• Aucun résultat trouvé

Chapitre 4 : La synthèse et l’optimisation du poly(1-(4-dodécylthiophèn-2-yl)-5-(2-

4.4 Optimisation des conditions de polymérisation

4.5.1 Analyse des spectres d’absorption dans l’UV-visible

Tel que mentionné précédemment, le spectre UV-visible en film est caractéristique de l’organisation du polymère à l’état solide et donc de sa masse molaire et de sa régiorégularité. Les valeurs de longueur d’onde maximale d’absorption ainsi que de bande

71

interdite sont de bons indicateurs de la RR, toutefois, l’allure du spectre est également très importante. C’est pourquoi la prochaine section décrit l’allure du spectre d’absorption UV- visible des polymères en film, afin d’en analyser davantage l’organisation à l’état solide. Tel que mentionné pour l’analyse des spectres UV-visible des POMT à la section 3.4.1, ceux-ci sont dépendants également de leur mise en œuvre. La masse molaire, la solubilité, la viscosité de la solution de départ ainsi que le taux d’évaporation sont tous des facteurs déterminants sur la qualité du film polymère et, donc, de son organisation à l’état solide. Cette section seule ne peut donc pas déterminer la régiorégularité des polymères, mais peut donner certaines informations supplémentaires.

Tel que mentionné dans la section 3.4.1, la principale bande d’absorption UV-visible des polymères conjugués correspond à une transition π-π*, c’est-à-dire l’excitation d’un électron passant d’une orbitale π à une orbitale π*.

Sur la Figure 68, il est possible d’observer que les longueurs d’onde maximales d’absorption des polymères 6 et 15 présentent un déplacement hypsochrome qui peut être induit par une faible masse molaire ou régiorégularité. Toutefois, leur masse molaire est similaire à celle de P3-14 et P3-21 qui possèdent pourtant une longueur d’onde maximale d’absorption plus élevée. Ceci indique donc que le λmaxfilm, dans ce cas-ci, est possiblement davantage influencé par la régiorégularité. Cette dernière diminue l’empilement π-π

0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0,8

0,9

1

300 350 400 450 500 550 600 650 700 750 800

A

b

so

rb

an

ce

n

or

m

al

isée

(u.

a.

)

Longueur d'onde (nm)

P3-6 P3-14 P3-15 P3-21 P3-23 P3-24

72

interchaîne des polymères et l’organisation à l’état solide du polymère, ce qui, par le fait même, diminue le λmaxfilm. Les polymères 14, 21, 23 et 24 possèdent des longueurs d’onde maximales d’absorption de 642, 644, 646 et 648 nm respectivement. Plus le polymère possède une masse molaire et une régiorégularité élevées, plus la longueur de conjugaison est élevée, ce qui mène à un déplacement bathochrome du λmaxfilm. La plus faible valeur de λmaxfilm de P3-14, malgré une masse molaire légèrement supérieure à P3-

21, peut être due à une légère différence de régiorégularité. Dans le cas des polymères 21 et 23, les maximums d’absorption très similaires malgré des masses molaires

différentes peuvent être expliqués par une structure plus régulière de P3-21. Du côté de l’allure du spectre, une différence entre l’épaulement de la courbe (vers 590 nm) et le maximum d’absorption (vers 640 nm) élevée peut indiquer une structure organisée. Cette différence est plus prononcée pour P3-23, ce qui semble indiquer une régiorégularité élevée. Il est donc difficile à ce point de déterminer si P3-21 est plus ou moins régiorégulier que P3-23. Pour ce qui est du polymère 24, sa longueur d’onde maximale élevée semble être due à sa masse molaire légèrement supérieure à P3-23.

Tel que représenté dans la Figure 69a, le spectre du polymère P3-14 en solution dans le chloroforme se superpose en partie avec le spectre du polymère à l’état solide. Ceci indique que le polymère se retrouve sous forme d’agrégats dans le chloroforme. Afin de vérifier cette affirmation, des spectres UV-visible de ce polymère dans l’o-dichlorobenzène ont été enregistrés selon différentes températures. Comme représenté à la Figure 69b, les courbes correspondant au polymère en solution à 50 et 60°C sont similaires à celle sous forme de film, ceci indique donc que le polymère est sous forme d’agrégats à ces températures. Lorsque la solution est chauffée jusqu’à 70°C, un maximum apparait à 495 Figure 69: Spectres UV-visible a) de P3-14 en film et en solution dans le CHCl3 et b) dans l'oDCB en fonction

73

nm. À 90°C, le maximum à 648 nm disparait complètement et seul le maximum à 482 nm est présent. Il est possible de dire que le polymère est alors complètement solubilisé. En effet, ceci indique que la structure la plus stable du P(TPD-T) est tordue dû à l’encombrement stérique, c’est-à-dire qu’un angle dièdre non nul est présent entre chaque unité de répétition. Cette torsion brise la conjugaison, ce qui explique le déplacement hypsochrome du spectre lors de l’augmentation de la température. Afin de solubiliser complètement le polymère et briser les interactions interchaînes, il est nécessaire de fournir une énergie supérieure à ces interactions π-π en chauffant la solution, la chaîne polymère peut alors adopter sa conformation la plus stable. Ceci démontre la grande force entre les chaînes polymère dans un polymère avec une organisation bien définie à l’état solide.

4.5.2 Analyse des spectres RMN

1

H

Comme mentionné précédemment, des petites molécules modèles ont été synthétisées représentant les motifs de répétition pouvant être présents au sein de la structure du P(TPD-T). Les spectres RMN 1H de ces molécules modèles ont été effectués dans les mêmes conditions que ceux des polymères. Ainsi, le déplacement chimique des protons des petites molécules pourra être utilisé pour l’assignation des protons au sein de la chaîne polymère.

Tel qu’illustré sur la Figure 70, les signaux des petites molécules modèles sont distincts et permettent donc d’identifier les signaux dans les spectres RMN 1H des polymères. Tout d’abord, les signaux de bouts de chaîne sont toujours plus blindés que les signaux dans la chaîne polymère dû au déblindage par les cycles aromatiques adjacents. En comparant le proton en position 3 du thiophène en bouts de chaîne (vert) du motif régiorégulier et celui du motif d’homocouplage tête-tête (T-T), il est possible de voir que ce dernier est plus déblindé par la présence adjacente de deux unités TPD pauvres en électrons. Ceci indique que le proton correspondant à de l’homocouplage T-T possède un déplacement chimique plus élevé que le signal du même proton se retrouvant dans la chaîne polymère (rouge). Pour ce qui est de l’homocouplage queue-queue (Q-Q), il ne peut être identifié par les protons présents dans la région aromatique. Toutefois, le signal des protons sur la chaîne alkyle du thiophène (gris) est légèrement plus blindé que celui des protons correspondants dans le motif régiorégulier. En effet, le déplacement de ces protons est diminué par la présence consécutive de deux unités riches en électrons adjacentes. Ce signal est alors

74

distinct du signal principal ainsi que celui de bouts de chaîne (rose). Ainsi, tous les signaux du motif régiorégulier ainsi que ceux des motifs d’homocouplage peuvent être distingués, ce qui va permettre le calcul de la régiorégularité des P(TPD-T).

Figure 71: Spectre RMN 1H du P(TPD-T) (500 MHz, 90°C, TCE-d 2)

Figure 70: Spectres RMN 1H des petites molécules modèles permettant l'assignation des signaux

75

La Figure 71 est un exemple de spectre RMN 1H (500 MHz, 160 acquisitions, 10 secondes de relaxation) d’un polymère dans le tétrachloroéthane-d2 (TCE-d2) à 90°C. Le chauffage est nécessaire afin d’éviter la présence d’agrégats de polymère, comme démontré par la spectroscopie UV-Visible dans la section précédente.

Basé sur l’analyse des spectres RMN 1H des molécules modèles, les signaux dans les spectres RMN 1H de polymères pour le calcul de régiorégularité sont identifiés dans le Tableau 27 ainsi que dans la Figure 72.

Tableau 27: Déplacements chimiques en ppm des différents protons du P(TPD-T) permettant le calcul de la régiorégularité

Régiorégulier Homocouplage T-T Homocouplage Q-Q Bout de chaîne

Hc 8,03 8,06 --- 7,93

Hd 2,91 2,74 2,70 2,74

Figure 72: Assignation des défauts d'homocouplage et des bouts de chaîne sur les spectres RMN 1H des

polymères P3

76

Avec l’intégration de ces signaux, il est alors possible de calculer la régiorégularité des polymères tel que retrouvé dans le Tableau 28.

Tableau 28: Détermination de la régiorégularité des différents P3 à l'aide des spectres RMN 1H Entrée Mn (kg/mol) ÐM λmaxfilm (nm) EgFilm (eV) RR (%) 6 36 1,5 582 1,80 85 14 39 1,5 642 1,75 96 15 34 1,6 634 1,79 91 21 35 1,5 644 1,76 97 23 54 1,6 646 1,77 97 24 58 1,7 648 1,74 98

Tel qu’attendu, l’analyse des spectres UV-visible précédemment effectuée concorde avec la RR calculée des différents P3 (Tableau 28). En effet, le polymère possédant la longueur d’onde maximale d’absorption la plus élevée, P3-24, est effectivement le plus régiorégulier. Tel que représenté à la Figure 72, le signal à 8,06 ppm indique la présence d’homocouplage T-T et est donc proportionnel à la régiorégularité. Il est possible de voir que ce signal est de très faible intensité dans le polymère P3-24, soit le polymère possédant une régiorégularité de 98%.

De plus, les signaux à 7,14 et 7,93 ppm correspondent aux protons d’un thiophène en bouts de chaîne en position 3 et 5 respectivement (mauve et vert). La présence du signal à 7,14 ppm avec une intégration égale au signal à 7,93 indique un taux élevé de débromation des thiophènes en bout de chaîne. Ceci, en plus de l’absence de signal correspondant à de l’homocouplage thiophène-thiophène (2,70 ppm), indiquent que la débromation du thiophène mène à la terminaison de la chaîne polymère. En effet, l’hydrogène sur le thiophène est beaucoup moins réactif que celui sur le TPD puisque ce dernier est sur une unité pauvre en électrons, ce qui affaiblit le lien C-H et le rend donc plus réactif.

De plus, il est important de mentionner l’absence du signal à 7,71 ppm dans certains spectres, soit le signal correspondant au bout de chaîne TPD (bleu). Ceci peut être expliqué par la présence d’homocouplage T-T. En effet, ce défaut induit nécessairement des bouts de chaîne constitués seulement d’unités thiophène. Plus le pourcentage

77

d’homocouplage T-T est important, plus le nombre de bouts de chaîne TPD diminue jusqu’à disparaître dans certains cas. L’absence de ce signal est donc indicateur de la présence importante d’homocouplage T-T.

La région aliphatique des spectres RMN 1H représentée à droite de la Figure 72 montre l’absence d’homocouplage Q-Q (2,70 ppm). Ce signal chevauche le signal de bouts de chaîne (2,74 ppm), mais il est toutefois distinct. De plus, un signal non identifié est présent à 2,48 ppm dans les spectres RMN des polymères P3-6 et P3-15, soit les deux polymères possédant les RR les plus faibles.

4.5.3 Analyse enthalpique différentielle à balayage

Les températures de cristallisation (Tc) et de fusion (Tf) ainsi que les enthalpies de ces transitions (ΔHc et ΔHf) sont très caractéristiques des propriétés physiques des polymères. Ces valeurs sont à la fois influencées par la masse molaire du polymère ainsi que par sa régiorégularité. En effet, plus un polymère possède une masse molaire élevée, plus les valeurs de température de cristallisation et de fusion augmenteront jusqu’à l’atteinte d’un plateau. La régiorégularité influence grandement la valeur de l’enthalpie de ces transitions puisqu’un polymère avec une régiorégularité élevée possèdera une organisation à l’état solide bien définie. Cette organisation nécessite davantage de chaleur lors de la fusion (processus endothermique) et en dégage davantage lors de la cristallisation (processus exothermique).

78

Tableau 29: Mesures thermiques des polymères P3 par analyse enthalpique différentielle à balayage Entrée Mn (kg/mol) ÐM RR (%) Tc (°C) ΔHc (J·g-1) Tf (°C) ΔHf (J·g-1) 6 36 1,5 85 214 15,1 271 16,2 14 39 1,5 96 285 19,5 295 20,4 15 34 1,6 91 274 12,9 283 12,7 21 35 1,5 97 284 25,7 293 25,8 23 54 1,6 97 285 26,9 294 27,2 24 58 1,7 98 286 28,0 296 27,5

C’est effectivement ce qui est observé lors de l’analyse enthalpique différentielle des polymères (Figure 73). Le Tableau 29, présentant les résultats de cette analyse, montre que les polymères de l’entrée 6 et 15, soit les moins régioréguliers, possèdent des températures de cristallisation et de fusion respectivement de 214°C et 271°C ainsi que 274°C et 283°C, soit des valeurs inférieures à celles des polymères possédant une régiorégularité plus élevée. Les polymères P3-14, P3-21 et P3-23 possèdent des températures de transitions très similaires malgré leur masse molaire différente; 39 kg/mol, 35 kg/mol et 54 kg/mol respectivement. Toutefois, la régiorégularité supérieure de 1% pour les polymères P3-21 et P3-23 est confirmée par les enthalpies de transition supérieures à celles de P3-14. L’analyse enthalpique différentielle du polymère P3-24 confirme que sa

79

régiorégularité est la plus élevée par une Tc de 286°C et une Tf de 296°C ainsi que par le ΔHc de 28,0 J·g-1 et ΔHf de 27,5 J·g-1. Ces valeurs supérieures à celles P3-23 confirment que P3-24 est le polymère le plus régiorégulier. Par cette analyse, il a été démontré que la régiorégularité influence davantage la Tc et Tf et les enthalpies de ces transitions que la masse molaire.