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CHAPITRE 4 Projet Pluie – Création théâtrale incluant un interprète musical

4.1 Description et déroulement

4.1.2 Déroulement de la séquence

Pour dégager la structure, je suis retournée au texte de la réécriture faite de Parle-moi Schéma 8 Schéma du dispositif sonore de Projet Pluie

synthétisée sous forme de schémas et de notes82. Une structure tripartite a rapidement été

dégagée, au niveau spatio-temporel : en effet, dans une première partie, la Femme effectue un certain nombre d’actions dans le « temps présent », avant de basculer dans un « temps futur » fictionnel, utopique, dans lequel elle coule des jours heureux et finit sa vie dans un hôtel du bord de mer, avant de retourner brutalement au « temps présent », à la routine. Ces trois moments réalité-rêve-réalité sont déclenchés par l’énonciation d’une phrase pivot : « Je veux partir ». Formulation éloquente, dans la mesure où malgré son désir d’évasion, elle ne bougera pas de l’espace clos formé par l’appartement. On peut imaginer que ce schéma se répète au quotidien pour le personnage, comme une boucle insatiable. Ainsi, tout comme pour la séquence présentée au colloque de la SQET83, j’ai retenu la forme cyclique,

de boucle, qui me semblait la plus adaptée à la création. En effet, au début, la création de l’univers sonore par le Musicien au moyen de la station de loop donnait le ton que nous voulions, et qui transparaissait dans le texte : l’idée d’une pluie en continu, qui permet d’accentuer la solitude du personnage principal.

L’écoulement du temps pendant ces trois périodes est également quelque chose que j’ai retenu lors du réexamen du texte : en effet, dans les périodes 1 et 3, le « temps réel » reste figé, il n’a pas avancé si ce n’est de quelques minutes, dans la période 2, celui du « temps fictif », on avance, la Femme vieillit (ses cheveux deviennent « gris » puis « blancs », et après cela elle « disparaît »). Ainsi, cet autre aspect, entre immobilisme et avancement temporel, me semblait intéressant à explorer au sein du laboratoire final et pouvait constituer une bonne manière d’utiliser le musicien comme vecteur de cette temporalité. De plus, la réécriture de ce texte sous forme de monologue de la Femme donnait l’idée d’un

stream of consciousness84, dénomination métaphorique en accord avec le motif de la pluie

tombant de manière discontinue.

82 Voir Annexe C 83 Voir Chapitre 3

84 Le « Courant de conscience » ou « flux de conscience » en français, est, selon le site internet de l’Office

Québécois de la Langue Française une « technique littéraire visant à représenter le déroulement ininterrompu des pensées d'un personnage. » Souvent utilisée par des modernistes comme William Faulkner ou Virginia Woolf, le terme de « stream » renvoie au champ lexical de la source, de la rivière, comme si la pensée du personnage s’écoulait de manière ininterrompue et fluide, tout comme le flot de l’eau. (Site internet de l’Office Québécois de la Langue Française, Fiche terminologique « Courant de conscience » [en ligne]. http://gdt.oqlf.gouv.qc.ca/ficheOqlf.aspx?Id_Fiche=26541389 [Consulté le 1er décembre 2019].

Ainsi, Projet Pluie serait donc lent comme l’eau de la pluie qui tombe, et de structure cyclique, avec différentes parties coïncidant avec des changements d’états, caractérisés par des moments pivots (ici, la sonnerie des minuteurs ou du four).

Résumé de Projet Pluie85

On peut diviser Projet Pluie en cinq parties : introduction, partie 1, partie 2, partie 3 et conclusion. Comme évoqué précédemment, la création adopte une forme de boucle, dans une dimension de symétrie, mais pas de symétrie exacte (cela est particulièrement visible dans la partie 3). Le système de délimitation des parties est géré par des « points forts » sonores décidés et provoqués la majorité du temps par le musicien, et qui provoquent des retournements de situation ou des mises en action.

Introduction

La femme dort, pendant que le Musicien bâtit l’univers sonore. Il débarrasse les restes d’un précédent repas (une meringue imbibée de vin rouge) et installe le nouveau. La Femme, pendant ce temps, s’est réveillée et reste quelques instants perdue dans ses pensées. Elle finit par se lever pour aller rejoindre le Musicien à la table.

Partie 1

Le repas : la femme mange un déjeuner singulier, ses gestes comme « commandés », en miroir, par rapport au Musicien. Elle se met plusieurs fois en danger, notamment en passant le couteau contre sa gorge, et en buvant un grand verre d’alcool sans respirer. Le Musicien, en actionnant le minuteur, met fin au supplice.

Partie 2

La rêverie : le Musicien passe « de l’autre côté du miroir » en passant par la penderie. Il joue de la scie musicale. La Femme enfile un beau manteau et s’amuse à se déguiser avec une perruque et des bijoux. Après avoir nettoyé le miroir, elle s’assoit et commence à se maquiller (elle reprend en fait les gestes effectués précédemment avec le couteau, mais cette fois-ci avec le rouge à lèvres). La radio dans le four commence à diffuser des sons

Partie 3

Le dessert : la Femme sort la radio du four et la laisse tomber sur la table, avant de se rasseoir. Le Musicien repasse du même côté qu’elle et débarrasse, pour installer un nouveau repas. Ils sont à nouveau assis face à face. La Femme mange, et au bout d’un moment se lève brusquement, le couteau à la main, comme si elle avait aperçu quelqu’un ou quelque chose derrière la fenêtre. Elle se rassoit, et boit sans respirer le contenu de son assiette, jusqu’à ce que le Musicien, à nouveau, la fasse cesser à nouveau en actionnant le minuteur.

Conclusion

La Femme s’est comme réveillée : elle regarde autour d’elle, constate les dégâts sur la table. Elle va se recoucher, après avoir placé la perruque et les bijoux à sa place sur la chaise. Elle se rendort.

4.2 Fonctions, postures et stratégies d’intégration de l’interprète