la proportion de cholestérol membranaire (Gordillo, Evans, et Gouon-Evans 2015).

2.1.2) Régulation du développement hépatique

Les mouvements morphogénétiques exposent les cellules à différents processus de signalisation au cours du développement hépatique. Les voies de signalisation principalement empruntées lors de l’hépatogenèse comprennent celles contrôlées par Tgfβ (transforming

growth factor β), Wnt, Fgf (fibroblast growth factor), Notch et les ligands de Bmp (bone morphogenetic protein). Cependant, la manière dont les signalisations Bmp, Fgf et Wnt

interagissent est incertaine. La signalisation liée à Wnt est essentielle à la spécification hépatique, néanmoins, aucune étude n’a pu identifier clairement de fonction à la voie Wnt durant la spécification hépatique chez la souris (Gordillo, Evans, et Gouon-Evans 2015). L’expansion des hépatoblastes est régulée par leurs interactions avec les cellules endothéliales et mésenchymales. La différentiation des hépatoblastes en hépatocytes et cellules biliaires s’effectue dans les environs du mésenchyme portal, de manière régulée par Tgfβ, Notch, Wnt, Bmp et Fgf. Différents mécanismes sont impliqués, en particulier, un gradient de Tgfβ est établi entre la zone portale et le parenchyme et permet la différentiation des hépatoblastes (Clotman 2005). Au cours de l’hépatogenèse, les cholangiocytes génèrent des facteurs de croissance de l’endothélium vasculaire et les hépatoblastes de l’angiopoïétine I, participant ainsi conjointement au développement du système vasculaire hépatique. Le déroulement de cette étape dépend des espèces, chez la souris les canaux biliaires se développent avant les artères hépatiques tandis que c’est le contraire chez l’être humain (Fabris et al. 2007). Enfin,

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la maturation des hépatocytes et la croissance hépatique est promue par l’action de facteurs tels que les glucocorticoïdes, l’Hgf et Wnt (Gordillo, Evans, et Gouon-Evans 2015).

De nombreux facteurs de transcription et régulateurs épigénétiques sont impliqués dans le développement hépatique. Les acteurs majoritaires appartiennent aux familles de protéines de liaison à l’ADN FoxA (forkhead box A) et GatA (Gordillo, Evans, et Gouon-Evans 2015). Une étude réalisée par immunoprécipitation de la chromatine a permis d’identifier un groupe de facteurs de transcription parmi lesquels se trouvent Foxa2 et plusieurs facteurs nucléaire hépatiques (Kyrmizi 2006). La stabilité et la flexibilité de ces facteurs de transcription sont contrôlées entre autres par le placement différentiel de marques épigénétiques. Les hépatoblastes progéniteurs vont se différencier en fonction de la présence de marques au niveau d’éléments régulateurs du développement hépatique et pancréatique (C.-R. Xu et al. 2011). Par exemple, l’acétylation de H3K9/K14 (généralement associées à des régions transcriptionnellement actives) est enrichie dans les régions en amont des éléments régulateurs du gène Pdx1. De plus, H3K27me3 (généralement associée à des régions transcriptionnellement inactives) ainsi que la méthyl transférase Ezh2 sont aussi associées préférentiellement à Pdx1. Ces caractéristiques font que Pdx1 peut être activé ou réprimé en tant que progéniteur endodermique et donner ainsi soit une identité pancréatique, soit une identité hépatique aux hépatoblastes. La programmation à devenir une cellule hépatique nécessite de plus une acétylation des histones de manière dépendante à l’acétyle-transférase p300 (C.-R. Xu et al. 2011). L’action d’Ezh2 est nécessaire plus tardivement, pour la croissance et la maturation des cellules hépatiques embryonnaires, son inhibition à E8.5 entraînant une diminution significative du tissus hépatique, tandis que son inhibition à E13.5 inhibe partiellement la différentiation en hépatocytes (Koike et al. 2014).

Le développement et la morphogenèse hépatique sont donc des processus complexes, extrêmement contrôlés et régulés. Plusieurs voies de signalisation sont impliquées dans la formation d’un foie mâture et fonctionnel, celles sous le contrôle de Tgfβ étant prédominantes tout au long du développement. La signalisation entre les différents types cellulaire est nécessaire à leur spécialisation et à l’établissement de l’architecture hépatique. Enfin, l’action de facteurs de transcription associés à des modifications post-traductionnelles des histones confèrent une flexibilité et une adaptabilité aux cellules au cours de leur différenciation et spécialisation.

Figure 22. Etapes aboutissant à l’établissement définitif des CSH au cours du développement embryonnaire

Les barres représentent l’âge auquel chaque site hématopoïétique est actif chez la souris et l’humain.

AGM – aorte-gonade-mésonéphros

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