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Chargement initial du milieu : mise sous contrainte du milieu granulaire

6.2 Champs de d´eformations, de rotation et de temp´eratures

7.1.1 Chargement initial du milieu : mise sous contrainte du milieu granulaire

Nous avons vu que le comportement de notre milieu granulaire peut ˆetre subdivis´e en deux ´etapes diff´erentes dans l’´evolution relative de sa dynamique et de sa cin´ematique.

La premi`ere ´etape correspond au chargement initial du milieu granulaire. Au cours de celle- ci, nous avons constat´e que la fraction d’empilement 𝜙 est un param`etre de premi`ere importance car c’est la compressibilit´e du mat´eriau granulaire qui intervient.

Cas des 𝜙 faibles

Dans le cas des plus faibles valeurs de 𝜙, la phase de chargement est clairement dissoci´ee du r´egime ´etabli qui suit. Cette phase est caract´eris´ee par une augmentation quasilin´eaire de la surface de la cavit´e avec le d´eplacement du plateau. Ainsi l’intrus progressant `a travers le milieu granulaire dans le r´ef´erentiel du plateau laisse dans son passage un sillage qui ne se referme pas et qui croˆıt quasi-lin´eairement avec son d´eplacement. Ne pouvant avoir acc`es `a l’´ecoulement granulaire `a l’avant et l’arri`ere de l’intrus simultan´ement, nous ´etablissons une statistique de la valeur de la distance de charge, distance parcourue par l’intrus dans le r´ef´erentiel du plateau correspondant `a une croissance lin´eaire du sillage sur les cinq exp´eriences correspondant `a l’aval de l’intrus d’une mˆeme s´erie d’exp´eriences. Nous nous demandons ce qui se passe au mˆeme instant en amont de l’intrus au cours de son ´evolution au sein du milieu granulaire jusqu’`a la distance moyenne de charge.

Le champ de d´eplacements pour une exp´erience en amont, mesur´e entre l’image de d´epart et l’image correspondant `a la fin estim´ee de la croissance lin´eaire de la cavit´e, est repr´esent´e sur la figure 7.1. Les d´eplacements sont amplifi´es d’un facteur 50, puis normalis´es par le nombre d’images entre le d´ebut et la fin de la charge.

Figure 7.1 – La figure ci-dessus repr´esente le champ de d´eplacements des grains d’une exp´erience donn´ee, donc non moyenn´e, au devant de l’intrus, durant la charge dans le r´ef´erentiel du plateau. L’intrus a un diam`etre 𝐷 = 20 mm et la fraction d’empilement est 𝜙 = 81, 9±0, 2 %. Les d´eplacements sont amplifi´es d’un facteur 50/𝑛, o`u 𝑛 est le nombre d’images entre le d´ebut et la fin de la charge.

Clairement, nous constatons sur la figure 7.1 que les grains sont pouss´es `a l’avant de l’intrus pendant cette premi`ere phase. Il n’y a pas encore de rouleaux de recirculation. Nous associons cette premi`ere phase `a une compression du milieu granulaire au devant de l’intrus. La surface de la cavit´e croissant de mani`ere quasi-lin´eaire au cours de cette ´etape, le milieu granulaire doit forc´ement se compacter ailleurs. Il est toutefois difficile de syst´ematiquement mesurer et localiser au cours de cette charge une augmentation locale de la compacit´e `a l’avant de l’intrus. Le champ de vision restreint ne nous donne pas acc`es `a la valeur locale de 𝜙 sur l’ensemble de la cellule de travail au devant de l’intrus.

Parall`element `a cette pouss´ee des grains devant l’intrus, nous constatons une augmentation du signal de force de traˆın´ee sur l’intrus.

Cas des 𝜙 fortes

L’influence du param`etre 𝜙 sur l’´evolution de la distance de chargement est ind´eniable, celle-ci diminuant `a mesure que 𝜙 croˆıt. Comme pr´ec´edemment, nous cherchons le champ de d´eplacements au devant de l’intrus correspondant `a cette phase de chargement, plus courte dans le cas pr´esent o`u la compacit´e est plus importante.

Figure 7.2 – La figure ci-dessus repr´esente le champ de d´eplacements des grains d’une exp´erience donn´ee, donc non moyenn´e, au devant de l’intrus, durant la charge dans le r´ef´erentiel du plateau. L’intrus a un diam`etre 𝐷 = 20 mm et la fraction d’empilement est 𝜙 = 82, 8±0, 2 %. Les d´eplacements sont amplifi´es d’un facteur 50/𝑛, o`u 𝑛 est le nombre d’images correspondant `a la charge.

Encore une fois, nous constatons que cette charge est associ´ee `a une pouss´ee des grains vers l’avant et que les recirculations ne peuvent ˆetre mises en place sans cette compression ou compaction initiale.

D’autre part, la localisation de la zone mise en mouvement au cours de la phase de charge- ment diff`ere selon la valeur de 𝜙 (figure 7.2). Sa largeur s’´evase loin devant l’intrus, tendant `a former un cˆone devant celui-ci, d’angle au sommet plus large que dans le cas des 𝜙 faibles.

Cette compression vers l’avant pr´ec`ede la mise en place des rouleaux de recirculation comme nous pouvons le voir sur la figure 7.3. L’´evolution de la vorticit´e du milieu granulaire avec la distance `a la paroi frontale 𝑑𝑤𝑎𝑙𝑙que nous avons pr´esent´ee au chapitre pr´ec´edent est un indicateur

de l’´evolution du m´ecanisme d’´ecoulement granulaire.

Front de pouss´ee

Les figures 7.3 illustrent la dynamique de pouss´ee des grains vers l’avant. Pour cela nous avons choisi une compacit´e faible (𝜙 = 80, 5 %) pour laquelle la phase de chargement dure suffisamment longtemps et nous avons segment´e en quatre sous-phases de mˆeme dur´ee (en l’occurence quatre s´eries cons´ecutives de dix images correspondant chacune `a un d´eplacement relatif de l’intrus de 10 ×16 mm).

(a) (b)

(c) (d)

Figure 7.3 – Les figures ci-dessus illustrent le d´eveloppement d’un front de pouss´ee au devant de l’intrus au cours de la premi`ere phase de sa progression dans le r´ef´erentiel du plateau. L’intrus a un diam`etre 𝐷 = 20 mm et la fraction d’empilement est 𝜙 = 80, 5 ± 0, 2 %. Chacun des champs de d´eplacements repr´esent´e correspond `a une avanc´ee de l’intrus de 10×16 mm et est amplifi´e d’un facteur 50/𝑛, 𝑛 valant ici 10.

Nous voyons clairement que la zone de pouss´ee des grains se d´eveloppe progressivement vers l’avant de l’intrus en s’´evasant jusqu’`a atteindre les limites du champ de vision. Cela est `a relier `a notre image de cˆone de compaction d´evelopp´e pr´ec´edemment.

7.1.2

R´egime ´etabli

Le chargement initial du milieu granulaire laisse place `a un r´egime que nous qualifions d’´etabli. Le milieu, initialement pouss´e au devant de l’intrus, s’´ecoule maintenant autour de celui-ci par le biais de rouleaux de recirculation. Cet ´ecoulement n’est pas continu. La strat´egie d´evelopp´ee par le milieu granulaire confin´e pour permettre le passage de l’intrus induit un ´ecoulement ponctu´e de fortes fluctuations aussi bien au niveau des forces mises en jeu que des d´eplacements saccad´es des grains.

Pour mettre en parall`ele les fluctuations de la dynamique et de la cin´ematique de notre milieu granulaire, nous rep´erons des ´ev`enements de charge et d´echarge du niveau de force et nous recherchons les d´eplacements des grains dans chacune de ces deux phases (figure 7.4). Pour ce faire, nous identifions le d´ebut de charge correspondant `a un minimum de force que nous nommons instant A, le maximum de force qui suit, d´esign´e par B, et enfin le minimum qui suit, nomm´e C. Nous calculons les champs de d´eplacements entre A et B, la charge, puis entre B et C, la d´echarge. Les cartographies pr´esent´ees sont amplifi´ees d’un facteur 50/𝑛 o`u 𝑛 est le nombre d’images associ´e `a la phase ´etudi´ee. 𝑛 est diff´erent en charge ou en d´echarge.

Nous constatons sur la figure 7.4 a que lors de la charge le d´eplacement des grains consiste en une pouss´ee vers l’avant de l’intrus et en une faible recirculation vers l’arri`ere de celui-ci.

Lors de la d´echarge, nous n’observons plus ce mouvement de pouss´ee vers l’avant mais une ´enorme recirculation des grains vers l’arri`ere. Cette recirculation est caract´eris´ee par une plus grande amplitude et une plus grande extension spatiale des d´eplacements vers l’arri`ere. Notons que les champs de d´eplacement sont toujours amplifi´es par le facteur 50/𝑛 dans le but de les normaliser et de pouvoir les comparer. Ces ´enormes recirculations autour de l’intrus poussent les grains vers l’arri`ere et conduisent `a un comblement partiel de la cavit´e `a l’arri`ere de l’intrus comme le montre par exemple la figure 7.5.

Ce comblement de la cavit´e et le d´eblocage de l’´ecoulement sont partiels car l’ensemble des grains redirig´es vers l’arri`ere ne peut pas acc´eder en mˆeme temps `a l’espace libre que la cavit´e constitue. Il y a encombrement st´erique.

En effet, la cavit´e constitue une r´eserve d’espace libre pour le milieu granulaire. Les grains pouss´es dans cette cavit´e vont lib´erer de la place devant l’intrus permettant `a nouveau une l´eg`ere compaction du milieu devant celui-ci, associ´ee `a une augmentation de la force qui correspondrait `a la croissance du sillage, avant une prochaine recirculation massive des grains vers la nouvelle cavit´e ainsi cr´e´ee, associ´ee `a une diminution de la force et `a un nouvel effondrement de la cavit´e. Au cours de la progression de l’intrus, ce ph´enom`ene alternant la croissance accompagn´ee d’une pouss´ee des grains au-devant de l’intrus puis la d´echarge et le comblement partiel de la cavit´e par le biais des rouleaux de recirculation, se r´ep`ete. L’´ecoulement du milieu granu- laire fluctue au rythme des blocages et d´eblocages successifs. Il y a comp´etition entre deux m´ecanismes permettant la r´eorganisation du milieu granulaire : les rouleaux qui correspondent `a un cisaillement et qui sont responsables de l’effondrement de la cavit´e sur elle-mˆeme et la

(a) chargement 𝐴𝐵 (b) d´echargement 𝐵𝐶

(c) force

Figure 7.4 – Les figures ci-dessus repr´esentent les champs de d´eplacements des grains `a l’avant de l’intrus au cours d’une charge 𝐴𝐵 (figure a) et d’une d´echarge 𝐵𝐶 (figure b) amplifi´es d’un facteur 50/𝑛 ainsi que la force correspondante (figure c) dans le cas d’un intrus de diam`etre 𝐷 = 20 mm et une fraction d’empilement 𝜙 = 82, 6 ± 0, 2 %.

compression vers l’avant de l’intrus qui est `a l’origine de la croissance de la cavit´e.

Cette description qualitative du m´ecanisme de recirculation du milieu granulaire autour de l’intrus est toutefois `a prendre avec quelques pr´ecautions. Il n’est pas ´evident de trouver une bonne corr´elation quantitative entre les fluctuations de la force, les mouvements des grains et les variations d’aire de la cavit´e. En effet, pour certains grands ´ev`enements, nous constatons la pr´esence de recirculations importantes d`es la mont´ee en force (figure 7.6). Cependant, ce qui semble se d´egager est que la mont´ee en force est toujours associ´ee `a un mouvement d’ensemble des grains pouss´es vers l’avant dans un chenal localis´e. Cette pouss´ee vers l’avant disparaˆıt au cours de la chute de force. Nous pouvons noter ´egalement sur l’exemple de la figure 7.6 que le centre du gros rouleau de recirculation se d´eporte vers l’arri`ere de l’intrus lors de la d´echarge. La pr´esence d’une grosse recirculation d`es la mont´ee en force peut provenir d’un ´ev`enement pr´ec´edent de d´echarge pour lequel les grains n’ont pas eu le temps de contourner l’intrus et d’ˆetre ´evacu´es vers la cavit´e.

(a) charge (b) d´echarge

Figure 7.5 – La cavit´e laiss´ee par l’intrus est combl´ee par intermittences au gr´e des fluctuations de la force. L’effondrement de cette cavit´e est tr`es rapide. Dans le cas pr´esent, ces deux photos se suivent `

a 1/10 de seconde, correspondant `a une avanc´ee du plateau de 1/6 mm soit 𝐷𝑔/30.

Cette concomitance de la pouss´ee vers l’avant (compression) et de ces recirculations (ci- saillement) rend difficile une analyse syst´ematique.