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Communication et excommunication

2.1. Incommensurabilité 1 Une fusillade

2.1.2. Communication et excommunication

Le professeur de sociologie Jacques Beauchemin suggère, dans un texte d’opinion rédigé quelques jours après la fusillade, que le diagnostic des spécialistes de la santé mentale empêche, dans une certaine mesure, de bien comprendre le sens de l’événement en créant une distance « insondable » avec la personnalité troublée du tireur. Il suggère qu’une telle démonstration de violence possède au contraire une valeur heuristique irréductible capable de « nous » livrer « quelques enseignements en ce qui concerne notre société ». Or, si la prémisse de son hypothèse est intéressante, l’analyse sociopolitique qu’il offre des rapports entre les « communautés de marginaux » et le corps social l’amène curieusement à reconduire l’objet de sa critique : il termine son article en jugeant d’« insensée », d’« étrange et froide », la violence manifestée par le jeune meurtrier (Beauchemin, 2006).

L’essayiste allemand Hans Magnus Enzensberger esquisse en quelques traits, dans un petit livre paru un peu plus tôt la même année, le type psychologique du « perdant radical » dont il se sert pour expliquer l’inexplicable, embrassant sous le chapiteau de son analyse aussi bien les agissements d’Adolf Hitler que ceux des « tireurs fous »

(pères meurtriers, solitaires déséquilibrés, adolescents désaffectés) et des fanatiques terroristes (les « suicide bombers » notamment) (2006). En suggérant, a contrario des idées reçues, que le « perdant radical » est le résidu normal de la forme actuelle qu’adoptent « nos » sociétés occidentales, l’essai d’Enzensberger a le mérite de rapprocher ces sujets « désaxés » des communautés qu’ils prennent pour cibles et dont elles souhaitent, pour leur part, se dissocier… radicalement. Toutefois, l’étude du type psychologique qui s’ensuit recouvre plus qu’elle n’éclaire cette problématique : qu’en est-il de la nature des rapports, des relations, qu’entretiennent ces « perdants » (voire ces « collectifs de perdants »)63 avec ce qu’ils ont perdu — le sens d’une certaine

commune mesure, le partage des valeurs qui « nous » servent précisément à les qualifier de « losers »?

Sur les manières dont s’est ressentie l’expérience du drame chez ceux qui n’étaient pas présents sur les lieux ce 13 septembre — mais devant leur téléviseur, connectés au fil de presse électronique ou penchés sur le journal : le public, les spectateurs — les témoignages présentent une certaine ambiguïté. Plusieurs se disant profondément choqués par ce qui s’est produit trouvent néanmoins les capacités — sinon le besoin — de décrire froidement et en détail qui des photographies, qui les draps maculés de sang couvrant le corps du tireur, qui les déclarations du ministre de la Sécurité publique, etc. D’autres, au contraire, affirment ne pas avoir été touchés en raison de la distance provoquée par la surexposition à une machine médiatique incapable de recul, traitant l’actualité immédiatement, confondant les moyens de l’information directe avec les fins de son analyse.

63 L’expression « collectifs de perdants » n’est pas sans rappeler la formule aporétique de Bataille sur la

De cette dérangeante expérience informée par l’intrication de la rumeur populaire et des discours experts (professeurs, psychologues, sociologues) émerge néanmoins avec insistance l’expression d’un refus de « comprendre » l’incident : de le prendre avec « nous ». Ce jeune homme devenu « fou », « insensé », une communauté entière n’en veut pas et manifeste ostensiblement sa volonté de rejeter jusqu’à son existence, voire de nier les liens qui l’unissent à lui. Tout se passe comme si les discours se solidarisaient dans le but de ne prendre pour objet le jeune homme que pour mieux s’en séparer. À un point tel où le caractère inexplicable de l’événement paraît avoir pour fonction — sinon pour effet — de faire communauté. Un processus de communication paradoxale semble à l’œuvre qui tire son mouvement d’une excommunication, c’est-à- dire étymologiquement d’une « mise-hors-de-la-communauté ». La mise en forme d’un monstrueux incommensurable apparaît intimement liée à une mise en commun64.

D’une part, « nous » ne cessons de réitérer l’importance d’une coexistence politique harmonieuse, de penser les relations communes au profit des termes individués. En témoigne l’échange intensif entre désir populaire et émetteurs spécialisés organisé autour de thèmes tels la mondialisation, la « grande famille humaine », les droits humains, les périls menaçant « nos » frontières communes (réchauffement planétaire, etc.), les mobilisations mondiales contre la guerre, contre les génocides, contre la

64 Le « monstrueux » est ce qui se présente — ce qui fait monstration — à l’entendement paradoxalement

comme ce qui lui échappe. Dans la mesure où il n’y a pas de « savoir qui ne suppose et ne constitue des relations de pouvoir », comme l’a montré Foucault, le monstrueux pose d’emblée un problème politique (1975 : 32; 2001c; Nuzzo, 2013). Suivant cette fois ses rapports à l’incommunicabilité, il y aurait lieu de développer l’idée que la communication a, à certains égards, quelque chose de fondamentalement monstrueux. Ce serait une manière de souligner que son « fond sans fond », suivant l’expression de Blanchot, si elle présente bien une opportunité, constitue aussi un risque, et qu’en aucun cas elle ne se présente avec l’aisance d’une solution tranquille. La réflexion qui engage ici le monstrueux avec l’idée

violence, etc. D’autre part, nul ne peut ignorer les effets qui secouent ces liens, parfois jusqu’à les rompre. L’idéal de communauté est agité de ressentiments, s’exprime dans la violence (montée des « communautarismes » identifiées à un « péril communautaire » : le cas de la dette publique grecque sera l’occasion d’y revenir), alors que les prêches en faveur d’un « vivre ensemble » prennent souvent la forme — à gauche comme à droite — de condamnation ou d’appel au schisme, à la division, à la suppression, à la désintégration, à la séparation. Les exemples sont aussi nombreux que disparates et se laissent observer sur différents plans, à différentes échelles. Les Mothers Against Drunk Drivers souhaitent « éliminer » l’alcool au volant; des associations juives poursuivent et, parfois, parviennent à faire emprisonner des auteurs dits « négationnistes »; l’association militante française « Les Identitaires » s’oppose farouchement au métissage ethnique et particulièrement à l’« islamisation » de l’Europe, l’ONU menace d’embargo économique la Corée du Nord qui se livre à des essais nucléaires dans la mer du Japon, etc. La tension oppositionnelle qui articule individualisme et forme de vie en commun semble tout à la fois intenable et persistante.

À l’automne 2001, les opposants à la politique interventionniste du président américain Georges W. Bush se sont acharnés sur le caractère réducteur de l’une de ces fameuses formules : « You’re either with us or against us ».65 Ce qui n’a pas été

suffisamment commenté, c’est à quel point la phrase reflétait — et reflète encore — une manière de vivre irréductible à un programme politique particulier, à une idéologie religieuse, voire à un système économique. Ceux qui brandissent le slogan omnia sunt communia partagent peut-être, malgré eux, cette manière avec l’ancien président américain.

N’y aurait-il pas moyen de comprendre cette contradiction pour ce qu’elle est, sans chercher à l’infléchir vers un programme? De manière générale, la formation des communautés semble s’opérer en lien avec la désintégration d’un autre corps social, ou encore en réaction à la crainte de leur propre désintégration. Le processus d’inclusion semble systématiquement impliquer — quoiqu’à des degrés très variables et de diverses manières — un processus symétrique d’exclusion66. Tony Seug l’exprime avec

clarté dans un ouvrage consacré à l’idée de communauté chez Heidegger — ouvertement influencée par les travaux de Nancy — où il tente de déployer une « communauté sans identité » afin d’engager précisément cette impasse :

Communities, as such, have an appearance of inclusiveness. However, there is also a structure of exclusion inherent in the logic of communities – this is because the attempt to include a set of beings itself demands the exclusion of another set of beings. (2009 : 15; emphases de l’auteur)

Cela se vérifie au du point de vue grammatical, dans la fonction du « nous » qui peut être tout à la fois inclusif et exclusif, modeste et autoritaire, et que Michel Marcoccia a pu qualifier de « nous paradoxal » (2004 : 152). Comme copule langagière d’interaction, le « nous » — dont les fonctions d’exclusion et d’inclusion ne sont pas spécifiques au français, mais se retrouvent dans plusieurs autres langues — pointe par ailleurs déjà les dimensions politiques auxquelles il se trouve étroitement intriqué (Benveniste, 1966 : 233-236; Guespin, 1985). Alain Vinson suggère que l’inclusion n’est toujours qu’espérée et propose d’en faire un « nous d’espérance » (1986). Denis de

66 Le fonctionnement d’une « inclusion exclusive » a notamment été mise en lumière par l’étude du

paradigme des camps à laquelle s’est livrée Agamben dans l’essai Homo Sacer et dont le présent projet s’inspire, sans s’y toutefois s’y réduire (1997). Il faudrait montrer ailleurs à quel point l’effort que met Agamben à neutraliser l’articulation dialectique de l’exclusion et de l’inclusion participe de la même éthique — qui est le nom de sa méthode, s’il peut lui en être prêtée une — qui vise à penser la communauté sous un jour qui n’est pas celui qui se donne à penser dans la séparation du propre et du

Rougemont souligne pour sa part le danger le plus grand que supporte cette espérance de communion en affirmant que « [les] partisans du nous ont fait erreur sur la personne » dans la mesure où ce « nous » est également celui du fascisme, peut-être l’expression la plus aiguë de l’« angle mort » examiné ici (1936 : 236-241). Chantal Mouffe repère cette tension comme une dimension inhérente de la démocratie parlementaire moderne (2000). Les problèmes associés à l’immigration — laquelle est notamment induite par la pression de crise économique, de guerres civiles et d’exactions religieuses — exposent cet enjeu avec gravité67. Il apparaît ainsi que la

question du vivre ensemble en est une de mouvement sans cesse reconduit, de processus d’inclusion et d’exclusion continu : vivre ensemble, c’est aussi bien vivre séparés, d’une séparation qui tranche parfois à même la vie.

Si cette dissertation s’arrêtait à ce dernier constat, qui au demeurant n’est pas un « simple » constat, elle s’engagerait sans doute dans la voie d’une « critique de la séparation ». Or ce n’est pas le problème qui l’intéresse. Une telle critique a déjà reçu de nombreuses formulations au cours des deux derniers siècles, avec au premier rang celle de Karl Marx, explicitement reprise par Raoul Vaneigem et Guy Debord, systématiquement reconduite par les différentes variations de la critique de l’aliénation qui verront — et voient toujours — le jour au 20e siècle. La tentation inverse consisterait

en une critique de l’« intégration », et à plus forte raison de l’intégration de la théorie critique, tel qu’elle a pu être esquissée à la fin des années soixante-dix par différents penseurs68. C’est bien plutôt la confusion actuelle et effective — non pas simplement

théorisée — d’un tel mouvement, sa forme aporétique d’emblée épistémologique,

67 En avril 2015, c’est par centaines que se comptait le nombre de victimes qui périssaient par noyade

alors qu’elles tentaient de fuir la Syrie et la Libye pour rejoindre, par la Méditerranée, les côtes des pays européens.

politique et éthique, qui motive la présente dissertation. Comment, sans tenter tout de suite de la dévaluer au profit d’une solution, rendre compte de cette confusion?

Comment penser l’être-avec de deux termes qui ne paraissent communiquer que par l’opération qui les sépare? Comment s’opère le lien entre la mise en forme de la communauté et l’apparente isolation d’individus définis comme restes élémentaires, ontologiquement séparés du corps social? Comment penser la conjugaison d’un idéal d’inclusion humaniste et celui d’une désintégration individuelle? Que gagnerait-on à penser l’impensable de ces événements moins en des termes statiques et prédéfinis que dans la perspective d’un processus proprement communicationnel concernant les manières, les modes par lesquels sont mises en forme les relations entre ce qui cherche précisément à se donner comme radicalement séparé?

Plutôt que d’apporter une réponse définitive à ces questions, ce que la fusillade du Collège Dawson doit d’abord permettre d’exposer c’est le noeud qui lie ensemble les problèmes épistémologiques aux enjeux politiques dans la difficulté qui consiste à comprendre l’incompréhensible. Cet incompréhensible — celui du geste meurtrier insensé — sera examiné à la lumière du thème de l’incommensurabilité. Son rapport aux formes de coexistence — de communauté — permettra de replacer le caractère insensé du geste posé en septembre 2006 dans un horizon historique plus large. Plutôt que d’en retirer « un » sens, il sera à tout le moins donné l’occasion d’apprécier le caractère commun, partagé, de sa béance, de sa blessure.

2.1.3. Incommensurabilité

Dans un discours livré le 12 janvier 2011 lors du mémorial Together We Thrive : Tucson and America tenu en hommage aux victimes de la fusillade de Tuscon, en

Arizona, où six personnes ont perdu la vie, le président Barack Obama a offert l’observation suivante :

You see, when a tragedy like this strikes, it is part of our nature to demand explanations—to try and pose some order on the chaos and make sense out of that which seems senseless. […]

Scripture tells us that there is evil in the world, and that terrible things happen for reasons that defy human understanding. In the words of Job, “When I looked for light, then came darkness.” Bad things happen, and we have to guard against simple explanations in the aftermath. […] For the truth is none of us can know exactly what triggered this vicious attack. (The White House, 2011).

Ces idées, qui rappellent celles exprimées à cinq ans d’intervalle par les politiciens canadiens lors de la fusillade du Collège Dawson, expriment avec acuité la nécessité contradictoire qui semble s’imposer à l’expérience chaque fois qu’une tragédie similaire se produit et qui « nous » tient écartelés comme au-dessus du gouffre qu’elle dévoile. D’une part, un besoin pressant demande de combler d’un sens la brèche insensée qu’est la tragédie, de suturer d’explications la déchirure que la mort inflige au frêle tissu qu’est ce « nous », même (ou surtout) dans ses manières problématiques. L’expérience à laquelle expose chaque itération de cette lacération semble constituer la limite même de ce qui peut être pensé, la limite du pensable. Ne sommes-« nous » pas réunis — récitent les mythes fondateurs de la pensée politique, notamment ceux hobbesiens – par crainte de la mort violente69? Or voici qu’elle resurgit non pas aux

frontières de notre cohésion — aux versants externes des valeurs, lois et normes que

69 Esposito a examiné la fonction politique de la peur dans le chapitre de son ouvrage Communitas qu’il

consacre à Thomas Hobbes : « En somme, et du moins de façon potentielle, la peur a une fonction non seulement destructive, mais également constructive. Elle ne détermine pas uniquement la fuite et l’isolement, mais aussi la relation et l’union; elle ne se limite pas à bloquer et immobiliser, mais pousse aussi à réfléchir et à neutraliser le danger; elle ne se tient pas du côté de l’irrationnel, mais du côté de la raison. » (2000 : 38). Brian Massumi offre de son côté un traitement actualisé du thème de la peur dans

« nous » partageons et qui « nous » rassemblent —, mais bien à l’intérieur même de ce « nous », en « nous », en notre intimité, au cœur de « nos » espaces publics, dans les écoles que fréquentent « nos » enfants, dans les bureaux où « nous » employons « notre » citoyenneté au maintien et à l’épanouissement de « notre » milieu de vie, dans les enceintes des universités où — selon la tradition — « nous » exerçons en groupe notre sens critique afin de maintenir la liberté qui fonde « nos » associations, jusqu’aux centres commerciaux où « nous » profitons de ce que cet effort commun confère en matière d’insulation contre les menaces imprévisibles qui planent dans « le silence éternel des espaces infinis ».70 Comment la mort peut-elle surgir à même le dispositif

déployé pour la prévenir, ou à tout le moins pour la maintenir au seuil de son inévitabilité? « Nous » demandons une manière d’accueillir cette expérience irrecevable; une manière qui peut de surcroît être commune, c’est-à-dire une façon d’absorber le choc ensemble, entre « nous », de partager ce bris d’insulation, mais d’un partage qui ne « nous » partagerait pas en retour.

D’un autre côté, il existe aussi le sentiment que certaines choses devraient demeurer dans l’ombre, ne pas être portées à la lumière. Non seulement est-il difficile d’assigner des explications là où, de surcroît, le motif est manquant, mais il semble parfois nécessaire de ne pas charger la raison d’une tâche aussi risquée. C’est ce qu’exprime l’inclination prescriptive du « Nous ne pouvons pas comprendre » énoncé par le politicien Gilles Duceppe au lendemain de la fusillade du Collège Dawson. Il ne s’agit pas seulement de « notre » incapacité à comprendre, mais de faire le choix délibéré de ne pas comprendre. Ces tragédies dépassent l’entendement, mais il peut aussi sembler nécessaire de tenir la raison loin de la source chaotique d’où elles ont pu jaillir. Aussi,

la détresse ne fuse-t-elle pas seulement de la contradiction entre le besoin d’explication et le caractère insensé du geste, mais de manière plus aiguë encore dans l’écartèlement douloureux entre le désir de comprendre et le sentiment que quelque chose de la tragédie, justement, ne doit pas être « pris », que quelque chose doit demeurer dans la distance insondable. Dans L’écriture du désastre, Blanchot rappelle l’âge de cet impératif d’apotropaïque :

C’est l’expérience grecque, tel que nous la reconstituons, qui privilégie la « limite » et qui confirme l’antique scandale de la rencontre de l’irrationnel, c’est-à-dire de la non-convenance de ce qui, dans la mesure, ne se mesure pas (le premier qui divulgua l’incommensurabilité de la diagonale du carré, périt, noyé dans un naufrage : c’est qu’il avait fait la rencontre d’une mort tout autre, le non-lieu du sans frontière…) (1980 : 160- 161).

Comme dans la légende grecque, « nous » sentons qu’il existe un risque à s’exposer à un domaine qui ne relève pas de l’ordre que « nous » reconnaissons, comme si le contact avec ces magnitudes irrationnelles pouvait en quelque manière contaminer le tissu de cohérence qui règle notre coexistence. Afin de « nous » prémunir contre l’exposition au chaos, « nous » sentons que certaines choses doivent être gardées à distance, inconnaissables, irreprésentables et incommunicables71.

Dans un essai portant sur Thomas Kuhn — et visant explicitement à invalider sa thèse célèbre sur l’incommensurabilité des paradigmes scientifiques, dont il a déjà été question — le documentariste et écrivain Errol Morris argue que le récit de la crise

71 Encore tout récemment, au sujet des fusillades de Copenhague du 14 et 15 février 2015, il était suggéré :

« There is no understanding El-Hussein—let us state that in advance. It can be foolish to attempt to plumb the

accompagnant la découverte des nombres « de magnitudes incommensurables » est une fabrication entièrement moderne :

Someone believed that there should have been a crisis even if there wasn’t any. They believed that the Pythagoreans should have been upset about the discovery of incommensurable magnitudes. But it was a retrospective belief, that is, a belief formed hundreds, if not thousands of years, after the crisis was supposed to have occurred. (2011)

L’histoire de la crise accompagnant la divulgation de l’incommensurabilité de la diagonale est à la fois bien connue et chargée de controverses. Il ne s’agit pas d’arguer contra Morris qu’une crise a bel et bien eu lieu, mais bien de reconnaître qu’il existe, dans les textes anciens, des mentions d’une « légende », d’une « allégorie », d’un