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chez Saccharomyces cerevisiae 1 Prélude

3. Mécanismes d’action des checkpoints de l’ADN

3.1 Arrêts du cycle cellulaire

Les arrêts du cycle en réponse à un stress génotoxique ont donné naissance au concept de checkpoints (Weinert & Hartwell, 1988; Hartwell & Weinert, 1989). A tout seigneur tout honneur, c’est donc par eux que nous commencerons.

3.1.1 Arrêt à la transition G1/S

L’exposition des cellules de S. cerevisiae au phéromone de conjugaison alpha (plus communément appelé facteur ") entraîne un arrêt du cycle en phase « équivalent G1 » . Siede

et al. ont montré que des cellules préalablement synchronisées au facteur " puis exposées aux

rayons $ ou aux UV restent temporairement bloquées en phase G1 de façon RAD9-dépendante (Siede et al, 1993). Par la suite, plusieurs travaux ont précisé les bases moléculaires du checkpoint de la phase G1. La transition G1/S est contrôlée par l’accumulation des cyclines de la phase G1, Cln1 et Cln2, qui est régulée principalement au niveau transcriptionnel par le complexe activateur Swi4/Swi6 (pour une revue, (Cross, 1995)). Sidorova et Breeden ont montré qu’en réponse au MMS, Swi6 est phosphorylée de manière Rad53-dépendante en G1

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(Sidorova & Breeden, 1997). Cette phosphorylation inactive le complexe Swi4/Swi6, maintenant les transcrits CLN1/2 à un niveau trop faible pour déclencher le passage en phase S. La protéine Rad53 immunoprécipitée à partir de cellules exposées au MMS est de plus capable de phosphoryler Swi6 in vitro, ce qui suggère que Swi6 est un substrat direct de Rad53 (Sidorova & Breeden, 1997).

Beaucoup plus récemment, un deuxième mécanisme à l’origine de l’arrêt en G1 suite à des dommages de l’ADN a été découvert. En réponse au MMS, une voie de signalisation Mec1 et Rad53-dépendante empêche l’exportation nucléaire des ARNt contenant des introns via la relocalisation au cytoplasme du principal facteur d’exportation nucléaire des ARNt, la karyophérine Los1. Il semble alors que l’accumulation intra-nucléaire des ARNt non-épissés retarde l’accumulation de Cln2 et donc la transition G1/S (Ghavidel et al, 2007).

L’arrêt en G1 rend compte de la diversité des réponses cellulaires contrôlées par les checkpoints de l’ADN – phosphorylation inhibitrice d’un facteur de transcription, relocalisation d’une protéine – et éclaire la complexité des mécanismes d’amplification du signal suite à leur activation.

3.1.2 Arrêt à la transition G2/M 3.1.2.1 L’arrêt décisif ?

L’arrêt G2/M est l’héritier du checkpoint mitotique défini par Weinert et Hartwell en 1989 (Hartwell & Weinert, 1989). Et malgré la découverte des arrêts à d’autres phases du cycle cellulaire, il est toujours considéré comme l’arrêt principal chez S. cerevisiae (Harrison & Haber, 2006).

Weinert et Hartwell ont montré que le maintien artificiel de l’arrêt en G2 obtenu en traitant les cellules avec un inhibiteur de la polymérisation des microtubules permet de sauver la sensibilité du mutant rad9 aux rayons X, indiquant que leur radiosensibilité est bien liée au défaut d’arrêt du cycle en G2 (Weinert & Hartwell, 1988). Cependant, un même blocage artificiel en G2 n’augmente pas la survie du mutant rad9 après une exposition aux UV (Aboussekhra et al, 1996). La prévalence de l’arrêt G2/M semble donc dépendre du type de dommages. Les cassures double-brin de l’ADN (le type de lésions induites par les rayons X) sont très majoritairement réparées par recombinaison homologue chez S. cerevisiae. La recombinaison homologue utilise l’information génétique d’une molécule d’ADN identique pour réparer la lésion, ce qui rend la présence de deux chromatides sœurs indispensable ; ce système de réparation ne peut donc fonctionner qu’à partir de la phase S dans des cellules de levure haploïdes (pour une revue, (Paques & Haber, 1999)). Les lésions induites par les UV sont quant à elles majoritairement prises en charge par le NER (Nucleotide Excision Repair), un système de réparation actif dès la phase G1 (pour une revue, (Costa et al, 2003)). L’arrêt G2/M apparaît alors essentiel pour la réponse aux cassures double-brin de l’ADN, mais l’arrêt G1/S est important pour la prise en charge d’autres types de lésions. Le rôle « moderne » des checkpoints de l’ADN comme coordinateurs de la réponse aux dommages de l’ADN avec la phase du cycle cellulaire est ici particulièrement mis en lumière (pour une revue très complète sur la régulation de la réparation de l’ADN au cours du cycle cellulaire, (Branzei & Foiani, 2008)).

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3.1.2.2 Mécanisme de l’arrêt G2/M

L’entrée en mitose de la levure S. cerevisiae est contrôlée par APC/C (Anaphase Promoting Complex/Cyclosome), qui ubiquitinyle la sécurine Pds1, un inhibiteur de l’anaphase, et entraîne sa dégradation par le protéasome 26S (Cohen-Fix et al, 1996). L’arrêt en G2/M fait intervenir les 2 protéines kinases effectrices chez S. cerevisiae, Rad53 et Chk1 (Sanchez et al, 1999). En réponse aux dommages, Pds1 est hyperphosphorylée de façon Chk1-dépendante, mais Rad53-indépendante (Cohen-Fix & Koshland, 1997). Cette phosphorylation stabilise Pds1 en bloquant son ubiquitinylation par APC/C (Sanchez et al, 1999). Rad53 contribue également à stabiliser Pds1, mais cette fois en inhibant son interaction avec Cdc20, la sous- unité activatrice d’APC/C, même si le mécanisme précis n’est pas connu (Agarwal et al, 2003).

En plus de la régulation de Pds1 et de l’entrée en mitose, Rad53, mais pas Chk1, inhibe la

sortie de la mitose en favorisant le maintien de l’activité du complexe Cdc28-cycline B.2 Sanchez et al. ont proposé un mécanisme dans lequel la polo-like kinase Cdc5, nécessaire pour l’inactivation de Cdc28-Clb lors de la sortie de mitose (Hu et al, 2001b), est phosphorylée et inhibée de façon Rad53-dépendante (Sanchez et al, 1999). Ce modèle a été précisé et en partie invalidé peu après. Cdc5 inhibe le complexe inhibiteur de la sortie de mitose Bub2/Bfa1 par phosphorylation de la sous-unité Bfa1 (Fraschini et al, 1999). Mais contrairement au mécanisme proposé par Sanchez et al., l’hyperphosphorylation de Bfa1 par Cdc5 n’est pas diminuée en réponse aux dommages de l’ADN (Hu et al, 2001b). De plus, Hu

et al. ont observé une nouvelle modification post-traductionnelle de Baf1, probablement une

phosphorylation, qui dépend de Rad53, suggérant que le complexe Bub2/Baf1, plutôt que Cdc5, est la cible de Rad53 dans le contrôle de la sortie de mitose (Hu et al, 2001b) (figure I

8).

Figure I 8. Vue schématique de l’arrêt G2/M chez S.

cerevisiae. Adapté de (Agarwal et al, 2003)

En réponse aux dommages, Chk1 inhibe l’ubiquitinylation de Pds1 par APC/C en phosphorylant directement Pds1. Rad53 contribue à stabiliser Pds1 en inhibant son interaction avec Cdc20. Rad53 inhibe également la sortie de mitose, via la phosphorylation de Cdc5 ou Bfa1/Bub2.

Précisons enfin que la régulation de l’arrêt en G2/M par les checkpoints de l’ADN chez S.

cerevisiae est très différente de celle observée chez les eucaryotes supérieurs (métazoaires) ou

la levure S. pombe, où l’entrée en mitose est inhibée via l’inactivation de la CDK1 (homologue de Cdc28) (pour une revue, (Nyberg et al, 2002)).

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