• Aucun résultat trouvé

C. Les sanctions prévues à l’article L. 430-8 du code de commerce

1. Le défaut de notification (I de l’article L. 430-8)

préalablement notifiée s’exposent aux sanctions prévues au I de l’article L. 430-8 :

« I. Si une opération de concentration a été réalisée sans être notifiée, l’Autorité de la concurrence enjoint sous astreinte, dans la limite prévue au II de l’article L.

464-51

2, aux parties de notifier l’opération, à moins de revenir à l’état antérieur à la concentration. La procédure prévue aux articles L. 430-5 à L. 430-7 est alors applicable.

En outre, l’Autorité peut infliger aux personnes auxquelles incombait la charge de la notification une sanction pécuniaire dont le montant maximum s’élève, pour les personnes morales, à 5 % de leur chiffre d’affaires hors taxes réalisé en France lors du dernier exercice clos, augmenté, le cas échéant, de celui qu’a réalisé en France durant la même période la partie acquise et, pour les personnes physiques, à 1,5 million d’euros ».

164. Ce dispositif sanctionne aussi bien une infraction intentionnelle qu’une omission par simple négligence. L’Autorité tient notamment compte, dans son appréciation, des circonstances ayant mené au défaut de notification et du comportement des entreprises.

165. L’application de cet article fait l’objet d’une procédure contradictoire devant le collège de l’Autorité. En application du III de l’article L. 462-5, le rapporteur général propose à l’Autorité de se saisir d’office de la situation de l’entreprise concernée au regard du I de l’article L. 430-8. Si l’Autorité se saisit, un rapport est communiqué aux entreprises concernées, qui ont deux mois pour présenter leurs observations en réponse. Les entreprises sont ensuite entendues en séance par le collège de l’Autorité. La décision est notifiée à la partie notifiante et publiée sur le site de l’Autorité.

166. La conformité de cette procédure « aux principes d’indépendance et d’impartialité indissociables de l’exercice de pouvoirs de sanction par une autorité administrative indépendante » a été validée par le Conseil constitutionnel dans la décision n° 2012-280 QPC du 12 octobre 2012 Groupe Canal Plus et autre.

167. Depuis sa création, l’Autorité a sanctionné à trois reprises des groupes qui avaient omis de notifier une opération relevant de l’application des dispositions des articles L. 430-1 et suivants21.

168. L’Autorité a considéré qu’il résultait de l’économie des articles L. 430-1, L. 430-3 et L. 430-8 que le défaut de notification d’une opération de concentration doit être imputé à la ou aux personne(s) physique(s) ou morale(s) sur laquelle (lesquelles) pesait l’obligation de notification, c’est-à-dire à celle(s) acquérant de façon ultime le contrôle de la cible, et

21 Décisions de l’Autorité n° 12-D-12 du 11 mai 2012 relative à la situation du groupe Colruyt au regard du I de l’article L. 430-8 du code de commerce, n° 13-D-01 du 31 janvier 2013 relative à la situation des groupes Réunica et Arpège au regard du I de l'article L. 430-8 du code de commerce et n° 13-D-22 du 20 novembre 2013 relative à la situation du groupe Castel au regard du I de l'article L. 430-8 du code de commerce. La décision n° 13-D-22 a cependant été partiellement réformée, par arrêt du 15 avril 2016 du Conseil d’État : la sanction de 4 millions d’euros infligée par l’Autorité a été ramenée à 3 millions d’euros. En effet, d’une part, la notification de l’opération avait été effectuée dans un bref délai après les premières demandes de justifications de l’Autorité et, d’autre part, il a été tenu compte de l’absence d’intention de contourner les règles de la concurrence en réalisant sans notification préalable l’opération.

52

non à la seule personne juridiquement signataire de l’accord d’acquisition.

169. Sur ce point, dans une décision du 14 décembre 2012, le Conseil d’État a rejeté la demande de renvoi devant le Conseil constitutionnel d’une question prioritaire de constitutionnalité présentée à l’appui d’une requête en annulation dirigée contre la décision n° 12-D-12 de l’Autorité du 11 mai 2012. Il a en particulier considéré que les articles L. 430-3 et le I de l’article L. 430-8 désignaient de façon suffisamment claire l'auteur du manquement à l’obligation de notification d’une opération de concentration, qui est également la personne physique ou morale susceptible d'être sanctionnée.

170. Par ailleurs, l’Autorité a considéré qu’en l’absence de disposition relative à la prescription spécifique à l’application du I de l’article L. 430-8, l’article L. 462-7 disposant que

« l’Autorité ne peut être saisie de faits remontant à plus de cinq ans s’il n’a été fait aucun acte tendant à leur recherche, leur constatation ou leur sanction » visait, sans distinction, l’ensemble des « faits » que l’Autorité peut être conduite à sanctionner. En conséquence, la prescription quinquennale est applicable aux faits relevant du I de l’article L. 430-822. 171. S’agissant du point de départ de cette prescription, l’Autorité a considéré que les faits visés au I de l’article L. 430-8 concernent l’omission d’une notification devant intervenir à un moment précis, et que la réalisation d’une concentration intervient en un trait de temps, même si ses effets sont appelés à se poursuivre. En conséquence, la réalisation d’une concentration sans qu’elle ait été notifiée préalablement constitue une infraction permanente dont la prescription commence à courir au jour où se matérialise le changement de contrôle.

Exemple : dans sa décision n° 12-D-12 du 11 mai 2012, l’Autorité a retenu un délai de prescription quinquennale pour l’infraction prévue au I de l’article L. 430-8. Elle a considéré que cette infraction était permanente, et que la prescription avait donc commencé à courir au jour de la formation des contrats de cessions des titres, matérialisant le changement de contrôle des sociétés.

172. Afin de déterminer la sanction, l’Autorité prend en compte la gravité des faits, eu égard aux circonstances de l’espèce et à la situation individuelle des entreprises en cause. Le non-respect de l’obligation prévue à l’article L. 430-3 constitue, par nature, une infraction grave à l’ordre public économique, dans la mesure où ce manquement prive l’Autorité de toute possibilité de contrôler un projet de concentration préalablement à sa réalisation, et ce, quels que puissent être les effets possibles de l’opération projetée sur la concurrence.

La caractérisation du manquement sanctionné par le I de l’article L. 430-8 ne nécessite donc pas la démonstration d’une atteinte à la concurrence qui pourrait être provoquée par

22 Dans la décision n° 2012-280 QPC du 12 octobre 2012, le Conseil constitutionnel a considéré que l’article L. 462-7 s’appliquait aux faits relevant du IV de l’article L. 430-8.

53

la concentration non notifiée. L’Autorité n’en tient pas moins compte, dans la détermination du montant de la sanction, des circonstances concrètes du cas d’espèce, qu’elles soient aggravantes ou atténuantes, parmi lesquelles :

– le caractère plus ou moins évident de la contrôlabilité de l’opération ;

– la taille de l’entreprise et les moyens, notamment juridiques, dont elle dispose ; – le fait que l’entreprise a spontanément porté l’absence de notification à l’attention

de l’Autorité ;

– l’éventuelle volonté de ses responsables de contourner l’obligation légale de notification, en particulier lorsque l’opération était susceptible de porter une atteinte substantielle à la concurrence ; ou

– la coopération apportée par l’entreprise au cours de la procédure.

Exemple : dans sa décision n° 12-D-12 du 11 mai 2012, l’Autorité a considéré que l’acquéreur avait délibérément ignoré son obligation légale de notification, afin de réaliser rapidement la concentration envisagée.

Au contraire, dans la décision du 15 avril 2016, faisant suite au recours formulé par la société Copagef contre la décision n° 13-D-22, le Conseil d’État a considéré que l’Autorité n’avait pas apporté la preuve suffisante de l’intention de contourner les règles de concurrence. De plus, selon lui, le fait que l’entreprise ait finalement notifié l’opération peu de temps après les premières questions posées par l’Autorité aurait dû être pris en compte au titre des circonstances atténuantes. Le Conseil d’État a ainsi réduit la sanction infligée par l’Autorité de 4 à 3 millions d’euros.

2. L’INFRACTION DE MISE EN ŒUVRE ANTICIPÉE D’UNE