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des langues et des cultures

III.2. Redéfinition du lien social avec les environnements virtuels

III.2.2. Didactique des langues et environnements virtuels : actions sociales et objectifs interculturels

III.2.2.2. Apprentissage collaboratif-coopératif en ligne et collaboration interculturelle

Dans les recherches centrées sur la formation à distance, la notion de collaboration s‘étend de la seule dimension collective voire coopérative consistant à partager ou à échanger des informations, de ressources, ou à débattre des sujets donnés via les environnements numériques d‘apprentissage (Henri et Lundgren-Cayrol, 2001) à un aspect impliquant davantage les apprenants à savoir la réalisation par des groupes des tâches communes à travers ces environnements (Lewis, 1998 ; Roschelle et Teasley, 1995). Ces précisions marquent, de ce fait la jonction, dans ce domaine de l‘apprentissage en ligne, des notions de collaboration et de communauté. Cette dernière complète la collaboration en lui conférant une dimension relationnelle et sociale mise en évidence par les liens qui s‘établissent entre les apprenants à travers des tâches à visée sociale. Pour Henri et Lundgren-Cayrol (2001) l‘apprentissage collaboratif est généralement envisageable pour des publics d‘adultes du fait du degré d‘autonomie sollicitée des apprenants.

Par ailleurs, l‘émergence du terme de « télécollaboration » nous informe sur la corrélation de la collaboration et des technologies communicatives et aux activités d‘apprentissage à distance. Selon le Grand dictionnaire terminologique de l‘Office Québécois de la langue française (2006), est collaboratif « ce qui, dans un environnement informatisé ou en ligne, vise à favoriser la collaboration entre pairs en permettant d'échanger et de partager des compétences pour mieux réussir un projet commun ».

Tout comme le principe de communauté, il ne peut y avoir de collaboration sans relier, selon les propos Henri et Lundgren-Cayrol (2001), engagement, communication et coordination. Ces trois conditions sont indispensables mais aussi difficiles à assurer, ce qui implique des procédures réfléchies de la part des concepteurs des projets télécollaboratifs qui relèvent de leur compétence de gestion. Ce qui caractérise le travail collaboratif est le fait qu‘il n‘y ait pas de répartition de tâches entre les membres engagés dans la réalisation du travail. Ces membres se subsument petit à petit et d‘une manière cohérente pour constituer un groupe déterminé par la participation de tous et la permanence des interactions. Les marques de la collaboration se présentent succinctement comme suit :

 Objectif partagé par la communauté ;

 Interactions sociales importantes ;

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 Engagement des participants ;

 Co-construction de signification partagée (Lewis, 1997; Minier et Brassard, 1999;

Daele et Lusala, 2002).

Pour appréhender le concept de collaboration, il s‘avère nécessaire de le comparer à celui de coopération de par la confusion qui les caractérise. La collaboration, d'après Damon et Phelps (1989) cité par (Pelgrims Ducrey, 1996), est définie par une situation dans laquelle des élèves novices, réunis en dyades, participent de manière égalitaire et mutuelle aux interactions liées à l‘exécution d‘une tâche collective. Elle implique une moins forte organisation de la tâche en parties et rôles que l‘apprentissage coopératif. S‘ajoute à cela la différence dans l‘implication des membres par rapport à la collaboration comme l‘explicite Blanquet (2007) « Une certaine division du travail existe dans toute collaboration mais celle-ci est spontanée, basée sur un engagement, un désir de participation libre, alors que dans la coopération, elle est demandée et raisonnée. ».

Dans le domaine de l‘apprentissage collaboratif en ligne, Dejean Thircuir et Mangenot (2006b ) soulignent que deux critères permettent de définir la collaboration :

Le premier concerne l‘intention commune et un processus commun de partage et de co-construction des connaissances chez les apprenants (Lewis, 1998), voire sur l‘établissement d‘une conception partagée du problème à résoudre (« joint problem space », Roschelle et Teasley, 1995). Le second critère consiste à poser la nécessité d‘une production commune à l‘intérieur de petits groupes (en général de 2 à 5 personnes). Dans les deux cas, on considère que la collaboration assistée par ordinateur favorise une extériorisation de la cognition (Lewis, 1998) ; certains vont jusqu‘à parler « d‘interactions épistémiques » (Baker et al, 2003) ou, dans le domaine des langues, de « conversations réflexives » (Lamy et Goodfellow, 1998).

Ces auteurs optent pour le terme de « mutualisation » tout en se réfèrant à l‘expression

« apprentissage collectif » (George, 2001) pour le cas des échanges n‘impliquant pas de travail par petit groupe et ne visant pas une production collective.

Quant à Cohen (1994), il ne fait donc pas la distinction entre collaboration et coopération.

Selon lui, les marqueurs ou critères à retenir sont l‘activité conjointe des élèves, l‘engagement de chacun dans la tâche collective et l‘absence d‘une supervision rigide de la part de l‘enseignant. Dans ce même contexte Heutte (2003) considère que la coopération repose sur le principe du partage des tâches et la réalisation d‘un objectif commun. Chacun des membres s‘engage dans une tâche déterminée dont l‘exécution contribue à la concrétisation de la tâche finale. Le travail est cependant organisé et dirigé en grande partie

175 par un responsable du projet qui se charge du suivi et de la performance des membres du groupe.

Par ailleurs, s‘appuyant sur les principes du socioconstructivisme, l'apprentissage collaboratif implique des démarches pédagogiques et suppose l‘interaction entre les apprenants qui rend possible la construction de connaissances dont « le conflit socio-cognitif » et « la zone proximale de développement » constituent des concepts clés. Face à un problème à résoudre ou à une tâche à réaliser, les sujets interagissent entre eux en exprimant des points de vue différents générant ainsi un conflit d‘ordre social, de par les difficultés relationnelles résultantes et d‘ordre cognitif dans la mesure où chaque sujet se trouve incapable d‘intégrer ses réponses ainsi que celles de l‘autre en un ensemble unique, ce qui donne naissance au conflit sociocognitif. Ce dernier représente le moteur qui permet d‘étendre le potentiel cognitif des sujets ou les zones proximales de développement favorisant la construction des connaissances. Pour Levis (1998), dans une situation d‘apprentissage collaboratif, les « zones proximales de développement » des apprenants se confrontent et s‘élargissent, de ce fait, le groupe peut avancer plus loin qu‘un individu isolé.

Par ailleurs, le concept de « conflit sociocognitif » impliquant la conscience de la différence de point de vue, permet à l‘individu de mieux cerner sa propre vision et ses limites (Ouellet, 1991). Hormis les facteurs cognitifs et sociaux qui se superposent, la conscience de la différence entre les individus devrait amener à une construction cognitive plus optimale et à faire évoluer les rapports sociaux. Cela peut s‘appliquer à la dynamique interculturelle caractérisée par la dominance de la différence et la confrontation des opinions. En fait, c‘est par l‘entremise du conflit sociocognitif ou « culturo-cognitif » que les individus, dans une situation impliquant les divergences culturelles, procèdent à des négociations conduisant au développement des comportements et des connaissances. La question des interactions interculturelles ne peut faire abstraction des dynamiques groupales et de l‘impact du conflit « culturo-cognitif » relatif au déséquilibre relationnel, culturel et cognitif sur la prise du recul par rapport aux référents originels et qui se manifeste dans la conscience de la différence. En effet, le conflit socio-cognitif, de par son utilité formatrice, participe dans les interactions à visée collaborative au sein d‘un contexte d‘apprentissage. De même, en situation d‘interaction interculturelle, le conflit « culturo-cognitif » mène à une collaboration interculturelle et au développement de la communication et de la compétence interculturelle car, l‘interaction entre les membres du

176 groupe se caractérise par la confrontation des points de vue, des modes de vie et des cultures. C‘est pourquoi l‘apprentissage collaboratif/coopératif conduit à établir et renforcer des liens sociaux entre les apprenants et à mettre en évidence l‘intelligence collective, celle-ci constitue pour Lévy (1996) la visée principale des apprentissages en communautés du fait des processus de coopération qui les régissent.

III.3. Blogues, blogosphère: définitions et