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Chapitre 2 LES ESPACES OUVERTS : DES ESPACES PIONNIERS ?

A. Une forte attractivité à petite échelle

Pour illustrer le propos de leur ouvrage collectif intitulé Chile : del país urbano al país

metropolitano, les géographes chiliens Rodrigo Hidalgo, Carlos de Mattos et Federico Arenas ont

choisi une photographie retravaillée d’un échangeur autoroutier (ARENAS, F., LAGOS, M., HIDALGO, R., 2010). Pas d’habitants, pas de végétation, pas d’automobiles ou de transports en commun, mais un symbole de la post-modernité urbaine basée sur des flux immatériels, des

effets d’affichage et la mobilité. On aperçoit juste à gauche de l’image quelques buissons de matorral évoquant la localisation périphérique de cet échangeur et également le fait qu’il puisse être implanté en lieu et place d’un espace ouvert comme de nombreuses activités ou infrastructures encombrantes.

En effet, pour quiconque connaît Santiago, l’évocation des autoroutes urbaines est incontournable. Et depuis dix ans et la finalisation de l’autoroute 68 reliant la capitale à Viña del Mar ou à Valparaíso, on peut extrapoler cette impression à l’échelle métropolitaine. Mais derrière ces projets pharaoniques et ces images, la mobilité est bien une notion qu’il faut aujourd’hui employer pour comprendre les réalités métropolitaines. Elle est maintenant communément définie comme un « bien intermédiaire » dont usent les personnes pour accéder à des ressources nécessaires à la satisfaction de leurs besoins et à la réalisation de leurs projets »29

Cette région se caractérise à petite échelle, comme étant une région très attractive pour les migrations régionales, nationales et internationales. Pour comprendre ce phénomène, il faut évoquer le contexte démographique national avec à la fois un taux de mortalité assez faible qui explique l’espérance de vie la plus haute d’Amérique latine avec 77,8 d’espérance moyenne en 2007 (INE, 2010) ce qui le place juste devant le Costa Rica et Cuba et un taux de natalité, au contraire, en forte baisse depuis ces dernières années. La combinaison entre ces deux éléments implique pour le Chili, le taux de croissance démographique (variation annuelle moyenne sur la période 2005-2010) le plus bas de tous les pays d’Amérique latine avec 1% comme l’Argentine et . Or, on l’a vu, les espaces métropolitains considérés sont vastes. La mobilité est donc au cœur de toutes les réflexions sur les aires métropolitaines pas simplement en termes de flux, ou d’aménagements mais aussi en termes de représentations. Leur étude constitue un double enjeu : un enjeu pour les aménageurs en termes de planification et un enjeu social car « l’explosion des mobilités, à l’ère de l’ « automobilité », met en évidence de plus en plus clairement le rôle des déterminants sociaux dans les comportements spatiaux des individus, qu’il s’agisse des navettes quotidiennes ou des pratiques de mobilité résidentielle » (BERGER, M., 2004).

105 l’Uruguay. Le Chili a donc plutôt un comportement démographique de pays du Nord comme les autres pays du cône sud américain que sont l’Argentine et l’Uruguay.

Ces chiffres révèlent par ailleurs un changement de mode de vie lié au vieillissement de la population d’une part et aux nouvelles pratiques de limitations des naissances d’autre part. En effet, le vieillissement de la population dans un Etat peu providentiel où les retraites sont quasiment inexistantes, les revenus des personnes âgées limités et le système social défaillant, même pour les classes moyennes, implique de nouvelles pratiques sociales notamment dans les espaces périurbains – automédication, difficile mobilité et finalement marginalisation d’une classe d’âge. Quant à la constante diminution du taux de natalité depuis quelques années, elle est surtout liée à la lente diffusion des moyens de contraception dans la population longtemps marqués d’une interdiction puis d’une condamnation par l’Eglise catholique, très puissante au Chili.

Ces éléments sont centraux pour comprendre la périurbanisation en cours puisque le lien entre ce processus physique et les cycles de vie des acteurs concernés a déjà été démontré (BONVALET C., 1990 ; HERVOUET V., 1998) et qu’il est évoqué dans la majorité de nos enquêtes.

Insatisfaction professionnelle et insatisfaction personnelle peuvent se rejoindre et dans ce cas, la solution envisagée est un déménagement au sein de la macro-région centrale. Le travail n’étant au Chili qu’un moyen de subsistance et de consommation et l’offre de logement étant conséquente, la mobilité résidentielle et professionnelle est très importante.

La très grande majorité des enquêtés a connu au moins 6 déménagements au cours de sa vie selon le rythme suivant : 1. Départ de la maison familiale pour études ou premier travail en ville avec hébergement par des amis ou de la famille 2. Premier couple 3. Enfants 4. Départ en périphérie 5. Retour au centre pour la proximité avec l’école ou le travail 6. Retraite et vente de la maison ou de l’appartement familial pour un plus petit logement en raison de l’absence de revenus à l’âge de la retraite ou hébergement chez les enfants. L’étape 3 est la plus prégnante et la plus déterminante. C’est dans 7 cas sur 10 que la naissance d’un enfant ou en tout cas la volonté de les voir grandir ailleurs qu’en ville a motivé l’installation sur des espaces ouverts périphériques. La mobilité liée au cycle de vie qui englobe les trajectoires résidentielles des ménages est en effet à prendre en considération même s’il est permis de se demander si ces cycles se reproduisent à l’identique quelque soit les ensembles régionaux et les générations.Tous

ces changements sont particulièrement sensibles dans l’aire d’étude. En 2002, la Région de Valparaíso a ainsi obtenu le plus fort solde migratoire du pays avec un solde positif de 20000 personnes30

Or cette mobilité se marque dans l’espace et particulièrement dans les espaces ouverts à la jonction entre espace urbain et espace rural donc à la jonction entre des activités différentes nécessaires à tel ou tel moment de la vie.

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C’est l’attractivité économique de cette grande région métropolitaine ainsi que la concentration et la diffusion de sa population vers ses périphéries qui rend indispensable l’étude de ses espaces ouverts soumis à des pressions mais perçus aussi comme des espaces alternatifs pour un type de développement plus durable. Des processus de périurbanisation, d’exurbanisation et d’exode rural naissent une configuration spatiale métropolitaine spécifique. Elle s’organise autour de centres économiques et métropolitains qui polarisent l’ensemble de la région et une grande partie des flux migratoires du pays : Valparaíso-Viña et Santiago ; des centres urbains anciens en milieu rural qui guident la périurbanisation depuis les deux métropoles comme Quilpué, Quillota ou Quilicura ; mais aussi des marges rurales plus ou moins intégrées à ces processus à la fois centrifuges et centripètes (VELUT S., FALIES C., 2008).

B. Les dernières heures de l’exode rural, la poursuite de la périurbanisation et un retour

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