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c. Précurseurs gazeux et mécanismes de nucléation associés

L’identité des espèces chimiques gazeuses impliquées dans le processus de nucléation reste aujourd’hui incertaine. Toutefois, certains précurseurs ont été identifiés comme jouant un rôle important. L’objectif de ce paragraphe est de les mentionner individuellement et de donner ensuite les associations principalement envisagées dans l’atmosphère, qui varient selon les environnements étudiés.

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i. Les précurseurs gazeux

Le potentiel d’une espèce chimique à jouer le rôle de précurseur gazeux pour la nucléation est déterminé par son abondance, sa volatilité et sa réactivité. La FNP dans l’atmosphère est étroitement liée au déroulement de réactions chimiques ou photochimiques en phase gazeuse. En effet, les concentrations en précurseurs gazeux requises pour la nucléation sont obtenues par photo-oxydation de gaz atmosphériques, tels que le dioxyde de soufre ou encore différents composés organiques volatiles.

Le précurseur gazeux identifié comme étant le plus commun est l’acide sulfurique, en raison de sa faible pression de vapeur saturante dans les conditions de température atmosphérique classiques, de plus diminuée en présence d’eau grâce à la grande enthalpie de mélange de ces deux composés (Marti et al., 1997). Les concentrations minimales en acide sulfurique nécessaires pour le déclenchement d’évènements de nucléation dans l’atmosphère semblent être de l’ordre de 105 cm-3 (Nieminen et al., 2009). Dans l’atmosphère, l’acide sulfurique gazeux est le produit de l’oxydation du dioxyde de soufre. Jusqu’à présent, il était admis que l’agent oxydant principal était le radical hydroxyle issu de la photolyse de l’ozone. Cependant, d’importantes concentrations en acide sulfurique obtenues en présence de faibles quantités de OH, mais aussi de nuit, ont suggéré qu’il existait un autre oxydant capable d’initier la formation de l’acide sulfurique à partir du dioxyde de soufre. Les études récentes de Mauldin Iii et al. (2012) ont montré qu’un composé carbonylé oxydé possédant deux sites à radicaux libres, le « stabilized criegee intermediate » (SCI), pouvait jouer ce rôle. La chimie d’oxydation du SCI semble être étroitement liée à la présence d’alcènes d’origine biogénique.

D’autres précurseurs que nous ne ferons que citer ici, tels que l’ammoniaque, différentes amines, des acides organiques, des oxydes d’iode ou bien encore des ions ont été identifiés comme acteurs de la nucléation dans différents environnements.

La taille et la composition chimique des embryons critiques restent mal connues aujourd’hui, en particulier à cause des limites instrumentales qui ne permettent pas l’analyse directe de ces embryons. Les mesures indirectes ainsi que les calculs théoriques suggèrent que l’embryon critique a un diamètre de l’ordre de 1 - 1.5 nm (Kulmala et al., 2007; Kirkby et al., 2011 ; Kulmala et al., 2013), et qu’il est constitué de quelques molécules maintenues ensemble par des interactions de van der Waals. Les précurseurs gazeux cités précédemment ont un moment dipolaire important et/ou contiennent des atomes d’hydrogène reliés à un atome électronégatif (azote ou oxygène). Ces propriétés permettent la mise en place d’interactions électrostatiques et de polarisation ainsi que la création de liaisons hydrogène qui jouent un rôle important dans la formation des embryons. Au cours de la croissance de l’embryon, un transfert de proton depuis les espèces acides (ex : H2SO4) vers les bases (ex : H2O, NH3) devient possible car la paire d’ions résultante est stabilisée par les molécules polaires au sein de l’embryon (ex : H2O). La formation de paires d’ions permet de réduire l’énergie libre de l’embryon critique et augmente donc le taux de nucléation. Toutefois, l’impact du transfert de proton ainsi que d’autres processus chimique mis en jeu restent aujourd’hui mal connus.

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ii. Mécanisme de nucléation binaire H2SO4 – H2O

Ce mécanisme a pour la première fois été proposé par Doyle en 1961, permettant selon lui un changement de phase aisé depuis la phase gaz vers la phase condensée à partir de concentrations en acide sulfurique de l’ordre de 1 ppt, et ce même pour de faibles valeurs d’humidité relative. Il a depuis été montré que des concentrations en acide sulfurique supérieures étaient requises afin d’initier la nucléation de l’acide sulfurique (Berndt et al., 2005; Nieminen et al., 2009), mais il semblerait que ce composé demeure malgré tout un des agents déterminants pour la nucléation atmosphérique dans de nombreux environnements. De multiples études de laboratoire ont été menées depuis les travaux de Doyle pour étudier le mécanisme de nucléation binaire H2SO4 – H2O et ont montré des résultats parfois peu en accord les uns avec les autres. Des travaux plus récents ont permis d’expliquer ces différences et d’éclairer réellement la contribution de ce mécanisme dans la nucléation atmosphérique.

Lors d’expériences de nucléation en chambre de simulation, l’acide sulfurique gazeux peut être acheminé vers la chambre via un gaz porteur qui circule au-dessus d’un réservoir ponctuel d’acide sulfurique liquide ou bien il peut être produit chimiquement in situ en continu. Ces deux méthodes de génération de l’acide sulfurique gazeux conduisent à des profils de concentration différents dans la chambre de simulation. Dans le premier cas, la concentration en acide sulfurique gazeux diminue rapidement avec le temps, limitant ainsi la croissance des particules, alors que dans le second cas la croissance des particules est favorisée par une concentration en acide sulfurique maintenue quasiment constante. L’instrumentation utilisée dans les premières études ne fournissant pas une efficacité de comptage suffisante et ne proposant pas de limite de détection en taille aussi basse que l’instrumentation actuelle, on observait des résultats différents en fonction du mode de génération de l’acide sulfurique. En effet, alors que la production chimique in situ d’acide sulfurique permettait à priori d’observer la nucléation pour des concentrations en acide sulfurique proche des concentrations atmosphériques (~107 cm-3, Berndt et al., 2005), les concentrations nécessaires dans le cas de l’utilisation d’un réservoir d’acide sulfurique liquide semblaient être largement supérieures (~109 cm-3, Zhang et al., 2004).

Récemment, grâce à des mesures de particules proches du nanomètre, des études conduites en laboratoire ont montré que la nucléation binaire de l’acide sulfurique et de l’eau pouvait effectivement, comme suggéré par Berndt et al. (2005), se dérouler à des concentrations pertinentes pour l’atmosphère et pouvait expliquer les taux de nucléation observés (Berndt et al., 2010 ; Brus et al., 2011). Sipilä et al. (2010) évoquent en particulier la formation d’embryons critiques contenant une ou deux molécules d’acide sulfurique, et ce quel que soit le mode de génération de l’acide utilisé. Toutefois, on se pose actuellement la question de savoir si, d’un point de vue thermodynamique, il est plausible qu’une ou deux molécules d’acide sulfurique suffisent à former l’embryon critique dans les conditions classiquement rencontrées dans la troposphère. Il est à penser que les études qui présentent de tels résultats sont basées sur des expériences dans lesquelles des contaminations chimiques non détectables par les instruments ont eu lieu (Kirkby et al., 2011).

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Cette dernière hypothèse est appuyée à la fois par des études en laboratoire et des mesures atmosphériques qui suggèrent que d’autres espèces gazeuses sont impliquées dans le processus de nucléation et sont présentes dans l’embryon critique afin de le stabiliser (ex : Paasonen et al., 2010 ; Kirkby et al., 2011). Des COV d’origine anthropique ou biogénique pourraient jouer ce rôle directement, à l’image des amines (Berndt et al., 2010) ou bien après photo oxydation, comme les acides organiques obtenus à partir de composés aromatiques et de monoterpènes. Ces propositions sont encouragées par une augmentation du taux de nucléation associé au système binaire H2SO4 – H2O en présence d’amines ou d’acides organiques, expliquée par la formation de fortes liaisons hydrogène entre les molécules organiques et l’acide sulfurique (Kurtén et al., 2008 ; Berndt et al., 2010).

iii. Mécanisme de nucléation ternaire H2SO4 – H2O avec NH3 ou amines

L’ammoniaque est présente dans l’atmosphère à des rapports de mélange compris entre 0.1 et 10 ppb au-dessus des continents (Seinfeld and Pandis, 1998). Son interaction avec l’acide sulfurique permet à ce dernier d’abaisser sa pression partielle via la formation de sulfates et bisulfates d’ammonium (Marti et al., 1997). La théorie et les premières expériences en laboratoire se sont tout de suite accordées sur le fait que la présence d’ammoniaque permettait d’augmenter les taux de nucléation du système binaire H2SO4 – H2O, mais qu’au-delà d’une certaine concentration en NH3 l’effet n’était plus amplifié (Merikanto et al., 2007a). Cette observation a été confirmée par des études récentes qui ont montré qu’au-delà de 100 ppt, l’effet de l’ammoniaque est à saturation (Kirkby et al., 2011). Cependant, la théorie prédit que le rôle de l’ammoniaque ne dépend pas de l’humidité relative, alors que l’expérience montre clairement que l’effet de l’ammoniaque est plus marqué à faible humidité relative (Berndt et al., 2010). Toutefois, même si les études en laboratoire montrent que l’ammoniaque augmente l’efficacité de nucléation du système H2SO4 – H2O, l’importance de ce mécanisme ternaire ne permet pas d’expliquer les taux de nucléation observés en atmosphère naturelle, et en particulier dans la couche limite (Kirkby et al., 2011). Ce constat implique donc que d’autres espèces, probablement organiques, sont impliquées.

Des concentrations significatives de diméthylamine détectées lors de la formation de nanoparticules en atmosphère naturelle laissent croire que des alkyl-amines peuvent contribuer à la formation et à la croissance de nouvelles particules (Sellegri et al., 2005; Smith et al., 2010). Les amines sont des dérivés de l’ammoniaque émis par toutes sortes de sources anthropiques ou biogéniques (Ge et al., 2011). Ces composés sont présents dans l’atmosphère à des concentrations moins élevées que l’ammoniaque (108 – 109 molec/cm3) mais sont des bases plus fortes, capables de former des complexes et des sels plus stables avec l’acide sulfurique et/ou les acides organiques (Kurtén et al., 2008). A cause de l’effet très marqué des amines sur la formation et la croissance de nouvelles particules, les mesures effectuées sans ajout intentionnel d’amines peuvent être faussées par des traces (< 109 molec/cm3) de ces composés non détectées par les instruments (Kirkby et al., 2011). Contrairement à l’ammoniaque, une augmentation de la concentration en amines décroit l’effet observé sur le taux de nucléation (Berndt et al., 2010). De nombreuses études s’accordent ainsi à conclure que les amines, en étant impliquées aux côtés de l’acide sulfurique et de l’eau, sont de très sérieux candidats pour expliquer les incohérences observées entre la théorie binaire et les

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mesures effectuées en laboratoire et en atmosphère réelle (Berndt et al., 2010; Erupe et al., 2011).

iv. Mécanisme de nucléation binaire H2SO4 – H2O assisté par des acides organiques

Les mesures réalisées en atmosphère réelle montrent que les particules d’aérosol présentent souvent une fraction organique importante dans leur composition chimique (Kanakidou et al., 2005; Pöschl et al., 2010; Freney et al., 2011). Une grande partie de la matière organique faiblement volatile présente dans les aérosols est issue de la photo-oxydation de COV émis en grande quantité dans l’atmosphère par des sources anthropiques ou biogéniques. A titre d’exemple, les acides aromatiques, comme l’acide benzoïque ou les acides toluiques, sont produits par la dégradation photochimique d’hydrocarbures aromatiques issus du trafic automobile et ont été identifiés en phase particulaire (Jang and Kamens, 2001). L’acide pinonique, qui est le produit d’une réaction entre l’α-pinène, l’ozone et le radical hydroxyle, constitue quant à lui une fraction importante des particules fines en milieu forestier (O’Dowd et al., 2002a).

Afin d’étudier le rôle des acides organiques dans la nucléation, des expériences ont été réalisées en chambre de simulation. Même si ces expériences s’accordent sur le fait que la participation des acides organiques dans les premières étapes du processus de formation de nouvelles particules est fortement probable (Hoffmann et al., 1998 ; Hoppel et al., 2001 ; Zhang et al., 2004 , 2009 ; Riccobono et al., 2014), des incertitudes persistent sur la manière dont ces acides sont impliqués.

Les travaux de Zhang et al. (2004; 2009) montrent qu’en présence d’acides organiques, la concentration en particules formées augmente et que la distribution en taille est décalée vers les diamètres supérieurs par rapport au système binaire H2SO4 – H2O seul, ce qui suggère que les acides organiques jouent un rôle à la fois sur la nucléation et la croissance des nouvelles particules. Toutefois, une étude menée sur l’acide cis-pinonique (Zhang et al. 2009) révèle que, dans le cadre de l’étape de nucléation, la participation des acides organiques se limiterait exclusivement à initier la formation des embryons à travers la mise en place de complexes stables avec l’acide sulfurique. A cause de l’effet Kelvin qui engendre des pressions de vapeur d’équilibre très élevées, ces acides ne seraient pas impliqués dans la croissance initiale des embryons jusqu’à des tailles détectables, de l’ordre de 1.5 - 3nm. La condensation de molécules d’acide sulfurique est, elle, rendue possible et favorisée par la condensation simultanée de molécules d’eau, qui limitent l’évaporation de l’acide sulfurique. Ce phénomène n’est pas observé dans le cas des acides organiques qui sont peu solubles et donc peu stabilisés par hydratation. Ainsi, la croissance initiale jusqu’à des tailles détectables (1.5 – 3 nm) serait uniquement due à l’acide sulfurique. Les auteurs suggèrent que l’augmentation de la taille des particules observée lors de l’ajout d’acides organiques en chambre de simulation pourrait être expliquée par une nucléation très rapide qui permet un temps de croissance plus long, conduisant par conséquent à des tailles de particules plus élevées. Même en absence d’eau, les interactions entre acide sulfurique et acides organiques conduisent à la formation de complexes heteromoléculaires qui permettent d’abaisser la barrière de nucléation et ainsi d’augmenter le taux de nucléation.

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La nucléation d’acides organiques seuls est à l’origine d’avis partagés. Zhang et al. (2004 ; 2009) suggère qu’en l’absence d’acide sulfurique, un acide organique, ou un mélange d’acides organiques, ne conduit pas à la formation de nouvelles particules, sauf à des sursaturations très élevées (ex : 45 pour l’acide benzoïque, Zhang et al., 2004). Au contraire, d’autres expériences basées sur l’ozonolyse de composés tels que le sabinène ou l’α-pinène, mettent en évidence la nucléation d’acides organiques seuls (Hoffmann et al., 1998 ; Hoppel et al., 2001). En particulier, les travaux de Hoffmann et al. (1998) suggèrent que la nucléation d’acides organiques se déroule via la formation d’heterodimères stables et que la formation de liaisons intermoléculaires fortes entre différents acides organiques joue un rôle clef dans la formation du noyau critique.

L’effet des acides organiques sur le taux de nucléation du système binaire H2SO4 – H2O pourrait être similaire à celui de l’ammoniaque (Benson et al., 2009). Cette observation laisse entendre que la nucléation assistée par des acides organiques pourrait expliquer les fortes concentrations en particules mesurées en milieu très pollué, où d’importantes quantités de ces acides sont produites par émission et oxydation photochimique d’hydrocarbures anthropiques et biogéniques.

v. Nucléation des oxydes d’iode

Des mesures menées en milieu côtier indiquent que des évènements intensifs de FNP sont observés sous l’effet du rayonnement solaire durant les périodes de marée basse, pour des concentrations élevées d’espèces iodées en phase gazeuse (O’Dowd et al. 2002, 2002a ; O’Dowd and Leeuw, 2007). En complément, la modélisation de tels évènements révèle que les taux de croissance observés ne peuvent pas être expliqués par la seule contribution de l’acide sulfurique (Pirjola et al., 2002). Etant données les concentrations en diiode plus élevées que celles de diodométhane ou d’autres espèces organo iodées et le taux de photolyse plus rapide du diiode, il semblerait que le diiode soit la source majeure d’atomes d’iode conduisant, après oxydation, à la FNP en milieu côtier. Des expériences en chambre menées par Sellegri et al. (2005) pour documenter le rôle des algues dans le processus ont montré que la quantité de particules produites dans la chambre était corrélée à la quantité de diiode, elle-même corrélée à la quantité d’algues introduites. La modélisation de ces expériences par Pirjola et al. (2006) a permis de retrouver les résultats obtenus dans la chambre de simulation.

vi. Nucléation induite par les ions

Dans le cas de la nucléation homogène, un embryon est formé par la condensation sur elles même de molécules de précurseurs gazeux, alors que dans le cas de la nucléation induite par les ions, l’embryon se forme préférentiellement autour d’un ion. Les interactions électrostatiques qui existent entre l’ion et les vapeurs condensables permettent en particulier d’abaisser l’énergie de formation de l’embryon. L’ion crée un champ de forces centrales qui limite l’évaporation des molécules, et influence également, dans des proportions moindres, l’arrivée des molécules de vapeur à la surface de l’embryon. Cette différence d’intensité dans les effets permet, grâce à un taux d’évaporation réduit, d’obtenir l’égalité des taux de condensation et d’évaporation pour des taux de condensation plus faibles que dans le cas de la nucléation homogène, et par conséquent un embryon critique de plus petite taille que celui

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obtenu en absence d’ion. Etant donné qu’un taux de condensation plus faible peut être obtenu pour des sursaturations en vapeur plus faibles, la nucléation induite par les ions permet donc d’obtenir les mêmes taux de nucléation que la nucléation homogène mais pour des sursaturations diminuées.

Les ions présents dans l’atmosphère sont porteurs du courant électrique dans l’air. Ils sont produits continuellement par la désintégration du radon, le rayonnement gamma et le rayonnement cosmique (Hirsikko et al., 2011). A ces trois sources principales s’ajoutent des sources plus ponctuelles (ex : décharges électriques, circulation automobile, chutes d’eau) ou propres à des environnements présentant des caractéristiques particulières (ex : friction des flocons de neige et de glace transportés par vent fort). Enfin, d’autres sources d’ions moins habituelles ont également été détectées : à la suite de la catastrophe nucléaire de Tchernobyl, on a mesuré une augmentation de la concentration en ions en Europe (Retalis, 1987), qui faisait probablement suite à la dégradation de composés radioactifs dans l’atmosphère.

L’étude des ions atmosphériques a fait l’objet de nombreux travaux, portant à la fois sur leur propriétés (sources, puits, concentration, taille ; ex : Hirsikko et al., 2011) et sur leur implication dans la FNP (ex : Laakso et al., 2002 ; Lovejoy et al., 2004 ; Luts et al., 2006 ; Kazil et al., 2008 ; Nieminen et al., 2011). La contribution de la nucléation induite par les ions se mesure en particulier par l’IIN, qui correspond au rapport du taux de nucléation chargé sur le taux de nucléation total. Il apparait que la nucléation induite par les ions est un mécanisme efficace pour la FNP dans les environnements caractérisés par de faibles températures et de faibles concentrations en particules préexistantes, associées à des humidités relatives élevées et des concentrations en acide sulfurique et en ions élevées. Ces conditions sont principalement obtenues en moyenne et haute troposphère, pour lesquelles on obtient des IIN allant jusqu’à 27% (Jungfraujoch, Manninen et al., 2010 ; Boulon et al., 2010). En couche limite, la nucléation induite par les ions joue un rôle moins marqué dans la formation de nouvelles particules, avec des valeurs d’IIN qui excèdent rarement 10% (Manninen et al., 2010). Une autre caractéristique remarquable de la nucléation induite par les ions est qu’elle est à priori plus fréquemment initiée par des ions négatifs que positifs (Wilhelm et al., 2004 ; Laakso et al., 2007; Enghoff and Svensmark, 2008). Des études récentes s’intéressent également plus particulièrement à la contribution de la recombinaison des ions dans la formation des particules neutres (Kulmala et al., 2013 ; Kontkanen et al., 2013).

Il existe deux types d’approche expérimentale pour étudier la nucléation induite par les ions. La première consiste à étudier la FNP en présence d’un rayonnement ionisant (UV, gamma, alpha) et à déterminer l’influence macroscopique des ions sur le taux de nucléation. La seconde consiste à s’intéresser aux réactions moléculaires entre les ions et les molécules neutres pour comprendre les mécanismes de la formation et de la croissance des embryons chargés.