• Aucun résultat trouvé

Caractéristiques générales du discours Ouest-France

CHAPITRE 11 : La presse quotidienne régionale (PQR)

11.2. Ouest-France et ses caractéristiques

11.2.1. Caractéristiques générales du discours Ouest-France

Nous l’avons vu, contrairement aux autres journaux où les spécificités principales relèvent – et c’est attendu – de caractéristiques géographiques (mentionnant villes, rives, quartiers ou encore villes périphériques), le journal Ouest-France se distingue par des formes attestées remarquables : « tribunal » +27, « mineurs » +19, « interpelés » +15, « policiers » +13, « correctionnel » +13, « vols » +13, « prison » +12. Ces premiers éléments viendraient souligner un « contexte rennais » particulier traité par le journal. Afin de compléter cette

phase comparative, nous avons procédé à un dendrogramme96 du corpus Ouest-France afin

de dégager les principaux regroupements thématiques identifiables dans le journal ; voici ses résultats dans le tableau suivant97 :

96 Méthode proposée par Iramuteq que nous avons utilisé précédemment avec le corpus PQN.

97 À noter ici deux modifications faites sur notre corpus Ouest-France étudié seul : (1) nous avons fait disparaitre les rubriquages (Rennes Centre, Rennes Actu) car ils ont déjà été étudiés précédemment et ceux-ci nuisaient à la bonne lecture du corpus par les logiceux-ciels ; (2) un article consacré à famille Odorico, originaire d’Italie, et ses créations de mosaïques dans la ville entre la fin du XIXème et le milieu du XXème siècle a également été retiré (article paru en août 2016), le nom Odorico apparaissant quinze fois entre le titre, les illustrations et le bloc de texte. Ce choix, discutable, nous permet cependant de garder la main sur un corpus plus petit en taille et de percevoir les limites d’un logiciel, dans ce type de traitement (ici,

Illustration 16: Dendrogramme du journal Ouest-France par le logiciel Iramuteq

Ce schéma nous permet de regrouper effectivement en différentes classes des éléments d’un même corpus en soulignant leur relative proximité tout au long du texte. Il

ressort de ce dendrogramme cinq classes98 relevant d’une proximité entre elles plus ou

moins grande au regard de l’arborescence située en haut du schéma. Ces classes regroupent

l’association de deux articles faisait rentrer le nom propre Odorico parmi les principales caractéristiques du texte, avec toutes les associations réalisées derrières). Nous retenons cependant que pour que « l’empreinte » d’une famille migrante reste au long terme, celle-ci doit réaliser quelque chose d’illustre.

98 Soulignons ici que la classe 3, la plus faible en volume d’occurrences dans le corpus retenu par le logiciel, nous pose le problème de sa valeur statistique. En effet, lors du chargement des tests Chi2 (Chi-squared test en anglais) par le logiciel avec un paramétrage par défaut, le message « Chi-squared approximation may be

incorrect » apparait furtivement, sans pour autant annuler le calcul final. Par tâtonnement – ou processus

itératif – sur les paramétrages, nous nous sommes aperçu qu’une augmentation d’un nombre minimum de segment de texte par classe obligatoire (par exemple 200) faisait disparaitre à la fois la classe 3 du schéma et le message d’erreur. Nous décidons cependant, en gardant à l’attention ce phénomène, de la garder car, premièrement, la classe et sa relation avec la classe 2 s’avère pertinente au regard d’une lecture qualitative hors logiciel (nous percevons le lien établi), deuxièmement, l’affectation d’une cinquième classe ne modifie que d’une manière infime les quatre précédentes et, troisièmement, les liens statistiques entre la classe ainsi créée et les éléments reliés sont très importants (des coefficients Chi2 liant les éléments à la classe parfois supérieurs aux autres classes et pas moins de 178 éléments ayant une relation statistique avérée avec une probabilité d’erreur acceptable statistiquement (moins de 5 %)).

1348 segments sur les 1639 produits sur l’ensemble du corpus, soit une bonne représentation du corpus (82,25 %).

La classe 1 est seule et s’oppose au reste du corpus lui-même divisé en deux sous-groupes. Les classes 2 et 3 sont réputées proches et s’opposent à l’intérieur du deuxième groupe (hors classe 1) aux classes 4 et 5. Les cinq classes sont proportionnées entre elles ainsi : classe 1 21 % du total, classe 2 22,6 %, classe 3 12,5 %, classe 4 21,6 % et classe 5 22,3 %. Ainsi, si quatre des cinq classes ont une taille relativement proche autour de 20 % (en dehors de la classe 3), la relative proximité des classes 2 et 3 génèrent à elles seules 35,1 % du corpus tandis que l’addition des classes 4 et 5 regroupe 43,9 % du corpus. Comme nous l’avons déjà dit, le dendrogramme permet de repérer les cooccurrences des classes. Ces dernières se sont constituées à partir de l’agrégation de deux éléments proches que nous avons appelés « ainé » et « benjamin » (LEBART, SALEM, 1994 : 113), puis, sur le même principe, de l’addition d’autres éléments lexicaux. Voyons comment elles se sont fabriquées :

La classe 1 est menée par l’ainé vol et le benjamin homme. En opposition avec les

trois autres, elle traite – et c’est ce qui fait la spécificité du corpus Ouest-France comparé aux autres PQR comme vu précédemment – d’une catégorie nommée « mineur isolé » selon les items les plus recensés. Ce regroupement, aussi disparate

soit-il des autres classes, réunit sur un seul et même public exclusif 1/5e du corpus

réunis. Celui-ci est donc composé d’hommes caractérisés par les vols qu’ils commettraient. Ils ont en commun d’être répertoriés par des catégories d’âges (mineur, jeune et isolé (de représentant légal et donc mineur)), une série d’infractions commises (voler, cambriolage, agression, violence, délit) sur des objets (portable,

téléphone, argent, portefeuille) et donc d’être suspects aux yeux de la police

(interpeler, policier, garder ou placer (en garde à vue, en rétention)) et du tribunal (correctionnel, comparaitre). La Place de la République et la nuit sont mentionnées quand il s’agit de les évoquer. Ce public, de fait non pris en charge dans les discours de la ville ou des associations (autres classes), couvre ainsi un ensemble d’items très spécifiques qu’il s’agira pour nous d’étudier de plus près par la suite (et même de dépasser notre nomenclature de recherche pour comprendre les phénomènes discursifs mis progressivement en place pour parler « d’eux »).

➔ La classe 2, la plus importante de la seconde branche de l’arbre hiérarchique, tourne autour des ainé et benjamin maire et réfugié qui semblent englober à eux seuls toute la communication politique de la ville de Rennes autour de ce sujet. Il semble en effet, d’une part, que le discours politique provenant de la ville de Rennes (la maire

Nathalie Appéré, élu, Rennes Métropole, Frédéric Bourcier (adjoint délégué à la

solidarité et à la cohésion sociale), socialiste, président) soit omniprésent dans journal

Ouest-France sur cette période et que, d’autre part, ce discours produit la trame

suivante : la ville de Rennes est solidaire de l’accueil (pour accueillir) des réfugiés. Ainsi, des moyens (euros), des dispositifs, des logements seraient mis à disposition. Cet accueil n’est pas l’apanage de la seule ville de Rennes99 car le « réseau des villes solidaires pour l’accueil des réfugiés » s’est constitué suite à un appel national du

socialiste Jean-Christophe Cambadélis face à la crise des réfugiés qui concerne tous

les états de l’Union Européenne. Toute commune100 peut donc se déclarer solidaire,

Rennes en faisant une publicité particulièrement intensive comme le laisse penser ce résultat. Cet accueil ne semble pas malgré tout inconditionnel et serait particulièrement réservé aux réfugiés syriens. Ces derniers sont également parfois qualifiés de migrants. Cependant, lorsque réfugiés et migrants coexistent dans un même cotexte, le dernier est opposé au premier au tant que migrants pour des raisons économiques ne relevant pas des droits des réfugiés. C’est ici un réel champ de bataille discursif entre les différents élus de divers bords sur la politique d’accueil rennaise. Le terme migrant, s’il est particulièrement dépendant de cette classe101, est de fait en conflit dans ce corpus et partagé à moindre échelle avec l’autre classe

proche (classe 3). Le schéma ci-dessous, représentant le Chi2 du terme migrant dans

chacune des classes, nous permet ainsi de montrer cette relation avec la classe 2 (et plus faiblement avec la classe 3) et, au contraire, d’établir les publics non pris en charge par le terme migrant dans le journal Ouest-France, à savoir les classes 1, 4 et 5.

99 Lille notamment, de l’élue également PS Martine Aubry, s’est déclarée solidaire pour l’accueil des réfugiés dans sa ville, comme nous avons pu le constater dans notre corpus PQR.

100 L’élément commun du schéma est, de fait, une lemmatisation de « commune » (dans le sens de petite ville). 101 Coefficient Chi2 évalué à 23,83 pour cette classe, avec une marge d’erreur inférieure à 0.05.

Illustration 17: Chi2 par classe du terme « migrant » par le logiciel Iramuteq

➔ La classe 3, dont le lien statistique semble plus tenu et le poids relativement faible

statistiquement (12,5 %) regroupe un ensemble d’items reliés – mais en opposition – avec la classe précédente autour des termes somaliens et administratif. En effet, la situation de Somaliens demandeurs d’asile ayant été expulsés par le tribunal

administratif de Rennes (sous l’impulsion de la ville de Rennes) de leur campement

(en tente) du parc des Gayeulles semble particulièrement symptomatique de la possibilité d’une coexistence en discours de deux phénomènes opposés : la ville de Rennes se dit ville d’accueil des réfugiés en même temps qu’elle ordonne l’expulsion de demandeurs d’asile somaliens (et donc en attente d’un statut de « réfugiés »). Une perspective pragmatique pourra nous permettre de comprendre cette situation. Ainsi, cette classe fait le lien entre cette situation et l’ensemble des situations pratiques de demande d’asile et, potentiellement, de leur refus. De fait, cette situation amène vers deux lieux : la Préfecture pour la demande ou le Centre de

Rétention Administrative (CRA) et l’enfermement avant la possible expulsion. La

situation du squat de la Poterie, ancien EPHAD propriété du promoteur immobilier

Lamotte, est également remonté avec le dépôt d’une plainte et la demande

d’expulsion de l’ancienne maison de retraite (encore appelé bâtiment). Cette dernière situation nous montre que l’activité de divers réseaux associatifs et militants rennais

(certain·e·s militant·e·s sont mêmes régulièrement nommément cité·e·s) est également diffusé médiatiquement. Si nous avons ici deux exemples précis, nous verrons dans les classes suivantes que d’autres actions associatives et citoyennes sont évoquées.

La classe 4, créée à partir de l’ainé organiser et du benjamin collectif, voit ses liens de dépendance statistique à la classe plus faibles que les classes précédentes tout en restant importants (respectivement 55,17 et 53,86 au test Chi2). Cette classe fait état de la mobilisation d’organisations militantes, culturelles et cultuelles et de leurs activités « à l’agenda ». Proche de la classe 5, elle s’en distingue par la dimension collective et répétitive de leur organisation. On retrouve ainsi différents acteurs comme le Collectif de soutien aux sans-papiers, le Mouvement pour la paix, des associations musulmanes (Conseil régional du culte musulman, Daara Touba, Centre musulman Avicenne…) et catholiques (Secours catholique, Comité catholique contre la faim et pour le développement, Mouvement de la jeunesse catholique 35…) proposant des rendez-vous, des manifestations, des débats, des fêtes, etc. avec des marqueurs spatiotemporels : dans des salles ou sur l’espace public, en avril ; le

mercredi ou le dimanche principalement, à 18 h. Si l’activité associative et militante

rennaise semble donc régulièrement trouver écho dans le journal, la communauté musulmane a vu sa présence médiatique augmenter durant le mois de novembre 2015 avant de retomber. En effet, sur les dix-sept formes musulman et formes associées (musulmane, musulmans) recensées, sept sont répertoriées sur ce seul mois (avant même de disparaitre jusqu’à février 2016. Il s’agit alors pour le journal de faire parler différents acteurs perçus comme représentants de la communauté sur le sujet de l’islam et des attentats et de faire état de la situation d’une possible peur de rejet qui pourrait en découler pour cette population.

La cinquième et dernière classe s’organise autour de l’ainé quartier et du benjamin

habitant. Cette association traduit la particularité de cette classe, moins positionnée

sur les faits divers que sur la vie quotidienne et citoyenne sur l’année. On y perçoit à la fois donc les habitants de quartier et la vie lycéenne & étudiante. On y voit une ville et des relais individuels, ou associatifs / culturels (MJC Bréquigny, AFS Vivre sans

frontière, l’auteure Catherine Macé) soucieux du bien-être des habitants (face à une possible dégradation de la vie de quartier) et de l’accueil de populations étrangères, notamment chez les jeunes. Cette classe semble faire état d’une volonté citoyenne dans la ville d’une prise en compte des cultures102 différentes sur son territoire avec la notion de partage et d’accompagnement autour de différentes activités : atelier,

scène, repas, lecture de livres. Les deux principaux destinataires (et parfois acteurs)

sont ainsi la jeunesse (élève, lycéen, scolaire) et les habitants des quartiers perçus dans le journal principalement comme les habitants des quartiers moins favorisés,

périphériques que sont Le Blosne, Villejean, Bréquigny, Maurepas… les tours étant

une des caractéristiques de ces quartiers relevées par notre dendrogramme. Enfin, l’accueil et l’accompagnement bienveillant vis-à-vis de populations étrangères trouve un écho particulier lorsqu’il s’agit d’étudiants étrangers intégrant les campus

universitaires pour l’année, et rarement plus… De nombreux articles leur sont

consacrés, notamment en début d’année scolaire.

Bien évidemment, les différents fronts propositionnels du journal Ouest-France ne sont pas aussi partitionnés dans les articles, ce que ni l’Analyse factorielle des correspondances, ni le Dendrogramme nous permettent de voir. En effet ces derniers

« accentuent alors les différences et minimisent les ressemblances entre les colonnes du tableau », donnant l’impression « que le monde lexical est bien partagé et que nos variables délimitent des territoires lexicaux bien tracés » (MARCHAND, RATINAUD, 2012 : 687).

L’analyse des similitudes (ADS), comme son nom l’indique, cherche à représenter l’organisation, la structure du discours par l’établissement de liens entre les différents items. Ainsi, le graphique organise les rapprochements entre les données plus ou moins « similaires » en même temps qu’elle montre les spécificités du discours. Voici sa définition proposée par Pierre Ratinaud, développeur du logiciel Iramuteq ayant intégré l’ADS et Pascal Marchand :

L’ADS est une technique, reposant sur la théorie des graphes, classiquement utilisée pour décrire des représentations sociales, sur la base de questionnaires d’enquête (FLAMENT, 1962 ; FLAMENT, 1981 ; VERGES & BOURICHE, 2001). L’objectif de l’ADS est d’étudier la proximité et les relations entre les éléments d’un ensemble, sous forme d’arbres maximum : le nombre de liens entre deux items évoluant « comme le carré du nombre de sommets » 102 Ici, l’adjectif culturel.le est recensé six fois sur les quatorze formes totales.

(FLAMENT & ROUQUETTE, 2003 : 88), l’ADS cherche à réduire le nombre de ces liens pour aboutir à « un graphe connexe et sans cycle » (DEGENNE & VERGÈS, 1973 : 473). Les bases théoriques de cette technique sont résumées dans un exemple développé par Flament & Rouquette (2003 : 88) (MARCHAND, RATINAUD, 2012 : 688).

Pascal Marchand et Pierre Ratinaud proposent également les graphes développés par Claude Flament et Michel-Louis Rouquette pour expliciter la notion « d’arbre maximum ». Les graphes, que nous reprenons à notre compte, ci-dessous permettent ainsi de comprendre comment nous passons d’un arbre « complet » à un arbre « maximum », graphique qui sera proposé ensuite avec le logiciel Iramuteq :

En théorie des graphes, un arbre est un graphe tel que, entre deux quelconques de ses sommets, il existe un, et un seul, chemin. Si on part d’un graphe valué […], tout sous-graphe « pèse » la somme des valeurs correspondant aux arêtes retenues. On démontre que la procédure décrite ci-dessus [ndlr : ici pour nous, ci-dessous] produit l’arbre le plus « lourd » possible à partir du graphe de similitude considéré. C’est pourquoi on l’appelle l’arbre maximum ; c’est aussi une manière de dire qu’on a retenu le plus possible de similitudes de l’ensemble avec un graphe aussi simple que possible. Cela n’est pas surprenant : toute analyse de données consiste à perdre de l’information, en ne retenant que ce qui, à un certain point de vue théorique, est essentiel et signifiant. (FLAMENT, ROUQUETTE, 2003 : 89).

Illustration 18: Exemple de graphe complet valué d’une série de liens statistiques (à gauche) et de l’arbre maximum tiré de celui-ci (à droite)*

* Schémas tirés de Flament et Rouquette (2003 : 88-89).

L’arbre maximum « nettoie » ainsi le schéma des arêtes les plus faibles statistiquement dans des « cycles » : par exemple, pour le cycle ABCA103, l’arrête AC disparait,

leurs liens étant établis alors par AB et BC. L’analyse des similitudes que nous proposons est formée, à partir du même corpus Ouest-France, des 100 premières formes ayant les plus gros effectifs104.

Illustration 19: Graphique d’analyse des similitudes de Ouest-France par le logiciel Iramuteq

Ce schéma105 nous permet de comprendre la manière dont est organisé le discours

médiatique et les liens tissés entre les différentes parties du discours. Il met à jour la façon 104 Nous avons décidé de retirer la forme Rennes : celle-ci est de fait au centre de notre recherche, mais sa

disproportion liée au rubriquage des articles la rend inopérante dans ce cas.

105 Paramètres de l’ADS par défaut : indice « cooccurrence », présentation « fruchterman reingold », type de graphique « statistique ».

dont le discours est organisé (notamment, pour ce qui nous intéresse, entre les différents acteurs nommés) par le journal Ouest-France. Les halos de couleurs mettent en valeur et regroupent des « communautés » ayant un lien statistique fort de par leurs arêtes. Tentons ici une lecture de ce graphique, qui semble pouvoir être lu en deux parties opposées, la forme permettant le basculement de l’un à l’autre étant enfant :

L’item central de la première partie est ici réfugié englobé dans la bulle de la ville (de son discours) de Rennes (Rennes métropole inscrite dans le réseau des villes solidaires pour l’accueil des réfugiés). La ramification ici est double. La première traite des familles, cheval de bataille discursif de la ville engagée médiatiquement à accueillir les « familles de réfugiés ». La question de la famille est également liée à la vie de quartier, du travail et de la scolarisation des enfants. Un besoin de stabilité qui passe par la préfecture pour l’obtention des papiers français. Le verbe accueillir, souvent utilisé à l’infinitif106 dans le discours de la ville, pose le problème de l’imprécision, car elle ne situe ni le nombre ni la personne. Nous pouvons ainsi penser qu’il est une forme purement énonciative en totale rupture avec des formes indicatives107, proposant à la place de faits, d’actions effectivement réalisés, la virtualité d’un processus qui ne semble jamais s’être mis en route.

Ouest-France , 05/09/2015 :

Extrait : La maire socialiste, Nathalie Appéré, a annoncé, hier, que la ville s'engageait dans le réseau des villes solidaires pour accueillir des réfugiés. « Un drame humanitaire, d'une ampleur inédite, se joue sous nos yeux, sur nos plages, sur nos routes. Des milliers d'hommes, de femmes et d'enfants fuient la guerre et les persécutions et regardent l'Europe comme leur dernier espoir », commente Nathalie Appéré dans un communiqué. « Ne pas agir, ne pas réagir, serait nier toutes nos valeurs. « Ne pas protéger, ne pas accueillir, serait contrevenir à toutes nos obligations. Devant l'horreur et l'indicible, nous avons un impératif d'humanité, un devoir de solidarité » […]

Ouest-France , 22/10/2015 :

Extrait : […] Dans le brouhaha de dizaines de langues mélangées, Glenn Jégou remercie ces nouveaux Rennais : « C'est toujours une démarche courageuse de s'expatrier. Toutes vos influences enrichissent notre identité. C'est dans ce cadre que la ville construit la cité internationale Paul-Ricoeur, pour vous accueillir ». Bientôt finalisé, l’édifice situé entre le

106 Forme attestée 39 fois à l’infinitif.

107 Sur l’ensemble des formes verbales d’« accueillir » à l’indicatif, seules deux (à l’imparfait et au présent) concernent une parole de la ville de Rennes vers un public en mobilité : il s’agit alors d’étudiants étrangers.

boulevard de la Liberté et l'esplanade Charles-de-Gaulle permettra de loger 79 étudiants et chercheurs étrangers, avec une vue imprenable sur la ville […]

Ouest-France , 30/05/2016 :

Extrait : […] Les écologistes demandent qu’un effort supplémentaire soit fait pour l’accueil des migrants. Sur la métropole rennaise, 130 logements ont été identifiés par les communes pour pouvoir accueillir les réfugiés Syriens et irakiens, mais seulement une vingtaine est occupée […]

Face au fait d’accueillir des familles de réfugiés, se pose la question de l’accueil des