• Aucun résultat trouvé

L'éthique dans une recherche représente un enjeu important. Tout d'abord, signalons que ce projet a été soumis au Comité d'éthique de la recherche avec des êtres humains de l'Université Laval (CÉRUL) et a obtenu le numéro d'approbation : 2010-110, le 04-05-2010 (Annexe B). Cette section vise à expliciter les principes éthiques qui ont guidé les rapports avec les participants et les organismes qui ont collaboré à la recherche ainsi qu'à la manière dont les informations obtenues ont été traitées, organisées et utilisées pendant le déroulement de l'étude. Finalement, une réflexion à propos des conséquences que peuvent découler des résultats de la recherche est exposée.

3.6.1 Le recrutement des participants

La recension des écrits a dévoilé qu'une proportion des itinérants souffre de problèmes de santé mentale, de consommation d'alcool ou de drogues. De plus, il apparaît dans la recherche de Fournier (2001), que certains itinérants seraient sous curatelle; c'est pourquoi des mesures ont été prises pour s'assurer que les participants n'étaient pas sous un régime de protection, soit la tutelle, soit la curatelle. Afin d'éviter que des personnes, éventuellement intoxiquées, ou ayant des problèmes aigus de santé mentale au moment prévu de l'entretien, ne soient pas en mesure de donner un consentement éclairé, une stratégie, inspirée de Bourgeois (2008), a été utilisée. Celle-ci s'appuie sur l'aide des intervenants dans le choix de l'échantillon. Après avoir été informé, par les intervenants,

que quelqu'un était intéressé à participer à l'étude, le premier contact avec la personne a été plus formel et l'étudiant a fait appel à un texte de recrutement préalablement préparé et approuvé par le CÉRUL (Annexe C). Ensuite, pour éviter tout sentiment qui pouvait être source de gêne ou d'inconfort pour le participant, le contact a pris un format plus informel et a porté sur des sujets n'impliquant pas la recherche. C'est seulement après s'être assuré, en faisant attention à l'odeur d'alcool, de même que la présence de tout comportement étrange ou bizarre, ou encore des propos incohérents ou délirants, de même qu'aucun avis n'ait été reçu de la part des intervenants indiquant la possibilité de consommation d'alcool, de drogues ou la présence des symptômes aigus d'une maladie mentale, que l'étudiant a donné suite aux procédures prévues avant de débuter l'entrevue comme telle. Celles-ci ont été réalisées dans un lieu sécuritaire et permettant la confidentialité des informations. Le local a été mis à la disposition par les organismes. Les entrevues se sont déroulées immédiatement après la rencontre avec le participant pour s'assurer qu'aucune consommation d'alcool ou de drogues ne soit en cause.

3.6.2 L'obtention du consentement des participants

Un des principes, qui doit être présent dans une recherche, est le consentement éclairé des participants (Mayer et Saint-Jacques 2000). De plus, Deslauriers et Kérisit (1997) mentionnent qu'on doit pouvoir garantir la confidentialité et l'anonymat des participants. L'obtention du consentement éclairé de la part des participants issus de la population itinérante a exigé la prise de mesures particulières. La recension des écrits a révélé que l'itinérance est accompagnée, dans de nombreuses situations, de troubles de santé mentale. Les itinérants sont souvent méfiants et cela exerce une influence sur les rapports avec les personnes avec qui les itinérants ont des contacts. De plus, Brassard et Cousineau (2002) mentionnent que certains itinérants sont inquiets quant à un éventuel rapport des intervenants avec la police; ce qui nuit aux interactions.

L'étudiant était conscient du fait d'être un étranger dans le milieu des itinérants et que cela pourrait être en soi une source d'anxiété pour les participants. Donc, afin d'éviter qu'un

participant ait donné un consentement écrit qui pourrait être source d'inquiétude ou d'instabilité pour lui, ou que le fait de demander la signature sur un formulaire soit le motif d'un nombre élevé de refus, ce qui rendrait la collecte de données impossible ou extrêmement longue, le mode d'obtention du consentement libre et éclairé a fait appel à l'enregistrement oral. Cette pratique n'est pas nouvelle comme forme d'obtention du consentement des participants itinérants; plusieurs chercheurs (Garrett et al., 2008; Peterson, Baer, Wells, Ginzler et Garrett, 2006) l'ont utilisée. Au Québec, Brassard et Cousineau (2002) ont aussi fait appel à cette façon d'obtenir le consentement libre et éclairé auprès des participants itinérants. Un guide pour l'obtention du consentement des participants a été élaboré et a eu pour modèle le formulaire de consentement proposé par le CÉRUL4 (Annexe D). Le langage a été adapté et privilégie les termes du langage oral, soit

l'usage de termes qui facilitent la compréhension. Finalement, selon les directives proposées par Mayer et Saint-Jacques (2000), l'objet de l'étude, ses objectifs et la participation sollicitée ont été expliqués de façon synthétique. Les critères d'échantillonnage ont aussi été précisés la recension des écrits a révélé que plusieurs itinérants sont méfiants, d'où l'importance de préciser la méthode de sélection des participants afin d'éviter toute crainte et inquiétude.

3.6.3 Les rapports avec les organismes qui ont collaboré à l'étude

Cette étude s'est déroulée sur le terrain même des participants. Marshall et Rossman (1989 citées par Deslauriers et Kérisit, 1997) mentionnent le besoin de respecter les particularités du milieu. De plus, ces auteurs signalent qu'un manquement éthique envers le milieu peut nuire à de futures recherches. Donc, pour éviter tout conflit et pour ne pas interférer dans les caractéristiques du milieu, l'étudiant a établi, en commun accord avec chaque organisme, les jours et les heures pour procéder au recrutement et à la collecte de données, les espaces à utiliser de même que les personnes ressources à contacter pour l'aider dans le choix de participants. Ces termes ont été spécifiés dans les lettres d'ententes signées avec chaque organisme. Donc, pour toute intervention nécessaire, de la part des organismes et

des intervenants, des mesures ont été prises afin d'interférer le moins possible dans leurs activités. Bref, l'intervieweur s'est adapté au milieu et s'est rendu disponible pour les rendez-vous et les rencontres selon ce qui lui a été proposé.

Comme prévu dans les lettres d'entente, une fois l'étude finie, c'est-à-dire après le dépôt final et la publication du mémoire, un résumé des résultats de l'étude sera fourni à chaque organisme. Le fait que l'étude a eu des répondants qui fréquentent les organismes participants rend plus probable que celles-ci sont représentatives de leur clientèle. Donc, la compréhension de la problématique apportée par la réponse de la question de recherche peut servir aux organismes pour orienter leurs interventions auprès de la clientèle masculine. Même si ceux-ci ne sont pas responsables d'offrir des services de santé et des services sociaux, dans l'éventualité de référer des clients hommes à ces services, la question du genre peut être prise en considération, et ce, dans le but d'augmenter les possibilités que les clients soient mieux desservis par les services de santé et les services sociaux dont ils ont besoin.

3.6.4 Les risques potentiels et les bénéfices de la participation

Malgré l'absence de risques liés à la participation à la recherche, sauf le fait qu'elle pouvait rappeler aux participants des expériences désagréables avec les fournisseurs de services de santé et de services sociaux de même qu'à propos de leurs expériences de vie, l'étudiant a pris une série de mesures afin de minimiser ces risques et faire face à une telle situation, si jamais elle se produisait. Les participants ont d'abord été informés des avantages et des inconvénients que pouvaient en découler de leur participation et ils ont eu la possibilité de se retirer de l'étude en tout temps sans avoir aucune conséquence de même que le choix de ne pas parler de ce qu'ils ne voulaient pas. Ils ont aussi été informés de la possibilité de s'adresser au Bureau de l'ombudsman de l'Université Laval5 pour toute insatisfaction ou

plainte concernant la recherche. Les actions menées ont suivi les directives de Mayer et Saint-Jacques (2000). Ces auteurs affirment que pour créer des connaissances le chercheur

5 Les coordonnées ont été données par écrit aux participants; elles font partie aussi du guide pour l'obtention

ne peut pas faire émerger chez les participants des émotions ou sentiments qu'ils ne le souhaitent pas.

En tout temps, des mesures ont été prises pour donner des informations ou recommander le participant au bon endroit si celui-ci démontrait avoir des besoins non comblés, des problèmes auxquels il ne pouvait pas faire face seul ou si l'étudiant identifiait des situations nécessitant une intervention. Les participants ont été informés qui si l'interviewer jugeait que la personne constituait une menace pour elle-même ou pour autrui, les services d'urgence seraient actionnés. Cependant, aucune situation qui aurait nécessité une telle intervention ne s'est présentée. À chaque rencontre, le bottin des ressources en santé et services sociaux a été apporté, pour être sûr, en cas de besoin, de donner les bonnes coordonnées verbalement et par écrit aux participants. De plus, du temps a été réservé pour consulter une ressource qui pouvait offrir de l'aide au participant.

Le principal bénéfice direct pour les participants à la recherche, a été l'opportunité de parler, de raconter leurs expériences et de s'exprimer en toute liberté. De plus, l'étude peut contribuer à la création de connaissances qui peuvent être utilisées pour améliorer les services destinés à la population itinérante, notamment les services qui s'adressent aux hommes itinérants. Les participants ont été informés de la possibilité de recevoir une synthèse avec les principaux points des résultats de la recherche, cette synthèse aurait été miss à leur disposition dans l'organisme où l'entrevue a été réalisée. Aucun participant n'a manifesté d'intérêt à recevoir une telle synthèse. Finalement, selon la même procédure des chercheuses québécoises, qui ont mené des recherches auprès d'itinérants (Colombo, 2008; Larouche, 2008), les participants ont reçu pour le temps accordé à l'entrevue une somme forfaitaire de vingt dollars.

3.6.5 Le respect de la confidentialité

Suivant les directives approuvées par le CÉRUL afin de respecter la confidentialité, certaines mesures ont été prises. Seul l'intervieweur a eu accès aux enregistrements. De plus, les noms des participants n'apparaissent dans aucun document de l'étude; ceux-ci ont

été changés par de pseudonymes. Toute information qui peut, d'une façon quelconque, identifier les participants de même qu'identifier d'autres personnes éventuellement mentionnées, a été effacée ou modifiée au moment de la transcription. En attendant la transcription, les enregistrements ont été gardés dans un classeur verrouillé, dont le l'étudiant était la seule personne à avoir la clé. Après la transcription et la vérification, les enregistrements ont été détruits. L'étudiant a été la seule personne à avoir accès à la liste de noms et de codes des participants de même qu'aux transcriptions. Toute autre personne, impliquée dans la recherche, n'a eu accès qu'aux données codées. Pour ce qui est du journal de bord, que l'étudiant a tenu, des mesures ont été prises pour n'inscrire aucune information qui puisse identifier les participants, les personnes mentionnées pendant les entrevues, les organismes ainsi que les intervenants avec lesquels l'étudiant a eu des contacts. Les documents informatiques ont été protégés par un mot de passe, puis les autres, par exemple les lettres d'entente, les notes prises sur le terrain, sont gardées dans un classeur verrouillé en permanence, dont seul l'étudiant concerné a la clé. Tous les documents seront gardés pour une période de six mois après le dépôt final du mémoire, après quoi ils seront détruits.

3.6.6 Les conséquences que peuvent découler des résultats de la recherche

Finalement, les résultats qui peuvent émerger de cette recherche soulèvent aussi des questions éthiques. À propos des recherches portant sur l'itinérance, Shinn et Weitzman (1990) signalent la possibilité que certaines études puissent contribuer à détourner l'opinion publique des causes sous-jacentes du phénomène, conduisant ainsi à une augmentation des préjugés et des stéréotypes envers la population itinérante. Bref, une vision déformée et incomplète du public peut conduire à des difficultés pour la mise en place de solutions aux problèmes identifiés, ainsi qu'à contribuer à l'augmentation de fausses croyances envers cette population. Donc, en tenant compte de cette question, l'étude a privilégié une approche de type exploratoire descriptif visant à dégager une vision plus comprehensive du phénomène de l'itinérance et de l'utilisation des services de santé et des services sociaux par les hommes dans la condition d'itinérance.