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délinquance féminine

3.3 Les violences sexuelles

3.3.1 Les abus sexuels sur mineurs

Pendant longtemps, l’existence de femmes agresseurs sexuels a été complètement niée (Hetherton 1999), et les quelques cas connus qualifiés d’aberrations (Denov 2003a). Fortement stigmatisées, dans les discours et les pratiques des acteurs judiciaires, ces atteintes suscitent à la fois répulsion et fascination227. Dans les rares cas où les victimes ont dénoncé un agresseur 224 Pour un état des lieux, v. p. ex. l’ouvrage édité par Theresa Gannon et Franca Cortoni

(2010).

225 Not. les travaux de Franca Cortoni et R. Karl Hanson (2005) et Franca Cortoni et

al. (2009), Theresa Gannon et Mariamne Rose (2008), Jacqui Hetherton (1999),

Pamela Nathan et Tony Ward (2001), Monique Tardif et al. (2005), Donna Vandiver et Jeffery Walker (2002), et Miriam Wijkman et al. (2010).

226 V. é.g. des données canadiennes de Tina Hotton Mahony (2011) selon lesquelles les femmes commettant des agressions sexuelles le font surtout à l’égard de connais-sances (56 %) et de membres de la famille (24.6 %).

227 Les entretiens réalisés par Coline Cardi (2008) avec des femmes incarcérées montrent à quel point les détenues elles-mêmes tenaient à se distancer de celles qu’elles nom-maient « les pédophiles ». Les unes insistaient sur leur qualité de bonnes mères (ou grands-mères), les autres soulignaient l’injustice de leur propre incarcération en re-gard des actes (horribles) commis par ces « autres ».

136 Partie I : Les femmes délinquantes femme, elles se sont heurtées à l’incrédulité, voire au mépris, de certains pro-fessionnels de la santé ou de la justice (Denov 2003b, 2004). Les violences et les abus sexuels seraient en effet souvent jugés moins graves lorsqu’ils sont commis par une femme que par un homme, à tout le moins lorsque les vic-times sont mineures (Finkelhor 1984)228. Ce tabou semble également exister chez les auteures elles-mêmes, puisque, d’après une étude française, le viol est la seule infraction pour laquelle le nombre de femmes accusées niant les faits est plus important que le nombre de femmes reconnaissant leurs actes (Bellard 2010 : 119).

En Suisse, en 2011, 3 % des personnes soupçonnées d’actes d’ordre sexuel avec des enfants étaient des femmes229. L’année précédente, celles-ci représentaient en France moins de 1 % des personnes condamnées pour un viol sur mineur230. Aux États-Unis231, les femmes représentaient également 1 % des personnes arrêtées pour viol, un pourcentage identique à celui ob-servé aux Pays-Bas (Wijkman et al. 2010)232. En revanche, les données des sondages – qui limitent les biais inhérents à la très faible reportabilité des violences sexuelles – sont inconsistantes233.

Comme les hommes agresseurs sexuels, les femmes agresseraient avant tout des victimes qu’elles connaissent (Beech et al. 2009 ; Gannon et Rose 2008). La question de savoir si les femmes abusent avant tout des gar-çons ou des filles n’a pas encore reçu de réponse claire (Gannon et Rose 2008 ; Vandiver et Kercher 2004), mais plusieurs études suggèrent que les victimes des femmes agresseurs sexuels seraient plus fréquemment des filles (Grayston et De Luca 1999). Lorsqu’elles passent à l’acte, les femmes adopteraient toute la variété des comportements observés chez les hommes : baisers, caresses des organes génitaux, fellations, cunnilingus, pénétration anale et vaginale avec les doigts ou un objet, acte sexuel complet, exhibitionnisme, exposition involon-taire à de la pornographie, etc. (Tardif et al. 2005). Elles commettraient tou-tefois, plus souvent que les hommes, des abus dits de moindre gravité (p. ex.,

228 Cité par Jacqui Saradjian (2010 : 14). 229 OFS, SPC, 2012.

230 Ministère de l’Intérieur, Les condamnations, 2011.

231 FBI, Uniform Crime Report (UCR), Crime in the United States, 2010, Table 42. 232 Ces différences entre pays ne reflètent pas forcément des taux d’implication différents

des femmes, mais ils sont peut-être simplement le fait de définitions légales diffé-rentes. Il faudra alors retenir que, partout, les femmes constituent une petite minorité des délinquants sexuels détectés par les forces de l’ordre.

233 Des données allemandes suggèrent que les femmes pourraient représenter jusqu’à 16.9 % des auteurs d’abus sexuels d’enfants, mais ces études ont été dénoncées comme étant peu valides. Sur ce sujet, v. Sandra Classen (2014) et les références citées.

3 Une délinquance féminine « extraordinaire » 137 attouchements, moqueries relatives aux organes génitaux de l’enfant, dormir ensemble, partager le lit de l’enfant de manière inappropriée ; Etherington 1997). Enfin, loin de ne convaincre leur victime que par la douceur, certaines femmes feraient preuve de brutalité (Lewis et Stanley 2000), même si, en tant que groupe, les femmes infligeraient moins de blessures à leurs victimes que les hommes (Nathan et Ward 2001).

À partir de la typologie de Ruth Mathews et al. (1989), première classification des femmes agresseurs sexuels, sont distinguées trois catégories de femmes agresseurs sexuels:

› Tout d’abord, les femmes qui abusent de garçons adolescents qui ne leur sont pas apparentés, comme les institutrices ayant des relations sexuelles avec un élève234 ; elles percevraient leur relation comme une relation amoureuse, positive, et ne comprendraient pas qu’elles soient considérées comme des délinquantes sexuelles. Ces femmes ne consi-dèrent généralement pas leur acte comme étant criminel, et pensent que leur victime est consentante. Il est plus rare que ces femmes aient été elles-mêmes victimes d’abus. Si cette forme d’abus n’est proba-blement pas la plus courante235, elle est celle qui est la plus conforme avec l’image que l’on s’en fait, l’abus étant vu comme une forme « d’amour ».

› Il y a également les femmes ayant elles-mêmes été abusées dans l’en-fance par un adulte ; elles rechercheraient une intimité avec autrui qui ne soit pas menaçante, raison pour laquelle elles s’en prendraient à de jeunes enfants. Agissant le plus souvent seules, contre leurs propres enfants ou des enfants de leur entourage proche, leurs rela-tions amoureuses adultes seraient le plus souvent elles aussi abusives. Plus souvent que les autres femmes agresseurs sexuels, elles pourraient avoir d’autres comportements sexuels déviants. Elles seraient difficiles à confondre (même pour les professionnels) : la proximité physique entre une mère et son enfant étant naturelle, il est plus difficile de reconnaître des gestes déplacés lorsque l’attitude générale de la société envers les mères est la bienveillance (Bellard 2010 : 121). Par ailleurs, les victimes de ces femmes seraient, en moyenne, plus jeunes que les victimes des hommes agresseurs sexuels (Saradjian 2010). Ce der-nier élément pose problème en terme de poursuites judiciaires (et 234 Par exemple, la « liaison » médiatique entre Mary Kay Letourneau, institutrice, et son

élève de 15 ans, qui s’est terminée par deux bébés et un mariage.

235 Sur les femmes abusant d’adolescents trop jeunes pour consentir à l’acte sexuel, et la dissymétrie des lois américaines qui ne punissaient jadis que les hommes ayant eu des relations sexuelles avec des mineures, v. Kay Levine (2005).

138 Partie I : Les femmes délinquantes de recherche), car plus l’enfant est jeune, moins il est en mesure de dénoncer les faits dont il est victime.

› Enfin, il y aurait les femmes qui agiraient initialement sous la contrainte d’un complice homme auquel elles veulent plaire, et conti-nueraient parfois seules leurs agissements.

Au-delà de l’approche typologique, les femmes agresseurs sexuels se distingueraient les unes des autres par leur histoire personnelle – leur éven-tuelle toxicomanie, le fait d’agir seule ou avec un complice, le lieu où elles agissent, si elles récidivent – et par les caractéristiques de leurs victimes – l’âge de ces dernières, leur sexe et leurs liens de proximité (Gannon et Rose 2008 ; Harris 2010). Sans qu’il soit possible – et pertinent – de dresser un profil unique, les femmes agresseurs sexuels partageraient certaines similitudes entre elles, ainsi que des différences avec les hommes agresseurs sexuels.

La détection des abus sexuels commis par des femmes est particu-lièrement difficile. Or, la recherche ne portant que sur les cas détectés, les conclusions dans ce domaine doivent être considérées avec prudence. Il n’est par exemple pas exclu que seules soient dénoncées les femmes vivant dans les conditions les plus précaires celles recevant une aide thérapeutique, ce qui donnerait lieu à un portrait-type biaisé de la femme agresseur sexuel. Cela étant précisé, la recherche suggère que les femmes agresseurs sexuels sont généralement d’âge moyen, le plus souvent âgées d’une trentaine d’années ; si des cas d’abus sexuels commis par des filles très jeunes (sur d’autres en-fants) ont été rapportés, ces cas sont rares, ce qui vaut également pour les abus sexuels commis par une grand-mère (Grayston et De Luca 1999). Ces femmes auraient souvent un statut socio-économique précaire, et un faible niveau de qualification. Elles changeraient fréquemment de partenaires de vie, se marieraient relativement tôt et auraient leur première grossesse jeunes (Nathan et Ward 2001). Leurs relations intimes, lorsqu’elles en ont, se carac-tériseraient souvent par des difficultés. Plusieurs recherches suggèrent que les femmes agresseurs sexuels présentent des antécédents d’abus, physiques et sexuels, dans l’enfance236. Comparativement aux hommes agresseurs sexuels, elles seraient plus nombreuses à avoir été abusées durant l’enfance, leurs abus étaient plus graves et plus fréquents que ceux subis par les hommes, et ont eu des séquelles plus importantes (Gannon et Rose 2008 ; Nathan et Ward 2001). Ayant souvent grandi dans des familles dysfonctionnelles et souffert de carences affectives dans l’enfance, elles seraient davantage susceptibles de faire montre d’immaturité et d’être dépendantes, voire soumises à un éventuel par-236 P. ex. Sonia Harrati et Loïck Villerbu (2010), Danielle Harris (2010), Catherine

Lewis et Charlotte Stanley (2000), Monique Tardif et al. (2005), et Miriam Wijkman

3 Une délinquance féminine « extraordinaire » 139 tenaire une fois adulte (Lehnert 2010 ; Tardif et al. 2005). Les femmes agres-seurs sexuels auraient fréquemment vécu une rupture avec leur famille dans l’enfance, et elles sont nombreuses à évoquer des difficultés relationnelles avec leur mère, qu’elles décrivent comme froide et indifférente (Bellard 2010 : 129). À l’âge adulte, ces femmes souffriraient fréquemment de dépression, de certains troubles de la personnalité, ou ont des problèmes d’addiction (He-therton 1999), apparaissant souvent à l’adolescence (Wijkman et al. 2010). Elles ne se distinguent toutefois pas des hommes abuseurs sur ce point, selon LC Miccio-Fonseca (2000). Les femmes agresseurs sexuels présenteraient souvent des déficiences intellectuelles, ce qui entame leur confiance en soi et explique également qu’elles aient souvent des emplois précaires et peu rému-nérés (Lewis et Stanley 2000 ; Wijkman et al. 2010). Il semble toutefois exister un consensus dans la littérature, selon lequel les femmes abusant sexuellement de mineurs sont moins souvent diagnostiquées comme étant pédophiles que les hommes abusant sexuellement de mineurs, c’est-à-dire qu’elles remplissent moins souvent les critères diagnostics de la pédophilie, soit la « présence de fantaisies imaginatives sexuellement excitantes, d’impulsions sexuelles, ou de comportements, survenant de façon répétée et intense, pendant une pé-riode d’au moins 6 mois, impliquant une activité sexuelle avec un enfant ou des enfants prépubères » (Nathan et Ward 2001). À nouveau, ces données requièrent une évaluation prudente, dans la mesure où les femmes souffrant de graves troubles psychologiques sont plus susceptibles d’être représentées dans ce type de recherches que celles qui possèdent un autre profil. Au vu de la rareté statistique des cas, la généralisabilité des profils est limitée. De surcroît, les caractéristiques mises en avant présentent souvent des similitudes avec le profil des personnes qui ont recours aux services sociaux en général. Un biais d’identification ne peut donc être exclu.

Contrairement aux hommes qui agiraient le plus souvent seuls, la plu-part des femmes agresseurs sexuels agiraient avec un homme, de force ou de gré ; ce dernier serait le plus souvent leur partenaire237. La contrainte peut être directe (menaces, violences) ou indirecte (dépendance émotionnelle). Lorsque complice, la femme participerait aux abus, mais son rôle pourrait aussi être limité au fait de procurer des victimes à son partenaire, ou d’être témoin des abus de ce dernier sans intervenir. Dans ce dernier cas, il ne serait pas rare que la victime soit sa propre fille. Il s’agit là de l’image classique de la femme agresseur sexuel : la complice passive, et parfois contrainte, d’un homme abu-seur sexuel (Lehnert 2010). Mais il convient de nuancer le propos, car cette image classique est celle de la femme agresseur sexuel qui se fait prendre. En 237 P. ex. Theresa Gannon et Mariamne Rose (2008), Danielle Harris (2010), Jacqui

140 Partie I : Les femmes délinquantes effet, Chrystèle Bellard (2010 : 121) postule que la présence d’un homme au côté d’une femme agresseur sexuel augmente la probabilité que celle-ci soit confondue, comparativement aux femmes qui agissent seules. Ces dernières bénéficieraient probablement du caractère socialement « impensable » de leurs actes et seraient ainsi plus difficilement détectées. Pour la même raison, la crédibilité des victimes est moins fréquemment questionnée lorsque la femme agresseur sexuel a agi comme complice d’un homme que lorsqu’elle a agi seule. D’une étude, enfin, il est ressorti que la plupart des femmes abu-seurs n’étaient arrêtées qu’une seule fois pour une infraction à caractère sexuel, qu’elles avaient été arrêtées pour la commission d’une seule infraction, et que très peu d’entre elles avaient une condamnation antérieure au moment de leur arrestation (Vandiver et Walker 2002). Les femmes agresseurs sexuels ne paraissent pas récidiver ; leur taux de récidive est de 1 % selon les données américaines, britanniques, australiennes et canadiennes compilées par Franca Cortoni et R. Karl Hanson (2005). Sur ce dernier point, les femmes se dis-tinguent des hommes agresseurs sexuels, qui ont, en général, des antécédents criminels plus nombreux et plus graves (Freeman et Sandler 2008 ; Vandiver et Kercher 2004). En revanche, il n’est pas rare que les abus commis par les femmes se déroulent sur une longue période, même si des abus ponctuels ont également été rapportés dans la littérature (Nathan et Ward 2001).

Les travaux explicatifs de la violence sexuelle concluent notamment que les délinquants sexuels, hommes et femmes, ont souvent une faible capa-cité à gérer le stress ou la frustration, des problèmes relationnels, une faible estime de soi ou encore des problèmes d’empathie qui ont pour conséquence qu’ils ne sont souvent pas en mesure de prendre en considération la souffrance de leurs victimes238. Si des distorsions cognitives et/ou des croyances erronées sont fréquemment identifiées comme caractéristiques des hommes agresseurs sexuels (p. ex. ils croient que les enfants ont des désirs sexuels, interprètent certains gestes comme une invitation sexuelle, nient la souffrance causée à la victime, se croient légitimés à agir ainsi)239, ces aspects sont encore trop peu étudiés chez les femmes. Quelques rares recherches tendent à suggérer que les mêmes traits sont présents chez les femmes (Beech et al. 2009), sans que les données existantes ne permettent de réellement de comparer les femmes et les hommes agresseurs sexuels (Gannon et Rose 2008). Après l’acte, cepen-dant, les femmes semblent faire preuve de plus de remords que les hommes, et mieux comprendre les conséquences de leurs actes pour leurs victimes, ce qui pourrait expliquer pourquoi les femmes semblent récidiver moins que les hommes (Nathan et Ward 2001). Elles présentent toutefois une tendance cer-238 Tony Ward et Richard Siegert (2002 : 331 ss et réfs. citées).

3 Une délinquance féminine « extraordinaire » 141 taine à minimiser leurs actes et à en attribuer la faute à autrui, leur partenaire dans le crime ou même l’enfant (Nathan et Ward 2002).

Contrairement à la croyance populaire240, les abus sexuels commis par des femmes ne sont pas moins délétères que ceux commis par un homme. Nombre d’études soulignent les atteintes à la santé mentale, physique, sexuelle et reproductive des victimes des femmes agresseurs sexuels241 : comportements dits à risque (alcoolisme, toxicomanie), tentatives de suicide, troubles de l’identité sexuelle, difficultés sexuelles et relationnelles, difficultés à assumer un rôle de parent, revictimisation242, mais également comportements ulté-rieurs d’agression sexuelle.

La recherche sur les femmes agresseurs sexuels souffre pour l’heure de carences conceptuelles ; les taxonomies sont encore grossières, construites à partir de caractéristiques démographiques superficielles qui relèvent presque de l’anecdote et qui ne permettent pas de saisir les raisons du passage à l’acte. S’ils adoptent les mêmes comportements, il se pourrait que les femmes et les hommes n’agressent pas pour les mêmes raisons : notamment, il y a parmi les hommes un plus grand nombre de pédophiles et ils seraient également plus nombreux à abuser dans le but d’exercer une forme de pouvoir. À l’inverse, les femmes, se sentant vulnérables, rechercheraient au travers de l’abus à ressentir une connexion avec autrui (Harris 2010 ; Vandiver et Kercher 2004). De telles explications paraissent toutefois fortement empruntes de genre : considérer que les femmes violent par amour ou solitude revient à leur nier une agentivité pourtant reconnue aux hommes, mais surtout renvoie à l’idée que les femmes ne peuvent pas être « mauvaises ». Or, la réalité est plus nuancée. Dans l’étude de Pamela Nathan et Tony Ward (2002), par exemple, les motifs évoqués par des femmes ayant commis des abus sexuels seules ou en complicité avec un homme étaient multiples. Quatre des douze femmes interrogées ont indiqué avoir agi par peur ou sous contrainte, et sept parce qu’elles s’étaient senties rejetées ou étaient jalouses. Six autres femmes ont également mentionné le désir de vengeance comme motivation ; elles avaient voulu se venger d’un par-tenaire qui les avait quittées ou le punir parce qu’il les avait trompées, ou alors se venger des abus qu’elles avaient elles-mêmes subis dans le passé. Pour trois femmes, enfin, le pouvoir avait été une motivation ; deux avaient agi seules, une en complicité avec un homme.

240 Il a même été écrit : « What harm can be done without a penis ? » (Mathis 1972 : 54), cité par Jacqui Hetherton (1999 : 165).

241 Not. Myriam Denov (2004) ; pour une revue de la littérature, v. Jacqui Hetherton (1999).

242 Ce terme est utilisé pour qualifier la victimisation à l’âge adulte de personnes qui avaient précédemment subi des abus dans l’enfance ; v. pp. 261 ss pour la revictimisa-tion en matière de violences conjugales et pp. 306 ss pour la revictimisarevictimisa-tion sexuelle.

142 Partie I : Les femmes délinquantes De manière générale, les violences sexuelles comptent parmi les in-fractions les moins souvent dénoncées aux autorités officielles. La peur de ne pas être cru, la détresse ou la honte font de ces infractions un tabou. Les actes commis par les femmes sont encore moins susceptibles d’être dénon-cés, notamment parce que ceux qui en sont victimes sont des enfants ou des adolescents. Ces derniers doivent vaincre les résistances – individuelles et sociales – associées à un double tabou : celui de la violence sexuelle et celui de la violence féminine. À noter également que les comparaisons internationales sont particulièrement ardues dans ce domaine, car la culture et les croyances influencent de façon importante la commission des abus et leur dénonciation aux autorités (Scott 2014).

Paradoxalement, du fait de ce double tabou, nul ne sait dans quelle mesure les femmes agresseurs sexuels, confondues par la justice et objets des recherches dans ce domaine, sont représentatives de la délinquance sexuelle féminine. Si la société peine à identifier ces agresseurs particulières, voire les ignore pour un temps, il est possible que celles qui tombent aux mains de la justice soit celles qui commettent les infractions les plus graves. Les femmes agresseurs sexuels ainsi détectées sont toutefois peu nombreuses. Consécuti-vement, les recherches qui leur sont consacrées se fondent sur des données limitées, et le plus souvent avec l’impossibilité de confronter leurs conclusions à des groupes de comparaison (Johansson-Love et Fremouw 2006). Malheu-reusement, le fait qu’elles soient peu nombreuses limite les connaissances ap-plicables à leur prise en charge, dès lors que les connaissances sur le traitement des hommes agresseurs sexuels ne peuvent simplement pas être transposées (bien que cela soit encore souvent le cas ; Gannon et Rose 2008).