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Analyse linguistique de la structure du terme

La modélisation comme moyen d’étude de la terminologie

I.1 Structure linéaire sans prépositions II.2 Structure linéaire avec prépositions

1.2.2.4. Analyse linguistique de la structure du terme

La modélisation a permis de distinguer les modèles les plus productifs qui sont communs aux terminologies de domaines différents. En outre elle a mis en évidence les traits spécifiques de la construction des termes juridiques.

L’analyse des modèles qui peut être effectuée d’après la nature des composants montre la présence des abréviations et des noms et adjectifs composés dans la formation terminologique. La modélisation qui permet d’effectuer la répartition des termes d’après le mot principal montre que les termes nominaux sont les plus nombreux en terminologie du droit. Les termes verbaux y sont aussi bien représentés. Cela permet, entre autres, d’étudier l’emploi d’autres formes flexionnelles du discours dans les termes composés comme, par exemple, les adjectifs, les participes, les gérondifs ou bien des adverbes et les pronoms qui jouent un rôle « terminologisant ».

1.2.2.4.1. L’adjectif de relation dans le terme complexe

Parmi les termes complexes, les modèles à deux composants sont les plus productifs en russe comme en français. A leur tour, parmi ces modèles, les modèles avec un adjectif prédominent dans les deux langues : A S (20%) en russe et S A (20,3%) en français.

L’importance des adjectifs est donc considérable dans la formation de dénomination du droit.

L’analyse linguistique des adjectifs faisant partie des termes complexes montre la fréquence en russe comme en français des adjectifs de relation.

Si l’adjectif qualificatif est destiné à décrire les caractéristiques propres de l’objet, l’adjectif de relation fait référence à des propriétés extérieures de l’objet autre que celui que l’on qualifie. Ils qualifient l’objet par sa relation avec un autre objet, action, lieu ou le temps.

Ainsi ils sont toujours dérivés, contrairement aux adjectifs qualificatifs qui sont souvent primaires. Du point de vue grammatical, les adjectifs de relation ne peuvent avoir ni degré de comparaison ou être employés avec les adverbes de degré ( , Эrès), ni d’avoir de forme courte (ce dernier est un trait caractéristique de la langue russe) (Kor Chahine, Roudet 2009 :

53). Par exemple :   ,   ,  КЛЬШХЮЭТШЧ  Хégale,

jurisprudence administrative. Les adjectifs relationnels de droit sont en priorité crées par dérivation à partir d’un terme nominal.

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L’adjectif relationnel est qualifié comme un élément-clé de toute langue de spécialité.

En français son utilisation à la place d’un complément de nom participe du principe d’économie de la langue et « confère à l’expression utilisée une consonance plus technique par son aspect figé, tout en évitant le choix entre article défini ou indéfini pour introduire le complément de nom » (Maniez 2010 : 263-264).

La cause principale de leur large emploi en français comme en russe est la suivante : la possibilité de l’adjectif de relation de faire référence aux autres termes du système est significative pour créer une dénomination terminologique dans la logique notionnelle. Nous allons développer ce point dans les paragraphes consacrés au conditionnement notionnel de la création du terme. Les adjectifs relationnels formés à partir des termes nominaux du domaine spécialisé situent les termes complexes dans le système conceptuel à la différence des adjectifs qualificatifs. Les caractères désignés par les adjectifs de relation sont permanents, ils n’ont pas de gradation quantitative et peuvent donc servir de base pour la classification des objets de même genre et leur subdivision en sous-classes. En outre les adjectifs relationnels confèrent un caractère juridique à un terme complexe dont le noyau nominatif est représenté par un nom de la langue générale :   , approche juridique.

Les termes avec deux substantifs sans préposition en russe S SG (14%) et avec préposition S S (17,7%) en français occupent la deuxième position. Les deux derniers modèles décrivent la relation de dépendance syntaxique entre les composants d’un terme complexe aussi bien que les modèles adjectivaux.

1.2.2.4.2. Particularités structurelles des termes juridiques

La terminologie du droit comprend des termes complexes dont la structure est valable pour toute terminologie et pour la langue donnée, mais également les structures caractéristiques à la terminologie juridique. Arrêtons-nous sur trois particularités de la terminologie du droit mises en valeur par la modélisation structurelle.

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1.2.2.4.2.1. Les verbes en terminologie juridique

Les juristes disent que le droit est actif, c’est pourquoi les verbes jouent un rôle particulier dans la terminologie juridique. Dans notre analyse 3% de modèles étudiés productifs contiennent un verbe (Tableau 1.7) :

Français S V S 0,33 % S (V-et-V) 0,33 %

S V 2,3 %

Russe S V SA 1,7 %

S V SA SG 1,3 %

Tableau 1.7 – Les termes avec des composants verbaux

Les termes verbaux simples ou complexes (ayant le verbe comme le noyau du syntagme terminologique) sont assez nombreux en terminologie juridique par rapport aux autres domaines. Les termes verbaux juridiques sont présents dans les terminologies de deux langues : audiencer, légiférer, plaider, abroger, apostiller, incarcérer, disculper, incriminer,

contre-interroger, témoigner, perquisitionner ;  ,

,

; défendre en justice V S, témoigner contre soi-même V Pr ;

  V SA ; Adv V.

Les verbes peuvent ne pas être la tête du syntagme, mais entrer dans la structure du terme comme des composants dépendants. Dans la composition du terme complexe comprenant un verbe ce dernier n’est pas nécessairement un terme juridique :

jugement avant dire droit

La structure S V est fréquente dans la terminologie française : capacité de témoigner, pouvoir de signer, faculté d’appeler, obligation de donner, obligation de faire, obligation de ne pas faire, obligation de livrer, droit de repentir, obligation de parler, injonction de payer, injonction de faire, ainsi que les structures basées sur ce modèle :

S (V-et-V) : liberté d’aller et de venir, droit d’entrer et de sortir ;

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: capacité active d’ester en justice, capacité passive d’ester en justice.

En russe les verbes sont également représentés dans différentes structures :  

S V SA

   

S V SL SG

  S V SA

     

En règle générale, l’emploi des termes verbaux est plus fréquent en français qu’en russe.

Le russe emploie beaucoup de substantifs verbaux pour marquer l’action juridique (emploi discursif préférant les noms aux verbes par rapport au français), des termes complexes avec un substantif au lieu du verbe (faculté d’appeler –     ; droit de repentir -

        ) ou des collocations verbales là ou le

français a un seul verbe au sens terminologique (indemniser -   ;

incarcérer -           ; dépénaliser -  

    ).

La terminologie juridique qui précise l’action juridique comprend des termes verbaux simples et composés. Les verbes dans la structure d’un syntagme terminologique peuvent ne pas être des termes simples, ou autrement dit, n’ont pas de sens juridique. Il s’agit donc de l’usage particulier du verbe en terminologie du droit : du côté syntaxique le verbe est employé comme tête du syntagme ou comme composant dépendant34, du côté sémantique le verbe est un terme de base ou un verbe courant sans sens juridique.

1.2.2.4.2.2. Structure avec coordination

La structure avec des liens de coordination, fréquente en terminologie juridique en français et en russe, peut être considérée comme spécifique du domaine du droit. Les

34 le verbe est généralement tête de syntagme dans la langue générale

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compléments coordonnés peuvent avoir des structures simples ou complexes. Présentons-en encore quelques exemples :

contrat pur et simple S (A-et-A)

traitements inhumains ou dégradants S (A-ou-A)

grâce pure et simple S (A-et-A)

droit d’entrer et de sortir S (V-et-V)

liberté d’aller et venir S (V-et-V)

caisse des dépôts et consignations S (S-et-S) inspecteur du travail et de la main-d’œuvre S (S-et-S) infraction contre la vie et l’intégrité corporelle S (S-et-S A)

      (A- -A) S

        S (SG- -SG)

         

 

S (S SG - -S SG)

     

 

S (SG-SG- -SG SG)

      S (SG- -SG)

      (A- -A) S

       

 

(A- -P SA) S

      A (S- -S)

      S V (SI- -SI)

Les structures des termes avec coordination que nous avons rencontrées dans le corpus sont linéaires avec ou sans préposition. Elles incluent des substantifs, des adjectifs ou des verbes coordonnés, parfois adjectif et participe pour la coordination des caractéristiques qualitatives. Les unités coordonnées peuvent être la tête du syntagme ou non, avoir des

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lexèmes dépendants à l’intérieur des deux éléments coordonnés (entre parenthèses dans les structures). Les constructions avec des verbes coordonnés sont propres au français.

Comme cas particuliers on peut citer survivant des père et mère, prémourant des père et mère qui semblent être créés d’après le même modèle S (S-et-S) mais où le sens se diffère des exemples cités précédemment.

1.2.2.4.2.3. L’adjectif antéposé en français

Il existe en terminologie juridique française des termes construits d’après les modèles rares en français spécialisé, où le déterminant précède le déterminé (il ne s’agit pas des adjectifs qui se placent avant le nom comme dans le terme Tribunal de Grande Instance ni des articles). On considère que la grammaire de la langue française, au sens large, a suffisamment évolué pour rendre anormaux ces schémas morpho-syntaxique, ces structures sont tout de même évaluées comme le phénomène « le plus typique des anormaux » en langue juridique (Sourioux & Lerat 1975 : 28). Le modèle structurel A S représente les exemples suivants : tacite reconduction, tierce opposition, tiers détenteur, folle enchère, subrogé tuteur, amiable compositeur, itératif défaut. Ce modèle représente l’ordre « anormal » pour la terminologie où l’adjectif est antéposé. Il peut être enrichi suivant le terme : preuve par commune renommée S A S.

Les caractéristiques particulières de la structure des termes juridiques dans le système terminologique bien formé sont à prendre en considération lors de création de nouveaux termes. Il est recommandé d’utiliser les modes et les moyens de dérivation les plus typiques au système donné (Xižnjak 1990).

1.2.2.5. Applications didactiques pour la formation de