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Une adaptation de la législation protégeant les libertés les libertés

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 52-56)

La société numérique, un cadre hétérogène de protection des libertés

Chapitre 1. Une adaptation de la législation protégeant les libertés les libertés

Le réseau Internet, les technologies du W‐B 2.0155 et l’accès mobile à Internet et aux réseaux sociaux modifient les agissements individuels dans la société numérique. D’une attitude passive limitée à la consultation des sites, l’internaute devient acteur et peut interagir en direct avec l’information qu’il reçoit, voire il peut créer l’information ou la relayer. Les actions des utilisateurs du W‐B 2.0 ajoutent de la valeur156. Sa liberté d’expression, mais aussi sa liberté de choix, se trouve démultipliée par l’univers numérique mis à sa disposition. De nouveaux besoins apparaissent dans une société mercantile cherchant à vendre et commercialiser de nouveaux concepts et modes de vie. Le téléphone mobile, apparu dans les années 1990, ne sert plus à téléphoner, mais à communiquer et à rester en relation avec un réseau de relations virtuelles. De téléphone, il est devenu smartphone en intégrant un appareil photographique, une caméra, un enregistreur de sons, un GPS. Il permet l’accès à Internet, la diffusion et la réception de messages courts en temps réels, la connexion permanente à son réseau social. Il est également utilisé pour écouter de la musique, voire pour regarder un film ou une émission de télévision.

Dans certains pays, avec la technologie N‑C157, le smartphone remplace la carte de crédit.

Bientôt, il sera utilisé pour enregistrer et capter des données vitales : rythme cardiaque, pouls, etc. Comme l’écrit Isabelle Compiègne158, le téléphone portable, devenu smartphone, est devenu un véritable instrument d’innovation sociétale.

155 Le W‐B 2.0 est une évolution technique du W‐B initial, la sophistication des techniques doit permettre à tout utilisateur d’un terminal (PC, smartphone, tablette, etc.) de communiquer et d’échanger des informations avec tout utilisateur. Sans connaissances techniques, l’utilisateur échange des informations, partage des photos ou des petits films, via les Blogs, ou via les réseaux sociaux, ‑acebook, Twitter, Alors qu’avec la technique initiale du W‐B, l’utilisateur recevait de l’information, avec les techniques mises en œuvre par le W‐B 2.0, il produit de l’information et devient acteur du W‐B.

De plus, avec les techniques du PUSH liées aux abonnements, l’information est disponible, pour l’utilisateur, sur son terminal sans aucune sollicitation nouvelle.

156 Tim O’Reilly, “The ‑uture of Data Industry”, Where 2.0 Conference, San José, 13-14 June 2006.

157 Near Field Communication ou communication dans un champ proche.

158 Isabelle Compiègne, La société numérique en question(s), Éditions Sciences Humaines, 2011, p. 14.

L’épanouissement de l’individu peut se manifester par des opportunités de modes d’expression nouveaux, des facilités de choix ou des possibilités nouvelles, mais cet épanouissement peut être contrecarré par des abus de cette liberté nouvelle, abus du fait de la personne concernée, mais aussi abus de tiers. Internet peut annihiler toute retenue et favoriser une certaine délinquance en l’absence de sanction et devenir un vecteur du crime organisé159.

Internet est également devenu un vecteur de diffusion de l’information. Aux États-Unis d’Amérique, Al Gore160 a propagé l’idée des autoroutes de l’information durant la campagne présidentielle de 1992. Il prévoyait une architecture et une infrastructure capables de véhiculer toutes sortes d’informations, son, images, à très grande vitesse, avec des accès étendus et une infrastructure unifiée. Cette autoroute existe aujourd’hui et a largement dépassé les frontières des seuls États-Unis. Avec l’apparition de la toile161, les internautes ont découvert un espace de communication puissant et international, se jouant des frontières162, mais cet espace ouvert, inventé par des universitaires ou des étudiants libertaires sur les campus universitaires ou dans les laboratoires de recherche, n’a pas été réalisé comme un espace sécurisé, et, à ce titre, son utilisation peut réduire, voire anéantir, certaines libertés. Il peut, à l’opposé, être utilisé pour contrer un État policier et organiser des réunions voire des manifestations prérévolutionnaires, comme ce fut le cas en Tunisie et en Égypte au printemps 2011163. De plus, la généralisation de la dématérialisation de nombreux documents et la vulgarisation de certaines techniques, initialement militaires, comme le GPS, ou la vidéosurveillance peuvent venir aussi réduire cet espace de libertés.

159 David S. Wall, “The Internet as a Conduit for Criminal Activity”, March 2010, in April ‑. Pattavina, (ed) Information Technology and the Criminal Justice System, Thousand Oaks, CA, pp. 77-98, URL:

https://www.researchgate.net/profile/David_Wall8/publication/228199078_The_Internet_as_a_Conduit_for_Cri minal_Activity/links/54d0b4cb0cf298d656681e31/The-Internet-as-a-Conduit-for-Criminal-Activity.pdf consulté le 20 mars 2018.

160 Vice-Président Al Gore, Information Superhighways Speech, discours du 31 mars 1994, en ligne à http://vlib.iue.it/history/Internet/algorespeech.html .

161 World Wide WEB (WWW) ou littéralement en français la toile (d’araignée) mondiale.

162 John Perry Barlow, « A Declaration of the Independence of Cyberspace », Electronic Frontier Foundation,

‑ebruary 8, 1996, Op. cit.

163 Jean-Jacques Lavenue, « Printemps arabes, révolutions virtuelles ? », Actes du colloque international « E-Révoution et révolutions », Lille, 220-21 décembre 2012.

Yves Gonzalez-Quijano, « Internet, le "Printemps arabe" et la dévaluation du cyberactivisme arabe », Égypte/Monde arabe, 2015/1 (n° 12), pp. 67-84. URL : https://www.cairn.info/revue-egypte-monde-arabe-2015-1-page-67.htm, consulté le 21 novembre 2017.

Titre 1 La société numérique, un cadre hétérogène de protection des libertés

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Mais le cyberespace, l’espace numérique dématérialisé, n’est pas un espace de non-droit164, comme le préconisaient les premiers utilisateurs et concepteurs du réseau Internet165. Le droit commun s’applique à cet espace mouvant et international, même si certaines particularités y ont incité le législateur à introduire des règles spéciales tenant compte de cette spécificité. Si Internet n’est pas un espace libertaire166, il demeure un espace de connaissance, d’échanges et de liberté.

«La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui»167, aussi, toute liberté trouve-t-elle ses limites dans le respect de la jouissance par autrui de ses propres libertés. Ces limites ou restrictions proportionnées au but à atteindre, peuvent provenir de la loi168, mais elles peuvent aussi être induites par d’autres facteurs : la morale, des règles d’éthique, une réglementation, voire des clauses contractuelles169. Avec l’apparition du cyberespace, la question du droit applicable à cet espace nouveau, international et protéiforme s’est posée. Le législateur devait-il laisser cet espace s’autoréguler ou au contraire, cet espace devait-il être régi par une législation, ordinaire ou spéciale ? Dès 1998, le Conseil d’État a précisé que

« l’ensemble de la législation existante s’applique aux acteurs d’Internet » et qu’il n’était pas

« besoin d’un droit spécifique de l’Internet et des réseaux »170.

Les droits fondamentaux (Section 1) ou les droits économiques (Section 2) connaissent des répercussions liées à l’omniprésence des techniques numériques dans la société actuelle. Les législations nationales, adoptées État par État, n’ont pas été élaborées pour faire face à un réseau mondial et à des interprétations légales divergentes. Des adaptations d’interprétation sont parfois nécessaires dans les États, en fonction de l’histoire et des coutumes, mais alors se pose la question du droit applicable. Au sein de l’Union européenne, une harmonisation partielle est réalisée par les directives, transposées dans le droit des États membres, et les règlements d’application directe. Toutefois, des divergences perdurent et sont utilisées par les acteurs

164 Jean-‑rançois Théry, Isabelle ‑alque Pierrotin, Internet et les réseaux numériques : étude adoptée par l’Assemblée générale du Conseil d’État le 2 juillet 1998, Conseil d’État. Section du rapport et des études, Publié à la documentation française, décembre 1998.

165 Le réseau ARPAN‐T, puis Internet, était utilisé par la communauté de recherche universitaire pour échanger et partager des idées entre chercheurs, respectant et encourageant la tradition universitaire de la publication ouverte des idées et des résultats. Cette tradition s’est perpétuée avec les logiciels libres.

166 Libertaire : « partisan de la liberté absolue, anarchiste » (définition du dictionnaire Larousse, URL : http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/libertaire/46993 consultée le 23 mars 2018).

167 Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen du 26 août 1789, Article 4.

168 Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, article 4. « Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la Loi ».

169 Murray N. Rothbard, The Ethics of Liberty, Humanities Press, 1982.

170 Jean-‑rançois Théry, Isabelle ‑alque Pierrotin, Internet et les réseaux numériques. Op. cit.

internationaux pour un « dumping » législatif171, les sites s’établissant dans les États membres où les contraintes sont moindres172.

171 Stéphane Astier, « Vers une régulation éthique de l'Internet : les défis d'une gouvernance mondiale », Revue Internationale des Sciences Administratives, 2005/1 (Vol. 71), pp. 143-161. URL : https://www.cairn.info/revue-internationale-des-sciences-administratives-2005-1-page-143.htm consulté le 7 décembre 2017.

172 Lire l’avis de la commission nationale de l’informatique et des libertés (Délibération n° 2017-299 du 30 novembre 2017 portant avis sur un projet de loi d’adaptation au droit de l’Union européenne de la loi n°78-17 du janvier 1978 (demande d’avis n°17023753)).

« Article 8 (Champ d’application territorial)

« L’article 8 du projet de loi vient préciser le champ d’application de la loi nationale. Il prévoit qu’en cas de divergence de législations entre États membres liée aux marges de manœuvre laissées par le Règlement, la loi nationale s’applique dès lors que la personne réside en France et ce, même si le responsable de traitement n’est pas établi en France. La logique est en revanche inversée dans le cadre du respect du droit à la liberté d’expression et d’information, par exemple dans le domaine de la presse, où le droit applicable est celui de l’État dans lequel est établi le responsable.

« La Commission prend acte de ces dispositions, tout en soulignant les difficultés opérationnelles qui pourraient naître avec les pays ayant retenu des critères différents et incompatibles avec ceux retenus par le projet de loi ».

De fait ces dispositions concernent les traitements mentionnés au 2 de l’article 85 du règlement général sur la protection de données : « 2.Dans le cadre du traitement réalisé à des fins journalistiques ou à des fins d'expression universitaire, artistique ou littéraire, les États membres prévoient des exemptions ou des dérogations au chapitre II (principes), au chapitre III (droits de la personne concernée), au chapitre IV (responsable du traitement et sous-traitant), au chapitre V (transfert de données à caractère personnel vers des pays tiers ou à des organisations internationales), au chapitre VI (autorités de contrôle indépendantes), au chapitre VII (coopération et cohérence) et au chapitre IX (situations particulières de traitement) si celles-ci sont nécessaires pour concilier le droit à la protection des données à caractère personnel et la liberté d'expression et d'information ».

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Section 1. Les droits fondamentaux dans la société numérique

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