• Aucun résultat trouvé

Chapitre IX : Les dynamiques d’échange et de participation

1. Le Contenu et dynamique de travail

Le contenu du site principal comporte différents sujets liés aux actualités de différents pays et aux informations des médias citoyens. Dans son évolution, Global Voices s’est ouvert à différents types de contenu, mais son noyau continue d’être les « histoires venant des médias citoyens », d’après la présentation principale. Le contenu et la dynamique de travail ont fortement changé avec l’augmentation du nombre des membres de la communauté, au fur et à mesure que le nombre et la variété des médias citoyens grandissaient.

La « newsroom » peut être vue comme un ensemble d’équipes qui produisent des

billets ou des « posts » dans le site principal. Pourtant, d’autres parties de la « communauté » ne sont pas laissées de côté. Le but est d’arriver à s’approcher et à rentrer

en contact avec les histoires qui sont partagées par les gens dans les médias citoyens. Depuis 2006 environ, les billets publiés sur le site de la communauté, les sites parallèles et les versions du site en différentes langues sont dépendants de plusieurs équipes de travail dont l’organisation a varié à travers le temps, comme on le verra ensuite.

Le contenu de Global Voices est divisé en régions et en langues. Comme il a été décrit dans la deuxième partie, la division des équipes de production de contenu se divisent non seulement par pays ou régions géographiques, mais aussi par langues (Voir figure 1, page 57). Ainsi, les éditeurs de langue (« language editors ») ont la responsabilité d’écrire et d’éditer des articles sur Global Voices qui portent sur des discussions, témoignages ou histoires des médias citoyens écrits dans cette langue, indépendamment de l’espace géographique.

Par exemple, l’éditeur en charge des blogosphères latino-américaines prend en charge tous les pays hispanophones de cette région. Le Brésil ne fait pas partie de cette équipe à cause de la langue. Pourtant, d’autres blogosphères qui parlent espagnol sont aussi suivies par une équipe de Global Voices qui prend en charge le contenu en espagnol des blogosphères de la Caraïbe, d’Espagne, de la population issue de la migration hispano- américaine aux États Unis et en Europe, ainsi que de la Guinée Equatoriale.

130

Le cas est similaire avec l’équipe de Global Voices qui suit les activités des médias citoyens dans les pays francophones. La France est rarement présente, sauf pour des événements forts comme les attentats du 13 novembre 2015 à Paris qui ont attiré l’attention de la grande majorité des médias internationaux). La couverture des médias citoyens parlant le français comprend des pays de l’Afrique francophone et des Caraïbes francophones.

En pratique, le travail est basé sur la recherche de sources venant des médias d’Internet et citoyens ; surtout des blogs, mais aussi des discussions qui ont lieu sur Twitter, à partir des images ou des vidéos publiées sur YouTube.

La préparation d’un « post » a comme point de départ, soit un sujet, soit un événement important. L’auteur peut ensuite choisir un sujet et chercher les blogs qui en discutent, ou bien suivre les conversations qui ont déjà lieu. Une des tâches constitue à publier le plus possible les sujets dont les blogosphères discutent et faire en sorte que les opinions des gens arrivent à un public plus large. Il faut pourtant souligner que suivre toutes les conversations d’une blogosphère est très difficile, surtout après les années 2010. Avec la diversification des médias d’Internet, la popularité des blogs a considérablement décru, même s’ils n’ont pas disparu.

Les auteurs suivent des blogs et aussi les histoires personnelles de certains blogueurs, notamment ceux qui sont influents dans l’opinion publique de leur pays ou communauté. Le choix des sujets est donc, important et complexe. C’est ici que commencent les échanges avec l’éditeur.

L’auteur et l’éditeur déterminent ensemble si le sujet en question a de l’intérêt et s’il y a assez de matière pour construire un billet. Dans les débuts du site, tout le contenu recueilli était écrit en anglais, les extraits provenant des médias citoyens étaient aussi traduits à cette langue. Une fois le projet « Lingua » mis en place, la dynamique ne s’arrête plus avec la publication en anglais mais elle continue avec les équipes de traduction. David Sasaki, un des membres fondateurs, explique cette méthode de travail dans une conférence en 2009 qui portait sur le fonctionnement et les valeurs de Global Voices:

Alors on a démarré un site web, avec différents éditeurs et différents auteurs. Et chaque auteur, chaque éditeur était une fenêtre sur leurs pays respectifs ou leurs communautés, ou la blogosphère dans leurs langues. Donc on avait par exemple quelqu’un qui venait d’Argentine et il disait « OK, voici ce dont parlent les blogueurs d’Argentine cette semaine. » Et il ajoutait un contexte supplémentaire pour un public international. [...Puisque la majorité des blogueurs en Argentine écrivent en espagnol] Jorge, l’éditeur, traduisait de l’espagnol vers l’anglais. Ensuite, sur le site de Global Voices, un grand nombre de ces articles était traduit de l’anglais vers 15 ou 20 autres langues [par les équipes de traduction appartenant à « Lingua »]. (Sasaki, 2009)

131

À l’époque de cette conférence, « Lingua » traduisait le contenu de Global Voices dans 20 langues environs. Les billets traduits étaient collectés dans des sous-sites (es.globalvoices.org pour l’espagnol, ou fr.globalvoices.org pour la version du site en français, par exemple). Ces équipes fonctionnaient de façon parallèle aux équipes régionales et elles ont aussi des éditeurs qui assistent et organisent le travail. La communication entre les équipes de traducteurs et d’auteurs pendant le travail n’est pas très intense. Pourtant, des messages existent quelques fois entre auteurs et traducteurs. Souvent c’est pour, soit remercier l’auteur d’avoir écrit sur un sujet en particulier, soit remercier le traducteur pour avoir traduit le travail de l’auteur. Parfois, une relation entre les deux membres est créée du fait que les deux personnes partagent les mêmes intérêts. Dans tous les cas, les animateurs de communauté et les éditeurs encouragent assez souvent la communication entre ces équipes.

Travailler dans plusieurs équipes est possible et il y a plusieurs façons de le faire. L’éditeur de « Lingua » espagnol, en charge des bénévoles qui traduisent le contenu de Global Voices de l’anglais à l’espagnol, est aussi un auteur très actif dans l’équipe de l’Amérique Latine. Comme je l’ai évoqué avant, j’ai travaillé moi aussi assez souvent avec l’équipe en charge de l’Iran pour écrire sur les relations Venezuela-Iran ou Iran-Amérique Latine.

L’information est suivie, recueillie et sélectionnée sur la base de l’opinion des gens et mise en contexte avec d’autres opinions ou témoignages. Pendant la période de 2004 à 2008, la pratique de traduction était prédominante. Pour écrire un article, qui à l’époque se faisait surtout en anglais, les citations des médias citoyens étaient nécessaires. Global Voices est donc devenu un « bridgeblog » lui-même. Les auteurs cherchaient des discussions ou des thématiques intéressantes pour les lecteurs internationaux et ajoutaient des informations pour expliquer le contexte autour du sujet.

Au cours des dernières années, les auteurs ont commencé à être invités à écrire dans leur propre langue. Le but était de faciliter le travail des bénévoles et d’améliorer la qualité de celui-ci. Dans ce but un nouveau groupe de traducteurs a été créé, non pas pour le projet « Lingua », mais au service de la « newsroom ». Si, par exemple, un auteur trouvait un sujet intéressant dans les médias citoyens du Bangladesh, il pourrait écrire son billet en bengali. Ensuite, l’équipe de traducteurs bengali-anglais de la « newsroom » ferait une version en

132

anglais de ce « post ». Ce processus reçoit le nom de « publication dé-centralisée » et fut le centre d’un grand nombre de changements et ensuite, de controverses.

Ainsi, pour faire de Global Voices un site plus plus proche des médias internationaux, les sub-éditeurs sont devenus le filtre final avant la publication de billets sur le site en anglais. Cette équipe corrige les billets soigneusement et se charge de rendre le contenu compréhensible pour un « public global ». Pourtant, de nombreuses controverses qui continuent aujourd’hui ont commencé dès ce changement.

Vers 2012 la « professionnalisation » du contenu, au centre des échanges dans les pages précédentes, a rendu le contenu de Global Voices comparable à d’autres médias internationaux plus compétitifs comme The Guardian ou The Huffington Post, particulièrement avec la conformation de l’équipe de sub-éditeurs. La figure du sub-éditeur est apparue pour assister le travail des éditeurs de contenu, eu égard à la grande participation des auteurs et la diversification de contenu.

En effet, le ton général du site est devenu plus proche des médias internationaux qui tentent d’attirer l’attention des lecteurs avec des titres accrocheurs. Ceci a inquiété les membres plus anciens de la « communauté » qui voient le site devenir de plus en plus un média en lui-même. Dans le même temps, d’autres membres reconnaissant la nécessité d’élargir le message de Global Voices, ont défendu la nécessité de s’adapter aux changements du monde des médias.

En conséquence, l’activité de la communauté montre des différences remarquables dans la participation: Le nombre de billets publiés a baissé de façon dramatique dans les dernières années. En 2008, une époque d’activité intense pour Global Voices 13.707 billets ont été publiés, en 2016, 2.391. Il faut souligner que les billets « brèves », de juste quelque mots, ont disparu et que ces « posts » ont augmentaient les chiffres de production dans les statistiques. Néanmoins, il faut remarquer aussi qu’avec le processus d’édition, actuellement plus exigeant, plusieurs auteurs sont beaucoup moins actifs. De la même manière, le processus d’édition étant plus méticuleux, la quantité de billets publiés se réduit pour privilégier un contenu susceptible d’être partagé sur Internet.

D’après le guide de style (qui se trouve dans le « Blog de la communauté »), un bon billet doit introduire l’événement ou le sujet de façon brève et claire et présenter ce qui sera exposé ensuite. Les billets ne sont pas écrits à la première personne et ne doivent montrer l’opinion personnelle de l’auteur. Plusieurs discussions à ce sujet ont eu lieu pendant les

133

rencontres de la communauté et dans la liste de communication par e-mail. Quelques uns suggéraient d’écrire leurs propres opinions sur leurs blogues personnels pour ensuite ajouter la citation dans le billet de Global Voices. Cette pratique n’est pas courante, pourtant. Quelques autres membres de la « communauté » croient que cela pourrait compromettre la transparence du travail réalisé.

Les auteurs débutants apprennent la dynamique de travail principalement en observant le travail d’autres auteurs. Généralement, les guides et les wikis sont consultés une fois que les bases du travail sont apprises et que l’auteur veut clarifier quelques normes de façon plus spécifique. Les éditeurs sont aussi disponibles pour répondre aux questions ou pour compléter les tâches qui ne sont pas encore comprises par les nouveaux membres. Ensuite, l’équipe de traducteurs traduira les billets de l’anglais vers plusieurs autres langues. Pour faciliter la lecture et le travail des équipes de traduction, il est fortement conseillé d’écrire des billets courts et claires. Dans les billets longs, le travail de citation et de traduction est le plus important, d’autant plus que les citations peuvent avoir plusieurs formats : vidéos, podcasts, photos, microblogging, etc.