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l’humanité. Le ministère de l’écologie et du développement durable est devenu celui de la transition écologique, une évolution sémantique qui en dit long : la question écologique et son lexique imprègnent désormais à ce point l’espace public et mobilisent tant le citoyen que ce ministère affiche, au moins dans les mots, sa volonté d’agir.

Pourtant, et comme le rappelle la légende du portrait de Rachel Carson, les questions écologiques se posent déjà il y a plus de 50 ans. En 1962, elle dénonce dans Printemps silencieux l’usage irréfléchi des insecticides chimiques, en particulier du DDT (dichloro-diphényle-trichloro-éthane). La conséquence en est une pollution durable de l’environnement suivant toutes ses dimensions : eau, sol, végétaux, animaux et êtres humains. Il y est question d’ailleurs de « biocides », de « guerre chimique » et d’« armes pointées contre le sol. »

La simplicité d’écriture permet à l’ouvrage d’être lu par le plus grand nombre aux États-Unis. En un mois, il est vendu à 600 000 exemplaires, après avoir été publié pour moitié dans trois numéros consécutifs du journal le New Yorker. Le 3 avril 1963, CBS Report lui consacre un documentaire d’une heure. Il est regardé par près de 15 millions de téléspectateurs. Le président John F. Kennedy s’empare du sujet et mandate une commission afin de vérifier les faits relatés par Rachel Carson. Son rapport est publié en mai 1963. Il recommande de limiter l’emploi des pesticides, et notamment de stopper la pulvérisation systématique préconisée par le département de l’Agriculture. Une réévaluation des niveaux de tolérance des résidus de pesticides dans les produits alimentaires est demandée.

Rachel Carson décède d’un cancer du sein 18 mois après la publication de son livre. Pour autant, ce dernier demeure une « graine » pour l’éveil de la conscience écologique. En témoigne la création en 1967 de l’Environmental Defense Fund, une organisation non gouvernementale de protection de l’environnement réunissant juristes, scientifiques et économistes. Elle obtient en 1972 l’annulation de l’homologation du DDT par la toute nouvelle Agence américaine de protection de l’environnement (EPA) créée par le président Nixon en 1970. Cette même année, quelques 20 millions de personnes défilent dans plusieurs villes américaines pour la première « journée de la Terre. »

cultures populaires, cultures informelles

Il y a un peu plus de 50 ans, Rachel Carson contribuait ainsi à faire entrer l’écologie dans la sphère publique. Son livre forme alors un « terreau » de connaissances incitant à considérer les questions écologiques en lien avec l’organisation sociale et l’action politique. Sa photographie avait pourtant été auparavant publiée dans le numéro de l’US Vogue le 15 août 1951, soit presque 10 années avant la diffusion de « Printemps silencieux ». Dans un article intitulé « Famous in Washington », le portrait de Rachel Carson apparaît ainsi aux côtés de 72 autres personnalités immortalisées par Irving Penn. Elle est accompagnée d’une autre légende : « auteure d’un brillant nouveau livre ‘La mer qui nous entoure’, et éditrice en chef de l’U.S. Fish and Wildlife Service. » A l’époque, ce livre (son deuxième) est une œuvre remarquée de vulgarisation scientifique de la vie marine. C’est déjà un immense succès, primé deux fois aux États-Unis et traduit dans près de 30 langues. Il reste plus de 80 semaines sur la best-seller list du New York Times.

Rachel Carson n’est-elle pas retombée dans l’anonymat pour le grand public, mobilisée ici non pour son œuvre propre mais pour célébrer au Grand Palais le seul travail artistique d’Irving Penn ? Ne devrait-elle pas sortir de l’imposant bâtiment et réinvestir aujourd'hui l’espace public ? En 1962, on peut lire dans Printemps silencieux l’histoire tragique d’une ville imaginaire exposée aux pesticides : « il y eu un étrange silence dans l’air. Les oiseaux par exemple - où étaient-ils passés ? (…) Ce fut un printemps sans voix. » En mars 2018, les scientifiques du Muséum national d’histoire naturelle et du Centre national de la recherche scientifique annoncent le phénomène de disparition massive des oiseaux sur le territoire français, « proche de la catastrophe écologique. » Le printemps silencieux dont parle Rachel Carson serait-il déjà survenu ?

page 169 extraite du catalogue des jouets de La Grande Récré « Nos moments préférés – jouets spécial noël » reçu en novembre 2017 dans une boîte aux lettres.

N

ovembre 2017, les fêtes de fin d’année approchent. Les stratégies commerciales des magasins de jouets se font de plus en plus agressives. La publicité inonde les boîtes aux lettres. Parmi les habituelles promotions, on y trouve cette année le catalogue la Grande Récré® « Nos moments préférés – Jouets spécial noël ». Un total de 212 pages, pour tous les âges, de quoi convaincre quiconque en quête d’une bonne idée de cadeau pour son enfant.

Le papier du catalogue est très fin. C’est un papier recyclé issu de forêts gérées durablement comme l’indique le logo PEFC avant le sommaire. En dépit de l’impression et l’envoi de dizaines de milliers d’exemplaires du catalogue, la Grande Récré se soucierait-elle réellement de l’environnement ? Peut-être bien. En témoignerait la création en exclusivité d’une gamme de jeux spéciaux en lien avec la nature, la gamme Exploria. On la retrouve page 169, située entre les globes terrestres et les microscopes. Comme on peut le constater sur la sélection de cette page, les propositions Exploria

2017

Exploria (jouet)