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Chapitre  2   : Problématique de recherche 16

2.3   Conclusion préliminaire : formulation de la question de recherche 27

Salazar (2007) soulève l’importance de reconnaître que de nos jours, le caregiving devient une étape normale dans nos vies et que chacun peut être amené à adopter le rôle d’aidant à un moment dans sa vie. Devant cette réalité, nous sommes confrontés au manque d’informations

sur les jeunes aidants et au fait que nous connaissons encore mal les effets de ce rôle sur leur trajectoire personnelle. Il faut donc améliorer la compréhension de leurs expériences dans le domaine du service social dans le but d’adapter les services à leurs besoins spécifiques. De ce fait, il faut repenser l’enfance et l’adolescence afin de leur donner une voix et que les opinions des jeunes concernant leur vie soient prises en considération. « [If] we understand children not just as individuals but as members of a social group, then we are forced to reflect on that group’s rights to participate in constructing the social order, social policies and practices » (Mayall, 2000 : 256).

L’étude canadienne de Charles, Stainton et Marshall (2012) soulève qu’il faut contrer la tendance à stigmatiser les jeunes et leur famille si l’on veut mieux répondre aux besoins des premiers. Cette stigmatisation existe, car il y a un manque de compréhension entre le concept de jeune aidant et le phénomène de parentification de l’enfant. Aussi, il faut souligner que même au Royaume-Uni, où la réalité des jeunes aidants est reconnue et où ils sont inclut dans des politiques en tant qu’enfants, mais aussi en tant qu’aidants, il existe une tension très présente, c’est-à-dire une tension entre la question de la prévention et du soutien, et la question de la protection. Dans ce sens, la dualité des rôles de ces jeunes pose certainement problème pour la reconnaissance ainsi que pour la pratique, car d’un côté, ce sont des adolescents qui ont besoin de protection contre tout obstacle pouvant compromettre leur développement et, de l’autre côté, ce sont des aidants qui ont certainement besoin de soutien dans leur rôle (Aldridge, 2008).

Par contre, devant ces enjeux, il ne faut pas en négliger un autre qui est présent lorsqu’on s’intéresse aux adolescents ayant adopté le rôle d’aidant. Charles, Stainton et Marshall (2012) écrivent que « le sentiment d’"invisibilité" est l’un des thèmes récurrents pour faire référence à cette période, […] qu’on ne leur offrait que peu ou pas de soutien, même de la part des personnes au fait des circonstances. Il semble que cette "invisibilité" résulte d’une combinaison de facteurs liés à l’indifférence des autres à l’égard des circonstances touchant la famille […] » (p.14). En conséquence, il est nécessaire de développer une dynamique relationnelle souple entre tous les acteurs concernés, c’est-à-dire les jeunes et leur famille, d’une part, et les professionnels qui les entourent, d’autre part. Cela renvoie à la nécessité de mieux comprendre le point de vue de toutes les personnes impliquées et de reconnaître

chacune afin que ses besoins soient respectés. Cette dynamique relationnelle souple représente, d’après nous, un enjeu important lorsqu’il s’agit des jeunes aidants, et c’est pourquoi nous devons mieux comprendre le point de vue de tous pour voir si une dynamique relationnelle souple est possible en ce qui concerne les jeunes aidants.

En nous basant sur les résultats des études recensées, nous avons formulé notre question de recherche de la façon suivante : compte tenu de la réalité des adolescents relativement à l’aide fournie à leur parent dépendant, comment cette réalité est-elle vécue par les adolescents, et comment est-elle perçue et interprétée par les intervenants des différents milieux qui les entourent ? L’objectif principal de la recherche est ainsi de comprendre l’adéquation des visions des adolescents et des intervenants dans la problématique du soutien auprès des parents dépendants, car, comme mentionné préalablement, la façon dont nous percevons la dynamique de la famille oriente les stratégies d’action (Charles, Stainton, Marshall, 2012). Il est ainsi important de connaître les valeurs, les représentations et les attentes de chacun pour savoir si le partenariat « […] est acquis, une possibilité ou une chimère » (Lavoie, Guberman, 2009 : 138). En outre, lorsque nous nous basons sur des exemples comme la France et l’Allemagne, la majorité des professionnels connaissent des enfants et adolescents qui assument des responsabilités dans la prise en charge d’un proche. Or, ne sachant pas quelle intervention privilégier, ils évitent l’engagement auprès de ces jeunes, même s’il y a nécessité d’agir, jusqu’à ce qu’il y ait des problèmes visibles. Dans ce sens, il nous semble qu’il est important de mieux comprendre le point de vue des divers acteurs concernés dans notre contexte québécois, c’est-à-dire les adolescents et les intervenants, lorsque nous visons une meilleure appréhension de la réalité et des besoins des jeunes aidants naturels, ainsi que des enjeux entourant cette réalité. Nous tenterons ainsi de répondre aux objectifs spécifiques suivants :

- Dégager les perspectives des adolescents, ainsi que celles des intervenants, par rapport aux raisons pour lesquelles les adolescents adoptent ce rôle dans leur famille ;

- Soulever des points de convergence et de divergence entre la perspective des jeunes et celle des intervenants entourant le phénomène des jeunes aidants ;

- Dégager la signification de ces points de convergence et de divergence par rapport à notre compréhension de la réalité de adolescents qui sont des aidants auprès de leur parent

Chapitre 3 : Le cadre théorique