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Concepts et notions pour discuter le texte 1 Structure narrative

Chapitre 2 Dramaturgies : l’image, le son, l’espace et le texte au théâtre

2.4.4 Concepts et notions pour discuter le texte 1 Structure narrative

Le livre Guion : escritura activa de Gabrio Zappelli Cerri532 présente une introduction à la structure narrative d’un scénario, ce que l’auteur appelle des paradigmes. Selon Zappelli, le paradigme est une sorte de squelette qui précède l’écriture du scénario. Il sert à construire l’évolution dramatique de l’histoire du début à la fin533. Bien qu’il y ait divers types de paradigmes, dans le cadre de notre recherche, nous nous sommes intéressée au paradigme général534. Celui-ci est présenté dans la figure 4.

Figure 4 Paradigma General 535

Le paradigme est divisé en trois grands moments : l’approche ou l’exposition, le développement et le dénouement, comme la structure dramatique classique. La durée de l’histoire est répartie entre ces trois grands moments : le développement occupe la moitié du temps et le début et la fin, un quart du temps chacun.

532 Gabrio Zappelli Cerri, Guion : escritura activa, Costa Rica, Editorial de la Universidad de Costa Rica, 2003. 533 Ibid., p. 25.

534 Ibid. p. 23-34.

Dans la première partie du paradigme, la fonction de l’approche est de clarifier les contraintes de l’histoire pour le spectateur. Zappelli propose trois principaux facteurs à considérer à ce moment. D’abord, on présente les personnages principaux : leurs caractéristiques physiques, leur idéologie, leur point de vue, leurs valeurs et antivaleurs. Puis, on présente le contexte dramatique, l’ambiance et l’atmosphère : les éléments visuels, le lieu, le contexte. Enfin, on présente les circonstances dramatiques dans lesquelles a lieu l’élément déclencheur. Selon l’auteur, ce déclencheur est provoqué par une causalité ou par le destin qui détourne l’intention initiale des personnages536. Vers la fin de cette première partie et peu avant le début du développement, il y a le premier pivot (connu aussi comme le point de non-retour). Ce pivot amène l’histoire dans une direction inattendue pour le spectateur et multiplie les directions possibles qu’elle peut prendre.

Dans la deuxième partie du paradigme sont présentées l’évolution des événements et la confrontation entre le protagoniste et l’antagoniste. Les processus de changements et l’évolution de la tactique des personnages sont approfondis. À la moitié du développement survient le point du milieu (connu aussi comme le point culminant mineur). Selon Zappelli, dans ce point du milieu, bien que l’histoire ne change pas de direction, elle comporte une révélation et une décision qui propulse la suite. Puis, vers la fin du développement et peu avant le dénouement survient le deuxième pivot (connu aussi comme le point culminant majeur) : c’est le climax. L’histoire commence alors à être dirigée vers une synthèse et dans une seule direction. Selon l’auteur, après ce deuxième pivot, la seule chose qui reste à faire pour le protagoniste et l’antagoniste est la bataille finale.

Dans la troisième partie du paradigme, le protagoniste a un dilemme : « ou il se laisse détruire par l’antagoniste, ou il fait un effort surhumain pour finalement le vaincre537 ». Dans le dénouement, il faut prévoir la fermeture du conflit entre le protagoniste et l’antagoniste à travers la bataille finale, l’autorévélation du besoin psychologique du protagoniste, qui doit être résolu avant de clore l’histoire. Cela peut être un changement idéologique ou une révélation morale chez le protagoniste et les autres personnages. Dans cette dernière partie, il y a une reconstruction de l’équilibre, du point de vue des

536 Ibid., p. 27.

537 Ibid., p. 32. Notre traduction. « [O] se deja destruir por el antagonista, o hace un esfuerzo sobrehumano para finalmente

spectateurs : on voit poindre la nouvelle vie que les personnages ont choisi après la résolution du conflit, mais celle-ci peut aussi comporter le début d’un nouveau conflit.

2.5. Conclusion

Il y a eu une importante évolution historique de la fonction de l’image, du son, de l’espace et du texte dans le théâtre. Le texte, qui était auparavant le générateur de tout le processus de création, doit se battre pour imposer sa présence dans le théâtre contemporain. Le son et l’image, qui étaient au service du texte, sont devenus des langages autonomes, avec un grand potentiel expressif, qui repose entre autres sur les médias numériques actuels. L’espace, qui était statique et frontal, est devenu actif et fondamental pour accueillir le dispositif scénique. Dans ce théâtre hypermédia, la dramaturgie de chacun de ces médias s’impose; c’est dans leur coprésence, leurs échanges et leurs interactions que l’écriture intermédiale peut avoir lieu. Pour cette raison, nous nous interrogeons sur leurs connexions, leur composition et leur mise en relation. Si nous nous penchons sur l’espace, nous devons penser au dispositif : la distribution des équipements techniques, la position des écrans et la diffusion sonore. Nous devons également envisager la fonction de cet espace dans la représentation et dans la relation avec le spectateur. Ainsi, la relation entre espace et médias est décisive dans la composition et le développement de la création. De même, réfléchir aux matériaux de l’espace et aux objets est important pour élaborer chacune des dramaturgiques scéniques d’un tel travail. Pour ce qui est du texte, il devient son quand il est verbalisé par un acteur ou s’il est enregistré. Il peut aussi devenir image s’il est projeté. On doit penser sa relation avec le personnage, en considérant si ce personnage est représenté par un acteur réel, une marionnette, un avatar ou par un son, etc. Le texte peut être un texte dramatique ou un texte-matériau (Danan) et, donc, les connexions entre l’image, le son et l’espace peuvent y varier selon les intentions qu’il y a dans la création. Dans notre travail, ce texte, en tant qu’écriture intermédiale, vise à établir et mettre en lumière des associations, des échanges et des interactions thématiques, sensorielles, matérielles entre les médias pour faire la construction poétique de la représentation. Si nous nous sommes arrêtée à chacun des éléments expressifs, c’était pour penser leurs points de rencontre bien plus que leurs différences. Nous avons tout de même vu que chacun peut avoir sa propre dramaturgie et son propre vocabulaire. Maintenant, nous souhaitons mettre l’accent sur la connexion de

ces dramaturgies pour arriver à une composition artistique unifiée. Dans ce sens, notre regard n’est pas divisé par les spécificités expressives : nous recherchons les potentialités narratives des médias (Gaudreault et Marion) lorsqu’ils sont mis en présence l’un de l’autre. C’est pourquoi nous réfléchissons à l’entrecroisement de certains concepts liés à ces médias. Cela nous aide à trouver un vocabulaire commun. Par exemple, la superposition peut toucher l’image, mais aussi le son, les objets dans l’espace ou le texte. Les niveaux de l’espace scénique peuvent aussi être associés à la position des haut-parleurs dans le dispositif et à la construction de trajectoires sonores. La figure-fond est une notion tirée des arts visuels, mais elle peut être appliquée au son et à la configuration spatiale. Nous voyons que l’écriture intermédiale du théâtre hypermédia peut être facilitée par un vocabulaire partagé. En effet, tout point de rencontre nous aide à mettre en branle la dynamique complexe de sa composition.