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a) Qu’est-ce que l’absurde ?

Si à première vue définir ce qu’est l’absurde paraît relativement simple, il n’en est rien.

En effet, ce dernier se place en totale opposition, et ce de façon inhérente, à la raison et donc à la capacité à rationnaliser, à comprendre et donc à expliquer. L’absurde doit, pour être perçu et étudié, être traité comme un sentiment, comme un élément fugace qui est subi, presque comme une passion. Il se trouve dans le « seul instant, dans le présent de la sensation »14. En analysant l’absurde de cette manière, il devient possible de le définir et d’essayer, après l’avoir ressenti, de le comprendre. Le moment absurde, l’instant absurde, est un moment de sentiment, de décalage, de non communion et de rejet, mais surtout d’impuissance face à tout cela.

Qu’est-ce donc que l’absurde comme état de fait, comme donnée originelle ? Rien de moins que le rapport de l’homme au monde. L’absurdité première manifeste avant tout un divorce : le divorce entre les aspirations de l’homme vers l’unité et le dualisme insurmontable de l’esprit et de la nature, entre l’élan de l’homme vers l’éternel et le caractère fini de son existence,

13 Notons qu’une partie des analyses (en ce qui concerne la linguistique) qui seront faites dans cette partie le sera sur la base d’œuvres critiques de spécialistes et non nécessairement à partir de citations directes bien que certaines soit naturellement associées. La raison de cette position est que ces analyses sont dans le cas d’Albert Camus déjà parfaitement expliquées dans les œuvres citées et demandent pour être développées dans le cas de Kôbô Abe une grande maîtrise du japonais.

14 PROUTEAU, Anne, Albert Camus et le présent impérissable, coll. « Universités », L'Harmattan, Paris, 2008, p.

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entre le « souci » qui est son essence même et la vanité de ses efforts. La mort, le pluralisme irréductible des vérités et des êtres, l’intelligibilité du réel, le hasard, voilà les pôles de l’absurde.15

L’absurde est une constante dualité et peut être incarné dans un paysage métaphysique en soi où se concentrent les angoisses de l’homme et où, dans son infinie impuissance, il se voit contraint de prendre conscience de ses peurs et par la même occasion de cette impuissance qui l’accable. L’absurde peut, sous forme de lieu, représenter cette scission universelle et en ce lieu, le sujet est incapable à la fois de fuir et d’affronter sur le moment son sentiment absurde.

Lorsque Karl Jaspers, révélant l’impossibilité de constituer le monde en unité, s’écrie : « Cette limitation me conduit à moi-même, là où je ne me retire plus derrière un point de vue objectif que je ne fais que représenter, là où ni moi-même ni l’existence d’autrui ne peut plus devenir objet pour moi », il évoque après bien d’autres ces lieux déserts et sans eau où la pensée arrive à ses confins. Après bien d’autres, oui sans doute, mais combien pressés d’en sortir ! A ce dernier tournant où la pensée vacille, beaucoup d’hommes sont arrivés et parmi les plus humbles. Ceux-là abdiquaient alors ce qu’ils avaient de plus cher qui était leur vie. D’autres, princes parmi l’esprit, ont abdiqué aussi, mais c’est au suicide de leur pensée, dans sa révolte la plus pure, qu’ils ont procédé. Le véritable effort est de s’y tenir au contraire, autant que cela est possible et d’examiner de près la végétation baroque de ces contrées éloignées. La ténacité et la clairvoyance sont des spectateurs privilégiés pour ce jeu inhumain où l’absurde, l’espoir et la mort échangent leurs répliques.16

Cependant, l’absurde peut aussi être vu autrement, comme une connexion entre ce monde philosophique, ce contenant métaphysique dont nous venons de parler et dont il peut être l’origine, et le sujet. De cette manière il devient un lien immatériel, intangible et le définir ou le voir comme un sentiment permet de bien saisir la notion de connexion instantanée.

L’absurde n’est pas un concept ; […] l’absurde marque la nécessité et en même temps l’impossibilité d’un mouvement de retournement, de retour. L’absurde n’est ni dans l’homme ni dans le

15 SARTRE, Jean-Paul, Explication de l’Étranger, Librairie du Palimugre, Paris, 1946, p. 6-7

16 CAMUS, Albert, Le Mythe de Sisyphe, coll. « Folio essais », Gallimard, Paris, 2019, [1942], p. 24

monde, ni dans le visage ni dans le paysage, il est dans leur défi réciproque, dans le climat qui les baigne et les façonne tous deux.17

Mais au contraire, dans un univers soudain privé d’illusions et de lumières, l’homme se sent un étranger. Cet exil est sans recours puisqu’il est privé des souvenirs d’une patrie perdue ou de l’espoir d’une terre promise. Ce divorce entre l’homme de sa vie, l’acteur et son décor, c’est proprement le sentiment de l’absurdité.18

L’absurde peut être considéré de cette manière : Une connexion, reliant un monde dans lequel il s’exprime et un sujet subissant plongé malgré lui au cœur de ce monde et dans l’incapacité de s’en échapper ni de se révolter.

L’absurde est essentiellement un divorce. Il n’est ni dans l’un ni dans l’autre des éléments comparés. Il naît de leur confrontation.

Sur le plan de l’intelligence, je puis donc dire que l’absurde n’est pas dans l’homme (si une pareille métaphore pouvait avoir un sens), ni dans le monde, mais dans leur présence commune.19

Si l’on voit l’absurde de cette manière, comme « un divorce », chercher à comprendre quelle est la place du désert dans la philosophie qui l’entoure devient un moyen détourné de chercher à mieux le comprendre lui. En effet, si l’absurde n’existe pas indépendamment du paysage de l’œuvre, de l’environnement de cette dernière, qu’il s’exprime à travers eux ou est une forme de lien entre ces derniers et le sujet, alors le désert devient en lui-même un élément de premier plan.

Ainsi, l’absurde est un sentiment, un moment, un lien et de ce fait, est comme nous l’avons dit quelque chose dont on ne peut se défaire. Une fois que le sujet prend conscience de l’absurde, que ce dernier est confronté à ses faiblesses, il se retrouve bloqué, seul face à la vacuité de son existence, sans une once d’espoir à laquelle s’accrocher. Pour incarner le sujet absurde et à travers lui donner forme au sentiment, de nombreux auteurs (dont Albert Camus et le philosophe japonais Shûzô Kuki, sur lequel nous reviendrons) ont choisi la figure mythologique de Sisyphe : « Les dieux avaient condamné Sisyphe à rouler sans cesse un rocher jusqu’au sommet d’une montagne d’où la pierre retombait par son propre poids. Ils avaient

17 MAILHOT, Laurent, Op. cit., p. 45

18 CAMUS, Albert, Le Mythe de Sisyphe, Op. cit., p. 20

19 Idem, p. 50

pensé avec quelque raison qu’il n’est pas de punition plus terrible que le travail inutile et sans espoir »20. Cette figure face à un travail sans fin et sans but représente pour certains philosophes de l’absurde le sujet conscient de l’absurdité tout en permettant de matérialiser à travers une action le sentiment qui accable ce même sujet.

Mais alors pourquoi ? Pourquoi chercher à exprimer ce sentiment ? Pourquoi chercher à le matérialiser ? Pour Albert Camus, il s’agit à la fois de développer sa propre pensée et de la confronter au monde pour montrer et prouver sa véracité et ainsi, à travers elle, amener une nouvelle compréhension, ou non compréhension, de ce dernier. Pour Kôbô Abe, il s’agit d’une réflexion sur le monde afin de proposer un nouveau modèle de société et donc de se détacher de cet absurde en trouvant en lui un sens (le caractère antithétique de cette affirmation étant l’une des particularités de l’auteur). N’oublions pas non plus que si le premier écrit pendant la deuxième guerre mondiale et dénonce le 8 août 1945 dans l’éditorial de son journal Combat qu’avec Hiroshima, « la civilisation mécanique vient de parvenir à son dernier degré de sauvagerie »21, le second, écrit vingt ans plus tard, et donne son avis en tant que victime indirecte de cette même attaque.

Abe Kôbô est un écrivain représentatif de ce qu’un célèbre critique littéraire japonais Katô Shûichi appelle « la littérature de la société en transformation » et selon lequel, pour la génération à laquelle appartient Kôbô, la guerre a été soit une source d’inspiration inépuisable, soit un cataclysme qui a jeté l’homme dans un considérable désarroi et l’a placé devant la nécessité dramatique de construire une société nouvelle.22

20 MAILHOT, Laurent, Op. cit., p. 163

21 CAMUS, Albert, Editorial de Combat, in Combat, 1945, p. 1

22 ROSSET, Suzanne, « Abe Kôbô et la littérature japonaise moderne », Cahiers Renaud Barrault, n°102, Paris, Gallimard, p. 29

Fig. 2, 29ème minute du film La Femme des sables

Fig. 9, 47ème minute du film La Tortue rouge

A ce propos, il est important de mentionner que le film insiste particulièrement sur le traumatisme d’Hiroshima. En effet, si dans le roman, l’heure est au début de l’œuvre plusieurs fois donnée : « Les aiguilles de sa montre marquaient onze heures seize. »23, « Sans aucun doute, deux heures dix ! »24 et que sa montre finit par s’arrêter, montrant par-là que le désert est hors du temps : « Sa montre s’était arrêtée, il ne savait pas quelle heure il était. »25, dans le film, la caméra insiste grâce à un gros plan sur l’horloge miniature sur les huit heures quinze affichées par les aiguilles (Voir Fig. 2). Cette heure, c’est celle du bombardement d’Hiroshima, c’est celle du largage de la bombe qui assèchera la terre et en fera un lieu de mort.

Notons aussi que chez les deux auteurs, le sujet est seul, seul face au monde et face à lui-même. Par-là, il faut entendre le fait qu’il n’y a pas de Dieu pour le guider ou pour le protéger.

Cependant, chez Albert Camus, l’absurde a une relation étroite avec le christianisme et sa tradition, et ce jusqu’à la fin du XXème siècle et ne pas inclure directement Dieu dans l’œuvre ne signifie pas l’en exclure totalement. A l’inverse, chez Kôbô Abe et dans l’absurde japonais en général, il n’y a jamais eu de place pour une entité supérieure quelconque et ce, d’aucune manière que ce soit. Cette différence aura (comme nous le verrons plus tard) un impact, en particulier chez Kôbô Abe, sur la réaction du sujet face au monde.

23 ABE Kôbô, La Femme des sables, Shinchosha Publishing Co, Ltd., Tokyo, traduction de BONNEAU Georges, coll. « Le Livre de Poche », Hachette Livre, Paris, 2018, [1962], p. 59

24 Idem, p. 96

25 Idem, p. 122

b) Absurde et construction du roman

Les deux romans de notre corpus se construisent aussi différemment et ce, en raison des intentions de leurs auteurs respectifs ou encore des habitudes culturelles et de ce fait, mettent en scène l’absurde différemment. L’Etranger est écrit comme une fiction réaliste, et cela dans le but de permettre une plus facile compréhension de l’espace dans lequel le personnage de Meursault évolue afin de mettre l’accent sur l’action qui rythme le roman. Même si « Le Mythe de Sisyphe n’est pas le manuel de référence qui « expliquerait » l’Etranger et d’autres œuvres, qui donnerait aux murs leurs portes ou aux portes leur « clé » »26, il est important de comprendre que L’Etranger, en tant que roman du cycle de l’absurde, doit de par sa place, mettre en scène l’absurde, et pas simplement l’expliquer. La structure du roman participe par exemple à cette mise en scène et le découpage en deux grandes parties de l’œuvre résulte de l’intention d’Albert Camus de montrer brutalement le basculement dans l’absurde. Cette structure binaire souligne parfaitement l’opposition qui existe entre un Meursault naïf et l’Etranger qu’il est après le meurtre et associe par la forme le développement narratif et la présentation de la philosophie.

Ce qui est important dans la structure en deux parties du roman, c’est qu’on voit Meursault avant le meurtre dans la vie courante et on voit comment il vit au travail avec sa maîtresse, avec ses amis, avec son entourage ; et puis ensuite il y a le meurtre et on le voit affronter d’une part, [le] système justicière qui est […] la forme sociale de l’absurde et, ensuite, la peine de mort donc la mort imposée, qui renvoie à une autre forme d’absurde.27

A l’inverse, Kôbô Abe utilise le fantastique comme cadre de son roman. Le désert dans lequel se perd son sujet ne se travestit pas en autre chose que lui-même. L’auteur ne cherche pas à mettre en place une certaine forme de réalisme comme le fait Albert Camus, il n’amène pas l’absurde petit à petit mais jette son sujet au cœur de celui-ci dès le début de l’œuvre.

Bien entendu, nous ne disons pas là que l’incipit de L’Etranger n’est pas déjà une mise en scène de l’absurde ou que Meursault n’est pas déjà conscient de ce dernier. Après tout, « Si l’on regarde de près, quand le roman commence, il y a longtemps que Meursault a entériné un

26 MAILHOT, Laurent, Op. cit., p. 44

27 SPIQUEL, Agnès, Conf. cit., 8min

fois pour toute que rien n’avait de sens »28. Non, ce que nous sous-entendons ici c’est que Meursault n’est pas encore dans une conscience active et totale de l’absurde, à l’inverse de Niki Jumpei, le personnage de La Femme des sables.

[Kobo Abe] explains how he employs fantastic elements in his works in order to expose and destroy the stereotyped "balance of reason and sense" which supports the complacent state induced by our daily routines. In casting the light of fantasy over our daily platitudes, he gives life to hypothetical situations and makes these platitudes "lose their balance and appear ab- normal." Only when we are confronted with this concretization of fantasy in an exaggerated form do we as readers see the distortion and perversion of our milieu and the degraded human image within it.29

Dans les deux œuvres cependant, peuvent être trouvés des points communs en ce qui concerne la construction. Ces points communs se retrouvent dans le choix des temps utilisés et dans la mise en place de l’acte d’énonciation. Dans L’Etranger, comme nous l’avons dit, l’absurde se retrouve dans l’instant, dans la sensation, et de ce fait passe par une utilisation de la première personne du singulier et du présent. Cela se ressent dans l’œuvre dès son incipit qui

« ancre le récit dans une actualité brûlante, [qui] imprime sa marque à tout le texte, [qui]

entraîne l’histoire à venir dans un présent d’immédiateté, [qui] donne une direction, [qui]

annonce une stratégie qui ne sera pas décevante [et qui] recèle en fait une puissante valeur cataphorique »30. Cette stratégie de l’auteur sert parfaitement son intention et ouvre, autour même de la construction de la phrase, une réflexion sur l’absurde31.

Il serait donc tout à fait indiqué de considérer le sujet de l’énonciation comme présent mais sur une modalité qui pointe la valeur relative du langage. Comment comprendre alors le crime de sang-froid,

28 Idem, 7min

29 YAMAMOTO, Fumiko, « Metamorphosis in Abe Kôbô' s Works », in Journal of the Association of Teachers of Japanese, vol. 15, No. 2, American Association of Teacher of Japanese, Pittsburgh, 1980, p.170 Nous traduisons : « Kôbô Abe explique comment il emploie des éléments fantastiques dans son travail dans le but de montrer et de détruire le stéréotype « balance de raison et de sens » qui soutient l’état complaisant induit par nos routines quotidiennes. En braquant la lumière de la fantaisie sur nos banalités quotidiennes, il donne vie à des situations hypothétiques et « fait perdre leur équilibre et fait apparaître comme anormal » ces banalités. Ce n’est qu’en étant confrontés avec cette fantaisie concrétisée de façon exagérée que nous voyons, en tant que lecteurs, la distorsion et la perversion de notre environnement et de l’image dégradée d’humain qui va avec ».

30 PROUTEAU, Anne, Op. cit., p. 120

31 Pour plus d’information en ce qui concerne la notion d’immédiateté dans L’Etranger d’Albert Camus, voir PROUTEAU, Anne, Albert Camus et le présent impérissable, coll. « Universités », L'Harmattan, Paris, 2008

sur une plage d’Alger, par un après-midi ensoleillé ? le passage à l’acte prend-il la place d’une affirmation jusqu’au-boutiste du nihilisme du personnage ou se donne-t-il à lire comme un retour dans le réel de ce qui a été forclos du symbolique ?32

Pour ce qui est du texte de Kôbô Abe, il est important de prendre en compte les différences entre la traduction et l’œuvre originale. En effet, nombreuses sont les traductions de l’œuvres qui transposent les verbes au passé et changent donc la construction de cette dernière et avec elle la manière dont est transmis le message absurde même.

Si, dans les traductions précédentes, les verbes sont au passé, ils sont au présent dans leur original. Ce présent n'est pas celui de la rhétorique (ou présent historique), c'est un présent que les linguistes appellent le présent ponctuel. Il situe une action dans l'instant même de son énonciation. Dans la neuvième citation, les actions des deux amoureux se déroulent au fur et à mesure du développement de la narration. Abe Kôbô a poussé cette caractéristique de la narration japonaise à l'extrême. Dans ses romans, le sujet de l'action et celui de la narration se superposent dans le personnage principal. Là, un faire n'est autre qu'un dire.33

Par tradition, tout roman, toute nouvelle ou tout texte narratif japonais en général se raconte au présent et les changements de comportement du personnage de Niki Jumpei transparaissent fortement. De nombreuses traductions ont cependant fait le choix du passé de narration, faisant de ce fait perdre au roman toute sa fluidité et diminuant l’impression d’intensité du moment.

Le texte de narration japonais est construit autour de l'axe « ici et maintenant » de l'acte d'énonciation ; le texte de la traduction française est construit sur la base du passé de narration. Dans le premier cas, les changements incessants, le caractère quasi-fluide du sujet de l'histoire s'imposent au premier plan, alors que la phrase elle-même, sortant fréquemment du domaine de la prose, abonde en expressions métaphoriques. Dans le second cas, le sujet est comme rigidifié en réalité du passé, et la phrase qui rapporte son histoire est analytique et objective. Le sens du sentiment lyrique dans la littérature japonaise, et

32 MEGHAIZEROU, Miriem, « Sous le soleil de L’Étranger », in Journal français de psychiatrie, vol. 42, no°2, 2015, p. 100

33 NAKAYAMA Masahiko, « Statut du sujet dans le texte littéraire du japonais », in Ebisu, n°11, 1995, p. 77

la nature de l'inspiration réaliste de la littérature européenne deviennent clairs.

Ces très nettes différences, on les retrouve aussi bien dans le Genji monogatari et sa traduction française que dans le travail d'Abe Kôbô et sa traduction française : ces particularités de la littérature japonaise qui traversent aussi bien les classiques que des œuvres modernes, on peut les saisir donc dans une comparaison avec leurs traductions françaises.34

Dans l’œuvre japonaise mais aussi dans la dernière traduction que nous utilisons, les verbes sont au présent et la différence entre narrateur et sujet se brouille, laissant en s’estompant apparaître cette immédiateté linguistique, ce moment absurde35.

Ce brouillage est inhérent à la langue et à la tradition japonaise. L’expression du sentiment, de tout sentiment (et donc du sentiment absurde), étant l’un des principaux thèmes de la littérature japonaise, il devient clair qu’en donnant la parole au sujet, en le faisant

Ce brouillage est inhérent à la langue et à la tradition japonaise. L’expression du sentiment, de tout sentiment (et donc du sentiment absurde), étant l’un des principaux thèmes de la littérature japonaise, il devient clair qu’en donnant la parole au sujet, en le faisant