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Carnot. Une des tours jumelles LU y est présente. La séparation s’effectue par le pont de la Rotonde, représenté par la deuxième tour, accolée au bâtiment, ainsi que la cheminée où il est inscrit LU.

L’histoire de cette usine débute en 1846. Jean-Romain Lefèvre reçoit une lettre de Monsieur Labbé, un nantais, qui l’informe qu’une place de pâtissier se libère à Nantes. Il quitte alors la Meuse pour l’Ouest de la France. En 1850, il épouse Isabelle Utile, originaire de l’Aisne. Tous deux s’installent à Nantes pour y tenir une pâtisserie au 5 rue Boileau. On estime entre 1848 et 1850 la date de création de la marque Lefèvre-Utile. La biscuiterie se fait à ce moment connaître par ses biscuits de Reims. A cette époque, les personnes les plus aisées achètent leurs gâteaux à la sortie du four. Jean-Romain Lefèvre attache beaucoup d’importance à la qualité de ses produits et à la rigueur de sa fabrication. Il choisit donc de produire des biscuits moins variés mais de qualité supérieure. Isabelle Utile, quant à elle, s’occupe de la dimension commerciale de l’affaire.

En 1882, Lefèvre-Utile reçoit la médaille d’or de l’industrie dans le cadre de l’exposition de Nantes. Forte de cette reconnaissance, la marque cherche à se développer. Elle change de lieu de production afin de disposer de plus d’espace et de fabriquer dans de meilleures conditions. A cause des problèmes de santé de Jean-Romain Lefèvre, la biscuiterie est rachetée la même année par Louis, l’un de ses fils. Trois ans plus tard, la société fait l’acquisition de l’ancienne filature en front de Loire, allée Baco, celle que l’on découvre sur ce cliché, face au Château des Duc de Bretagne. Lieu stratégique, il abrite longtemps la plus grande usine de Nantes. De nouveaux biscuits y sont créés dont le fameux Petit Beurre en 1986 ou encore Pailles d’Or en 1905. LU emploie ainsi jusqu’à 2000 salariés.

Lors de l’Exposition Universelle de 1900, Lefèvre-Utile reçoit l’unique Grand Prix destiné à la biscuiterie française, marquant ainsi sa consécration internationale. LU fait sensation avec un phare érigé sur le lieu de cette exposition. Est-ce un avant-goût des tours LU ? Dans le compte rendu du conseil municipal du 27 décembre 1899, on apprend que Louis Lefèvre-Utile souhaite augmenter la superficie de son usine et lui donner un meilleur aspect ». L’entreprise souhaite acquérir les deux côtés de l’avenue Carnot

cultures populaires, cultures informelles

et propose ainsi d’édifier de part et d’autre « des constructions symétriques, d’un aspect monumental », d’une « belle apparence », donnant à l’entrée de l’avenue Carnot un « aspect des plus agréables ».

Louis Lefèvre-Utile fait appel à l’architecte Auguste Bluysen afin de dessiner les tours jumelles. Elles sont construites en 1905 pour atteindre 38 mètres. Leurs fenêtres à trois baies sont surmontées d'un dôme ajouré, lui-même surmonté d'un phare au-dessus d'une tourelle de guet. L’objectif est de montrer l’évolution des industries et l’ampleur de la biscuiterie. Les tours se voient du ciel et font la fierté de Nantes. Elles sont aussi un bel objet de promotion de la marque : « pour susciter la gourmandise, rien de tel que de séduire l’œil » nous dit Louis Lefèvre-Utile à propos d’elles.

L’une des tours est fragilisée par les bombardements en 1943. En 1972, celle de gauche a pu être préservée. Elle bénéficie de travaux de restauration en 1998. Depuis 2004, elle est accessible au grand public.

L’usine LU a connu de grands changements architecturaux (extension, guerre, rénovation), mais aussi fonctionnels avec par exemple des moments de délocalisation, tel celui de la Haye Foussière en 1987. Aujourd’hui, ses vestiges sont devenus un lieu culturel prisé des nantais. Avec ses initiales, le Lieu Unique rend hommage à l’inoubliable biscuiterie. Le LU est maintenant un lieu de culture et de loisir, accueillant un large public. Dernier témoin de l’histoire mythique de la famille Lefèvre-Utile, la tour LU orpheline est toujours debout. Mais a-t-on conscience aujourd’hui d’être dans l’une des usines les plus emblématiques de Nantes lorsque l’on sirote un jus de fruit au bar ?

I

ntitulée “un petit endroit discret”, cette photographie en noir et blanc a été prise en 1953 par Robert Doisneau au marché des Halles à Paris. Qui ne connait pas son œuvre ? Doisneau est le photographe humaniste le plus populaire du 20e siècle. Il arpente les rues de Paris et de sa banlieue

pour raconter une époque. Avec bienveillance et amusement, il capte des moments furtifs, des petits instants du quotidien urbain, tout en témoignant d’une profondeur de réflexion. Au demeurant, son œuvre est foisonnante. Récompensés par de multiples prix de photos et exposés internatio- nalement, ses travaux figurent pour nombre d’entre nous le Paris d’autrefois. Le protocole est toujours le même. Patiemment et obstinément, il attend le bon moment pour déclencher son appareil et capturer l’histoire du quotidien comme il le dit “là où il n’y a rien à voir”. Rien à voir ? Pas si sûr avec ce cliché qui nous plonge au cœur de la densité du marché des Halles. Décrit par Zola comme “le ventre de Paris”, c’est depuis le 11e siècle une

concentration tant humaine qu’alimentaire qui s’y entasse dans

1953