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3 MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE

3.5 Collecte de données

Il va sans dire que les techniques de collecte de données proposées ci-après sont envisagées de façon itérative, c’est-à-dire dans l’idée d’opérer un va-et-vient constant entre une actualisation théorique et le processus de collecte de données. Elles sont aussi inductives,

donc laissent les connaissances émerger à partir des données recueillies sur le terrain et des observations spécifiques faites au cours de processus de collecte de données.

3.5.1 Recherche documentaire

Selon Olivier et Tremblay (2000, p.149), la recherche documentaire permet de dresser un portrait de l’état de la connaissance sur un thème de recherche précis, et ce, en amont de la démarche de recherche scientifique. Il s’agit d’une démarche généralement constituée de cinq étapes soit de : a) se questionner b) se familiariser avec les outils de recherche c) apprendre et agir d) évaluer le matériel obtenu et e) localiser la documentation et l’information (p.150).

Dans un premier temps, j’ai effectué ces différentes étapes dans le but de documenter le phénomène de l’étude de cas, soit l’intersectionnalité et les pratiques intersectionnelles, mais je suis aussi allée au-delà des recommandations des auteures, j’ai utilisé la recherche documentaire en tant que méthode de collecte de données. En ce sens, l’étude de cas suggère de compiler les traces objectivées du site. Ces traces objectivées sont en quelque sorte les différents documents produits dans le cadre du site (procès-verbaux, organigramme, articles, mémoires, affiches, etc.) (Albarello, 2011, p. 52). Ces documents m’ont permis d’avoir une meilleure connaissance et une compréhension plus affinée de l’organisme.

Pour chaque document retenu, j’ai produit une fiche synthèse qui me permettait de faire ressortir les principaux éléments du document consulté.

3.5.2 Entretiens semi-dirigés individuels

Cette technique de collecte de données m’a permis de réaliser dix entrevues semi-dirigées (ou semi-structurées) d’environ une heure avec des intervenant·e·s, des membres de CA et des participant·e·s de l’organisme. J'ai opté pour l'entrevue semi-dirigée à questions ouvertes. Cette forme d'entrevue laisse plus de liberté à la personne interrogée pour s'exprimer tout en permettant de garder un cadre restreint par les questions posées (Mayer et Saint-Jacques, 2000, p.120). Ce type d'entrevue a été choisi pour permettre aux personnes interviewées de me parler de leurs pratiques en profondeur tout en me permettant

de récolter les informations désirées. J’ai cherché à faire des entretiens qui se situent à mi- chemin entre la directivité et la liberté et qui cherchent à aborder les thèmes en profondeur. Les entrevues semi-structurées intégraient les notions de savoirs d’expérience et permettaient d’observer en quoi les connaissances générées par la pratique étaient différentes ou non de celles venant d’une démarche théorique. Il s’agissait aussi de donner une valeur aux récits comme lieu de connaissance et d’appréhender la manière dont les personnes percevaient la situation afin d’en saisir les logiques d’action présentes.

Le guide d’entretien6 a été considéré comme un outil permettant de structurer les questions autour des thèmes centraux de la recherche qui sont explicités dans le cadre conceptuel. Le schéma d’entrevue a été constitué à partir de ma question de recherche, des questions de recherches opérationnelles et des objectifs.

J’ai adapté le guide d’entretien selon les différentes catégories de personnes approchées, soit les participant·e·s, les intervenantes, le personnel administratif et les membres du CA. Je travaillais donc à partir de quatre guides d’entretien dont le tronc était commun. J’ai divisé le questionnaire en trois parties. La première portait sur les difficultés rencontrées par les membres de l’AMEIPH. La deuxième, sur les pratiques et les activités mises en place par l’organisme. La troisième portait sur les effets de l’implication dans les parcours des membres, plus particulièrement en termes de transformation des rapports de pouvoir. Une entrevue test a permis de reformuler des questions et de bonifier ma compréhension du sujet. Le guide d’entretien a subi des modifications mineures au cours des entrevues. Les entrevues ont été menées en français.

Les entretiens ont eu lieu, pour la majorité, dans les locaux de l’organisme, deux entrevues se sont déroulées à domicile afin de faciliter la question du transport pour certaines participantes. Les entretiens ont débuté par l’explication du déroulement de l’entrevue, un rappel des objectifs de ma recherche et la clarification de certaines questions générales si nécessaire. Le formulaire de consentement a été ensuite lu, discuté et signé, et une copie signée leur a été remise. Après avoir démarré l’enregistrement, j'ai posé les questions figurant à mon guide d’entretien tout en respectant le développement « naturel » de la

6 Voir Annexes C, D et E

conversation. Les entretiens ont duré entre 60 minutes et 1 heure 30. Les entrevues ont été réalisées conjointement avec des séances d’observation participante.

3.5.3 Observation participante

À titre de troisième stratégie de collecte, j’ai fait une quinzaine de séances d’observation participante à l’organisme. Les données recueillies m’ont permis d’approfondir le repérage des pratiques d’intervention et organisationnelles de l’organisme. Ces moments m’ont permis d’observer les interactions dans le milieu, d’affiner ma compréhension des dynamiques dans l’organisation et de mieux m’imprégner de l’énergie du milieu.

L’observation participante fait partie du spectre large de l’observation directe qui, selon Petrez (1998, p.48), cité dans Deslauriers et Mayer (2000, p.137), compte trois temps d’activité : « une forme d’interaction sociale avec le milieu étudié pour être présent sur les lieux, des activités d’observation et, enfin, un enregistrement des données observées, c’est- à-dire principalement une prise de note ».

Il serait plus juste de dire que l’observation faite dans cette recherche était inspirée de l’observation participante, puisqu’il ne s’agissait pas d’observation participante complète au sens ethnographique du terme. Toutefois, j’ai quand même choisi de définir le type d’observation mobilisé comme une observation participante puisque ma participation dans les activités observées était sollicitée explicitement par l’organisme. Albarello (2011, p.69) réfère au fait que le ou la chercheur·e peut être amené·e à participer à un événement qui surgit lorsqu’il ou elle est présent·e au sein du site et même à y jouer un certain rôle. J’ai expérimenté une telle situation lorsque les participantes d’une activité m’ont déléguée pour faire l’animation de la cuisine collective du mois suivant, mes tâches dépassaient alors l’observation participante puis que j’étais responsable de l’activité. J’ai décidé de jouer le jeu et d’incarner le rôle qui m’avait été délégué le temps d’un après-midi.

Contrairement aux formes conventionnelles d’observation participante, les objectifs poursuivis par le recours à cette méthode ne sont pas de s’insérer à long terme au sein de la communauté étudiée ni d’approfondir la compréhension du phénomène étudié par un engagement personnel et durable. (Deslauriers et Mayer, 2000, p.137), mais plutôt de découvrir de nouvelles pratiques, de les explorer, de les voir et les « sentir ». C’est pourquoi

j’ai aussi opté pour un type d’observation nommée « observation libre », qui est utile pour « découvrir et explorer un nouveau terrain d’intervention » (Deslauriers et Mayer, 2000, p.138). J’ai produit une grille d’observation7 qui a guidé mes observations sur le terrain. Les observations se sont déroulées dans le cadre d’événements, d’ateliers ou de réunions, le détail des observations est précisé dans le tableau des observations ci-bas. J’ai tenté d’aller chercher une diversité dans les moments d’observation afin d’avoir une plus grande représentativité. J’ai ciblé, entre autres, des réunions d’équipe pertinentes, des activités et des fêtes de l’organisme. L'observation s’est aussi beaucoup faite de façon informelle et aléatoire. Je m’arrêtais un moment dans le couloir pour parler avec les intervenant·e·s ou des participant·e·s. Aussi à l'heure du dîner où la plupart des personnes se retrouvent pour manger dans les locaux.

Tableau 3 : Les moments d’observation

Type d’activité (récurrence) Détail des activités (récurrence) Accueil et roulement régulier (3) Observation libre (3)

Réunion (5) Rencontre d’équipe (4)

Séance de préparation de la cuisine collective (1)

Atelier (7) Cuisine collective (2)

Atelier d’expression artistique (2)

Atelier d’information sur le thème de l’emploi (1) Préparation de l’activité du marché de Noël (1) Café-rencontre (1)

Fête (2) Activité de départ d’une stagiaire et fête d’un

étudiant (1) Fête d’hiver (1) Activité de financement (1) Marché de Noël (1)

7 Voir Annexe F

Lors de ces occasions, j’ai pu m’informer sur les services disponibles, voir comment fonctionne l’organisation ainsi qu'échanger autant avec le personnel qu’avec certain·e·s participant·e·s. Le fait de participer régulièrement dans les activités de l’organisme a facilité la rencontre régulière avec les personnes liées à organisme. Cette régularité a permis de développer la familiarité et la confiance réciproque nécessaire (Mucchielli 2009, 166) avec le milieu pour pouvoir m’insérer dans la dynamique de l’organisme, c'est-à-dire que cela m’a permis de m’insérer dans la logique d'action spécifique de l’organisme, selon la propre dynamique du milieu (Olivier de Sardan 2008).

Lorsque je participais dans une activité, je prenais toujours un moment pour me présenter et présenter le projet, toutefois les moments d’observation sélectionnés ont tous pris place dans des activités qui étaient de nature publique, les formulaires de consentement n’ont donc pas été nécessaires. Un journal de terrain était également rempli suite à chacune des séances observation tel que recommandé par Chauvin et Jounin (2010, p. 158).