• Aucun résultat trouvé

1.1. L’enseignement spécialisé à Genève

A Genève la prise en charge des élèves présentant des besoins éducatifs particuliers (BEP) est assurée par l’office médico-pédagogique (OMP). Cet office, chapeauté par le département de l’instruction publique (DIP), a pour mission de proposer aux élèves présentant des besoins éducatifs particuliers, des troubles ou étant en situation de handicap, différentes prestations et mesures de pédagogie spécialisée adaptées à leurs besoins, leur permettant une scolarisation et un encadrement adapté à leur situation.

L’enseignement spécialisé à Genève est régi par une base légale et notamment par la loi sur l’instruction publique (LIP)1. Cette loi assure l’intégration et l’instruction des enfants à besoins éducatifs particuliers (art.1 alinéa 2) et notamment leur intégration dans une structure d’enseignement ou de formation adaptée à leurs besoins (art. 32 alinéa 3). Cette loi prévoit par ailleurs que le département de l’instruction publique met en place des mesures de pédagogie spécialisée à destination des enfants / jeunes à besoins éducatifs particuliers (art. 28 alinéa 1) et décrète que « des solutions intégratives sont préférées aux solutions séparatives dans le respect du bien-être et des possibilités de développement de chaque élève, en tenant compte de l’environnement et de l’organisation scolaire » (art. 10 alinéa 2). Ce dernier principe se traduit par une série de mesures qui visent à diminuer la ségrégation des enfants à besoins éducatifs particuliers et favoriser leur scolarisation en milieu régulier. Le règlement sur la pédagogie spécialisée (RPSpéc) 2 concrétise la LIP en ce qui concerne la pédagogie spécialisée et constitue le référentiel de la pédagogie spécialisée à Genève. Ce règlement décrit et organise les mesures de pédagogie spécialisée.

Dans le canton de Genève, trois types de dispositifs rassemblent l’ensemble de l’offre en matière de pédagogie spécialisée : les structures et dispositifs intégrés (par ex. classes intégrées), les structures en sites propres (par ex. écoles de pédagogie spécialisée), et les structures et dispositifs inclusifs qui se traduisent par des mesures de pédagogie spécialisée allouée directement à l’élève scolarisé par ailleurs dans l’enseignement ordinaire (par ex.

appui à l’intégration, soutien pédagogique en enseignement spécialisé, etc.). Chacun de ces dispositifs est supposé répondre à des profils d’enfant bien spécifique, avec des besoins particuliers. L’orientation des élèves dans ces différentes structures dépend d’une évaluation appelée procédure d’évaluation standardisée (PES), réalisée par le secrétariat à la pédagogie spécialisée (SPS) et qui vise à déterminer les besoins et les mesures qui seront allouées aux élèves relevant de l’enseignement spécialisé.

1 https://www.ge.ch/document/loi-instruction-publique-lip-c-1-10-0 consulté le 7 août 2021

2 https://www.ge.ch/document/concept-cantonal-pedagogie-specialisee-geneve consulté le 18 août 2021

1.2. L’enseignement en institution spécialisée

Dans le cadre de ce mémoire, nous questionnons les violences vécues par les enseignants spécialisés en contexte d’institution, il convient alors de décrire plus précisément ces structures à Genève et notamment leurs particularités. Les institutions spécialisées, aussi appelées écoles de pédagogie spécialisée (ECPS) sont des structures accueillant entre 10 et 25 élèves à besoins éducatifs particuliers de 4 à 18-20 ans ne pouvant pas suivre un cursus d’enseignement en contexte régulier compte tenu de difficultés diverses et variées qui vont du trouble du spectre autistique, aux difficultés comportementales et d’apprentissages, en passant par le trouble de la personnalité. L’objectif de ces institutions est de pouvoir réintégrer, dans la mesure du possible, ces élèves dans le système régulier.

Dans ce contexte, les élèves bénéficient d’une prise en charge plus conséquente qui se traduit par un encadrement plus important, c’est-à-dire avec plus d’adultes et notamment un encadrement pluridisciplinaire assuré par : psychologue, psychomotricien, logopédiste, éducateurs, thérapeutes et bien sûr enseignants spécialisés. L’élève est pris en charge dans sa globalité, autrement dit, les professionnels travaillent sur les capacités scolaires, l’autonomie, mais aussi le développement général de l’enfant (Site État Genève)3. Cette prise en charge globale de l’élève est rendue possible par le triple mandat assumé par les institutions spécialisées. Effectivement, les institutions spécialisées fonctionnent dans

« l’entrecroisement […] de mandats à visées pédagogique, éducative et thérapeutique » (Emery, 2016, p. 33) et les professionnels ont, pour ce faire, l’injonction de travailler en équipe multiprofessionnelle (Emery, 2016, p. 48). Les institutions spécialisées, plus qu’ailleurs, se caractérisent par une « hétérogénéité des professions » (Emery, 2016, p. 35), par conséquent les professionnels doivent composer avec différentes expertises pour accomplir leur mission. De ce fait, la collaboration constitue un enjeu majeur dans ce contexte.

L’hétérogénéité des élèves est aussi très caractéristique de ce contexte puisque les élèves accueillis se distinguent non seulement par le trouble ou la déficience, mais également par le parcours scolaire et les savoirs acquis (Pelgrims 2006, 2009). De plus, comme le montre Pelgrims (2006, 2009) cette hétérogénéité est susceptible de constituer une contrainte de fonctionnement et d’infléchir l’activité des enseignants spécialisés.

Il convient aussi de préciser que l’enseignement en institution spécialisée se caractérise par une « absence de programme » (Emery, 2016, p. 28). Cela signifie que les enseignants n’ont pas d’injonction à suivre un programme tel que le plan d’étude romand (PER) pour mener leur enseignement. En revanche, ces derniers se doivent d’établir un projet éducatif individualisé (PEI) pour rendre compte des apprentissages des élèves, des objectifs fixés et de leur évaluation.

3 https://www.ge.ch/enseignement-specialise/structures-lieux-accueil#3 consulté le 7 août 2021

Comme tout enseignant spécialisé engagé à l’OMP, l’enseignant spécialisé exerçant en institution est censé répondre au cahier des charges du maître généraliste de l’enseignement spécialisé (Cahier des charges du maître généraliste de l’enseignement spécialisé, 2014). Ce cahier des charges prescrit que ce dernier assure le mandat pédagogique de l’institution et a pour mission première l’instruction et la transmission culturelle de connaissances et l’acquisition de compétences chez les élèves. Il assure également l’éducation et la transmission de valeurs sociales nécessaire à la vie en société.

Dans son rôle, l’enseignant spécialisé assure le suivi de chaque élève et leur fournit un encadrement pédagogique et éducatif adapté à leurs besoins. Il occupe par ailleurs une fonction centrale dans le fonctionnement de son établissement et doit, pour ce faire, s’impliquer dans les différents projets pédagogiques ou autres dispositifs de son institution.

L’enseignant est garant du bon fonctionnement des activités et de la collaboration entre : ses collègues, les professionnels externes et les parents. Enfin, il s’acquitte de tâches administratives afférentes à sa fonction et s’engage continuellement dans une démarche de développement professionnel en identifiant ses besoins de formation et en se formant lorsque cela s’avère nécessaire (Cahier des charges du maître généraliste de l’enseignement spécialisé, 2014).