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8.3 Phase 1

8.3.3 Analyse des données, Phase 1, première vague d’analyse

Tel que déjà mentionné, en MTE, l’analyse des données est réalisée simultanément à leur collecte. Ainsi, l’analyse permet d’identifier, dans une logique itérative et inductive, quelles données sont manquantes pour approfondir la théorisation émergente (Charmaz, 2012; Guillemette et Luckerhoff, 2009). Cela facilite ensuite l’évolution des outils de collecte de

92 données et des questions d’entrevue en fonction de cette théorisation émergente. En cohérence avec cette logique, une analyse préliminaire des entrevues de la Phase 1 s’est faite pendant la collecte de données, avant d’ensuite faire une analyse plus complète entre la première et la deuxième phase de collecte de données. Toujours en cohérence avec la logique de la MTE, l’analyse formelle des 20 entrevues de la Phase 1 s’est faite en deux vagues. Pour débuter, 14 entrevues ont été analysées afin d’en dégager les thèmes principaux et d’amorcer l’organisation de ces thèmes en arbre de codification. Les 6 autres entrevues ont ensuite été analysées grâce à cet arbre de codification, tout en continuant de l’étoffer et d’en modifier la structure pour la rendre plus cohérente avec les données nouvelles.

Pour ces deux vagues d’analyse de données, le logiciel NVivo 10 a été utilisé, à l’aide de stratégies caractéristiques de la MTE (Guillemette et Lapointe, 2012). Pour faire cette analyse, nous avons d’abord procédé à la transcription mot-à-mot des entrevues, avec l’aide de deux transcriptrices, qui se sont toutes deux engagées à respecter la confidentialité des propos des participantes. Ensuite, en restant fidèle aux propos des participantes, nous avons amorcé le codage ouvert, qui consiste à examiner, comparer et catégoriser de façon systématique les données (Starks et Brown Trinidad, 2007). Cela a été très laborieux puisque, pour chacune des 14 entrevues, environ 1200 codes ont été répertoriés, pour un total d’approximativement 16 500 codes. Ceci nous a permis de codifier l’ensemble des propos des participantes d’une façon fidèle à leurs paroles, mais nous a donné peu de recul pour faciliter le passage à l’étape suivante. Cette deuxième étape, aussi incluse dans le codage ouvert, visait à regrouper les codes en catégories. Avec un si grand nombre initial de codes, les regroupements ont parfois été très ardus et la tâche a demandé énormément de temps.

93 Pour y arriver, la technique de la comparaison constante a été utilisée (Aldiabat et LeNavenec, 2011). Celle-ci demande de comparer les codes entre eux pour voir lesquels se recoupent. Les recoupements sont alors regroupés en catégories, représentant un niveau d’abstraction plus élevé que les codes (Mills, Bonner et Francis, 2006, p. 3) Les codes sont aussi comparés aux données scientifiques, utilisant alors les concepts sensibilisateurs pour voir lesquels aident à faire sens des données empiriques colligées. L’analyse s’est donc aussi appuyée sur des concepts sensibilisateurs en mettant en rapport les données empiriques, les données scientifiques et notre compréhension de celles-ci (Duchesne et Savoie-Zajc, 2005). Cela a permis l’émergence d’éléments théoriques enracinés dans les données recueillies.

Après avoir ainsi complété le codage ouvert, nous avons amorcé le codage axial des 14 entrevues de la première vague d’analyse de la Phase 1 de collecte de données. Le codage axial permet de faire des regroupements entre les différentes catégories découlant du codage ouvert (Dionne, 2009). Les catégories sont alors organisées « into groupings based on relationships and patterns

within and among the categories identified in the data » (Starks et Brown Trinidad, 2007, p.

1376). Les catégories construites à partir des codes basés sur les données empiriques ont donc été mises en relation les unes avec les autres.

Tout ce travail d’analyse a aussi été soutenu par la rédaction de mémos méthodologiques et analytiques (Charmaz, 2000). Ces mémos visent à faciliter le passage entre le codage et la théorisation, tout en restant fidèle aux données empiriques (Aldiabat et LeNavenec, 2011). Ils permettent aussi de garder une trace de l’évolution du processus d’émergence théorique et des choix méthodologiques (Starks et Brown Trinidad, 2007). Tout au long du projet, de son élaboration jusqu’à la collecte de données et leur analyse, nous avons donc régulièrement rédigé

94 des mémos détaillant notre compréhension actuelle de l’objet étudié. De plus, des commentaires ont été notés suite à chaque entrevue, tant au sujet du contenu que de la forme de ces entrevues.

Tableau III. Arbre de codification, Phase 1, vague 1

Catégorie Sous- catégories

Codes Exemples de sous-codes

Soutien à ceux qui soutiennent (rôle supplétif essentiel) Clientèle = Proches/Famille (avec ou sans usager) Offrent soutien aux proches

- Implique famille en réadaptation - Intervention familiale et conjugale

Mandat de réadaptation imprécis au sujet de la place des proches en réadaptation

- Départager ce qui appartient à réadaptation ou non pour n'intervenir que là-dessus

- Gestionnaire ramène les mandats des TS6 pour qu'ils s'intègrent dans les mandats établissement

Facilitent le travail de l’équipe

Compensent quand services pas offerts par d’autres

(généralistes)

- S'assurent que rien ne tombe entre 2 chaises

- S’assurent qu'intervenants ne

débordent pas de leur rôle

Facilitent

partenariat usager- famille-

intervenants

- Fait circuler info entre famille et équipe

- Sensibilise équipe à la réalité client-proches

Pistent équipe - Pister équipe sur forces client

- Rôle de consultante

Soutiennent lorsque clientèle dite difficile

- Gestion dossiers complexes

- Apaiser tensions causées par client difficile

Grâce à tous ces outils d’analyse, les 14 entrevues initialement analysées nous ont permis d’élaborer un arbre de codification à peaufiner avec l’analyse des 6 entrevues restantes de la Phase 1. Selon cette première ébauche d’arbre de codification, les données s’organisaient autour

6 Dans la présente thèse, selon le contexte, le sigle TS peut référer à « travail social » ou à « travailleuse(s)

95 de la catégorie « soutien à ceux qui soutiennent » (voir Tableau III : Arbre de codification,

Phase 1, vague 1). Les travailleuses sociales étaient alors positionnées comme étant dans une

situation où elles sont en deuxième plan dans l’équipe de réadaptation, mais font des choses qui doivent être faites, soit dans un rôle supplétif essentiel.

Cet arbre de codification présentait l’avantage de regrouper la majorité des codes identifiés en catégories. Par contre, il présentait deux limites principales. Tout d’abord, l’aspect processuel de l’identité professionnelle étudiée n’était pas encore conceptualisé. Ensuite, quelques redondances existaient entre les catégories identifiées, démontrant une faiblesse dans l’identification des interactions entre les thèmes ciblés. La deuxième vague d’analyse des données de la Phase 1 visait entre autres à compenser ces limites.