• Aucun résultat trouvé

5   DOSSIERS MIXTES ET ENJEUX DE GESTION

5.4   L A GESTION DES DOSSIERS MIXTES

5.4.3   Archivage mixte : volet technique

Sur le volet technique de la gestion mixte, le MoReq1 et le MoReq2 consacrent chacun des spécifications optionnelles traitant des archives non électroniques depuis leur capture jusqu’à la gestion de leur sort final. Cette prise en compte part d’un constat, celui de la coexistence dans l’activité d’une entreprise de documents physiques et de documents électroniques, les uns comme les autres participant à tracer l’activité :

« A côté des archives électroniques, les locaux d’archivage d’une entreprise/organisation peuvent conserver des archives non électroniques. Ce peut être des archives papier ou sur d’autres supports analogiques, par exemple des microfiches ou des bandes audio. Ce peut être également des archives numériques stockées sur des supports amovibles tels que cédéroms, DVD ou bandes.

L’adjectif « physique » est utilisé par MoReq2 pour désigner tout document archivé sur un support extérieur au SAE, c’est-à-dire non seulement les

supports analogiques mais aussi les supports numériques contenant des documents qui ne sont pas contrôlés individuellement par le SAE. » (26)

La norme ne se préoccupe pas des besoins en matière d’archivage physique, elle cherche à

« traiter la continuité de la gestion papier et électronique dans le SAE » (25), afin de permettre l’intégrité, l’accès et l’exploitation d’un ensemble documentaire mixte (physique et électronique) : « Ces spécifications ne traitent pas des besoins métier de gérer et de conserver des archives physiques. Ce besoin peut exister ou non, selon l’environnement législatif et réglementaire. S’il existe, il faut veiller à préserver l’intégrité et l’accessibilité des archives électroniques et physiques comme un tout. Ces questions seront gérées par des procédures organisationnelles spécifiques. » (26)

Dans la dernière version du MoReq, le MoReq2010, le constat de la coexistence des supports physiques et électroniques est maintenu, même si la norme pointe la montée exponentielle de la production de documents électroniques. La nouvelle version de la norme confirme donc encore une fois la nécessité qu’un SAE gère aussi bien les documents physiques que les documents électroniques. La norme ne consacre plus pourtant, comme dans le MoReq1 et le MoReq2, de spécifications particulières pour la gestion des documents physiques, établissant uniquement que les documents d’archives regroupent des composants physiques et électroniques et que tous les composants doivent être pris en compte.

Si l’on revient aux premières éditions du MoReq, l’objectif est de conserver la trace d’une activité de la façon la plus complète possible, et d’y accéder de façon unifiée pour faciliter l’exploitation. Ainsi, selon le MoReq2, « le SAE doit pouvoir gérer les références aux archives physiques et/ou électroniques ; il doit pouvoir gérer des unités mixtes constituées d’archives électroniques et d’archives physiques. Les séries, dossiers, sous-dossiers et volumes peuvent comporter toute combinaison de documents physiques et électroniques. » (26) Cette approche du dossier mixte a évolué entre le MoReq1 et le MoReq2. Le MoReq2 considère qu’un dossier mixte est composé de pièces électroniques et de pièces physiques, géré de façon unifiée dans un système électronique. En revanche, le MoReq1 donnait la définition suivante d’un dossier mixte : « Ensemble cohérent de documents d’archives électroniques et papier stockés en partie dans le SAE sous forme d’un dossier électronique et en partie hors du SAE sous forme d’un dossier papier. » (25) Cette définition distinguait donc deux dossiers pour un même objet, l’un physique et l’autre électronique, ce qui s’oppose à l’approche du MoReq2 où il ne peut exister qu’une unité documentaire pour un même objet, le support des documents constitutifs de l’unité ne pouvant être une raison pertinente de scinder une unité cohérente d’un point de vue logique.

La différence d’approche du dossier mixte entre le MoReq1 et le MoReq2, et plus généralement de l’unité mixte, est bien lisible lorsque l’on compare leurs modèles de

relations entre entités. Dans le MoReq2, chaque groupe de documents, que ce soit la série, le dossier, le sous-dossier ou le volume, apparaît comme une entité dont l’hétérogénéité éventuelle de ses supports n’altère pas son unité, alors que dans le MoReq1, le dossier physique est considéré comme une entité autonome, reliée le cas échéant à l’entité de dossier mixte.

MoReq1 : modèle des relations entre entités MoReq2 : modèle des relations entre entités Figure n°6 : Modèles des relations entre entités dans le MoReq1 (25) et dans le MoReq2 (26)

Si l’approche MoReq2 nous paraît mieux respecter le sens de l’unité documentaire du dossier en tant qu’unité logique, nous pouvons remarquer que la distinction faite dans le modèle du MoReq1 entre les entités « archive électronique » et « archive physique » (qui correspondent dans le modèle du MoReq2 à l’entité « document archivé »), ainsi que les distinctions entre les sous-entités qui en découlent, mettent en relief des situations qui perdurent, et particulièrement l’existence d’une version électronique et d’une version physique d’un même document. Même si la distinction du document archivé en deux entités en fonction de son support peut être remise en question du fait que le document est comme le dossier une unité logique au-delà de la question de son support, électronique, physique

ou mixte, la distinction faite dans le modèle MoReq1 n’est pas fausse dans la mesure où ces entités présenteront des différences de traitement dans le SAE : un document physique pourra certes être référencé selon des règles commues aux documents électroniques et physiques, pourtant les métadonnées pourront différer entre les documents physiques et les documents électroniques et surtout le contenu des documents physiques ne sera ni indexé ni restitué à l’écran alors que ces possibilités existent pour les documents électroniques. Ces différences sont d’ailleurs signalées dans l’exigence 10.1.23 du MoReq2 (26).

Si l’on rentre plus en détail dans l’approche du MoReq2 des unités mixtes, on note que la norme distingue deux cas. En premier lieu, un groupe de documents homogènes, c’est-à-dire formé uniquement d’entités physiques, doit selon la norme être géré dans le SAE et rattaché au plan de classement suivant les cas en tant que série, dossier, sous-dossier ou volume. Il sera identifié à partir de son contenant physique dont les métadonnées seront capturées dans le SAE. En second lieu, dans le cas de combinaisons de documents physiques et électroniques au sein d’un groupe de documents, et donc d’une unité logique, c’est une gestion unifiée des documents au-delà de leurs supports qui est prônée : le contenant physique des documents physiques, s’il doit être référencé dans la description des documents pour les localiser à partir du SAE, ne fait pas sens en tant qu’entité à identifier en tant que telle dans le SAE, les documents physiques qu’il contient sont les seules entités signifiantes pour la gestion de l’unité logique à laquelle ils appartiennent. A ce titre, leurs métadonnées doivent pouvoir être capturées et gérées pour assurer une gestion unifiée de l’unité logique, de sa capture dans le SAE à la gestion de son sort final.

« Les documents physiques peuvent coexister avec les documents électroniques de plusieurs manières, notamment :

- une série, un dossier, sous-dossier ou volume ne contient que des documents physiques ; dans ce cas, l’entité identifiée dans le SAE renvoie à un contenant physique, par exemple une chemise de classement ;

- une série, un dossier, sous-dossier ou volume mêle documents physiques et électroniques ; le contenant physique des documents n’est pas signifiant pour l’archivage – par exemple un dessin d’ingénierie stocké dans un classeur avec d’autres dessins sur d’autres sujets.

Le SAE doit fournir des fonctions de gestion des contenants physiques (premier cas).

Pour gérer les documents physiques, le SAE doit pouvoir capturer et gérer leurs métadonnées. Ces métadonnées permettent aux administrateurs et aux utilisateurs, sous réserve des droits d’accès, de localiser, suivre, retrouver, réviser et détruire les documents physiques, et de leur attribuer des droits d’accès de la même façon que pour les documents électroniques.

De la même façon, le SAE doit pouvoir capturer et gérer les métadonnées des contenants physiques. » (26)

Nous venons de voir que les MoReq1 et MoReq2 prennent bien en compte la possible hétérogénéité de support des groupes de documents qu’un SAE doit gérer et préconisent une gestion unifiée de ces groupes de documents. Nous allons maintenant tenter de définir

les caractéristiques d’une gestion unifiée en analysant les exigences consacrées dans le MoReq2 à la « Gestion des archives physiques (non électroniques) » et à la « Destruction des archives physiques » (26). Ces modules sont identifiés comme optionnels du fait que la présence d’entités physiques parmi les entités à gérer n’est pas considérée comme une caractéristique systématique des ensembles documentaires que doit gérer un SAE. Bien que le MoReq1 aborde aussi la gestion des dossiers mixtes, nous concentrerons notre analyse uniquement sur les exigences du MoReq2, son approche des unités mixtes nous apparaissant mieux respecter le sens de l’unité documentaire du dossier en tant qu’unité logique. Nous organiserons notre analyse en fonction des catégories générales d’exigences fonctionnelles exposées dans la norme pour concevoir un SAE (chapitres 3 à 9), auxquelles nous ajoutons les exigences liées aux métadonnées (chapitre 12). Le détail de ces exigences fonctionnelles spécifiques aux archives physiques est donné en Annexe 1.

Concernant les « Plan de classement et organisation des dossiers », il s’agit de rendre compte de l’unité logique d’un groupe de documents comme un dossier en permettant d’y associer les documents physiques et les documents électroniques. Les aspects de

« Contrôles et sécurité » se concentrent pour les contenants et documents physiques sur le fait de tracer leur localisation et leurs mouvements (emprunts et retours) ainsi que les responsabilités qui y sont associées, avec historisation de l’ensemble de ces événements.

Dans le cadre des activités de « Conservation et destruction », la gestion d’unité mixte implique une gestion unifiée des documents physiques et des documents électroniques, notamment en appliquant les mêmes règles d’héritage des métadonnées dans les unités documentaires. Cette gestion unifiée peut se traduire par des alertes indiquant l’existence et la localisation de contenants et documents physiques dans le cadre de l’application des règles de conservation et de destruction d’une part, dans le cadre des transferts et des exports d’autre part. Dans ces actions d’export, les métadonnées des documents physiques devront être exportées selon les mêmes règles que pour les documents électroniques. Les actions d’export et de transfert des contenants et documents physiques nécessitant la réalisation d’interventions manuelles hors du SAE, ce dernier demandera confirmation de leur réalisation.

Concernant les « Capture et déclaration des documents », les règles de capture des documents électroniques devront s’appliquer aux documents physiques pour la saisie et la gestion de leurs descriptions au sein d’unités mixtes. L’« Identification » des contenants et documents physiques concernera leur identification dans le SAE et la répercussion cohérente de cette identification sur les supports physiques avec la création de codes-barres et d’étiquettes générés à partir des identifiants-système permettant d’identifier sans ambiguïté les contenants et documents physiques référencés dans le système électronique et de tracer leur localisation et leurs mouvements.

Au niveau des activités de « Recherche, repérage et restitution », les documents et contenants physiques seront signalés à l’utilisateur au même titre que les documents électroniques, par une remontée simultanée et dans une même opération des métadonnées des documents physiques et électroniques avec l’application des mêmes contrôles d’accès : le comportement du système devra être le même dans les opérations de recherche quel que soit le support des documents, à la différence que les documents physiques ne pourront être restitués à l’écran et que les métadonnées affichées pour les documents physiques pourront présenter des spécificités liées à leur support. Lors des opérations de recherche, l’utilisateur sera renseigné sur les informations liées à l’emprunt des documents physiques.

Enfin, concernant les « Exigences liées aux métadonnées », les métadonnées des contenants et documents physiques devront pouvoir être gérées selon les mêmes règles que pour les documents électroniques, particulièrement concernant l’enregistrement des modifications qui pourront être apportées, avec la possibilité d’attribuer aux documents physiques un jeu de métadonnées différent de celui utilisé pour les documents électroniques afin de préciser des éléments spécifiques aux supports physiques tels que la localisation et les formats.

On voit dans ce passage en revue des exigences fonctionnelles spécifiques aux archives physiques, la volonté de mettre des documents physiques au niveau des documents électroniques en termes de capture, d’identification, de recherche et de gestion. Les seules différences qui ne peuvent être uniformisées par le système électronique de gestion unifiée résident dans la restitution des contenus documentaires physiques et leur indexation.