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Énoncé du problème

Le problème 4 proposé aux élèves lors de cette séquence est le suivant (Figure 1).

Figure 1 : Énoncé du problème des portes de prison

4. Ce problème est proposé depuis longtemps dans les classes. Il est désormais fréquemment formulé dans un autre contexte (des réverbères disposés le long d’une route) moins incohérent avec les connais-sances et les compétences, notamment citoyennes, que l’on cherche à développer chez les élèves.

Les consignes données aux élèves sont les suivantes :

Séance 1 : tu travailles avec tes deux camarades sur la résolution du problème « Amnistie ». Rappelle-toi de lire attentivement toutes les consignes, de chercher et tester des pistes de résolution, d’organiser clai-rement tes essais et calculs et puis de contrôler tes réponses.

Séance 2 : vous travaillez à l’écriture du texte qui présente vos recherches, vos essais, vos réponses.

Notons que les élèves de cette classe ont déjà rédigé de nombreuses nar-rations de recherche et qu’ils savent donc qu’ils sont tenus d’y narrer l’inté-gralité de leur recherche, y compris leurs erreurs et fausses pistes.

Analyse à priori des stratégies possibles pour résoudre le problème Deux stratégies peuvent principalement être mises en œuvre pour résoudre ce problème. Dans les deux cas, il s’avère utile de commencer par simuler les manipulations du directeur de prison sur les premières étapes afin de s’appro-prier le fonctionnement de l’algorithme.

La stratégie la plus accessible consiste à raisonner sur les étapes pré-sentées dans l’énoncé. On traite alors successivement les différentes étapes (première étape : on tourne tous les boutons, deuxième étape : on tourne les boutons d’une porte sur deux à partir de la deuxième, etc.) en appliquant l’algorithme aux différentes cellules avant de faire le bilan de celles qui sont finalement ouvertes. Cette première stratégie nécessite de s’appuyer sur une représentation schématique des portes. Chaque porte de prison peut être représentée par le numéro qui correspond à sa place dans la liste (ordre sug-géré dans l’énoncé : « la deuxième », « la troisième », etc.). Il est alors possible de noter, à chaque étape, l’état (ouvert/fermé) de chacune des portes, même pour celles qui ne changent pas d’état (représentation 1, figure 2), ou bien de noter seulement le changement d’état des portes concernées (représen-tation 2, figure 2). Le système de représen(représen-tation choisi peut aussi ne laisser apparaitre que l’état des portes à la dernière étape (représentation 4, figure 2) ou garder trace des différentes modifications mais sans correspondance avec les étapes impliquées (représentation 3, figure 2). Les représentations les plus efficaces sont celles qui permettent de garder une trace des différentes étapes du processus (représentations 1 et 2, figure 2) car elles permettent de savoir ce qui s’est passé à chaque étape et de voir émerger plus facilement le rôle central joué par les multiples et diviseurs.

La deuxième stratégie ne nécessite pas de représentation schématique particulière. Elle consiste à raisonner sur les cellules, c’est-à-dire se poser la question suivante : quand est-ce que l’on change la position du bouton de la cellule ? Il s’agit alors de prendre en compte les diviseurs du nombre associé (par exemple : je change la position du bouton de la cellule 14 quand je suis à l’étape 1, 2, 7 et 14). Il est alors possible de déterminer la liste des portes ouvertes.

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Figure 2 : Différentes représentations du « problème des portes de prison »

Quelle que soit la stratégie employée, la valeur importante du nombre de cellules (250) permet de raisonner sur un sous-ensemble de cellules pour chercher une régularité sur les cellules qui sont finalement ouvertes, et ce en vue d’une généralisation. Il est alors possible de remarquer l’existence d’une suite logique et déterminer de proche en proche les termes de la suite. Il est aussi possible de remarquer que le numéro des cellules qui sont ouvertes cor-respond aux nombres qui sont des carrés parfaits. On peut alors généraliser cette conjecture sans preuve ou bien chercher à la prouver. La preuve permet alors de comprendre pourquoi les carrés parfaits sont les solutions. Dans ce cas, en plus de l’idée que les étapes qui vont modifier l’état de la porte corres-pondent aux diviseurs du nombre, il faut remarquer que la cellule est ouverte si on a changé un nombre impair de fois la position du bouton, et fermée si on a changé un nombre pair de fois la position du bouton. La preuve repose alors sur la parité du nombre de diviseurs d’un nombre : un nombre a un nombre impair de diviseurs si et seulement si c’est un nombre qui a une racine carrée entière, autrement dit si c’est un carré parfait.

Nous voyons donc que la complexité de ce problème repose sur la manière de le représenter et dépend du point de vue adopté pour raisonner (étapes vs cellules). Les notions mathématiques impliquées dans le problème (multiples, diviseurs et carrés parfaits) sont familières des élèves à qui ce problème est proposé. Ils ont travaillé précédemment sur plusieurs problèmes mettant en jeu ces différentes notions. Nous analysons ci-dessous les modes de raison-nement, de preuve et les registres de représentations sémiotiques à priori mobilisés dans la résolution de ce problème.

Analyse des modes de raisonnement, de preuve et des registres de représentations sémiotiques à priori mobilisés dans la résolution du problème

Comme nous l’avons souligné précédemment, il est judicieux, pour résoudre ce problème, de représenter schématiquement la situation afin notamment de mieux se l’approprier. Les élèves doivent élaborer eux-mêmes un système de représentation symbolique leur permettant de connaitre le numéro associé à la place de la porte dans la liste et leur état (ouvert/fermé). Cette représentation met en jeu le registre numérico-symbolique puisque l’on attribue un numéro à chacune des portes, et que ce numéro sert bien souvent de représentant aux portes elles-mêmes. Les systèmes de représentation qui gardent la trace des différentes étapes du processus permettent de voir émerger plus facilement les notions mathématiques en jeu (multiples, diviseurs, suite logique).

La résolution de ce problème met en jeu différentes articulations de registres de représentation sémiotique. Il s’agit tout d’abord de passer d’un registre langagier à un registre schématique et numérico-symbolique. Ce registre sert de support au raisonnement qui s’opère dans le cadre numé-rique 5, et qui peut aboutir à la formulation d’une conjecture exprimée ver-balement. Pour prouver cette conjecture, il est alors nécessaire d’exhiber les raisons qui la justifient, et qui sont basées sur les propriétés mathématiques des nombres entiers.

Ce problème met à priori en jeu un raisonnement basé sur une démarche expérimentale (essais sur un certain nombre de portes, observation d’une récurrence et généralisation) et un mode de preuve basé sur un raisonne-ment hypothético-déductif (propriétés mathématiques des nombres carrés).

Comme dans tout problème mettant en jeu une démarche expérimentale, il est possible d’établir une conjecture erronée et de l’invalider par exhibition d’un contre-exemple.

Nous présentons ci-dessous l’analyse des interactions verbales entre trois élèves, Adrien, Enzo et Nassim, travaillant ensemble à la résolution du problème des portes de prison. Rappelons que nous nous appuyons pour cela sur les transcriptions de l’ensemble de leurs échanges verbaux lors des deux séances de cours.

Analyse des interactions verbales entre trois élèves