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Cécile Bélet-Gonda ; mis à jour par Ludwig Eschenlohr et Emmanuelle Evéquoz

avec des contributions de Ian Hedley et Gisela Thierrin-Michael

La zone d’activité dédiée à la réduction du minerai de fer est représentée par les traces de l’emplacement d’un bas fourneau prolongé par une aire de travail, d’une aire de rejet limitrophe et d’un ferrier principal en aval (fig. 32 et chap. 3.14). Ces décou- vertes confirment la présence d’une activité de réduction du fer en Ajoie au cours du Haut Moyen Age (Eschenlohr 2001)15.

3.6.1 Traces de l’emplacement d’un bas fourneau (Bf) et

de son aire de travail (At)

Les restes de cette structure renvoient à son dernier état de fonc- tionnement. Il s’agit d’un hémicycle de calcaires partiellement rubéfiés, doublé sur sa face interne de fragments de tuiles romaines avec impacts de chaleur (fig. 33 et 34). Cette structure de combus- tion, préservée sur une seule assise, forme la fondation en arc de cercle de la paroi d’un foyer ; elle mesure 1,3 m de diamètre. Au nord, un segment, sans aménagement, a livré de rares fragments de scories et débouche sur l’aire de travail contiguë. Il s’agit sans doute du seuil de la porte du bas fourneau arasé.

Fig. 33 Plan et coupe du bas four- neau et de son aire de travail.

Bas fourneau Aire de rejet Ferrier

Ar Bf At Fr 0 5 m N N

Fig. 32 Plan des aménagements liés à la réduction du minerai de fer.

r r

3.3 2

Silts chauffés Silts rubéfiés 5.1 457,90 m 25 cm 0 N N

Calcaire Calcaire rubéfié Scorie Tuile

At TP14

Cette double rangée de pierres et de tuiles délimite une aire circu- laire interne d’un diamètre de 75 cm constituée essentiellement d’une sole de foyer épaisse de 6 cm et d’un diamètre de 60 cm. Celle-ci est composée de nodules de terre cuite gris, disposés de manière assez compacte. Elle semble toutefois avoir été rema- niée. Une première série d’échantillons en vue d’une datation par archéomagnétisme y a été prélevée (chap. 3.6.1.1).

La coupe stratigraphique de la structure de combustion laisse apparaître sous cette première sole un second niveau de sédi- ments rubéfiés d’une épaisseur moyenne de 5 cm et reposent sur la couche 3.3 (fig. 33). Une seconde série d’échantillons pour analyse archéométrique provient de ce niveau (chap. 3.6.1.2). Le mobilier présent dans le remplissage est peu abondant et se compose quasi exclusivement de déchets scorifiés (quelque 2 kg). Le tamisage des sédiments contenus au centre du foyer a mis en évidence une présence discrète de charbons de bois, essentielle- ment du chêne (chap. 3.8.2).

Au nord du foyer, une cuvette oblongue de 1 m sur 1,25 m se dis- tingue. Cette cuvette est peu prononcée (profondeur moyenne de 10 cm) et s’appuie sur la couche 3.3. Son remplissage est formé de sédiments charbonneux contenant des déchets scorifiés (env. 7 kg), ainsi que des fragments de calcaire (fig. 169). Il s’agit très probablement de l’aire de travail (fig. 33).

Un seul trou de poteau, de 16 cm de diamètre pour une profon- deur de 8 cm, a été découvert à proximité de l’emplacement du bas fourneau (TP14, fig. 33). Situé 1 m au nord-est de l’aire de travail, il devait probablement, associé à au moins un autre poteau, soutenir une couverture légère en bois permettant aux artisans de travailler par tous les temps (Bellaires III, fours XXI : Pelet 1993, fig. 78 ; Boécourt - Les Boulies : Eschenlohr et Serneels1991, fig. 85).

3.6.1.1 Analyse archéomagnétique

Ian Hedley

L’archéomagnétisme est basé sur deux phénomènes naturels (Demarez et Othenin-Girard 1999, p. 134-135). Le premier est physique et dépend du fait que les matériaux archéologiques cuits dans l’Antiquité mémorisent, lors de leur refroidissement,

le champ magnétique terrestre (CMT) ambiant. Le second phé- nomène concerne la variation continue du CMT avec le temps sur une échelle des siècles, voire des millénaires, appelée variation séculaire. Par référence aux courbes étalons de la variation, on peut procéder à la datation des structures de combustion – fours et foyers – d’âge inconnu à partir de l’étude en laboratoire de leur mémoire magnétique (Kovacheva et al. 2004).

Variation séculaire

En 2008, lors de l’élaboration des résultats, l’aiguille d’une boussole en Suisse indiquait bien le nord géographique mais, par le passé, il y a eu parfois une grande différence entre le nord magnétique et le nord géographique : au début du 19e siècle, le nord magnétique

se trouvait par exemple 20° à l’ouest. Appelée déclinaison, la varia- tion de ce paramètre ainsi que celle de l’inclinaison (l’angle entre le vecteur du CMT et le plan horizontal) est bien connue depuis le 16e siècle grâce à des mesures directes faites en observatoire.

Pour les périodes plus reculées, il faut faire appel à l’archéomagné- tisme. En Europe occidentale, grâce à plusieurs dizaines d’années de recherche sur les structures de combustion archéologiques bien datées, on a pu établir les courbes de référence archéomagnétiques de cette variation séculaire pour nos régions, au moins pour les deux derniers millénaires (Bucur 1994).

Magnétisme des terres cuites

Lorsqu’une roche ou une terre cuite se refroidit en présence d’un champ magnétique, elle s’aimante selon une direction parallèle à ce champ. Si la température de cuisson a dépassé une température critique, celle de Curie (600-700°C), cette aimantation thermoré- manente (ATR) a une stabilité élevée. Dans le cas des terres cuites, l’aimantation est portée par les oxydes de fer – soit magnétite, soit hématite – associés à l’argile. Malgré l’étonnante stabilité magné- tique de l’ATR, il est important que la structure de combustion soit restée in situ et intacte depuis sa dernière cuisson, sans subir de dislocation ou d’affaissement du sol.

Technique de prélèvement

Comme l’archéomagnétisme est essentiellement une étude direc- tionnelle, l’orientation de chaque échantillon doit être contrôlée avant détachement de la structure archéologique. Dans le cas de la structure de combustion de Lai Coiratte, la méthode du disque collé a été utilisée. Sur une surface préalablement nettoyée, pour obtenir une surface horizontale, plusieurs disques en plastique d’un diamètre de 25 mm ont été collés avec une colle instantanée. Une flèche d’orientation vers le nord magnétique a ensuite été tracée sur chaque disque à l’aide d’une boussole de géologue. La direction de chaque flèche a été contrôlée avec un compas solaire afin éviter une erreur due à une éventuelle anomalie locale du CMT. Les mesures faites avec le compas solaire donnent une direction moyenne pour le CMT à Chevenez en septembre 2002 qui correspond à un degré près à celle calculée à partir du modèle géomagnétique pour la Suisse 16. L’anomalie magnétique due aux

restes de la structure est donc négligeable. Lors de la première intervention, le 30 août 2002, 21 échantillons ont été prélevés (fig. 35a) ; le 17 septembre 2002, on a procédé à une seconde série de treize échantillons (fig. 35b).

Fig. 34 Vue de l’emplacement du bas fourneau dans son dernier état d’utili- sation en tant que structure de combustion.

Résultats

La direction et l’intensité de l’aimantation rémanente ont été mesurées en laboratoire avec un magnétomètre de type « spinner » Minispin. La première série d’échantillons montre une forte dis- persion des directions d’aimantation rémanente avec un impor- tant angle alpha95 de 26o (statistique de Fisher 17). Les analyses

magnétiques indiquent que malgré une forte cuisson, presque tous les spécimens de ce niveau du foyer ont été perturbés. Dans un premier temps, la grande dispersion des directions d’aimanta- tion a conduit à dater la structure du 11e siècle. Suite à ces résul-

tats peu probants et au vu les données archéologiques de terrain, la seconde série d’analyses a été entreprise et donne un meilleur résultat avec une dispersion des directions plus serrée autour de la direction moyenne (alpha95 de 8,3o).

Une étude de la stabilité magnétique de la terre cuite par un essai de viscosité magnétique (stockage pendant un mois au labora- toire en l’absence d’un champ magnétique) a montré une grande variabilité parmi les treize échantillons. Une viscosité élevée est

témoin d’une faible cuisson, ce qui était le cas des échantillons 7, 9-11 et 13 qui ont été éliminés. Sur la base de ces premières analyses magnétiques, seuls six échantillons (2-5, 8 et 12) ont été reconnus comme fiables, les autres ayant une viscosité élevée ou une direction d’aimantation aberrante. Les échantillons retenus donnent une direction moyenne : déclinaison (D) = 355,3°, incli- naison (I) = 70,3° et un angle alpha95 de 3,3°. Bien que ce résultat

soit basé sur un nombre restreint d’échantillons, il est tout à fait acceptable et fournit une fourchette chronologique beaucoup plus restreinte et mieux appropriée au contexte de découverte des structures et du mobilier archéologique. En effet, les résultats obtenus proposent deux solutions de datation dans l’intervalle de 0 à 1800 ap. J.-C. (fig. 36).

Désaimantation par champ alternatif

Lors d’une étude archéomagnétique classique, un essai de vis- cosité magnétique est normalement suffisant pour éliminer les échantillons de terre cuite avec une aimantation instable (Thellier 1981). Cependant, nous avons procédé en plus à une désaiman- tation par champ magnétique alternatif dans le but de nettoyer toute aimantation parasite acquise par un séjour dans le CMT et de relever la direction de l’ATR de l’époque.

La désaimantation se fait par paliers, avec une mesure de l’aiman- tation entre chaque étape, jusqu’à seize en nombre. L’appareil utilisé, de marque 2G, est piloté par ordinateur et permet de monter jusqu’à un champ alternatif de 180 millitesla, donc plus de trois mille fois plus fort que le champ magnétique terrestre, suffisant pour complètement désaimanter la terre cuite.

Des treize échantillons prélevés, huit ont été sélectionnés pour une désaimantation (2-6, 8, 10 et 12). En général, les échantillons montrent un bon comportement lors de la désaimantation, avec la seule présence d’une petite composante visqueuse mais qui dis- paraît après un traitement dans un champ alternatif faible. Mais les échantillons 6, 10 et 12 indiquant des directions aberrantes après ce traitement, seuls cinq échantillons ont donc été retenus (2-5 et 8, fig. 35b). La meilleure estimation de la direction pendant la désaimantation de chacun de ces cinq échantillons a été ensuite calculée par la méthode de l’analyse de composante principale (Kirschvink 1980). 25 cm 0 N N 11 6688 77 99 10 10 11 11 13 13 22 33 44 55 12 12

Calcaire Calcaire rubéfié Scorie Tuile Prélèvement

Prélèvement retenu Silts chauffés Silts rubéfiés

a) b) 0 95% CVZ2-af-n5 CVZ2-af-n5 200 400 600 800 1000 1200 1400 1600 1800 ap. J.-C. Fig. 35 Plan du bas fourneau avec

positionnement des échantillons archéomagnétiques.

Fig. 36 Datation archéomagnétique du bas fourneau avec les courbes de probabilité (logiciel REN-DATE, Lanos et al. 2001).

Après le traitement par champ alternatif, la direction moyenne des cinq échantillons est : D = 0,06°, I = 69,6° et un angle alpha95

de 3,7°. Si on tient compte de l’erreur dans l’analyse, ce résultat est peu différent de la direction moyenne basée sur l’aimantation rémanente naturelle initiale.

Datation

Cette direction valable à Lai Coiratte a été transférée à Paris, sur l’hypothèse d’un champ géomagnétique dipolaire, pour per- mettre une comparaison avec les données archéomagnétiques pour cette ville, ce qui donne : DParis = 0,9°, IParis = 70,6°. Par référence aux données françaises (Gallet et al. 2002) et à l’aide du logiciel REN-DATE basé sur les statistiques bayésiennes, deux solutions pour la structure de combustion sont possibles entre 0 et 1830 ap. J.-C. (fig. 36). Soit 549 à 845 ou 1603 à 1719 ap. J.-C. avec un niveau de fiabilité de 95 %. La courbe de probabilité indique que la solution aux 7e - 8e siècles est la plus vraisemblable.

3.6.1.2 Analyse archéométrique Gisela Thierrin Michael

Trois échantillons de sédiments prélevés dans le niveau rubéfié ont été analysés. Le premier échantillon (JU353) provient de l’encaissant, le deuxième (JU354) de la marge de la rubéfaction et le dernier (JU355) de la zone paraissant la plus rubéfiée au moment du prélèvement (« couche argileuse fortement rubéfiée » ; Gonda et al. 2003, p. 23). La couche sus-jacente, décrite comme « nodules de terre cuite gris très compacts » d’une épaisseur de plus de 5 cm, avait déjà été enlevée au moment du prélèvement et n’a donc pas été analysée.

Préparation et analyses

Les trois échantillons ont été broyés et analysés par diffraction RX selon les douze préparations suivantes :

– poudre brute (tous) ; – poudre brute orientée (tous) ;

– fraction 2µ orientée (JU353 et JU355) ; – fraction 2µ glycolée (JU353 et JU355) ;

– fraction 2µ chauffée à 550°C (JU353 et JU355).

La fraction 2µ a été obtenue par une séparation des particules argileuses par acidulation et centrifugation subséquente 18.

Résultats La poudre brute

L’assemblage minéralogique déterminé est pratiquement iden- tique pour les trois échantillons, soit quartz, feldspaths, illite et autres minéraux argileux. Ces derniers ne peuvent pas être iden- tifiés sur la base de cette préparation. Il pourrait s’agir de chlo- rite et de mixed layer (indéterminé) ou de kaolinite et de mixed

layer à illite-montmorillonite ; les pics de chlorite se trouvent à la

même place que ceux de ML montmorillonite et de kaolinite. Les échantillons JU354 et JU355 montrent en outre un petit pic large, mal défini vers 33° 2 où l’on trouve aussi le signal maximal de l’hématite. La mauvaise définition suggère cependant qu’il pour- rait s’agir plutôt d’un pic mineur d’illite (reflet 023 dans référence ASTM29-1496). La température maximale est donc indiquée par la

présence des minéraux argileux, soit de chlorite (présente jusqu’à 650°C), soit de kaolinite (disparaît à 550°C). Afin de préciser la composition de la fraction argileuse et de trancher entre ces deux possibilités, des préparations supplémentaires ont été réalisées.

La fraction 2µ

Les échantillons JU353 et JU355 produisent des diffractogrammes identiques pour les préparations comparables. La disparition des pics à 12,4°, à 24,9° et à 37,8° 2 dans les diffractogrammes des préparations cuites à 550°C indique clairement la présence de kaolinite dans les deux échantillons, donc dans la partie rubéfiée et dans l’encaissant. Les changements de position des pics entre 5 et 9° 2 dans les diffractogrammes des préparations orientées séchées, glycolées et cuites à 550°C suggèrent un mixed layer montmorillonite-illite (pic basal). Selon la position des pics dans le diffractogramme de la préparation glycolée et d’après C.E. Weaver (1956), la proportion des minéraux gonflables – dans notre cas la montmorillonite – serait d’environ 50 %.

Estimation des températures de cuisson

La présence de kaolinite prouve que la température maximale subie par les sédiments prélevés était certainement inférieure à 550°C. Il s’agit ici de la température à la base de la structure de combustion. Comme le prélèvement d’un échantillon sûr ailleurs dans le foyer était irréalisable compte tenu du mauvais état de conservation de la structure, ces températures n’ont pas pu être vérifiées. L’endroit où ont été prélevés les échantillons analysés devait donc être situé à distance de la source maximale de chaleur. S’ils ont existé, les témoins d’une température nettement plus élevée – au-delà de 1000°C, tel que connu ailleurs dans un bas fourneau19 – ont dû être ici complétement érodés (chap. 3.14.4).

3.6.2 Les aires de rejet liées à la réduction

En aval de l’emplacement du bas fourneau et de son aire de travail, se situe la zone de rejet principale, appelée ferrier. Une seconde aire de rejet de taille bien inférieure a été observée à l’est de la structure de combustion (chap. 3.14.2.1).

3.6.2.1 L’aire de rejet (Ar)

La seconde concentration de déchets scorifiés est située à 1,5 m à l’est de l’emplacement du bas fourneau (fig. 37). De forme subrec- tangulaire, elle couvre une superficie de 6,5 m2 aux limites irrégu-

lières et diffuses. Ce dépôt, épais de 20 cm, s’apparente au niveau archéologique et semble être conservé dans une dépression natu- relle. La documentation de terrain distingue plusieurs remplissages qui après étude s’avèrent appartenir à un seul et même sédiment de comblement localement plus charbonneux 20 (fig. 169).

Le mobilier contenu dans cet épandage est composé en grande majorité de fragments de scories coulées et de parois scorifiées (chap. 3.8 ; voir aussi chap. 3.11.1 et 3.11.6). Le poids total des déchets scorifiés prélevés dans cette surface est d’environ 16 kg, dont un quart de paroi de bas fourneau.

Cette accumulation est interpétée comme une aire de rejet en lien avec l’emplacement du bas fourneau.

3.6.2.2 Le ferrier (Fr)

La principale concentration de déchets scorifiés est située à 5 m au nord de la structure de combustion interprétée comme empla- cement du bas fourneau. Elle présente une forme ellipsoïdale, mesurant 20 m de long sur 12,5 m de large, conservée sur une épaisseur moyenne de 15 cm (chap. 3.8, 3.9 et 3.14). A pre- mière vue, le mobilier mis au jour présentait des caractéristiques propres à la réduction du minerai de fer. Lors de l’étude, il s’est avéré que ce ferrier contenait surtout des scories coulées et, dans une moindre mesure, notamment dans la zone de contact occi- dentale, des résidus de postréduction provenant des ateliers de forge situés à l’ouest (chap. 3.7).

Les quantités précises des différents catégories de déchets scori- fiés, ainsi que leur répartition spatiale, seront présentées ci-après (chap. 3.8, 3.9 et 3.14). Au total, quelque 370 kg (57 % de ces déchets), soit environ 14 700 fragments, ont été répertoriés dans le ferrier, dont trois quarts sont liés à l’étape de la production du fer, un huitième à celle de la transformation et du travail du fer. Un dixième est non attribuables à l’une ou à l’autre de ces étapes. Le faible volume du ferrier s’explique, d’une part, par le relief qui favorise un mouvement des déchets scorifiés vers le nord, d’autre part, par l’action érosive du Creux-des-Prés. De ce fait, une évalua- tion des quantités de matériaux perdus a été tentée (chap. 3.10.2).

3.6.3 Analyse chronologique et synthèse interprétative

des vestiges liés à la réduction du minerai de fer

L’unique datation 14C de la zone du bas fourneau place le remplis-

sage de l’aire de travail entre 540 et 700 AD (Ua-2084621, fig. 38).

La fourchette d’utilisation proposée par les analyses archéoma- gnétiques (550-850 ap. J.-C.) est donc précisée. Deux autres ana- lyses 14C proviennent du ferrier (Ua-20847 et Ua-20848 22) et

donnent deux plages chronologiques, entre 530 et 670 et entre 560 et 690 AD. Sur la base de ces trois éléments de chronologie absolue, l’activité métallurgique peut être fixé entre le milieu du 6e et la fin du 7e siècle ap. J.-C. Les données typologiques prove-

nant de l’étude du mobilier métallique et céramique apporteront un éclairage complémentaire (chap. 3.14.4.1).

Au vu de l’ensemble des structures observées in situ et des déchets scorifiés associés, la structure de combustion présentée ci-dessus réoccupe vraisemblablement la place d’un bas fourneau.

Toutefois, en l’état, cette structure ne peut pas constituer les restes d’un bas fourneau pour des raisons morphologiques évidentes. La comparaison avec les spécimens similaires connus dans le Jura central suisse et ailleurs dans l’Arc jurassien ne permet pas d’imaginer qu’une surface plane bordée immédiatement de tuiles romaines et de pierres calcaires forme les fondations d’un bas fourneau. En l’occurrence, le fond du fourneau manque, de même que sa paroi interne argilo-sableuse. A ce stade, une question demeure : comment dans le court laps de temps, entre l’abandon du bas fourneau et le remploi de son emplacement par la structure présentée ci-dessus, 20 à 30 cm de terre, soit le soubas- sement du bas fourneau, ont-ils pu disparaître ?

Quant aux données archéométriques, les premiers prélèvements destinés à l’archéomagnétisme proviennent de la sole remaniée du foyer. Seule la seconde série, issue de ce qui pourrait être le fond du bas fourneau antérieur, a donné une fourchette chronologique. Les analyses archéométriques de ce même niveau ont montré que les températures atteintes étaient peu élevées. Cependant, rien ne permet d’exclure sans équivoque que la rubéfaction du niveau inférieur n’ait pas été induite par le fonctionnement de la dernière structure de combustion, probable foyer artisanal dont le lien avec l’activité métallurgique n’est pas assuré. La disposition spatiale de cet atelier sera abordé par la suite (chap. 3.14).

456,80 m 456,80 m 3.3 3.3 r r r Projection 2 Projection 1 Projection 2 Projection1 Ar 0 1 m N N 20 cm Scorie Céramique Métal

Fig. 37 Plan de l’aire de rejet et positionnement des projections 1 et 2.

Fig. 38 Résultats des datations 14C de certains aménagements liés à la réduc- tion du minerai de fer.

400 AD 600 AD 800 AD

Str. No analyse Date BP cal 1 σ -

2 σ AD At Ua-20846 1405 ± 45 1 σ : 600 - 6652 σ : 540 - 700 Fr Ua-20847 1460 ± 45 1 σ : 560 - 6452 σ : 460 - 490 530 - 670