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LA CLASSIFICATION DES CONTRIBUTIONS PUBLIQUES

II. La classification proposée par la doctrine

1. Les catégories reconnues

A. La doctrine majoritaire: les impôts et les taxes causales

A la suite de Ernst Blumensteins, un grand nombre d'auteurs9 s'accordent pour distinguer deux catégories essentielles de contributions publiques: les impôts d'un côté, les taxes causales de l'autre.

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A Grise!, Traité, p. 645.

R. Auer, Sonderabgaben, p. 27; Knapp, Précis, No 1682.

System, pp. 1 ss; le même, Steuerrecht, pp. 4 ss.

Knapp, Précis, Nos 2771 ss; F. Gygi, Verwaltungsrecht, pp. 262 ss; Hohn, Steu-errecht, pp. 58 ss; A Grise!, Traité, pp. 604 ss; T. Fleiner, Grundzüge, pp. 172 ss;

Schwarzenbach, Grundriss, pp. 205 ss; Rivier, Droit fiscal, pp. 37 ss;

a) La distinction entre les impôts et les taxes causales

Le critère de base pour distinguer ces deux catégories se fonde sur le motif particulier qui justifie le prélèvement de la redevance. A la base de la perception d'une taxe causale doit se trouver une raison particulière

"Entstehungsgrund", une cause, qui consiste en une prestation étatique ou un avantage particulier octroyé par l'Etat au contribuable1°. Les impôts, en revanche, sont inconditionnels, car leur prélèvement n'est soumis à aucune condition, si ce n'est la soumission de l'individu à la souveraineté territorialell. La notion d'inconditionnalité peut prêter à confusion. En effet, des impôts ne peuvent être prélevés auprès des individus sans que certaines conditions soient réalisées en la personne du contribuable, conditions censées concrétiser l'état de fait permettant de prélever l'impôt (revenus, chiffre d'affaires, etc.)12. Le caractère inconditionnel de l'impôt signifie en réalité que quiconque remplit l'état de fait permettant de prélever l'impôt, peut se voir imposé sans avoir pourtant bénéficié de prestations particulières ou d'un avantage particulier de la part de l'EtatB. Le devoir de payer l'impôt est, en conséquence, une dette abstraite14.

Si l'on essaie maintenant de cerner avec plus de précision la notion de prestation ou d'avantage étatique particulier, censée distinguer les deux catégories en cause, force est de constater une certaine incertitude génératrice d'insécurité juridique. Deux points de vue s'affrontent:

aa) La théorie de la contre-prestation

Selon les partisans de cette théorie, les taxes causales constituent la rémunération que l'administré fournit à l'Etat en contrepartie d'une prestation ou d'un avantage particulier15. A l'instar d'un rapport

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Imboden/Rhinow, Verwaltungsrechtsprechung, pp. 751 ss; Ryser, 10 leçons, pp.19 ss.

Knapp, Précis, No 2775; le même, Imposition, p. 224s; Zaugg, Steuer, p. 222.

E. Blumenstein, System, p. 3.

F. Gygi, Verwaltungsrecht, p. 265.

F. Gygi, Verwaltungsrecht, p. 265s; Ryser, 10 leçons, p. 19s.

Knapp, Précis, No 2772; T. Fleiner, Grundzüge, p. 17s; Zuppinger, Steuerrecht, p 3; Schwarzenbach, Grundriss, p. 206.

E. Blumenstein, System, p. 2.

d'obligation en droit privé, il existe, entre l'état de fait qui justifie la taxe causale et le montant prélevé auprès du contribuable, un rapport direct de prestation/contre-prestation16. Le prélèvement des impôts n'est, à l'inverse, nullement motivé par l'octroi d'une prestation étatique particulière: le contribuable doit s'y soumettre inconditionnellement17.

Cependant, il existe des contributions publiques qui, certes, sont motivées par la fourniture d'une prestation étatique à un administré, mais dont le montant dépasse la valeur du service rendu par l'Etat. Dans ces cas, la rémunération fournie par l'administré est manifestement plus élevée qu'une simple contre-prestation. La doctrine, prenant cette situation en considération, a conclu à l'existence d'une catégorie intermédiaire, située entre les impôts et les taxes causales : les contributions (ou impôts) mixtes. De telles contributions représentent pour partie la contre-prestation d'un avantage étatique; pour le reste, elles sont inconditionnelles lB.

La reconnaissance de cette catégorie intermédiaire, loin de résoudre les problèmes de qualification, a, au contraire, provoqué une incertitude juridique à un double titre. D'une part, on ne voit pas bien quel intérêt justifie la distinction de cette catégorie intermédiaire, puisque la doctrine admet que les conséquences juridiques propres aux contributions mixtes sont les mêmes que celles qui s'appliquent aux impôtsi9. D'autre part, les éléments caractéristiques aux contributions mixtes ne sont pas bien délimités2o. Certains auteurs reconnaissent également l'existence de taxes causales dont le montant peut dépasser les coûts d'une prestation étatique21, par exemple procurer un certain bénéfice à l'Etat, sans pour autant les qualifier de contributions mixtes. Il en va ainsi, notamment, de certaines taxes d'utilisation prélevées en contrepartie de l'octroi d'un

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Knapp, Précis, No 2772; Hohn, Steuerrecht, p. 59; Schwarzenbach, Grundriss, p. 206.

Knapp, Précis, No 2787; Hohn, Steuerrecht, p. 62; Schwarzenbach, Grundriss, p. 208; E. Blumenstein, Steuerrecht, p. 7s.

Knapp, Précis, No 2788; F. Gygi, Verwaltungsrecht, p. 267.

En ce sens également, Diriwachter, Lenkungsabgaben, p. 36; voir aussi les critiques de Vallender, Kausalabgabenrecht, p. 40s.

Knapp, Précis, Nos 2825 ss; A. Grisel, Traité, pp. 612, 616; Imboden/Rhinow, Verwaltungsrechtsprechung, p. 779.

droit de régale (taxe de concession radio, par exemple). On voit mal dans cet exemple ce qui distingue la taxe causale de la contribution mixte.

bb) La théorie du rattachement ("Anknüpfungspunkt-Theorie") Cette théorie est défendue par Vallender22. Ce dernier constate que l'Etat fournit aux particuliers deux types de prestations. Il fournit, d'un côté, des prestations particulières à certaines personnes, prestations qui sont ainsi imputables à ces dernières; d'un autre côté, l'Etat fournit des prestations générales que l'on ne peut imputer à des personnes particulières. De là découle la division des contributions publiques entre taxes causales, d'une part, et impôts, de l'autre. L'Etat est cependant libre de financer les prestations imputables à des particuliers par des impôts, en ce sens: "Steuer muss es geben, Kausalabgaben kann es geben"23, Selon cet auteur, le critère qui permet de distinguer les impôts des taxes causales est ainsi le fait que, dans le cas d'une taxe causale, celle-ci peut être rattachée à une prestation particulière de l'Etat au contribuable. La prestation étatique n'a pas besoin de correspondre à la contre-prestation du contribuable; il suffit qu'elle soit appropriée ("angemessen")24. Au contraire, les impôts sont dus sans que l'on puisse les rattacher à une contre-prestation particulière de l'Etat.

La grande différence entre la conception précédente et celle de V allender réside dans le caractère approprié de la prestation étatique particulière.

Dès lors que celle-ci n'a pas besoin de correspondre au montant de la taxe, le concept d'impôt mixte, dans le système de Vallender, n'existe pas. En effet, même si le montant d'une taxe causale dépasse celui de la prestation étatique, celle-ci reste une taxe causale en vertu du critère du rattachement, puisqu'elle repose encore sur une prestation étatique appropriée, et n'en devient pas pour autant un impôt.

Dans ce système, une contribution publique ne peut être qualifiée que d'impôt ou de taxe causale; il n'y a plus de place pour une catégorie 22 23

24

Kausalabgabenrecht, pp. 29 ss.

Ibid., p. 30.

Ibid., p. 34.

intermédiaire. Cependant, les difficultés de la qualification juridique des contributions publiques ne sont pas résolues pour autant. Si l'incertitude de la notion de contribution mixte a disparu, le problème s'est simplement déplacé. Car, pour reconnaître une taxe causale dans le système de Vallender, il faut, d'une part, démontrer le rattachement possible de la redevance à une prestation étatique, et d'autre part, conclure au caractère particulier ("zurechenbar") et approprié ("angemessen") de celle-ci. La référence à des notions juridiques aussi imprécises, comme l'absence de critères permettant de délimiter ces diverses notions, ne font que consacrer l'insécurité juridique en ce domaine.

b) Les diverses formes d'impôt

aa) Les impôts généraux et à buts spéciaux

Les impôts généraux ou ordinaires qui servent à financer les tâches générales de l'Etat se distinguent des impôts à buts spéciaux ou d'affectation dont le produit est affecté au financement de tâches déterminées. La portée de la distinction concerne particulièrement l'interdiction de la double imposition intercantonale, car il est admis que les impôts à buts spéciaux peuvent s'ajouter aux impôts généraux sans violer l'article 46 al. 2 Cst25.

bb) Les impôts directs et indirects

La doctrine n'a jamais pu s'entendre sur une définition claire de ces deux notions26. De plus, la portée juridique de la distinction est douteuse27.

25 26 27

A. Grisel, Traité, p. 605.

Comp. E. Blumenstein, System, p. 131s; Rivier, Droit fiscal, p. 39; Hôhn, Steuerrecht, p. 66, Nos 6s; Zuppinger, Steuerrecht, p. 4.

L'intérêt principal de cette distinction réside, à l'heure actuelle, dans l'interprétation de l'art. 42quinquies Cst., qui n'accorde à la Confédération la compétence de n'harmoniser que les impôts "directs" de la Confédération, des cantons et des communes.

Quoi qu'il en soit, il semble reconnu aujourd'hui que les impôts directs sont ceux dont l'objet de l'imposition et l'assiette sont identiques (impôts sur le revenu et la fortune des personnes physiques, sur le rendement et le capital des personnes morales) alors que la différence de ces deux éléments caractérise les impôts indirects (ICHA, droits de douane, par exemple )28.

cc) Les impôts fiscaux et d'orientation

La distinction ne fait pas l'unanimité et nous aurons l'occasion d'y revenir de façon approfondie29. Il est admis en tous cas que l'impôt comme tel ne tend pas uniquement à procurer des ressources financières (impôts fiscaux), mais qu'il cherche également dans certains cas à orienter le comportement des particuliers (impôts d'orientation)30.

Savoir si cette particularité est propre à délimiter valablement deux différents types d'impôts est en revanche l'objet de controverses.

c) La classification des taxes causales

La doctrine, sur la base de caractéristiques communes à certaines taxes causales, a proposé deux classifications principales, selon deux points de vue qu'il convient de distinguer.

aa) En fonction de la nature de la contre-prestation étatique

De ce point de vue, la doctrine3t a pu distinguer trois catégories principales, à savoir:

l'émolument: prix d'une prestation ou d'un avantage particulier accordé par l'Etat;

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Hohn, Steuerrecht, p. 66, No 7; Vallender, Grundbegriffe, pp. 80, 187.

Voir infra, 1re partie, chapitre 2.

Bockli, Indirekte Steuem, pp. 3s, 49 ss; le même, Rechtliche Aspekte, pp. 32 ss;

Zuppinger, Steuerrecht, p. 4s; Hohn, Steuerrecht, p. 65, No 4.

Voir les auteurs cités à la note 9 supra.

la charge de préférence: contribution mise à la charge des administrés qui profitent de façon particulière des installations étatiques mises en place par l'Etat dans l'intérêt général;

la taxe de remplacement: contribution qui est due par un particulier dispensé d'un devoir public.

bb) En fonction de la soumission au principe de la couverture des frais

Le principe de la couverture des frais, dégagé par la jurisprudence de la règle de la proportionnalité32, signifie que les ressources totales provenant de certaines taxes causales ne doivent pas dépasser le montant global des coûts qu'elles engendrent pour I'Etat33.

Etant donné que ce principe ne s'applique que pour une partie des diverses taxes causales, certains auteurs34 ont proposé de distinguer entre celles qui sont soumises à ce principe et celles qui ne le sont pas, la raison principale étant que les exigences du principe de légalité sont moins sévères dans le premier cas que dans le second.

Appartiennent ainsi à la catégorie des taxes causales dépendantes des frais35, les émoluments administratifs, la plupart des charges de préférence36 et les émoluments d'utilisation des établissements publics.

Les autres taxes causales sont indépendantes des frais; tel est le cas, notamment, des émoluments d'utilisation du domaine public, des taxes causales régaliennes et des taxes de remplacement.

32 33 34 35 36

Knapp, Précis, No 2823; plus nuancé, Buffat, Les taxes, p. 81.

Knapp, Précis, No 2824; A. Grise!, Traité, p. 611; Buffat, Les taxes, p. 78; par exemple: ATF Consortium Giessen, 106 la 241 (243) = JdT 1982 pp. 485 ss (488).

Vallender, Kausalabgabenrecht, pp. 152 ss, Widmer, Legalitlitsprinzip, pp. 49 ss.

Pour une liste, voir notamment, Knapp, Précis, Nos 2825 ss; A. Grise!, Traité, pp. 611s, 615, 617; Buffat, Les taxes, pp. 79 ss.

Deux exceptions notables: la surtaxe HLM selon le TA genevois, cf. RDAF 1981 pp. 187 ss (192); contra, Knapp, Le prélèvement, p. 19, pour qui il ne s'agit ni d'un impôt, ni d'une taxe causale, mais de la restitution d'une subvention indue; la deuxième exception est représentée par la contribution de plus-value, selon l'A TF Hausbesitzer-Verein Base!, 105 la 134 (145) = JdT 1982, pp. 530 ss (559).

d)Résultat

En droit actuel, la distinction entre impôt et taxe causale se heurte à des difficultés méthodologiques. Le critère de la contre-prestation a favorisé l'émergence d'une situation confuse sur le plan juridique, puisqu'il en vient à créer une catégorie intermédiaire de contribution publique aux contours mal définis : les contributions mixtes. D'un autre côté, la conception de Vallender, inattaquable sur le plan logique, aboutit à substituer à cette répartition une subdivision formelle, mais difficilement praticable.

Dans ce contexte, pour tenter de résoudre la difficulté, Hohn a proposé37 la distinction suivante: les taxes causales qui ne sont pas soumises au principe de la couverture des frais devraient se voir qualifiées d'impôts.

En effet, les premières ne se distinguent pas de façon fondamentale des seconds; elles sont substituables pour le législateur, qui peut décider de frapper un certain état de fait soit d'une taxe causale de ce type, soit d'un impôt. Hohn de citer l'exemple des plus-values immobilières, que l'on peut imposer soit sous la forme d'un impôt spécial sur les gains immobiliers, soit sous celle d'une contribution de plus-value (taxe causale indépendante des frais)38.

Selon ce système, seules les taxes qui resteraient dans les limites des coûts étatiques mériteraient la qualification de taxes causales.

Avec cette distinction, on parviendrait, il est vrai, à supprimer l'incertitude sur la notion d'impôt mixte, parallèle à celle de taxe causale indépendante des frais. En outre, l'appartenance d'une contribution publique à la catégorie des taxes causales pourrait se démontrer à l'aide d'un critère relativement précis (le coût global de la prestation étatique).

Cette opinion ne nous paraît cependant pas conciliable avec un principe fondamental en matière de taxes causales, qui est celui de l'équivalence.

Selon ce principe - déduit de la règle de proportionnalité39 - les taxes

37

38 39

Geleitwort, p. 12.

Ibid., p. 12.

Knapp, Précis, No 2830.

causales, même celles qui ne sont pas soumises au principe de la couverture des frais4°, doivent correspondre aux avantages économiques ou juridiques objectifs dont le contribuable bénéficie, et à son intérêt, à l'acte étatique4t. En assimilant purement et simplement les taxes causales indépendantes des frais aux impôts, Hahn enlève aux contribuables de ces redevances la possibilité d'obtenir un certain contrôle du montant de ces contributions, car il est admis que le principe d'équivalence ne s'applique pas en matière d'impôt42.

Quel est, dans ces conditions, le critère qui permet de distinguer les impôts des taxes causales ? Cette dernière catégorie est caractérisée par un lien étroit entre un avantage étatique particulier accordé à un administré et le montant qu'elle représente. Ce montant ne doit pas forcément correspondre aux coûts que la fourniture du service provoque à l'Etat. En revanche, il est admis que les taxes causales doivent correspondre objectivement à l'avantage économique ou juridique43 dont le contribuable bénéficie. Telle est, à notre avis, la particularité juridique qui permet de définir le lien étroit qui doit nécessairement exister entre le prélèvement de la taxe et la prestation étatique. Le critère essentiel n'est donc pas l'importance des coûts du service étatique en cause, mais, du point de vue du contribuable, la valeur objective de la prestation étatique particulière obtenue de l'Etat. L'appartenance d'une contribution publique à la catégorie des taxes causales suppose donc une démarche en deux temps: il faut, tout d'abord, démontrer l'existence d'une prestation étatique particulière qui est accordée à un contribuable, ensuite, vérifier si l'avantage économique ou juridique qui est conféré à ce dernier

Par exemple, les taxes régaliennes: ATF Gaioni, 114 la 8 (12); Volz, 109 lb 308 (314) = JdT 1985 pp. 85 ss (92).

Knapp, Précis, No 2830; A. Grisel, Traité, pp. 612s, 616, 617; Buffat, Les taxes, p. 82; pour un cas de violation du principe d'équivalence, voir ATF Faes, 107 la 29 (33s) = JdT 1983 pp. 309 ss (313 ss).

A. Grisel, Traité, p. 608.

La jurisprudence rappelle, du reste, que l'avantage que la taxe procure à celui qui paie la taxe causale ne doit pas nécessairement être de nature économique: A TF Volz, 109 lb 308 (314) = JdT 1985 pp. 85 ss (92).

Nous rejetons, en revanche, la notion de contribution mixte, source d'incertitude juridique. Si le montant d'une contribution publique dépasse celui des coûts qu'elle cause à l'Etat, celle-ci n'en devient pas pour autant une contribution mixte ou un impôt. Il faudra encore vérifier dans quelle mesure le contribuable reçoit une prestation qui es1 objectivement équivalente à son tribut.44. Dans le cas contraire, seulement, la contribution publique sera qualifiée d'impôt. La notion de prestation étatique objectivement équivalente ne doit pas s'interpréter restrictivement. Elle ne saurait signifier que la redevance et la prestation étatique soient de même valeur45, un certain schématisme étant admissible46, mais il est nécessaire que la prétention financière de l'Etal soit objectivement équilibrée avec la prestation fournie. Cette démonstration est d'autant plus aisée, lorsque la prestation étatique est facilement quantifiable, par exemple, lorsque celle-ci est comparable à celle offerte dans le secteur privé47.

Si nous reprenons la définition de Vallender, nous constatons que notre conception, non seulement s'en rapproche, mais permet de concrétiser la notion peu claire du rattachement à une prestation étatique particulière

"appropriée", censée opérer la distinction entre impôts et taxes causales.

De notre point de vue, sera appropriée toute prestation qui constitue effectivement pour le contribuable un avantage étatique objectivement équivalent.

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La définition de E. Blumenstein est compatible avec cette façon de voir. Selon ce dernier, les taxes causales "bilden gleichsam ein Entgelt (Aequivalent) für Leistungen oder Aufwendungen, die das Gemeinwesen mit Bezug auf die Person des Abgabepflichtigen machen musste (Aequivalentsabgabe)", System, p. 2 (c'est nous qui soulignons).

Buffat, Les taxes, p. 82.

Knapp, Précis, No 2830.

A. Grisel, Traité, p. 613.

Dans le droit actuel, même la contribution de plus-value, qualifiée par la doctrine dominante48 et le Tribunal fédéral49 de "contribution causale indépendante des coûts", nous paraît respecter le principe d'équivalence.

Certes, le Tribunal fédéral a déclaré, à propos de la qualification juridique de celle-ci, que l'"on ne peut tirer de la nature de cette contribution aucun élément déterminant quant à son montant". Il s'agissait, pour notre Haute Cour, d'exclure l'application du principe de la couverture des frais, et non de prendre position sur celui de l'équivalence. A la base de la perception de cette taxe causale, se rencontre effectivement un avantage étatique, de nature juridiqueso, et objectivement équivalent pour le contribuable: les conséquences économiques favorables qu'entraînent pour ce dernier certaines mesures d'aménagement du territoire (un reclassement, par exemple). La taxe de remplacement est également soumise à la règle d'équivalence. Selon la jurisprudence, en effet, son montant doit être en rapport avec l'importance du service dont le contribuable est dispensést.

En résumé, il nous semble, sur la base des divers critères que nous avons vus, que l'on peut distinguer deux catégories de con~ributions publiques:

Les impôts, d'un côté, qui ne reposent sur aucune prestation ou avantage particulier accordé par l'Etat aux contribuables; les taxes causales, de l'autre, auxquelles l'on peut, par définition, rattacher une prestation ou un avantage étatique objectivement équivalent. Ces dernières peuvent, pour le surplus, se subdiviser en deux catégories, suivant qu'elles correspondent ou non au montant des coûts qu'elles impliquent pour l'Etat. On parle de taxes causales dépendantes des frais, dans le premier cas, et indépendantes des frais, dans le second.

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Buffat, Les taxes, p. 67; F. Gygi, Verwaltungsrecht, p. 266; Zaugg, Die Mehr-wertabschopfung, p. 227; Furer, MehrMehr-wertabschopfung, p. 114; Aubert/Jagmetti, Erglinzungsgutachten, p. 52s; comp. Knapp, Imposition, p. 254; Zuppinger, Mehrwertabschopfung, p.203; Kutt1er/Zaugg, Planungswertabschopfung, p. 257;

Lendi, Planungsrecht, p. 196.

ATF Hausbesitzer-Verein Base1, 105 la 134 (145s) = JdT 1982 pp. 530 ss (558s).

En ce sens, Knapp, Imposition, p. 254.

ATF Reutemann, 97 I 792 (803); Buffat, Les taxes, p. 84; Grise!, Traité, p. 617.

B. Un point de vue dissident: les redevances spéciales ("Sonderabgaben") Sous l'influence de la doctrine allemande52, Res Auer a proposé une nouvelle classification des contributions publiques53. Il estime, en effet que la dichotomie traditionnelle (impôt/taxe causale) est dépassée, n'étalll plus à même d'appréhender les nouvelles formes particulières de~

contributions publiques.

Auer, examinant le droit actuel des contributions publiques, constate trois nouvelles tendances. La première d'entre elles consiste à préleve1 des sommes d'argent dans le but d'agir sur le comportement de~

contribuables.

Selon la deuxième tendance, un groupe particulier de personnes, particulièrement responsable de certaines dépenses étatiques, se voi1 frappé de redevances qui permettent ainsi de couvrir ces dépenses selon

Selon la deuxième tendance, un groupe particulier de personnes, particulièrement responsable de certaines dépenses étatiques, se voi1 frappé de redevances qui permettent ainsi de couvrir ces dépenses selon