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Citoyenneté : du juridique à la reconnaissance par ses concitoyens

4.4. La charte de l’AVJPN et les enjeux qu’elle aborde

4.4.1. Citoyenneté : du juridique à la reconnaissance par ses concitoyens

Le premier enjeu que j’aborderai est celui de la citoyenneté. Lors de la hiérarchisation des valeurs faite par les membres, elle était située en deuxième position après « le volontariat ». Au cours de cette journée d’écriture, ils ont défini la citoyenneté comme « celui ou celle qui prend part à la construction de sa province, du Pays en participant dans la définition des politiques publiques en faveur de la jeunesse ». Ils devaient également formuler une « phrase d’action » devant représenter les engagements de l’AVJPN concernant cette valeur. Ainsi, ils engageaient leurs membres à « être acteur de [leur] propre avenir dans le respect de l’application des droits et devoirs dans l’intérêt de tous ». Il m’est alors apparu intéressant de m’interroger sur l’utilisation de cette notion par l’AVJPN, me questionnant sur les processus à l’œuvre dans la « fabrique de la citoyenneté » où « s’entremêlent dimensions statutaires et relationnelles, enjeux d’appartenance et d’engagement, rapport à l’État et aux autres » (Gagné et Neveu 2009 : 8). La notion de citoyenneté revêt divers sens

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que ce soit « le citoyen » en tant qu’individu en relation avec un État ou « le citoyen » membre d’une collectivité « juridiquement constituée et socialement construite » (Neveu 2004 : 4). Avant d’aborder ces deux dimensions de la citoyenneté, un détour par l’histoire s’avère toutefois nécessaire pour resituer la construction de la notion en Nouvelle-Calédonie à travers le temps.

Depuis les débuts de l’histoire coloniale jusqu’à aujourd’hui, la citoyenneté est au cœur de processus d’inclusion et d’exclusion en Nouvelle-Calédonie. D’abord relayés au statut de sujet de la République sous le régime de l’indigénat, les Kanak avaient accès à la nationalité française sans la citoyenneté qui donne accès au Code civil (Merle 2010 : 20). Cette manière d’exclure les Kanak de la citoyenneté en leur accordant le statut de « sujet » permettait à l’administration coloniale de s’écarter des principes républicains et de maintenir un régime de droits distincts pour une population particulière. Pour permettre cette exclusion, la République s’est appuyée sur un système de représentations au détriment des Kanak. Les récits du capitaine français d’Entrecasteaux publiés en 1808 qui décrivent les Kanak comme des cannibales, font alors autorité et les situent au plus bas de l’échelle sociale (LeFevre 2013b : 33). Au plus fort de l’entreprise coloniale, leur infériorité était si évidente que l’on croyait qu’ils allaient tout simplement disparaitre :

Living as they did as prehistoric relics in such a state of degradation and evolutionary backwardness, Kanak could not possibly survive the arrival of the European race and the onslaught of modernity it premised. Their inferiority in the face of the French civilization was so great it ensured their inevitable extinction. (LeFevre 2013b : 40)

Ce genre de représentation permettait de justifier le régime de droits particuliers auxquels devaient se soumettre les Kanak. Si la fin du régime de l’indigénat en 1946 permit l’accession au statut de citoyen, le régime de représentations qui pèse sur les Kanak n’a pas disparu, pas plus qu’elle ne mit fin à un traitement différencié en matière de droits civils puisque les Kanak sont régis par le statut civil coutumier (appelé droit coutumier depuis l’Accord de Nouméa, voir Salomon 2002 : 8), sauf pour ceux qui y ont renoncé. Ce statut civil coutumier, participe à réaffirmer la distinction des citoyens non kanak et kanak. Ces derniers se voient conférer « des droits fonciers spécifiques sur les “terres coutumières” et [le statut civil coutumier] renvoie les Kanak qui en relèvent devant des juridictions civiles avec “assesseurs coutumiers” (des Kanak) pour toutes les affaires qui concernent la famille » (Demmer et Salomon 2013 : 65). Comme le précise encore Salomon, « [s]i le maintien de la distinction de statut personnel est interprété de nos jours comme le signe de la reconnaissance

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juridique par l’état français de l’identité kanake, il ne faut pas perdre de vue que cette distinction de statut a longtemps recouvert une séparation profonde dans l’organisation de la vie locale à tous les niveaux » (2002 : 8).

À la suite de la signature de l’Accord de Nouméa, une nouvelle notion, celle de citoyenneté néo- calédonienne fit son apparition dans les débats entourant les processus d’inclusion et d’exclusion rattachés à la citoyenneté et vint introduire la notion-clé de « destin commun ».

Il est aujourd’hui nécessaire de poser les bases d’une citoyenneté de la Nouvelle-Calédonie permettant au peuple d’origine de constituer avec les hommes et les femmes qui y vivent une communauté humaine affirmant son destin commun. (Accord de Nouméa)

Ainsi, la création de cette notion de citoyenneté néo-calédonienne s’inscrit « dans un processus de “décolonisation”, car c’est bien le terme employé dans l'Accord de Nouméa (1998), dont l’originalité est de fixer par avance et dans un processus irréversible les étapes du transfert de compétences de l’État français à la Nouvelle-Calédonie, avec, à terme, la transformation possible de la citoyenneté en nationalité néo-calédonienne » (Gagné et Salaün 2007), advenant le cas que le référendum débouche sur l'indépendance.

Pour l’instant, cette citoyenneté calédonienne se situe donc « à l’intérieur » de la citoyenneté française. Ainsi, si tous les citoyens de la Nouvelle-Calédonie sont citoyens français, tous les citoyens français, même ceux résidant en Nouvelle-Calédonie, ne sont pas nécessairement citoyens néo-calédoniens. Le principe fondant la restriction d’accès à la citoyenneté néo-calédonienne se trouve dans l’ancienneté de résidence et est rattaché au corps électoral. L’article 4 de l’accord de Nouméa institue une citoyenneté calédonienne qui se rattache aux conditions fixées dans l’article 188 de la Loi organique no 99-109 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie40, c’est-

à-dire, au corps électoral restreint.

Pour cette période, la notion de citoyenneté fonde les restrictions apportées au corps électoral pour les élections aux institutions du pays et pour la consultation finale. Elle sera aussi une référence pour la mise au point des dispositions qui seront définies pour préserver l’emploi local. (Accord de Nouméa)

40 La loi organique relative à la Nouvelle-Calédonie est le texte déterminant le cadre juridique de l’organisation

institutionnelle de la Nouvelle-Calédonie. Elle établit les normes juridiques du nouveau statut prévu par l’accord de Nouméa.

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En Nouvelle-Calédonie, trois corps électoraux coexistent. En premier lieu, on retrouve un corps électoral pour les élections nationales et européennes ouvert à tous les citoyens français majeurs. En deuxième lieu, on retrouve un corps électoral dit « restreint » pour le scrutin d’autodétermination prévu entre 2014 et 2018. Les électeurs admis à y participer doivent remplir l’un des huit critères suivants :

a) avoir été admis à participer à la consultation du 8 novembre 1998;

b) n’étant pas inscrit sur la liste électorale pour la consultation du 8 novembre 1998, remplir néanmoins la condition de domicile requise pour être électeur à cette consultation;

c) n’ayant pas pu être inscrits sur la liste électorale de la consultation du 8 novembre 1998 en raison du non-respect de la condition de domicile, justifier que leur absence était due à des raisons familiales, professionnelles ou médicales;

d) avoir eu le statut civil coutumier ou, nés en Nouvelle-Calédonie, y avoir eu le centre de leurs intérêts matériels et moraux;

e) avoir l’un de leurs parents né en Nouvelle-Calédonie et y avoir le centre de leurs intérêts matériels et moraux;

f) pouvoir justifier d’une durée de vingt ans de domicile continu en Nouvelle-Calédonie à la date de la consultation et au plus tard au 31 décembre 2014;

g) être nés avant le 1er janvier 1989 et avoir eu son domicile en Nouvelle-Calédonie de 1988 à 1998;

h) être nés à compter du 1er janvier 1989 et avoir atteint l’âge de la majorité à la date de la consultation et avoir eu un de leurs parents qui satisfaisait aux conditions pour participer à la consultation du 8 novembre 1998. (Loi organique no 99-109 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie)

Ces restrictions introduisent les critères de la date de naissance et de la durée de la résidence sur le territoire néo-calédonien. Aussi, il institue un corps électoral gelé puisque seules les personnes pouvant justifier de leur établissement en Nouvelle-Calédonie avant le 31 décembre 1994 et les nouveaux majeurs nés en Nouvelle-Calédonie pourront participer au référendum.

En troisième lieu, on retrouve un critère qui fait l’objet de débats entre indépendantistes et loyalistes, soit celui relatif à la composition du corps électoral pour les assemblées de provinces et le congrès. L’article 188 pose ici trois critères aux électeurs :

a) remplir les conditions pour être inscrits sur les listes électorales de la Nouvelle-Calédonie établies en vue de la consultation du 8 novembre 1998;

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b) être inscrits sur le tableau annexe et domiciliés depuis dix ans en Nouvelle — Calédonie à la date de l’élection au congrès et aux assemblées de province;

c) avoir atteint l’âge de la majorité après le 31 octobre 1998 et soit justifier de dix ans de domicile en Nouvelle-Calédonie en 1998, soit avoir eu un de leurs parents remplissant les conditions pour être électeur au scrutin du 8 novembre 1998, soit avoir un de leurs parents inscrit au tableau annexe et justifier d’une durée de domicile de dix ans en Nouvelle-Calédonie à la date de l’élection. (Loi organique no 99-109 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle- Calédonie)

Toutefois, en 2007, suite à des pressions des indépendantistes, l’Assemblée nationale modifia la constitution afin de geler au 8 novembre 1998 le corps électoral pour les élections provinciales et territoriales. Cette modification a fait naître de vifs débats et est fortement contestée par les partis loyalistes Rassemblement-UMP (nouveau nom du RPCR depuis 2004), le RPC et le FN. Lors de la convention du Rassemblement-UMP « Citoyenneté et destin commun en Nouvelle-Calédonie », Virginie Ruffenaach, secrétaire générale adjointe du Rassemblement-UMP, dénonça fortement cette décision, la qualifiant de « scandale » et la décrivant comme une atteinte aux valeurs de la République :

L’admission en conséquence du suffrage restreint sur un territoire de la République française apparait comme un scandale dans le pays qui a parmi les premiers au monde consacré le suffrage universel de 1848, et dont le suffrage universel est annoncé dès l’article 3 de notre Constitution qui affirme aujourd’hui « le suffrage est toujours universel ». (Ruffenach 2013 : 50) Cette réaction trouve son fondement dans les contradictions qu’apporte cette décision entre l’article 3 de la Constitution française qui pose le suffrage universel, et l’article 77, qui porte sur certaines dispositions transitoires relatives à la Nouvelle-Calédonie, plus précisément sur la définition du corps électoral restreint. De la sorte, la France, grande combattante de l’égalité de tous, admet que des électeurs soient exclus du droit de vote afin de permettre aux électeurs établis en Nouvelle- Calédonie depuis un certain temps de prendre leur destin en main vis-à-vis de la métropole (Clinchamps 2008 : 159).

En 2014, des tensions entourant les restrictions portées au corps électoral sont réapparues en vue des élections provinciales qui ouvraient le dernier mandat41 de la mise en application de l’Accord de

41 Les mandats pour les élus du Congrès et des assemblées de province sont d’une durée de cinq ans (Accord

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Nouméa. Au cours de ce mandat, les élus au congrès pourront décider de la tenue du référendum à la majorité du 3/5e. À cette occasion, Roch Wamytan, alors président du congrès, a réclamé la

radiation de 6 700 électeurs de la liste électorale spéciale qui recense les électeurs qui pourront se prononcer sur l’accession de la Nouvelle-Calédonie à la pleine souveraineté. Pour faire pression sur l’État à ce sujet, l’UC a boycotté le 12e comité des signataires42 prévu par l’Accord pour préparer et

suivre son application. Finalement, les radiations demandées furent refusées pour la grande majorité d’entre elles par les commissions de révision des listes (Les Nouvelles Calédoniennes 2015).

La citoyenneté de la Nouvelle-Calédonie se trouve liée à ces restrictions qui visent, d’une part, à donner aux électeurs calédoniens la possibilité de prendre leur destin en main en marge de la métropole, et d’autre part, à assurer un « rééquilibrage » démographique entre les électeurs non kanak et kanak devenus minoritaires vers la fin des années 1950 (Clinchamps 2008 : 152, Salaün et Vernaudon 2009 : 68). Avec un corps électoral « glissant », ce qui veut dire que la liste électorale spéciale aurait été ouverte aux électeurs justifiant de dix années de résidence en Nouvelle-Calédonie peu importe leur date d’installation, le déséquilibre aurait pu s’accentuer. Les nouveaux arrivants auraient pu participer au scrutin au bout d’une certaine période, jouant ainsi un rôle important à un moment charnière où se décidera le destin de la Nouvelle-Calédonie. Or, si la notion de citoyenneté calédonienne s’oppose à une citoyenneté ethnique, elle est tout de même conditionnelle à la reconnaissance de l’identité kanak (Salaün 2009 : 64) et porte en elle l’enjeu d’équilibre démographique hérité de la période coloniale et qui « colle » au clivage kanak/non-kanak. Si les indépendantistes tiennent à ce « gel » du corps électoral, c’est bien pour conserver un « avantage » électoral perçu comme une réparation des torts causés par le passé colonial.

Certes, lorsque les membres de l’AVJPN font appel au « développement de la citoyenneté active », ils n’ont pas en tête ces enjeux de façon directe. Ils ne sont pas visés par les risques d’éradication de la liste électorale, mais en sont plutôt protégés puisqu’ils sont tous nés sur le caillou de parents répondants aux conditions pour être électeurs. Il s’agit toutefois d’une notion utilisée par une multiplicité d’acteurs aux visées divergentes que côtoient les membres de l’AVJPN, que ce soit

42 Le Comité des signataires veille à l’application de l’accord de Nouméa. Composé des délégations des camps

indépendantiste et loyaliste, signataires historiques de l’accord, ainsi que des dirigeants locaux, le Comité se réunit à date non fixe sur convocation du gouvernement.

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indirectement par les médias ou directement lors de leur participation à des journées thématiques organisées par des organismes ou autorités publiques, comme la « fête de la citoyenneté » qui a lieu le 24 septembre de chaque année depuis 2003. Elle fut créée à l’initiative du « Comité 150 ans après ». L’objectif était de remplacer la fête commémorant la prise de possession de la Nouvelle- Calédonie par la France.

Pour revenir à l’intérêt des autorités publiques — dont font partie de nombreux Kanak -- à la sensibilisation des jeunes à la citoyenneté, est-ce que cette volonté peut être comprise dans la logique des enjeux de citoyenneté et de corps électoral restreint? Si l’on tente de rééquilibrer le rapport de force en restreignant l’accès au droit de vote, est-il possible que l’on tente, par ailleurs d’optimiser son rapport de force en « politisant » les jeunes qui seront ainsi amenés à jouer leur rôle d’électeurs? Ceci implique que ces jeunes votent, et donc, qu’ils se sentent suffisamment concernés par la collectivité et son avenir. D’où l’intérêt d’éveiller leur intérêt envers la chose publique. Pour le coordonnateur du conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance de Païta, Benoît Coquelet :

les perspectives de sortie de l’accord de Nouméa posent la question de la citoyenneté, du civisme donc de la participation concrète à la vie de la cité. C’est pourquoi, depuis des années, les politiques se sont emparées de la question de la participation, de la démocratie participative, de la sensibilisation au civisme (2013 : 98).

Pour Graziella de la DSASE, il est important que les jeunes accomplissent les devoirs qui sont liés à la citoyenneté :

Eve : Les jeunes utilisaient le terme citoyenneté? Graziella : Oui.

Eve : Et pour eux, ça veut dire quoi?

Graziella : En fait, eux ils ne vont pas te dire : « moi je suis citoyen de la commune de Koné ». Ils vont te dire : « je suis un jeune de Koné ». Et quand on va lui dire : « oui, mais c’est quoi tes actes citoyens dans ta commune? ». Il va te dire : « moi je fais ça dans ma famille, ça dans mon clan »; et celui qui est en tribu, il va dire : « ma place c’est là, mon rôle c’est ça, et voilà ce que j’apporte au sein de mon environnement ». Il y en a qui vont te dire : « oui, je vais voter » et d’autres te disent : « moi, je ne vais pas voter parce que je suis en colère après les politiques ». On lui dit : « tu parles de citoyen, mais tu n’es pas citoyen ». Un des devoirs de citoyen c’est d’aller voter.

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Graziella : Oui, voilà, c’est d’avoir des devoirs. Et nous on a fait tout ce travail-là avec eux pour arriver à se mettre d’accord sur cet intitulé-là. C’est un terme qu’on a pris des jeunes. Cette démarche citoyenne, en fait, c’est pour accompagner le jeune. Malgré tout, il fait beaucoup de choses le jeune, il s’investit. Je mets une parenthèse pour tout ce qui est thématique jeunesse en difficulté parce que je n’aime pas dire « les problèmes jeunesses » parce que pour moi qui suis dans ce domaine-là, ce n’est pas les jeunes qui ont un problème, c’est la société qui a un problème. Si les jeunes sont comme ça aujourd’hui, c’est que le cadre de la société d’aujourd’hui ne leur convient pas. Donc pour ça, je n’aime pas dire « les problématiques jeunesses » je préfère dire, « les thématiques jeunesses ». Pour revenir à ça, on a validé avec eux cet intitulé de démarche citoyenne. Et quand on dit démarche, c’est que je me rends « acteur » de ce que je fais dans ma commune ou dans ma famille, dans mon pays ou ma région. C’était le mot « démarche », pour ne pas dire la citoyenneté. Quand on dit « démarche », c’est que je me rends acteur. J’agis en tant que citoyen. Les gens nous le disent, « oui, mais ça veut dire quoi démarche citoyenne? » et tant qu’on n’explique pas, ça ne parle pas aux gens.

Et si la province a accepté qu’il y ait des Journées jeunesse provinciales, ça veut dire que les politiques avaient déjà un intérêt pour la jeunesse. Les jeunes critiquent souvent les élus, ils disent : « vous venez nous trouver seulement quand vous avez besoin de nous ». Sauf qu’ils oublient que s’ils ont accepté qu’il y ait cette grande journée provinciale pour les jeunes, qu’elle [la province] ait permis qu’il y ait un espace de parole, d’échange entre les jeunes, les moins jeunes ou les politiques, c’est qu’elle avait déjà une orientation, un intérêt pour sa jeunesse.

La citoyenneté est aussi une notion qui va au-delà de son aspect juridique, comme mentionné déjà. Elle comporte une dimension que l’anthropologue Catherine Neveu (2004) qualifie d’horizontale, c’est-à-dire que la citoyenneté a une dimension projective qui s’effectue dans la relation des citoyens entre eux ou entre ceux qui en sont et ceux qui n’en sont pas. S’oppose ainsi au citoyen celui qui commet des actes d’incivilités ou qui ne participe pas au bien-être de la collectivité. Comme nous l’avons vu au chapitre précédent, les jeunes vivent le poids du système de représentations qui pèse sur la jeunesse océanienne. Ils sont perçus comme des consommateurs, délinquants, violents et paresseux. Ainsi exclus par leurs concitoyens — c’est du moins ce qu’ils ressentent —, les jeunes ne demandent qu’à être reconnus et vus dans une lumière positive. Comme nous l’avons vu au chapitre précédent, les jeunes tentent de prendre leur place comme citoyens en participant aux prises de décisions et en s’affichant acteurs par le biais de l’association. Les jeunes veulent être reconnus en tant que participants au bien-être de leur communauté en organisant des activités dans la commune et en faisant de l’autofinancement pour démontrer leur engagement et leur autonomie. Ils ne veulent