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Le harcèlement entre élèves peut être déni comme l'utilisation d'un comportement agressif répété et systématique contre certains élèves par d'autres dans un contexte rela-tionnel de déséquilibre de pouvoir entre les harceleurs et leurs victimes (García & Margallo, 2014), mais parvenir à trouver un consensus sur la dénition du harcèlement est probable-ment l'aspect le plus dicile des programmes de prévention du harcèleprobable-ment (Espelage &

Swearer, 2003). De même, Piguet et Moody (2013) arment que la question de la

déni-tion du harcèlement fait encore débat actuellement. Et, pour Hamburger, Basile et Vivolo (2011), la manière dont les expériences de harcèlement sont vécues et dénies varie beau-coup. Ainsi, après plus de quarante ans de recherche sur ce phénomène, il n'existe toujours pas de dénition partagée de manière universelle, même s'il y a un certain consensus dans la recherche occidentale (Farrington, 1993 ; Smith, 2014).

Les critères utilisés dans la majeure partie de la littérature de recherche apparaissent dans la dénition suivante :

In my denition, a student is being bullied or victimized when he or she is exposed, repeatedly and over time, to negative actions on the part of one or more other students. Negative actions can include physical contact, words, making faces or dirty gestures, and intentional exclusion from a group. An additional criterion of bullying is an imbalance in strength (an asymmetric power relationship) : The student who is exposed to the negative actions has diculty defending himself or herself (Olweus, 1995, p.197).

Pour Bauman et Hurley (2005), également, les chercheurs ont atteint un consensus sur la dénition du harcèlement : il y a trois éléments qui le distinguent des autres formes de conits ou d'agression. Premièrement, le harceleur inige intentionnellement un préjudice physique ou verbal à la victime. Deuxièmement, les actions portées à l'encontre de la victime sont répétées. Troisièmement, il y un déséquilibre de pouvoir entre la victime et l'auteur du harcèlement. Pour résumer, le harcèlement est une sous-catégorie du compor-tement agressif (Houndoumadi & Pateraki, 2001 ; Salmivalli, 2010) qui se caractérise par une intention hostile, un déséquilibre de pouvoir et une répétition (Burger et al., 2015).

Smith et Brain (2000) décrivent le déséquilibre de pouvoir comme l'incapacité de la victime à se défendre facilement toute seule pour une ou plusieurs raisons. Selon ces chercheurs, les auteurs du harcèlement peuvent être plus nombreux, plus grands ou physi-quement plus forts ou encore psychologiphysi-quement plus résilients que la victime. De même, ils peuvent être plus vieux, mieux adaptés socialement, avoir de meilleures compétences verbales (Bauman & Hurley, 2005) ou encore être plus populaires (Arseneault, Bowes &

Shakoor, 2010).

Néanmoins, même si le déséquilibre de pouvoir et la répétition sont des critères large-ment utilisés, ils ne sont pas universellelarge-ment acceptés (Smith & Brain, 2000). D'ailleurs, toutes les mesures utilisées pour évaluer les comportements de harcèlement n'incluent pas tous les critères (Hamburger et al., 2011) et ceux-ci ne sont pas toujours évidents à dénir.

Ainsi, Finkelhor, Turner et Hamby (2012), qui mettent en évidence la diculté à dénir le déséquilibre de pouvoir, soutiennent que certains appellent simplement harcèlement des épisodes d'agression répétée. La question de l'intention peut également être probléma-tique, tant sur le plan théorique que sur le plan praprobléma-tique, et, comme il est souvent dicile de distinguer "entre ce qui est accidentel et ce qui est intentionnel [...] on aura tendance

(Boivin, Ouellet-Morin & Petitclerc, 2006, p.383). Finalement, la dénition scientique du harcèlement est complexe, parce qu'elle ne fait pas référence à un acte isolé, mais à une situation relationnelle considérée dans le temps (Smorti et al., 2003).

2.3.1 Diérentes formes de harcèlement

Le harcèlement peut autant être physique que psychologique (Bosworth, Espelage

& Simon, 1999). Se produisant le plus souvent sans provocation de la part de la victime (Salmivalli, Lagerspetz, Björkqvist, Österman & Kaukiainen, 1996), il comprend plusieurs formes d'agression. Rivers et Smith (1994) distinguent les formes physiques, verbales et indirectes. Quant à Cook, Williams, Guerra, Kim et Sadek (2010), ils citent l'agression physique, l'agression verbale, l'agression relationnelle et la cyber-agression. De leur côté, Evans, Fraser et Cotter (2014) écrivent que le harcèlement entre élèves comprend à la fois des comportements agressifs directs (par exemple : l'intimidation physique, les menaces verbales) et des comportements agressifs indirects (par exemple : l'exclusion, le rejet).

Selon ces auteurs, quatre formes de harcèlement peuvent typiquement être distinguées : le harcèlement physique, le harcèlement verbal, le harcèlement relationnel et le dommage à la propriété. Dans une étude, Piguet et Moody (2013) distinguent le harcèlement physique (ex. coups, bagarres, pincements, tirer les cheveux, bousculades, jets d'objets), le harcè-lement verbal (ex. surnoms méchants, moqueries, rejets, insultes, racisme, menaces), le harcèlement sexuel (ex. voyeurisme, retirer les habits de force, baiser forcé), les violences d'appropriation (ex. vols d'objets personnels, vols de goûter, vols d'argent, vols du maté-riel scolaire, racket) et le cyberharcèlement (ex. insultes, moqueries, menaces sur internet et sur le téléphone portable, prise de photographie ou de lm). Les formes de harcèlement utilisées dépendent notamment du genre et de l'âge des élèves.

Selon Björkqvist, Lagerspetz et Kaukiainen (1992), il a souvent été suggéré que les hommes sont plus agressifs que les femmes et que les types de comportement agressif achés dièrent. Dans ce sens, Olweus (1994) écrit que le harcèlement à l'aide de moyens physiques est plus commun chez les garçons, alors que les lles utilisent plus souvent des formes subtiles et indirectes de harcèlement telles que la diamation, la propagation de rumeurs et la manipulation des relations d'amitié (par exemple : priver une lle de sa

"meilleure amie"). De même, del Barrio, Martín, Montero, Gutiérrez, Barrios et de Dios (2008) notent que les lles sont plus impliquées dans la propagation de rumeurs néga-tives. Piguet et Moody (2013) observent les mêmes tendances. Leurs résultats suggèrent notamment que les garçons sont plus souvent auteurs de harcèlement physique, alors que les lles utilisent plutôt des stratégies d'ostracisme ou d'agressions indirectes, telles que la diusion de rumeurs et l'exclusion.

Wolke et al. (2001) trouvent également que les garçons sont plus impliqués dans le harcèlement direct ou physique que les lles. Cette diérence est signicative à l'école primaire et encore plus notable à l'école secondaire (Rivers & Smith, 1994). La préférence

pour les formes physiques de harcèlement des garçons pourraient reéter le fait qu'ils ont en moyenne une plus grande force physique (Rivers & Smith, 1994).

Il faut noter que les diérences de genre dépendent également de l'âge des enfants.

En eet, Björkqvist et al. (1992) mettent en évidence les résultats suivants lorsqu'ils comparent trois cohortes de 8, 11 et 15 ans :

The results reveal typical age trends in the development of aggressive behaviour.

Physical aggression seems to be more general among the boys during all age groups.

Indirect aggression, however, appears more frequently among the girls but is not fully developed yet at the age of 8. At ages 11 and 15, it is clearly more prevalent among girls. Direct verbal aggression (as a summed variable) appeared equally frequently among the genders at the age 15 [...] the boys of some cohorts displayed certain kinds of direct verbal aggression more frequently than did the girls. Again, withdrawal seems to be a kind of behavior more typical for girls of all age groups. (p.126)

Avec l'âge, le harcèlement entre élèves tend également à devenir plus complexe et caché (Smith, 2014). Dans le même sens, Catheline (2009) écrit que les recherches internatio-nales sur le harcèlement mettent en évidence qu'il est plutôt physique chez les plus jeunes, alors que les insultes et les humiliations sont plus fréquentes à l'adolescence. Cette trajec-toire développementale dans les formes de harcèlement utilisées peut être expliquée par l'accroissement des compétences verbales (Björkqvist et al., 1992) et sociales (Björkqvist et al., 1992 ; Smith, Madsen & Moody, 1999) des enfants qui leur permet d'ajouter, dans un premier temps, l'agression verbale, puis dans un second temps, l'agression indirecte, à leurs stratégies agressives (Björkqvist et al., 1992). En eet, l'agression indirecte dé-pend de la maturation et demande un certain niveau de compétences verbales et sociales (Björkqvist et al., 1992).