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c – Des règles caractéristiques du traité-constitutif

Au sens juridique courant, le traité constitutif est celui « portant création d’une organisation internationale »2. En droit international, les auteurs3 évoquent de façon plus large

l’établissement de « structures ». Or, les Conventions à l’étude créent effectivement une « structure internationale » et en déterminent son mode de fonctionnement. Ainsi, les dispositions franco-algériennes portent création d’une « Commission mixte de Partenariat », quant aux dispositions franco-marocaines elles portent création d’un « Conseil d’Orientation et de Pilotage du Partenariat ». Le texte franco-algérien définit très précisément le mode de fonctionnement de la « Commission mixte de partenariat ». Qualifiée d’instance de concertation, les chefs d’États français et algériens en désignent les membres dirigeants et participants. Ils fixent également son calendrier et le lieu de ses réunions. La Commission est assistée dans ses travaux par des comités de suivi et sectoriels. Quant au texte franco-marocain, il ne créée pas une structure mais une série « d’organes du Partenariat »4. En substance, la

création de « structures » ou « d’organes » par des dispositions conventionnelles est une caractéristique favorable à l’idée que les Conventions étudiées seraient alors à ranger dans la catégorie des traités constitutifs.

Partant des caractéristiques du traité-constitutif, il convient de s’interroger sur le développement suivant. Selon Dominique CARREAU, « la spécificité du régime juridique

1 Soit que ces dispositions renvoient à l’application d’un texte conventionnel spécifique à l’instar de l’art. 7 de la

Convention franco-algérienne de Partenariat renvoyant à l’Accord signé entre la France et l’Algérie le 17 octobre 1999 (ratifié en 2002), soit que le texte de la Convention prévoit explicitement de telles mesures (dans le cadre du Partenariat franco-algérien, au Chapitre 1er du Protocole administratif et financier annexé à la Convention). Quant à

la Convention franco-marocaine, cette question est réglée par son article 18.

2 SALMON J. (Dir.), Dictionnaire de droit international public, Bruylant, Bruxelles, 2001, p. 1090. 3 DAILLIER P., FORTEAU M., PELLET A., op. cit., p. 378 et 379.

4 Convention de Partenariat pour la coopération culturelle et le développement entre le Gouvernement de la

République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc (ensemble deux annexes et deux protocoles) signée à Rabat le 25 juillet 2003, art. 8.

[d’un traité constitutif] tient, pour l’essentiel à deux caractéristiques : la volonté des États d’assurer la longévité des organisations internationales constituées et le souci d’en garantir le fonctionnement continu. Dans ce […] cas, l’institution, possédant une personnalité morale distincte des États membres, va pouvoir elle-même être une source de droit autonome en adoptant des actes unilatéraux appropriés. En bref, si le traité multilatéral en lui-même constitue une sorte de législation internationale, cette fonction est renforcée en cas de création d’une organisation intergouvernementale qui, de son côté, amplifiera le mouvement en adoptant des actes unilatéraux eux-mêmes constitutifs d’une législation dérivée »1. Partant de

ce développement, il est indéniable que les Conventions de partenariat étudiées constituent toutes les deux non pas une « organisation internationale » au sens courant, mais bien une « structure intergouvernementale » au sens du texte franco-algérien et, s’agissant du texte franco-marocain, d’un « organe intergouvernemental ». Ces structures ou organes sont dotés par les Parties de missions très précises, caractéristiques d’une autorité publique internationale

sui generis. Dans le contexte franco-algérien, comme franco-marocain, ces « structures » ou ces «

organes » ainsi constitués font autorité en matière de définition et de pilotage du Partenariat. Or, sur la base du raisonnement de Dominique CARREAU, quelques précisions s’imposent. Tout d’abord, il n’est pas envisageable a priori que la Commission franco-algérienne ou le Conseil franco-marocain possède une personnalité morale distincte des États qui l’ont créée. De fait, ils bénéficient tout au plus d’une habilitation par les États parties portant exercice de leurs prérogatives respectives en matière de définition et de pilotage de leur partenariat. Cela étant dit, il sera nécessaire d’interroger le degré d’autonomie laissé à ces structures par les États parties aux conventions de l’espèce. Ensuite et toujours sur la base du raisonnement de Dominique CARREAU, les actes que la Commission franco-algérienne et le Conseil franco- marocain sont susceptibles de prendre ne sauraient être de nature législative. Dans ce sens, il conviendra de s’interroger sur la nature juridique des actes que ces deux « autorités » prendront au titre des missions d’organisation et de pilotage du « partenariat » confiées par les États parties. Enfin, devront être envisagées les règles de longévité et d’assurance assignées par les États parties au fonctionnement continu de ces « structures ». Au demeurant, cet impératif de « fonctionnement continu » est conforme aux règles juridiques du droit international du développement commandant un processus de coopération à long terme.

Sans préjuger des conclusions auxquelles mèneront ces prochains développements, force est de constater qu’il est impossible de ranger les ensembles conventionnels bilatéraux de l’espèce dans la catégorie des traités-constitutifs. En effet, comme pour le traité-loi, il est exclu que les textes conventionnels, du seul fait de leur nature bilatérale, ne soient pas placés « sous le contrôle exclusif des participants »1. A ce titre, les conventions bilatérales de partenariat à

l’étude n’ont pas et ne peuvent pas avoir, comme un traité multilatéral, de vie propre de nature à l’émanciper de la tutelle des États contractants.

Sur la base de ces tentatives de classification des textes conventionnels proprement dits, somme toute inopérantes, il convient de s’interroger à ce stade sur la nature du « document- cadre de partenariat ».

II. – De la nature du document-cadre de partenariat

Dès lors qu’ils ne sont pas annexés à l’ensemble conventionnel étudié, il est nécessaire d’étudier le document-cadre de partenariat (DCP). Au demeurant, si leur nature est imprécise, les pouvoirs publics français sont relativement explicites sur ses deux principales caractéristiques. Le DCP, en tant que tel, est un document « de référence de la programmation par pays de l’aide française »2 (A). Il est par ailleurs « l’élément clé de la réforme de la

coopération française, [et met] en œuvre une approche rénovée de la coopération, favorisant sa lisibilité et sa visibilité, tout en se conformant aux principes de la Déclaration de Paris sur l’efficacité de l’aide »3. En ce sens, le DCP est un document intergouvernemental censé garantir

l’efficacité de l’aide (B).