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TEXTE, LECTURE, COMPRÉHENSION

CHAPITRE 2 Notion de texte

2.3. Interactions entre les constituants textuels

2.3.1. Conception de F Rastier

Dans un texte, F. Rastier différencie :

trois pôles constitutifs : l’émetteur, le récepteur et le monde ;

deux plans : intrinsèque (rapport au sens du texte des trois pôles) et extrinsèque (rapport de l’émetteur et du récepteur dans le monde réel).

Il dégage deux ordres d’interactions de l’organisation du texte celles entre les trois pôles ;

celles entre le texte et le monde réel.

Cette dernière relation témoigne que la sémantique textuelle dépend non seulement de facteurs linguistiques mais également extralinguistiques. Quant à la première, elle manifeste la dépendance des trois constituants pour (re)construire le sens du texte. Nous dégagerons leurs relations avec l’univers du texte puis dans un second temps leurs relations avec le monde réel.

2.3.1.1. Trois pôles extrinsèques

Si l’émetteur ne peut pas mettre le monde dans l’objet texte, il doit en imaginer un autre et l’y intégrer par des moyens linguistiques. Autrement dit, en dehors du monde réel, l’émetteur, le récepteur et le monde se retrouvent dans le monde imaginaire exprimé dans l’objet texte. Parmi toutes ses pensées, l’émetteur en cible certaines puis construit et exprime des informations par le biais de ses compétences langagières. Le récepteur, lui, reconstruit le message sous forme de représentations mentales. En raison de la différence existant entre les mondes imaginaires des deux sujets, les représentations mentales peuvent diverger, bien que les unes résultent des autres. En outre, il nous paraît intéressant d’analyser les trois relations sémiotiques que F. Rastier ajoute aux opérations de la construction de la sémantique textuelle. La sémiologie, qui porte sur la réduction des signes en images sur monde, mérite toute notre attention dans cette étude. L’auteur explique ainsi que47 :

« Le signe se trouve alors réduit à un objet simplement matériel qui n’a de sens que rapporté à trois relata non linguistiques : le monde de référence, l’émetteur et le récepteur. »

Les différentes relations entre les paramètres constitutifs d’un texte agissent donc sur la compréhension. En sémiologie, la comprehension passé par le recours à des concepts déjà acquis, les mots désignant certaines notions, c’est la conception

fonctionnelle du texte. Si les interlocuteurs ne possèdent pas de connaissances

communes sur les signes, la compréhension est entravée. Nous laissons de côté la représentation des choses (le signe est un symbole) pour nous attacher aux éléments linguistiques :

● l’expression : le signe se présente en tant qu’indice, autrement dit en tant que symptôme de l’émetteur ;

● l’appellation : le signe se perçoit comme un signal pour le récepteur.

Ces deux derniers éléments nous conduisent à prendre en compte la subjectivité de l’auteur, son art du texte. Dans le texte, le monde réel est exprimé à travers des signes dont le lecteur doit déterminer le sens en les mettant en rapport avec

la réalité. Ce traitement est mis en œuvre par des opérations cognitive qui permettent la reconnaissance des causes (les signes linguistiques et les règles de l’enchaînement) et des fonctions du langage (leur signification dans le monde). Pour nous, la reconstruction du sens – propre à un contexte donné – dépend des arts et des habiletés du lecteur. Ainsi, les signes ne fonctionnent que comme des instruments contenant certaines relations sémiologiques.

En réalité, F. Rastier soutient qu’il existe trois causes de variation des représentations : l’auteur est dissocié de son intention en raison du découpage de la réalité ; il pointe vers un monde mais sans le désigner directement ; en outre, s’il avait des destinataires lors de la rédaction du texte, il s’adresse ensuite à tous. Ceci relève de la rencontre de la subjectivité de l’auteur et de celle du lecteur, ce qui provoque une variation des représentations d’un même texte en raison de la discordance des caractères entre l’auteur, le lecteur et le monde. L’auteur est considéré comme le foyer

énonciateur ; le lecteur, qui est le foyer interprétatif, peut l’identifier grâce à son style.

2.3.1.2. Trois pôles intrinsèques

Au cours de l’activité d’interprétation, le plan intrinsèque (le monde) résulte de la réflexion sur le plan extrinsèque (les interactions dans l’objet texte entre les trois paramètres : l’émetteur, le récepteur et le monde). Dans la situation de lecture, les trois pôles intrinsèques, qui sont les trois paramètres en relation avec le monde réel, interagissent par leur incidence sur le texte en contact avec le réel. Par exemple, le genre détermine l’emploi des unités linguistiques relatives à la place de l’énonciateur et du destinataire. Leur statut dans le monde du texte est en effet mesuré par celui qu’ils ont dans la réalité. F. Rastier fait appel à la théorie de l’impression référentielle48 qui définit les trois pôles en les détachant du réel afin de préciser leur rôle dans le texte.

Pour discerner les pôles intrinsèques, dès l’entrée dans le texte, monde à construire, le récepteur réel crée des images fictives en se référant à la réalité pour construire la compréhension du texte. Nous découvrons donc les interactions entre les plans intrinsèque et extrinsèque. F. Rastier nous explique à ce sujet49 que

« Certes, le lecteur réel s’imagine un monde, un auteur, et peut-être lui- même. Ses représentations, rapportées à la réalité supposée des pôles extrinsèques, deviennent pour lui le ‘réel’. »

Dès lors, la reconstruction du sens textuel se réalise dans le monde imaginaire où se trouvent les trois pôles.