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Caractérisation de la persona Valley Girl  —  test de l’hypothèse 1

prises pour cible

Hypothèse 3  : Des idéologies linguistiques sont associées aux marqueurs Valspeak

4.2 Caractérisation de la persona Valley Girl  —  test de l’hypothèse 1

4.2.1 Méthodologie

Rappel de l’hypothèse principale et des hypothèses subsidiaires testées :

Hypothèse 1 : Les participants sont capables de définir le terme « Valley Girl. »

Hypothèse 1.1 : Le terme est connu de la majorité des participants.

Hypothèse 1.2 : Les participants associent à « Valley Girl » des sèmes prototypiques du stéréotype.

Hypothèse 1.3 : Les participants font en partie appel à des marqueurs linguistiques pour définir « Valley Girl. »

Deux questions ont été posées aux participants afin de tester ces hypothèses : 

« Are you familiar with the term ‘Valley Girl’? »

« If so, what does it mean to you? How do you feel about Valley Girls? »

Il était uniquement possible de répondre « oui » ou « non » à la première question. Cette dernière était requise , c’est-à-dire que les participants ne pouvaient pas continuer 17 l’enquête avant d’y répondre, la seconde était optionnelle.

Ces deux questions intervenaient dans la quatrième et dernière partie de l’étude, c’est-à-dire après les parties consacrées à la perception du CVS, HRT et de LIKE pour ne pas influencer le ressenti de ces trois marqueurs.

4.2.2 Résultats

115 participants (93.5%) disent connaître le terme «  Valley Girl,  » contre 8 (6.5%) qui répondent par la négative.

110 personnes (89.4% de l’échantillon) ont répondu à la seconde question. Les réponses, présentées dans l’annexe 4.2 étaient en moyenne de 23.4 mots (Md. : 19), mais avec de fortes disparités (σ : 17.4). Certains ont donc pris le temps de développer leur

Les questions requises sont marquées d’un astérisque rouge dans l’annexe 4.1.

réponse (réponse a., par exemple) alors que, parmi ceux qui ont répondu, d’autres ont 18 été beaucoup plus laconiques (réponse b.) :

a. It's hard to say--I don't know that they exist so much any more, other than possibly being upper-middle class White adolescent girls who have been identified with the San Fernando Valley area "memorialized" by Frank Zappa and Moon Zappa--and then by "Clueless" There are dialect features, yes, and certainly people have responses to them. I really don't know how I feel about them--I notice them and I associate them with youth more than with age, but I don't know how many "millennials" use a dialect with such features.

b. Using 'like' a lot.

Plusieurs sèmes principaux se dégagent des définitions apportées par les personnes interrogées. Nous faisons ici état des sèmes évoqués par 5 participants ou plus. Nous excluons de ces résultats le sème [fille] car l’objet même de la question, la perception du terme « Valley Girl, » implique nécessairement que les participants fassent référence à des jeunes femmes.

Plusieurs participants circonscrivent la persona Valley Girl dans l’espace et dans le temps. Elle est en effet souvent définie en fonction de son lieu de résidence : la vallée de San Fernando, la ville de Los Angeles ou plus largement la Californie (réponses c., d.), et est associée aux années 1980, ou plus rarement aux années 1990 (e., f.) :

c. Valley girls are girls who are from the LA region.19

d. Someone from the valley in California.

e. Valley Girl to me epitomized 80's Southern California culture.

f. […] I mostly seen it as a term not used since the 80s, mostly to reference.

La Valley Girl est parfois imaginée comme blanche (g., h.) et lui sont associés des pratiques linguistiques, une forme « d’accent, » ou des marqueurs du Valspeak (i., j.) :

g. I think of a young caucasian girl in her teens. h. Talking "white."

i. It means the person says "like" a lot. j. Use of 'like' a lot, vocal fry.

Plusieurs participants convoquent aussi des représentations médiatiques (k., l.) pour définir le terme :

Toutes les réponses des participants présentées sont exactement celles qui ont été données  ;  aucune

18

modification (orthographique, syntaxique…) n’a été apportée, et la mention [sic] n’est pas utilisée pour ne pas entraver la lecture.

C’est à chaque fois nous qui soulignons certaines parties des réponses des participants.

k. The stereotype Valley Girl is like Alicia Silverstone's 1995 character from Clueless.

l. When I think of valley girl, I think of movies: The cinderella story, clueless, mean girls.

Si certaines personnes s’attachent à donner un ressenti neutre (m., n.), le terme est parfois considéré explicitement comme un stéréotype ou un cliché (o., p.) :

m. I don't necessarily see Valley Girls negatively […]

n. […] I don't care much for it. It's just how someone speaks.

o. Valley girls are a stereotype that don't really exist (unless deliberately) which anyone who has spend any real amount of time in the valley knows.

p. I've heard about it being referenced more so from the accent rather than the stereotype of a, typically white, girl from the Valley. […]

Enfin, certains participants indiquent que ce terme peut être négativement perçu par les gens, mais pas nécessairement par eux-mêmes (q., r.) alors que d’autres décrivent sans détour ces jeunes femmes de manière dépréciative sans mise à distance (s., t.) :

q. The term tends to refer to young women in a disparaging way.

r. […] Most people seem to have a negative view of Valley Girl speech as I used to, but I no longer feel like it is annoying or particularly bad.

s. A valley girl feigns "ditziness" to seem cool, and I dislike them for this. t. I find valley girls to be slightly annoying and pretentious.

La majorité des participants fait référence à deux sèmes ou plus dans leur réponse  (M  :  2  ;  Md.  :  2  ;  σ  :  1.1), comme par exemple [description dépréciative] + [pratiques linguistiques] (réponse u.), ou [lieu de résidence] + [pratiques linguistiques] (réponse v.) :

u. To me a "valley girl" is someone who is an airhead blonde with an accent. Personally, i find valley girls annoying on the way how they speak and how they act.

v. A valley girl is from the San Fernando valley, and they say “like” every chance they get.

Comme nous l’indiquions précédemment (cf. section 1.3.1), le terme est donc associé à différents sèmes pour les participants, et ces sèmes varient en fonction de la personne interrogée, ce qui confirme que le sémème de «  Valley Girl  » repose sur le principe de «  ressemblance de famille  » (Wittgenstein  :  1963) évoqué dans la section

1.3.1. Il faut donc concevoir ce terme comme faisant référence à un faisceau de sèmes qui 20 peuvent varier selon les individus.

Il semble cependant exister une hiérarchie entre les différents sèmes associés à «  Valley Girl  » car certains semblent plus communément partagés que d’autres. La majorité des 110 réponses apportées (68, soit 61.9%) mentionnent des pratiques linguistiques. Ceci peut tenir au fait que les participants savaient qu’ils participaient à une étude dont l’objet d’étude était le langage, mais il est tout de même à noter que cette association avec des marqueurs du Valspeak a été faite spontanément par les participants. La figure 4.2 ci-dessous présente par ordre décroissant les sèmes (mentionnés par 5 participants au moins) associés au terme « Valley Girl » :

Figure 4.2 : Sèmes associés au terme « Valley Girl » 0 22 44 66 88 110 6 8 11 14 29 39 47 68

Pratique linguistique ou marqueur du Valspeak Description négative/dépréciative

San Fernando, Los Angeles, Californie Description neutre

« Stéréotype/cliché » Blanche

Référence à au moins une représentation médiatique Années 1980

Eckert (2008a, 454) utilise le terme « champ d’indexation » (indexical field) (cf. section 2.1.2).

4.2.3 Discussion & conclusion

Le terme «  Valley Girl  » est connu d’une très grande majorité des participants (93.5%). L’hypothèse 1.1 est donc acceptée. Bien que la population composant l’échantillon soit jeune, les participants connaissent pour la plupart le terme, ce qui contredit en partie les résultats de Bucholtz et al. (2007, 347), qui indiquaient :

Somewhat surprisingly given its salience in popular culture, the Valley girl label was relatively uncommon […].

Par ailleurs, les participants décrivent la Valley Girl avec des sèmes prototypiquement associés à cette persona. Bien qu’ils soient pour la plupart eux-mêmes californiens, ils s’attachent à préciser l’association du terme avec un lieu de résidence supposé. 11 personnes soulignent qu’elles perçoivent la Valley Girl comme blanche ; ceci peut être dû à la composition de l’échantillon. Bien qu’aucune statistique ethnique n’ait été réalisée (cf. section 4.1.3), si l’échantillon des participants correspond à la population totale de CSUN concernant l’appartenance ethnique, 77.9% des interrogés ne seraient pas blancs. Un individu non-blanc pourrait être plus à même de faire un commentaire sur l’appartenance ethnique qu’il associe aux Valley Girls car elle diffèrerait de la sienne. Les années 1980 semblent être associées au terme de façon plus ténue. Seulement 6 personnes y font référence, et il est à noter que ces individus sont en moyenne plus âgés que les autres participants : 35 ans (Med. : 36 ; σ : 8.3). Ceci suggère que l’association du terme avec les années 1980 s’estompe, particulièrement chez les plus jeunes. Quand des représentations médiatiques sont citées, il s’agit le plus souvent du film Clueless (cité 5 fois), sorti en 1995. Par ailleurs, si le terme est décrit de façon neutre par un quart des interrogés (26.4%), presque la moitié des participants (42.7%) y font référence de manière dépréciative et 12.7% le considèrent comme un stéréotype. Associer des caractéristiques négatives au terme est également prototypique (cf. section 1.2.2). L’expression «  Valley Girl  » convoque en outre des marqueurs linguistiques prototypiquement associés à la persona. Le sème [pratique linguistique] est le plus fréquemment mentionné. C’est pourquoi les hypothèses 1.2 et 1.3 sont également acceptées.

En conclusion,  une grande majorité de participants est effectivement capable de définir le terme «  Valley Girl.  » Elle y associe des sèmes prototypiques du stéréotype, particulièrement des marqueurs linguistiques. Ceci est l’objet de la prochaine section, qui traite de la perception du Valspeak.