Nous allons chercher à analyser les commentaires : les différentes sortes de ces commentaire et leurs effets à partir de la question 22 jusqu’à la question 28.
Il leur est d’abord demandé (question 22) s’il leur est déjà arrivé d’avoir reçu des commentaires négatifs. Sur 168 personnes, la majorité (65,5%) répond oui, pendant que 34,5% des autrices disent n’avoir jamais reçu de commentaires négatifs.
Puis, à la question 22.b. je me renseigne sur le nombre de remarques négatives récoltées par chapitre (en moyenne), le chiffre varie entre 1 et 10 mais davantage 1 (32,5%) que 10 (3,4%).
Ensuite, nous cherchons à savoir sur quoi portaient ces remarques (question 22.a.) (les Wattpadiennes pouvaient donner plusieurs réponses).
Figure 19: Résultat question 22a, questionnaire aux auteurs wattpadiens et autrices wattpadiennes
Sur 115 répondantes, 48 mentionnent l’orthographe. C’est sur ce sujet que portent apparemment la plupart des commentaires négatifs. Ce résultat n’est pas étonnant pour plusieurs raisons ; d’abord, on sait qu’ici 14% des répondantes ont moins de 18 ans et l’orthographe est une aptitude qui s’acquiert aussi avec le temps. Puis, nous avons vu (c.f. cadre théorique) que 50% du contenu publié sur la plateforme l’est depuis un téléphone portable sur lequel on fait davantage de fautes car on écrit plus rapidement et que la vue d’ensemble du texte est beaucoup moins bonne (il est donc plus difficile de repérer ses fautes sur un petit écran). Enfin, la structure du site pour les auteurs fait en sorte qu’ils puissent publier leurs histoires chapitres par chapitres (environ 2000 mots) afin qu’ils puissent les écrire partout même dans une file d’attente ! Une relecture n’est donc pas toujours réalisée, sur Wattpad c’est la spontanéité qui prime. D’ailleurs, le site a même ouvert un nouveau genre d’histoire, le « chat story », qui compilent des textes sous forme de dialogue en langage familier.
Vient, après, avec 37 personnes choisissant cette réponse ; l’intrigue du texte. Ici, nous trouverons ce résultat logique. L’intrigue du texte étant centrale pour un lecteur, s’il ne l’aime pas, il le mentionnera.
Puis, arrivent ex æquo, la grammaire et le style de l’écriture. Si la grammaire se retrouvent sur le podium des sujets mentionnés dans les commentaires négatifs, elle doit sa place aux mêmes raisons que l’orthographe. Cependant, les fautes de grammaire ont l’air d’un tout petit peu moins déranger que celles d’orthographe. En ce qui concerne le style de l’écriture, il peut comprendre l’orthographe et la grammaire mais consiste davantage en un tout. Et il est dérangeant de lire un texte dont la forme et le style ne nous plaisent pas.
Les personnages, le genre et la thématique de l’histoire suivent ces différents points.
À la question numéro 23, on apprend que les commentaires négatifs ont influencé l’écriture de 52,9% des répondantes et 47,1% des autrices disent que ça n’a pas été le cas. Un résultat plutôt serré.
J’interroge donc ensuite celles qui ont répondu par l’affirmative, de quelles façons ces remarques négatives ont eu un impact sur leur écriture. Les résultats ont été les suivants9 :
Figure 20: Résultat question 23a, questionnaire aux auteurs wattpadiens et autrices wattpadiennes
9 Ce qui est rajouté en gras est bel est bien ce qui était écrit, seulement, cela n’apparaissait sur le graphique que quand on pointait le curseur dessus.
Sur ce graphique, il est intéressant d’examiner certaines des catégories qui ressortent le plus sur les 85 personnes répondantes. Il y a 14 personnes qui ont arrêté d’écrire en général. Si cela ne consiste pas en une majorité, c’est tout de même un résultat brutal. On ne peut pas savoir si les commentaires étaient particulièrement violents ou à quel point les autrices étaient peu sûre de leur écriture mais cela montre que l’interactivité de la plateforme peut pousser à des extrêmes.
Néanmoins, comme nous l’avons dit, ce n’est pas la majorité. Effectivement, la plupart des réponses montrent qu’en général, les répondantes (65,9%) ont pris les critiques de manière constructive et ont alors retravaillé les passages pour lesquels elle avaient reçu des commentaires négatifs.
On observera aussi que 43,5% des autrices ont douté de leur façon d’écrire après avoir pris connaissance des critiques. Cette proportion peut nous paraître élevée mais sachant que la plupart n’ont pas décidé d’arrêter d’écrire ensuite, ces doutes n’ont pas l’air anormaux, spécialement pour des premières publications. D’ailleurs, une seule personne a considéré le fait de changer de plateforme (et ne l’a finalement pas fait). La majorité des autrices wattpadiennes ont donc, continué d’écrire sur Wattpad malgré les critiques et en en tenant compte. Il y a une acceptation globale des règles du jeu de la plateforme, de l’écriture interactive.
On se penche ensuite, sur les commentaires positifs :
Figure 21: Résultat question 24, questionnaire aux auteurs wattpadiens et autrices wattpadiennes
Ce qui est intéressant dans ces résultats c’est que les commentaires positifs se focalisent sur l’intrigue, c’est-à-dire le fond, alors que les remarques négatives ciblent en majorité la forme. Cependant, il est vrai que le style de l’écriture est apparemment très important pour les lecteurs (étant très présent dans les deux genres de commentaires). Est-ce que les Wattpadiens sont plus souples avec des défauts dans l’intrigue en général ?
À la question 25, 88,6% des répondantes affirment que les commentaires positifs ont eu une influence sur leur écriture en général contre 11,4% disant que ce n’est pas le cas pour elles. On réalise ici que les remarques positives ont davantage de poids que les négatives. Ce constat n’est, en y réfléchissant, pas étonnant. En effet, les personnes publiant du texte sur Wattpad le font par envie et par passion. Un commentaire positif va aviver cette démarche dans laquelle elles sont lancées (car c’est un commentaire qui ira dans le sens de la marche). Tandis qu’une critique sur le travail qu’elles prennent plaisir à réaliser et à terminer, si elle peut avoir des effets, devrait être très puissante pour stopper le train en marche.
Puis, il est demandé aux autrices wattpadiennes de quelles façons ces commentaires influencent leur écriture.
Figure 22: Résultat question 25a, questionnaire aux auteurs wattpadiens et autrices wattpadiennes
Le graphique de résultats montre que les commentaires positifs incitent la très grande majorité des répondantes (91,2%) à continuer à écrire, ils boostent leur moral et leur donne pour 78,9% d’entre elles, confiance dans leur écriture. C’est un cercle vertueux car plus les autres ont un regard positif sur notre travail, plus on prend confiance, on ose et on publie (47,6%), ce qui augmente les chances de récolter d’autres commentaires positifs. Ces remarques ont même poussé presque 30% de ces autrices wattpadiennes à présenter leur travail à une maison d’édition.
L’absence de commentaire est également examinée. 68% des autrices disent avoir déjà été dans la situation de ne recevoir aucun commentaire sur un chapitre de leur texte, tandis que 32 déclarent que ça ne leur est jamais arrivé.
Quand, à la question 26.a., les Wattpadiennes sont questionnées sur les raisons de cette absence de commentaires, est les réponses données sont très diverses. 14 personnes sur 99 disent ne pas savoir pourquoi, une vingtaine blâment leur propre texte pas assez bon ou trop ennuyeux et, finalement, la réponse qui revient le plus (23 fois) concerne le manque de visibilité. 5 personnes mettent la faute sur les lecteurs « fantômes » qui lisent sans jamais laisser de remarques, et quelques autres pensent que les lecteurs n’ont pas forcément le temps ou l’énergie de commenter.
Les lecteurs sont donc assez peu mis en cause par rapport aux autres motifs de non-commentaires. Peut-être car les lecteurs constituent une denrée précieuse et que les autrices ont à cœur de les ménager ?
La question 27 nous apprend que l’absence de commentaire (contrairement à ceux positifs et négatifs) n’a pas d’influence sur l’écriture de la majorité des répondantes (72,9%). La quarantaine d’autrices ayant répondu être touchée dans leur écriture par ces non commentaires, répondent alors sur l’effet que cela a produit. La moitié révèle avoir arrêté d’écrire. On en conclut que si les autrices wattpadiennes sont beaucoup moins atteintes par l’absence de remarques que par les remarques négatives, celles qui le sont, le sont plus « gravement ». Ce phénomène est compréhensible. Les auteurs de Wattpad s’inscrivent sur la plateforme expressément pour chercher des retours et des réactions. S’ils n’en obtiennent aucune, l’écriture sur Wattpad perd quelque peu de son sens.
Ensuite, il est demandé aux écrivaines si elles ont déjà orienté un chapitre en fonction des commentaires qu’elles avaient reçus dans le précédent. Et, chose étrange, 68,5% répondent non contre 31,5% qui l’ont déjà fait. Ce résultat est un peu curieux, sachant que la majorité des autrices ont répondu avoir retravaillé leur texte après avoir reçu de mauvaises critiques. Toutefois, comme les critiques portent essentiellement sur la forme du texte, la question 28 était peut-être mal posée.