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La méthode Hartree-Fock est une méthode centrale de la chimie théorique, aussi bien pour sa simplicité (conceptuelle et de mise en œuvre), qu’en tant que réference pour la dérivation de méthodes plus élaborées et plus exactes. Si les calculs réalisés lors de cette thèse l’ont justement été avec ce type d’approches post-Hartree-Fock, il est indispensable de définir les bases de l’approche Hartree-Fock, ne serait-ce que pour avoir une vision concrète du fonctionnement des approches qui en découlent [1].

L’approximation centrale de cette approche repose sur l’utilisation d’un unique déterminant de Slater (approche monodéterminantale) pour écrire la fonction d’onde du système dans son état fon-damental:

el

0i ' |φel

0i (2.16)

avec |ψ0eli, la fonction d’onde exacte et |φel

0i, la fonction d’onde Hartree-Fock. Cette dernière est déterminée variationnellement, i.e. telle qu’elle minimise l’énergie totale du système :

el

0| ˆHelel

0i = Eel

0 ≥ Eel

0 (2.17)

avec ˆHel, l’hamiltonien électronique (2.8), Eel

0 , l’énergie total exacte (2.9) et Eel

0 , l’énergie propre associée à |φel

0i.

2.2.1 L’équation de Hartree-Fock

Du point de vue pratique, la flexibilité de la fonction d’onde |φel0i dans l’approche variationnelle (2.17) vient du choix des spinorbitales ({χi, χj, ...χk}) dans l’écriture du déterminant de Slater :

el

0i = |χiχj...χki (2.18)

Afin de minimiser l’énergie totale du système, ces spinorbitales doivent être solution de l’équation de Hartree-Fock (2.19), dérivée du principe variationnel :

ˆ

avec ˆf (1), l’opérateur de Fock [2], i.e. un opérateur monoélectronique dont les spinorbitales |χii d’énergie εi sont états propres, et qui s’exprime :

ˆ

f (1) = ˆh(1) + ˆυHF(1) (2.20) avec ˆh(1), l’hamiltonien monoélectronique tel qu’il est défini dans l’équation (2.12), et ˆυHF(1), un opérateur monoélectronique de champ moyen pour la répulsion électronique. Plutôt que de considé-rer individuellement toutes les interactions d’un électron avec ses voisins, tel que c’est le cas dans l’expression (2.12) de l’opérateur ˆh(i, j), ˆυHF(1) considère la répulsion entre un électron et le champ moyen généré par ses voisins. Tout comme ˆh(1), l’expression de ˆυHF(1) est indépendante des coor-données des électrons. De plus, cet opérateur s’écrit lui-même comme la somme d’opérateurs mono-électroniques : ˆJj(1) et ˆKj(1), respectivement, les opérateurs de Coulomb et d’échange, tel que :

ˆ υHF(1) = n X j h ˆJj(1) − ˆKj(1)i (2.21)

avec n, le nombre d’électrons (ou plus exactement, le nombre de spinorbitales occupées), et ˆJj(1) et ˆ Kj(1), tels que : ˆ Jj(1)|χii = Z χjj) 1 rijχjj)dωj  χii) (2.22) et ˆ Kj(1)|χii = Z χjj) 1 rijχij)dωj  χji) (2.23)

Ces opérateurs dépendent explicitement des spinorbitales. La résolution de l’équation de Hartree-Fock est donc itérative (voir paragraphe suivant).

Pour comprendre l’origine et le sens physique de ces opérateurs, on peut revenir à l’expression de la valeur moyenne de l’opérateur ˆh(i, j), i.e. quand les interactions entre électrons sont considérées explicitement et pas de façon moyennée. Par exemple, pour deux électrons i et j, de coordonnées ωi et ωj, et occupant les spinorbitales |χii et |χji, on aura :

hˆh(i, j)i = hχiχj| 1

rijiχji (2.24)

Comme la fonction d’onde du système s’écrit sous la forme d’un déterminant de Slater, l’expression (2.24) devient : hˆh(i, j)i = Z  χiijj) 1 rijχiijj) − χ iijj) 1 rijχijji)  dωij (2.25) Dans l’intégrale de l’équation (2.25), l’occupation des spinorbitales reste la même de part et d’autre de l’opérateur pour le terme de gauche, alors qu’elle est inversée pour le terme de droite. Le terme de gauche correspond donc à l’image classique que l’on se fait de la répulsion entre deux électrons (i.e. l’interaction n’affectant pas les électrons). Il est d’ailleurs appelé terme de Coulomb. Le terme de droite, quant à lui, ne possède pas d’interprétation classique. Il est d’origine purement quantique, conséquence directe de l’indiscernabilité des électrons et de l’antisymétrie de la fonction d’onde. On parle dans ce cas du terme d’échange.

Regardons maintenant la valeur moyenne des opérateurs de Coulomb et d’échange, ˆJj(1) et ˆ

Kj(1), tels qu’ils sont definis dans les expressions (2.22) et (2.23) :

i| ˆJj(1)|χii = Z χii) Z χjj) 1 rij χjj)dωj  χii)dωi (2.26) = Z Z  χiijj) 1 rijχiijj)  dωij et hχi| ˆKj(1)|χii = Z χii) Z χjj) 1 rijχij)dωj  χji)dωi (2.27) = Z Z  χiijj) 1 rijχijji)  dωij

ce qui n’est pas sans rappeler les termes de Coulomb et d’échange dans l’expression (2.25).

Au final, l’équation de Hartree-Fock (2.19) peut en quelque sorte être vue comme une version améliorée de l’équation de Schrödinger monoélectronique (2.13). En effet, pour dériver l’équation de Schrödinger monoélectronique, on fait l’approximation que les électrons sont complètement in-dépendants les uns des autres, ce qui dans le cas d’une molécule est loin d’être exact. Au contraire, pour l’équation de Hartree-Fock, en faisant l’approximation de champ moyen, il est possible d’inclure l’effet des voisins et donc d’obtenir des états propres monoélectroniques plus réalistes.

Dans l’approche Hartree-Fock, l’énergie totale du système E0el (2.17) ne s’écrit pas comme la somme des énergies des spinorbitales ({εi}). Si tel était le cas, l’interaction de répulsion électronique serait décomptée deux fois pour chaque électron. De ce fait, l’énergie totale du systéme s’écrit :

E0el = hφel0| ˆHelel0i = n X i hi+1 2 n X i n X j [Jij − Kij] (2.28)

avec n, le nombre d’électrons total du système, hi, la valeur propre de l’opérateur monoélectronique ˆ

h(1), tel que défini par l’expression (2.12), pour l’électron i, et Jij et Kij les valeurs propres des opé-rateurs de Coulomb et d’échange tels que définis par les expressions (2.22) et (2.23), respectivement. Enfin, le théorème de Koopman établit que l’énergie d’une spinorbitale occupée correspond à l’énergie d’ionisation verticale de l’électron qu’il contient, tandis que l’énergie d’une spinorbitale inoccupée peut être vue comme l’affinité électronique pour l’ajout d’un électron dans cette même spinorbitale.

2.2.2 Les fonctions de base

L’équation de Hartree-Fock (2.19) n’admet de solution exacte que dans le cas des atomes. Dans le cas des molécules, une approximation efficace consiste à introduire pour chaque atome du système un ensemble de fonctions de base, et d’écrire chaque spinorbitale sous forme d’une combinaison linéaire de ces fonctions (CLOA). Cependant, par définition (2.14), une spinorbitale n’est autre que le produit

d’une fonction d’onde spatiale monoélectronique (aussi appelée orbitale) et d’une fonction de spin. La fonction de spin d’un électron ne pouvant prendre que les valeurs +1/2 ou −1/2, ce sont donc les fonctions d’onde spatiales (orbitales) qui s’écriront comme combinaisons linéaires de ces fonctions de base :

ϕi(−→r ) =XN b

κ

Cκ(−→r ) (2.29)

avec N b, le nombre total de fonctions de base utilisées pour décrire tous les atomes du système (au minimum, autant de fonctions de base que d’électrons : N b = n), C, les coefficients dans la combinaison linéaire et ξκ, les fonctions de base.b Tout comme les fonctions d’onde spatiales, les fonctions de base sont définies en tout point de l’espace et sont monoélectroniques. Au final, la flexibilité de la fonction d’onde Hartree-Fock dans la procédure variationnelle vient du choix des coefficients pour l’écriture des orbitales ϕi(−→r ).

2.2.3 Les équations de Roothan

Pour un ensemble restreint de spinorbitales, tel que ces dernières ne différent deux à deux que par leur fonction de spin :

ii), χjj)} =    ϕi(xi)α(si) ϕi(xi)β(si) (2.30) (ce qui est généralement une bonne approximation pour les systèmes sans couche(s) ouverte(s)), il devient possible d’éliminer le spin de l’équation de Hartree-Fock. Les fonctions propres de l’opérateur de Fock ne sont donc plus les spinorbitales mais les orbitales ϕi(−→r ) :

ˆ f (1)|ϕii = εiii (2.31) avec ˆ f (1) = ˆh(1) + n/2 X j h 2 ˆJj(1) − ˆKj(1)i (2.32) le nouvel opérateur de Fock (qui lui-même ne dépend plus des spinorbitales mais uniquement des orbitales), et εi, l’énergie de ces orbitales. Dans ce contexte, l’ensemble des n spinorbitales est com-plètement déterminé par un ensemble de n/2 orbitales, tel que la fonction d’onde électronique du système s’écrit (la présence d’une barre est synonyme d’un spin β (−1/2), son absence, d’un spin α (+1/2) :

el

0i = |χiχj...χni = |ϕiϕiϕkϕk...ϕn/2ϕn/2i (2.33) En introduisant la notion de fonctions de base, il devient possible de transformer l’équation intégro-différentielle de Hartree-Fock (2.31) en une équation matricielle, caractéristique d’un système de N équations indépendantes à N inconnues (les orbitales), couplées entre elles par une condition b. Ces fonctions de base peuvent être ou non centrées sur les atomes, et de nature mathématique très variée (onde plane, fonction gaussienne, etc.).

de normalisation. Ces équations sont appelées équations de Roothan [2], et peuvent s’écrire sous la forme condensée :

F C = SCE (2.34)

avec F , la matrice de Fock, qui correspond à la représentation de l’opérateur de Fock dans la base de l’ensemble des fonctions de base ({ξκ}), S, la matrice de recouvrement des fonctions de base ({ξκ}), C, la matrice des coefficients pour l’expansion de chaque orbitale ϕi(−→r ) en terme de fonctions de base {ξκ} (2.29), et E, la matrice diagonale des énergies des orbitales ϕi(−→r ). Toutes ces matrices sont de dimension N b x N b, avec N b toujours égal au nombre de fonctions de base. Dans cette approche, l’utilisation de N b fonctions de base permet d’obtenir N b orbitales différentes. Les n orbitales de plus basses énergies, parmi les N b orbitales possibles, seront occupées par des électrons tandis que les orbitales restantes seront laissées vacantes.

La généralisation du formalisme des équations de Roothan à un ensemble non-restreint de spinor-bitales, conduit aux équations de Pople-Nesbet, par séparation des électrons de spin α et des électrons de spin β.

2.2.4 La procédure SCF

Pour résoudre les équations de Roothan, il est nécessaire d’avoir recours à une procédure itérative auto-cohérente (Self-Consistent) [2]. En effet, l’écriture de ces opérateurs de Coulomb et d’échange dépend directement des orbitales, elles-mêmes solutions des équations de Roothan, dans lesquelles interviennent les opérateurs susmentionnés (2.31 et 2.32).

Pour ce faire, on part d’un jeu d’orbitales initial, i.e. de fonctions de base (2.29) caractérisé par un jeu de coefficients C. Typiquement, ces fonctions de base correspondent, initialement, aux orbitales atomiques. Avec ce jeu initial, les équations de Roothan sont résolues une première fois. Apres avoir écrit les opérateurs de Coulomb et d’échange, les éléments des matrices de Fock et de recouvrement, F et S, sont calculés, puis la matrice de Fock F est diagonalisée pour obtenir les matrices des co-efficients et des énergies C et E , correspondant à un nouveau jeu d’orbitales. Pour ce nouveau jeu d’orbitales, l’énergie totale du système E0elest calculée (2.28), puis comparée à l’énergie du système avec l’ancien jeu d’orbitales. Si la différence entre ces deux énergies est suffisamment petite, le nou-veau jeu d’orbitales est satisfaisant, sinon, la procédure est réitérée jusqu’à obtenir un jeu d’orbitales satisfaisant.