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En quête de notabilité locale et intellectuelle

III- Appartenir au monde des lettres

558 La demande de création est effectuée dès le mois d’octobre 1773 auprès du Grand Orient à Paris. Voir Pistre

(Charles), op. cit, p.37.

559 Le vénérable est Louis Charpentier de Cossigny qui a été initié au Cap Français à Saint-Domingue. Les liens

maçonniques vont être importants dans la carrière de Fos.

560 PISTRE (Charles), op. cit., p.41. Les domestiques ne sont pas libres de pensée et d’action qui sont les

fondements de la franc-maçonnerie.

561 CHEVALLIER (Pierre), « Nouvelles lumières sur la Société Olympique » in Dix-huitième siècle, n° 19,

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Le travail scientifique est un autre aspect de l’activité des médecins méridionaux. En quête de reconnaissance, celle-ci doit passer par le jugement des pairs et la validation scientifique. Pour certains la production ne sera pas scientifique mais apportera d’autres particularités. Ajoutons que sur l’ensemble des médecins de notre corpus peu d’entre eux ont été des auteurs prolixes voire même des auteurs tout simplement. Pour beaucoup nous n’avons même pas leur thèse de doctorat. Nous nous attacherons à l’ensemble des publications des médecins du corpus et des préoccupations de leur temps. Nous nous intéresserons par la suite à deux médecins originaux par leurs écrits et ce à deux moments différents de notre période. Les publications, qu’elles aient une portée scientifique ou non, apportent un éclairage sur les médecins méridionaux. On découvre ainsi une autre facette de ces praticiens.

1. Apporter une contribution aux progrès de la science

Rédiger et publier des contributions scientifiques est, pour certains médecins, à la fois le reflet de leur intérêt pour leur art et une volonté de rayonner en tant que praticien au niveau local voire national. Nous nous intéressons aux publications ce qui sous-entend que nous excluons la thèse de baccalauréat et autres écrits universitaires. Nous occultons volontairement les correspondances et les mémoires soumis aux différentes académies ainsi qu’à la Société royale de médecine.

Sur les 303 médecins de notre corpus seulement douze médecins ont été publiés, soit 3,96%. De cette infime proportion, nous avons pris le parti d’isoler publication locale et publication nationale.

a. Des publications de portée locale

Seuls trois auteurs ont publié à échelle locale. Dans le cas de certains, il s’agit d’un travail répondant à une demande précise des autorités présenté sous forme de brochure. Jean-Pierre Carayon précise en introduction de son mémoire sur une épidémie ayant sévit à Réalmont qu’il s’agit d’une demande de Monsieur Du C….562.

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Vous exigez un Mémoire sincere & tres circonstancié sur la maladie qui a aflligé certains cantons de notre province, & qui s’est faite sentir si vivement dans notre ville de Réalmont563.

Cet ouvrage est imprimé à Albi et tout porte à croire que la portée est locale.

Jean Gallet-Duplessis rédige un mémoire relatif à l’épidémie de fièvre miliaire, ou suette, particulièrement meurtrière en 1782. Dans ce cadre, il a participé avec d’autres médecins à la rédaction de plusieurs mémoires avec les docteurs Rigaud, Frère, Frizac, Vallée et Laroque et ce dans un laps de temps rapproché en mars, avril et mai 1782. Ces différents mémoires ont été imprimés à Castelnaudary ou Carcassonne. Contexte lié aux missions de la Société royale de médecine, Gallet-Duplessis publie un ouvrage sur le traitement de la fièvre miliaire, cette fois à Pamiers564. Le docteur Reboul, autre médecin audois, a participé à l’élaboration d’un

fascicule dans le cadre de cette épidémie de suette. Cette brochure a été publiée à Toulouse en mai 1782 et est co-signée entre autre par le docteur Dubernard, professeur de la faculté de médecine de Toulouse.

C’est dans un contexte similaire que Jean Mailhès565 écrit en 1721 un rapport relatif à

l’épidémie de peste de Marseille. Il relate les faits observés au cours de son intervention avec les médecins de Montpellier. Cet écrit, compilé aux lettres des autres médecins, a été imprimé à Lyon. Bien qu’il soit un protégé de Chirac, le destinataire de cet écrit n’est autre qu’un médecin local, il n’en reste pas moins le doyen de l’université de Cahors. Jean Mailhès, questionné sur les modalités d’intervention durant l’épidémie, relate brièvement la prise en charge des malades et l’évacuation des cadavres. Il donne peu de détails sur la maladie :

Il seroit inutile, Monsieur, que je vous en décrivisse les symptomes & les differentes variations on ne sçauroit le faire avec plus de justesse que ces sages & excellens praticiens de Montpellier l’ont fait dans leur relation566

Mailhès se contente de décrire quelques observations sur les malades avec bubons et charbons et ceux qui en sont dépourvus. Il conclut avec par une réflexion sur les origines de la maladie et expose deux causes. La première pourrait trouver sa source « dans des balots de

563 Idem.

564 GALLET-DUPLESSIS (Jean de), Méthode pour le traitement de la fièvre éruptive miliaire, mise simplement

à la portée du public. Observations, suppléméent, remèdes contre les suites de la maladie, par M. Pilhes,

médecin, Pamiers, A. Larroire, 1782.

565 BMT – FaD 510 (2) – Lettre à Monsieur Calvet, conseiller, medecin du roy, professeur royal et doyen de

l’université de Cahors. Avec des observations sur la maladie pestilencielle de Marseille. Par Mr Mailhes, A

Lyon, Les frères Bruyset, 1721.

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marchandises transportez de Seide ville de Syrie » mais d’autres pensent que les Marseillais, manquant de blé, en auraient trop consommé. Cette consommation de blé avarié en trop grande quantité aurait entraîné une mauvaise digestion. Mailhès semble partisan d’une cause liée aux troubles digestifs :

Vous sçavez, Monsieur, que les fortes passions dérangent la machine beaucoup plus qu’on ne pense, & que le sang tient d’ordinaire du chile ses bonnes & mauvaises dispositions ; on ne conçoit pas de même l’action de ces miasmes ou corpuscules ; on doute s’ils peuvent agir puissamment sur d’autres corps sans se détruire, passer si aisément de l’un à l’autre sujet & porter dans tous, le désordre & l’abbatement567

Il en va de même pour François Triadou qui en 1802, publie un écrit à connotation pamphlétaire à l’encontre de Pierre Pharamond, tous deux médecins de la ville de Millau. Cet écrit a été publié à Millau. La portée semble être strictement locale puisqu’il s’agit d’un conflit entre deux médecins de la même ville dans la tradition née au XVIIIe siècle de mise à

contribution de l'opinion publique pour défendre son honneur et sa réputation scientifiques.

b. Acquérir une renommée nationale

En revanche tous les autres auteurs ont publié à Paris. Sur cette petite dizaine restante, seuls trois médecins ont une production riche de plusieurs ouvrages. Les médecins concernés ont plutôt publié à la fin du XVIIIe siècle voire au début du XIXe siècle. Nous avons choisi de les

présenter chronologiquement. Le docteur Pierre Isaac Deidier, maire de Nîmes, publie deux articles dans le Journal de médecine.

En 1778, le docteur Etienne Lascazes de Compayré, de L’Isle d’Albi, publie à Paris l’ouvrage sur l’hygiène et l’éducation des enfants intitulé Dangers du maillot et du lait de femme ;

moyen d’y remédier, avis aux mères568. Dans le catalogue des sciences médicales, il est

signalé comme directeur du Ludovicée de Montpellier569. A l’image de nombreux médecins

des Lumières, ce médecin prône l’allaitement maternel et le bien-être du nouveau-né570. Il

prévient les dangers liés à l’emmaillotage qui représentent un obstacle au bon développement

567 Ibidem, p. 5.

568 Publié à Paris chez Laporte. Ce petit ouvrage du médecin lislois est cité et critiqué dans la revue Sage-femme

du 10 juillet 1929 dans un article intitulé « Paradoxe sir l’allaitement maternel ».

569 Le ludovicée est la nouvelle appellation donnée à la faculté de médecine de Montpellier par le roi Louis XV. 570 L’allaitement maternel est au cœur des préoccupations liées aux soins infantiles. De nombreux médecins

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de l’enfant. Il réfute les théories de Van Helmont sur la fermentation du lait et condamne le recours aux nourrices mercenaires, vectrices de maladies. Il est convaincu que les nourrices peuvent transmettre des vices moraux.

Cas assez exceptionnel, Paul Bosc d’Antic, médecin de la maison du roi que nous avons déjà présenté dans les chapitres précédents, a publié en 1780 à Paris Œuvres de Monsieur Bosc

d’Antic contenant plusieurs mémoires sur l’art de la Verrerie, sur la Faïencerie, la poterie, l’art des Forges, la minéralogie, l’électricité, & sur la médecine571. Peut-être dans la lignée

de mise en valeur des activités techniques dans l'Encyclopédie, ce médecin avait d’autres activités et affectionnait les « arts utiles ».

Jacques Samuel Olombel a publié l’un de ses mémoires sur les maladies vermineuses à Paris en 1816.

Etienne Lanthois publie en 1818 les cours du professeur Grimaud. Cet ouvrage intitulé Cours

complet de physiologie, ouvrage posthume de J-C-M-G de Grimaud, conseiller-médecin ordinaire du Roi, professeur en médecine à l’université de Montpellier, tome Ier572. En 1824

paraît une nouvelle édition toujours intitulée Cours complet de physiologie ; distribué en

leçons… , il est précisé que l’ouvrage est « publié par son disciple et ami le docteur

Lanthois ». Cette édition est « revue, corrigée, et enrichie de notes573 ».

Nous avons fait le choix de conserver les trois auteurs les plus prolixes pour les traiter dans un dernier temps. Leur carrière sera abordée dans les chapitres suivants, pour cela nous ne ferons que citer leurs œuvres majeures. Ces trois médecins ont la particularité d’avoir publié plusieurs écrits à la fois des livres et des articles. Le docteur Sacombe publia onze ouvrages parmi lesquels figurent des mémoires, des poèmes et des périodiques. La majorité de ses ouvrages furent publiés à Paris, à l’exception d’une réédition. Ses mémoires sont relatifs à l’obstétrique à destination des praticiens, jeunes médecins et sages-femmes. Certains de ses écrits sont des réclamations et ont un caractère pamphlétaire à l’encontre des « caesariens ». Deux périodiques sont à son initiative, Les douze mois de l’école anti-césarienne ainsi que La

571 Imprimé à Paris chez Hotel Serpente avec la mention « avec approbation & privilège du Roi ».

572 Imprimé à Paris chez Maquignon-Marvis. Un avertissement figurant dans l’ouvrage précise que le manuscrit

du professeur Grimaud a été remis à Monsieur Vauquelin par le biais de « Monsieur le docteur Lanthois, son disciple ». Monsieur Vauquelin a ainsi pris en charge les frais de l’édition.

573 LANTHOIS (Étienne), Cours complet de physiologie, distribué en leçons, ouvrage posthume de J. C. M. de

Grimaud, Paris, Ecron imprimeur-libraire, 1824, 2eédition. Le docteur Lanthois est mentionné comme membre

de l’ancienne Académie de médecine de Paris et du comité d’Emulation de la même ville ; auteur de la nouvelle théorie de la Phtisie pulmonaire, et de la réfutation de la médecine anglaise du docteur Clare sur les maladies syphilitiques par les injections.