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contextes urbains

4.1 Démarche expérimentale

Dans l’objectif de comprendre quel est le lien entre les structures et dynamiques des transports collectifs artisanaux, les stratégies individuelles et la structure urbaine, nous avons développé une démarche expérimentale basée sur plusieurs modèles (Figure 4.1).

Dans un premier temps, nous avons défini les caractéristiques des transports artisanaux qui reposent sur la gestion des itinéraires et sur la gestion des fréquences (voir Chapitres 2 et 3). Une fois ces deux modes de fonctionnement analysés, nous proposons de les modéliser en utilisant des systèmes multi-agents. Deux modèles ont ainsi été élaborés : LimaBus et BrazzaBus. Grâce à ces deux modèles, nous pouvons juger de la pertinence de notre modé- lisation des stratégies individuelles. Ils nous amènent à observer les structures émergentes et leurs caractéristiques dans les cas particuliers de Lima et Brazzaville. Le parti pris très appliqué de ces deux modèles contraint un certain nombre de paramètres qui sont indexés sur la réalité. Ces premiers modèles sont principalement utiles pour confronter nos simulations au terrain. Ils nous permettent également de mieux comprendre le fonctionnement des stratégies des différents agents du transport artisanal. À partir de cette première série de simulation, de nouvelles hypothèses sont apparues.

Dans un second temps, nous proposons de plonger ces systèmes de transport dans des contextes urbains théoriques afin de jauger l’importance d’autres paramètres liés à la structure urbaine. Une telle démarche produit une deuxième série de modèles, plus abstraits. Ils seront présentés dans le chapitre suivant. Les contextes urbains testés à cette étape nous permettent de faire varier d’autres paramètres et de tester l’influence du contexte autant que de la stratégie des équipages de véhicules. Les résultats de ces simulations alimentent une nouvelle fois notre réflexion et conduisent à hiérarchiser les différents paramètres qui influencent les structures émergentes.

4.1.1 Nos hypothèses

Cette démarche repose sur un incessant aller-retour entre les modèles et le réel. Ainsi la modélisation s’est construite progressivement. Les hypothèses de départ ont été amendées et

de nouvelles hypothèses sont apparues au cours du processus. Notre problématique générale consiste à identifier les éléments structurants des caractéristiques émergentes des transports artisanaux. Notre première hypothèse de travail est l’influence des stratégies individuelles des différents acteurs du transport. Ainsi, nous souhaitons jauger l’influence des stratégies individuelles sur les structures et les dynamiques de la desserte dans les transports artisanaux. Nos enquêtes ont montré le caractère central des choix des équipages de véhicule dans la construction du service. Ainsi nous proposons d’éclaircir le lien entre ces stratégies et l’efficacité du système. Deux types d’efficacité sont mis en avant ici : le rendement, en termes d’usagers desservis, et la répartition spatiale, plus ou moins homogène, de la desserte3. Cette

première série de modélisation a principalement pour but de comprendre ce lien multiscalaire. Au terme de notre première série de modélisation et de simulation, il semble que le contexte urbain ait également une influence. Nous vérifierons donc cette hypothèse dans un second temps.

4.1.2 Protocole expérimental

Élaboration Tests

Modèles Appliqués

Intégration des données d’en- quête

Confrontation des résultats aux données collectées

Calibration Tests de sensibilité

Modèles Abstraits

Intégration de contextes ur-

bains théoriques Tests de sensibilité Calibration

FIGURE 4.2 – Tableau récapitulatif du protocole expérimental

Les systèmes multi-agents ont l’avantage de permettre la mise en place d’une approche ex- périmentale en sciences humaines. Dans notre cas, il s’agit de travailler sur l’auto-organisation des transports collectifs. Nous avons identifié deux types de stratégies qui sous-tendent des systèmes différents. Notre démarche est structurée autour de deux séries de modèles (Figure 4.2). Les modèles appliqués intègrent des données d’enquête et les résultats sont confrontés à nos observations de terrain. Les modèles abstraits sont mis en place par la suite pour explorer de nouvelles hypothèses.

3. Ces deux types d’efficacité correspondent aux deux variables de sortie qui permettent d’observer le comportement du système. Elles sont plus amplement présentées en partie 4.4.1

4.1.3 Quelle plateforme choisir ?

Nous utilisons la plateforme Netlogo [Wilensky, 1999] pour nos modèles. Il s’agit de la plateforme la plus utilisée aujourd’hui dans un contexte pédagogique comme scientifique [Banos et al., 2015]. Cette plateforme a l’avantage d’être accessible sans une formation poussée en informatique. Le nombre important d’utilisateurs à travers le monde facilite également la résolution rapide des problèmes techniques. Il existe d’autres plateformes telles que MAGéo, GAMA, Cormas ou Repast. Chacune de ces plateformes a des particularités qui les rendent plus adaptées à certains types de modèles [Taillandier, 2015]. Repast permet de modéliser un très grand nombre d’agents, mais les compétences en informatique nécessaires sont trop importantes pour nous [Chen et al., 2008]. Cormas est conçu pour les méthodes participatives [Le Page et al., 2012]. MAGéo passe par une implémentation graphique du modèle, ce qui la rend très accessible [Langlois et al., 2013]. GAMA est particulièrement adaptée pour intégrer des données géographiques [Taillandier et al., 2014]. Nous avons classiquement choisi Netlogo, mais nos modèles pourraient tout aussi bien être adaptés sous GAMA.

4.1.4 La démarche ODD pour présenter nos modèles

La démarche ODD4permet de présenter les modèles multi-agents de manière claire et

pédagogique [Grimm et al., 2006] [Polhill et al., 2008] [Grimm et al., 2010]. Ce protocole en trois temps dissocie les concepts utilisés et la formalisation du modèle de son implémentation. Une telle approche permet aux non-initiés du langage informatique de s’approprier le modèle et ses objectifs. D’autre part, il existe plusieurs plates-formes de modélisation multi-agents et ce langage permet de dépasser les contraintes posées par l’utilisation de l’une ou l’autre. La description de modèles par la méthode ODD a d’abord été élaborée en écologie [Grimm et al., 2006]. Elle s’appuie sur trois étapes. La "Vue d’ensemble" (overview), qui donne les objectifs généraux, est suivie de la catégorie "Concepts principaux" (design concepts) qui éclaircit les principes de fonctionnement. Les "Détails" (details) permettent d’entrer plus précisément dans le modèle et d’expliquer les choix de modélisation. Des étapes supplémentaires ont été ajoutées à cette méthode par Birgit Müller et son équipe [Müller et al., 2013] afin de mieux décrire les processus de décisions humains.

4. Acronyme de Overview, Design Concepts, Details, qui sont les trois grandes étapes du protocole de présentation des modèles.