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Analyse du Rôle Joué Par les DRMs Comme Outils de Versionnage de la Musique en Ligne de 2001 Jusqu’au Début de l’Année 2009.

De 2001 jusqu’au début de l’année 2009, les DRMs ont eu un rôle structurant dans l’évolution des versions de la musique proposées sur Internet qui se sont centrées sur les libéralités d’usage et les périmètres d’accès aux catalogues. Ils ont permis l’introduction de versions innovantes de la musique associant des libéralités d’usage restreintes à des accès de plus en plus larges aux catalogues musicaux.

Cependant, ils sont loin d’avoir joué le rôle d’outil providentiel du versionnage de la musique sur Internet que leurs potentialités pouvaient laisser présager. Peu efficaces dans leur fonction de protection de la musique numérique contre la copie, ils vont de surcroît contraindre le versionnage. De plus, ils vont finalement jouer un rôle limité comme outils versionnage de la musique sur les libéralités d’usage.

4.1. Les Contraintes Exercées par les DRMs sur le Versionnage de la Musique en Ligne sur les Libéralités d’Usage.

Comme nous l’avons vu dans le sous-chapitre 3c, de 2001 à 2009, les DRMs n’ont pas permis de contenir les réseaux d’échanges non autorisés de musique sur Internet. Ils n’ont donc pas favorisé la mise en œuvre du versionnage de la musique. De surcroît, leur utilisation en tant qu’outils de protection de la version premium sur Internet a contraint le versionnage de la musique. D’autre part, les incompatibilités entre technologies DRMs ont entraîné des restrictions involontaires du niveau de libéralités d’usage de tous les fichiers équipés de DRMs.

4.1.1. Les Contraintes Dues à l’Utilisation des DRMs Comme Outils de Protection des Téléchargements Définitifs à l’Unité.

Les modèles de versionnage que nous avons présentés dans la deuxième section de ce chapitre prévoient toujours que la version de haute qualité sera fournie à sa qualité efficace, qui est maximale lorsque le coût de fourniture de la qualité est nulle. La restriction des libéralités d’usage des téléchargements définitifs à l’unité, la version de haute qualité sur Internet, dans un objectif de protection contre la copie a donc pu impliquer un choix sous optimal de qualité de la version la plus haute. De plus, suite à ce rationnement, le respect de la contrainte d’auto-sélection a pu entraîner la fourniture de qualités exagérément basses pour les versions inférieures. L’abandon, en janvier 2009, des DRMs comme outil de protection des téléchargements définitifs à l’unité permet de relâcher cette contrainte. Il pourrait, par exemple, expliquer l’apparition, en France, en 2008, d’offres de téléchargements définitifs illimités sécurisés par des DRMs n’interdisant que la gravure. Ces dernières proposent en effet des libéralités d’usage supérieures à celles des téléchargements locatifs illimités préexistants.

Si les DVD, la version traditionnelle du film qui offre les plus grandes libéralités d’usage, ont toujours été protégés contre la copie, les tests sélectifs de protection de CD n’ont jamais été généralisés. La version physique premium de la musique enregistrée ne restreint par conséquent aucunement les libéralités d’usage. L’utilisation des DRMs comme outils de protection contre la copie implique donc pour la musique enregistrée, un décalage en termes de libéralités d’usage, entre la version Internet la plus haute et le CD. À la différence du

cinéma, les téléchargements définitifs ne sont pas l’exacte réplique de la vente physique de support numérique. Ce décalage complique la tâche des maisons de disques pour la mise en œuvre de leur schéma global de versionnage.

4.1.2. Les Contraintes Dues Aux Incompatibilités Entre Technologies DRMs.

Nous avons montré dans le sous-chapitre 3c comment les incompatibilités entre les technologies DRMs utilisées sur les fichiers musicaux affectaient l’utilité des consommateurs en restreignant les libéralités d’usage. Ces incompatibilités ont abaissé le niveau de libéralités d’usage souhaité de tous les fichiers équipés de DRMs : des téléchargements définitifs à l’unité jusqu’au début de l’année 2009 et des abonnements illimités restreints par les DRMs. Les iPods n’ont par exemple jamais été compatibles avec ces dernières. Certaines offres de téléchargements locatifs ont même été associées à un unique baladeur numérique. Et aujourd’hui, de la même façon, les offres de téléchargement définitifs illimités sécurisées par DRMs ne peuvent être transférées sur tous les baladeurs du marché.

Les contraintes imposées par les DRMs sur le versionnage de la musique par les libéralités d’usage sont représentées sur le graphique 24. Les libéralités d’usage maximales offertes par la musique sur Internet sont contraintes à la fois par la fonction de protection contre la copie des DRMs et leurs incompatibilités. Le niveau de libéralité souhaité pour protéger les téléchargements définitifs contre le piratage est désigné par q^, celui obtenu suite aux incompatibilités par q^’, et celui offert par le CD par qCD.

Graphique 24 : Les contraintes de qualité imposées par les DRMs sur le versionnage de la musique en ligne sur les libéralités d’usage.

Depuis la généralisation de l’abandon des DRMs sur les téléchargements définitifs vendus à l’unité en janvier 2009, le versionnage de la musique sur les libéralités d’usage est moins contraint. La version premium, débarrassés des restrictions d’usage liées à la protection et de celles liées aux incompatibilités, atteint un niveau de libéralités d’usage maximum. Le niveau de libéralité d’usage est à présent le même sur les téléchargements définitifs à l’unité et sur les CD. Cependant, le niveau de libéralités d’usage de la version intermédiaire, les abonnements illimités, est toujours restreint par les incompatibilités entre technologies DRMs.

Selon l’analyse que nous avons menée dans le chapitre 3, le retour des DRMs comme outil de protection des téléchargements définitifs à l’unité supposerait que soient réglés les problèmes de sécurisation du CD et d’incompatibilités entre les différentes technologies DRMs. C’est à

ces conditions qu’ils pourraient redevenir profitables pour les maisons de disques. Les DRMs rationneraient alors de nouveau les libéralités de la version Internet premium mais celles-ci seraient alignées sur celles du CD. De plus, les libéralités d’usage des versions inférieures équipées de DRMs ne seraient plus contraintes par les DRMs.

4.2. Le Rôle Limité des DRMs Comme Outils de Versionnage de la Musique en Ligne de 2001 à 2009.

Comme nous l’avons vu plus haut, les DRMs sont un outil très performant de versionnage des biens culturels numériques sur les libéralités d’usage permettant de contrôler le nombre de copies autorisées d’un fichier, son temps de possession ou encore le nombre de transferts permis vers des appareils, eux-mêmes identifiés.Cependant, les DRMs n’ont pas été utilisés, comme on aurait pu l’imaginer, pour créer de nombreuses versions de la musique en ligne fondées sur de multiples bundles de micro-usages. Si les grandes versions de la musique en ligne qui ont progressivement émergé de 2001 à 2009 sont classées par libéralités d’usage croissantes, leur nombre ne s’élève qu’à trois. De plus, les DRMs ne sont nécessaires en tant qu’outils de versionnage, qu’à la version intermédiaire : les téléchargements illimités, locatifs ou définitifs, restreints par DRMs. Dans sa déclinaison locative, cette version n’a jamais représenté qu’une part minime du marché de la musique en ligne. Elle rencontre plus de succès dans sa déclinaison en téléchargements définitifs restreints, mais le statut des DRMs, entre outils de protection et outils de versionnage y est ambigu.

Les DRMs ne jouent aucun rôle dans le fonctionnement du streaming illimité à la demande, qui a émergé comme troisième grande version de la musique en termes de libéralités d’usage. Les DRMs ne sont pas utilisés pour moduler les libéralités de cette version basse. De plus, si les maisons de disques ont imposé des protections techniques non systémiques contre la captation des flux, elles n’ont pas exigé des plateformes de streaming à la demande la mise en œuvre de DRMs. Les offres de streaming illimité à la demande financées par la publicité connaissent aujourd’hui un réel succès.

Les DRMs sont en revanche nécessaire à la version intermédiaire de la musique enregistrée sur Internet qui a émergé sous la forme d’abonnements illimités restreints par DRMs. Leur forme historique, et la seule existant à ce jour aux Etats-Unis, est le téléchargement locatif. Lancées en France seulement à partir de 2006, mais dès 2002 aux Etats-Unis, elles n’ont jamais rencontré le succès. Selon les chiffres de l’IFPI, la faible part représentée par ces abonnements dans les revenus de gros de la musique numérique (en ligne et mobile) a même diminué en 2004 et 2007, passant de 12 à 7%. La pertinence de cette version de la musique en ligne est par conséquent questionnable.

En France, ont été lancés, à partir de 2006, des abonnements de téléchargements définitifs illimités bundlés verticalement avec des abonnements ou des appareils sur lesquels les DRMs interdisent la gravure. Elles sont légèrement plus chères que les abonnements illimités locatifs72 et bénéficient de catalogues moins étendus. Elles sont de plus conditionnées à la

souscription à un abonnement ou à l’achat d’un appareil. Cependant, elles semblent plus populaires que les abonnements locatifs. En France, le SNEP inclut pour la première fois en 2008 les abonnements dans les revenus de gros numériques des maisons de disques. Ils

72 En France, l’abonnement de téléchargements locatifs illimités de MusicMe coûte 9,90€ par mois

tandis que les offres de téléchargements définitifs illimités bundlées verticalement de l’opérateur mobile SFR et de l’opérateur mobile et FAI Orange ont été proposées à 12€ par mois.

représentent, couplés avec le streaming une part d’environ 20% qui avec les chiffres américains où les abonnements illimités ne sont que locatifs.

Les maisons de disques exigent la présence de DRMs sur ces offres mais le statut de ces derniers est ambigu. Les DRMs constituent-ils un outil de versionnage à proprement dit, c’est-à-dire utilisé pour différencier la qualité des téléchargements définitifs à l’unité et des abonnements définitifs illimités ou seulement un outil de protection de ces derniers ? Dans le sous-chapitre 3c, nous avons montré que, principalement du fait de la non sécurisation du CD, les DRMs utilisés sur les téléchargements à l’unité avaient une efficacité très marginale contre le partage non autorisé, non seulement sur les réseaux d’échange Internet mais également sur les réseaux privés locaux. Si le retrait des protections que les DRMs offrent contre la copie sur les abonnements illimités n’aurait certainement qu’un effet marginal sur la disponibilité des fichiers sur les réseaux d’échange Internet, ils pourraient cependant favoriser les échanges non autorisés locaux. En effet, un abonné illimité pourrait suffire à alimenter en fichiers musicaux la totalité de son réseau local, selon les goûts de chacun de ses membres. Les risques de la mise à disposition de larges catalogues non protégés peuvent ainsi paraître plus grands pour les maisons de disques que ceux de la mise à disposition de titres isolés. Si les DRMs ne sont utilisés sur les abonnements définitifs illimités que pour leur fonction de protection contre les copies non autorisées, ils permettent cependant l’existence de cette version innovante.

Finalement, de 2001 à 2009, le rôle des DRMs en tant qu’outils de versionnage de la musique en ligne sur les libéralités d’usage a été limité. S’ils sont, sans conteste, indispensables à la commercialisation d’abonnements de téléchargements locatifs, cette version représente une part de marché négligeable de la musique numérique. Le statut de leur utilisation sur les abonnements de téléchargements définitifs à l’unité est ambigu. Ils semblent y être utilisés dans un objectif de protection contre la copie plutôt que de versionnage sur les libéralités d’usage. De plus, ils ne sont pas nécessaires à la version la plus basse en termes de libéralités d’usage, le streaming illimité à la demande financé par la publicité. Enfin, leur utilisation sur les abonnements de téléchargements définitifs illimités pourrait être . Parallèlement les DRMs ont contraint le versionnage de la musique sur Internet. D’une part, les incompatibilités entre technologies provoquent des restrictions involontaires de libéralités d’usage sur tous les fichiers équipés de DRMs. D’autre part, leur utilisation comme outils de protection des téléchargements définitifs, à l’unité et en abonnements illimités, rationne les libéralités d’usage offertes sur les versions premium de la musique sur Internet. Le schéma 22 résume le rôle des DRMs dans le versionnage de la musique sur Internet de 2001 jusqu’au début de l’année 2009.

Schéma 22 : Le rôle des DRMs dans le versionnage de la musique en ligne de 2001 à janvier 2009.

Il est hautement probable que la situation du versionnage de la musique au début de l’année 2009 ne soit que transitoire. La section suivante examine les perspectives du versionnage de la musique sur Internet et du rôle que pourraient y jouer les DRMs.

5. Les Perspectives d’Utilisation des DRMs dans le Versionnage A Venir de la Musique

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